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25/01/2017 | FRANCE | N°16NT01431

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 25 janvier 2017, 16NT01431


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des décisions du 29 mars 2016 par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a prononcé sa remise aux autorités allemandes, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1602748 du 7 avril 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a, par un article 1er, annulé la décision du 29 mars 2016 portant assignation à résidence, par un article 2, mis à la charge de l'Etat

la somme de 1 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... C...a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des décisions du 29 mars 2016 par lesquelles le préfet de Maine-et-Loire, d'une part, a prononcé sa remise aux autorités allemandes, d'autre part, l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1602748 du 7 avril 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a, par un article 1er, annulé la décision du 29 mars 2016 portant assignation à résidence, par un article 2, mis à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, et, par un article 3, rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée sous le n° 16NT01431 le 4 mai 2016, le préfet de Maine-et-Loire demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 1er de ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 avril 2016 ;

2°) de rejeter la demande tendant à l'annulation de la décision d'assignation à résidence du 29 mars 2016 présentée par M. C...devant le tribunal administratif de Nantes.

Il soutient que :

- le jugement est entachée d'une erreur de droit ; l'assignation à résidence prévue à l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est une mesure alternative au placement en rétention et ne se limite pas aux seules mesures portant obligation de quitter le territoire français ;

- il se réfère aux développements contenus dans son mémoire en défense produit en première instance s'agissant des autres moyens présentés à l'appui de la contestation de l'assignation à résidence.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2016 et sous le numéro 16NT02119, M.C..., représenté par Me E...-D..., conclut au rejet de la requête et demande en outre qu'une somme de 1 800 euros soit mise à la charge de l'Etat au profit de son conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- aucun des moyens soulevés par le préfet de Maine-et-Loire n'est fondé ;

- à titre subsidiaire, l'assignation à résidence a été prise par une autorité incompétente ; elle n'est pas suffisamment motivée ; elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision de remise aux autorités allemandes.

II. Par une requête, enregistrée sous le n° 16NT02056 le 18 juin 2016, M.C..., représenté par Me E...D..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 7 avril 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 29 mars 2016 décidant sa remise aux autorités allemandes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros, qui devra être versée à son conseil, Me E...D..., qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision de remise aux autorités allemandes a été prise par une autorité incompétente ;

- elle n'est pas suffisamment motivée ;

- il n'a pas été informé sur la procédure de relevé d'empreintes dans une langue qu'il comprend, en méconnaissance de l'article 18 du règlement UE 2725/2000 du 11 décembre 2000 ;

- la décision de remise aux autorités allemandes méconnaît les articles 4 et 26 du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 dit Dublin III relatif au droit à l'information lors de la demande d'asile ;

- le préfet de Maine-et-Loire s'est cru lié par les critères hiérarchisés de détermination de l'Etat membre ;

- il n'a pas été procédé à un examen de sa situation personnelle.

Une mise en demeure a été adressée le 16 août 2016 au préfet de Maine-et-Loire, en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.

Le préfet de Maine-et-Loire n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision en date du 23 mai 2016.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Allio-Rousseau a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que les requêtes n°16NT01431, n°16NT02056 et 16NT02119 concernent la situation d'un même requérant et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant qu'à la demande de M. A...C..., ressortissant soudanais né le 3 février 1987, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes, a, par l'article 1er de son jugement du 7 avril 2016, annulé la décision du 29 mars 2016 du préfet de Maine-et-Loire décidant son assignation à résidence ; que, par l'article 3 du même jugement, le magistrat a rejeté la demande de M. C...tendant à l'annulation de la décision du 29 mars 2016 du préfet de Maine-et-Loire décidant sa remise aux autorités allemandes ; que le préfet de Maine-et-Loire relève appel de l'article 1er de ce jugement et M. C...de l'article 3 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la décision de remise aux autorités allemandes :

3. Considérant que les moyens tirés de l'incompétence du signataire de la décision de remise aux autorités allemandes, de son insuffisante motivation, du défaut d'examen de la situation personnelle du requérant, de la méconnaissance des dispositions des articles 4 du règlement n° 604/2013 et 18 du règlement n° 2725/2000 et de l'erreur de droit du préfet de Maine-et-Loire à s'être cru lié par les critères hiérarchisés de détermination de l'Etat membre, que le requérant reprend en appel sans aucune précision supplémentaire, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le premier juge ; que l'intéressé ne peut, par ailleurs, se prévaloir utilement de l'article 26 du règlement du 26 juin 2013 qui porte sur les conditions de notification des décisions de transfert ;

En ce qui concerne la décision d'assignation à résidence :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois. " ; qu'aux termes de l'article L. 551-1 du même code : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'assignation à résidence prévue à l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile constitue une mesure alternative au placement en rétention prévu par les dispositions de l'article L. 551-1 du même code, pour les étrangers devant être remis aux autorités compétentes de l'Etat responsable du traitement de leur demande d'asile ; que, par suite, c'est à tort que le premier juge a annulé, pour erreur de droit et erreur de fait, la décision du 29 mars 2016 portant assignation à résidence au motif que M. C...n'avait pas fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie dans cette mesure du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C...devant le tribunal administratif de Nantes et la cour ;

6. Considérant, en premier lieu, que la décision contestée a été signée par M. Pascal Gauci, secrétaire général de la préfecture de Maine-et-Loire, qui disposait d'une délégation de signature du préfet de ce département du 26 octobre 2015 régulièrement publiée au recueil des actes administratifs de la préfecture de Maine-et-Loire, à 1'effet notamment de signer " tous les arrêtés, décisions, circulaires, rapports, correspondances et documents relevant des attributions de l'Etat dans le département de Maine-et-Loire ", à l'exception de certains actes limitativement énumérés au nombre desquels ne figurent pas les décisions portant assignation à résidence ; que dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que cette décision vise les textes dont il est fait application, rappelle la situation administrative de l'intéressé, ses conditions d'hébergement et les garanties qu'il présente ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que cet arrêté serait insuffisamment motivé ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu''il résulte de ce qui a été dit au point 3 que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant réadmission vers l'Allemagne doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de Maine-et-Loire est fondé à demander l'annulation de l'article 1er du jugement du 7 avril 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 29 mars 2016 par laquelle il a assigné à résidence M.C... ;

Sur le surplus des conclusions :

10. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions présentées par M. C...tendant au bénéfice des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L.761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 1er du jugement n°1602748 du magistrat désigné du tribunal administratif de Nantes en date du 7 avril 2016 est annulé.

Article 2 : Les conclusions présentées par M. C...devant le tribunal administratif de Nantes tendant à l'annulation de la décision du préfet de Maine-et-Loire du 29 mars 2016 portant assignation à résidence et le surplus de ses conclusions d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... C....

Une copie en sera transmise au préfet de Maine-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 janvier 2017.

Le rapporteur,

M-P. Allio-RousseauLe président,

L. Lainé

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 16NT01431, 16NT02056, 16NT02119


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01431
Date de la décision : 25/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : RODRIGUES-DEVESAS ; RODRIGUES-DEVESAS ; RODRIGUES-DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-01-25;16nt01431 ?
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