La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

25/01/2017 | FRANCE | N°16NT00671

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 25 janvier 2017, 16NT00671


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler, d'une part, l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 9 septembre 2015 rejetant sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile et, d'autre part, l'arrêté du 4 novembre 2015 ordonnant sa remise aux autorités tchèques.

Par un jugement n° 1505232 du 1er décembre 2015 le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a renvoyé à une formation collégiale du tribunal administratif les conclusions dirigées contre

la décision du 9 septembre 2015 portant refus d'admission provisoire au séjour au tit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler, d'une part, l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 9 septembre 2015 rejetant sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile et, d'autre part, l'arrêté du 4 novembre 2015 ordonnant sa remise aux autorités tchèques.

Par un jugement n° 1505232 du 1er décembre 2015 le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a renvoyé à une formation collégiale du tribunal administratif les conclusions dirigées contre la décision du 9 septembre 2015 portant refus d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile et rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 24 février 2016, M.B..., représenté par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes du 24 février 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 4 novembre 2015 ordonnant sa réadmission en République tchèque ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal, de l'admettre provisoirement au séjour en qualité de demandeur d'asile dans un délai de trois jour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ou, subsidiairement, de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de remise est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision de refus d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile ; les stipulations de l'article 4 du règlement européen n°604/2013 du 26 juin 2013 ont en effet été méconnues : si le guide du demandeur d'asile lui a été remis en langue géorgienne, les brochures A et B qui lui ont été communiquées étaient rédigées en anglais, langue qu'il ne maîtrise pas suffisamment ;

- la décision de remise est entachée d'erreur de droit au regard des dispositions de l'article 12-2 du règlement européen n° 604/2013 du 26 juin 2013, dès lors que le visa de huit jours délivré par les autorités tchèques était expiré à son entrée sur le territoire français.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 novembre 2015, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le guide du demandeur d'asile en géorgien a été remis à M. B...et il a reçu en outre la brochure A " j'ai demandé l'asile dans l'Union européenne, quel pays sera responsable de ma demande ' " et la brochure B " je suis sous procédure Dublin, qu'est-ce que cela signifie " en langue anglaise que l'intéressé a déclaré comprendre ;

- l'autre moyen de la requête n'est pas davantage fondé.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle par une décision du 18 janvier 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil en date du 26 juin 2013 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur.

1. Considérant que M.B..., ressortissant géorgien, est entré régulièrement en France le 6 août 2015, accompagné de M. E...qui serait son compagnon ; qu'il a présenté au préfet d'Ille-et-Vilaine une demande d'asile le 20 août 2015 ; que ses empreintes digitales ayant révélé, au moyen du fichier Visabio, qu'il disposait d'un visa de court séjour délivré par les autorités tchèques, valable jusqu'au 20 août 2015, le préfet a refusé de l'admettre provisoirement au séjour au titre de l'asile, le 9 septembre 2015, et a saisi les autorités tchèques, d'une demande de prise en charge sur le fondement du 2 de l'article 12 du règlement (UE) n°604/2013 du 26 juin 2013 ; que les autorités tchèques ayant consenti le 15 octobre 2015 à cette prise en charge de M.B..., le préfet d'Ille-et-Vilaine a, par une décision du 4 novembre 2015, ordonné la remise de l'intéressé à ces autorités ; que M. B...relève appel du jugement du 1er décembre 2015 par lequel le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision du 4 novembre 2015 ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité de l'arrêté du 9 septembre 2015 de refus d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; / b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; / e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. / Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5. / 4. La Commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune (...), contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ; qu'aux termes de l'article 20 de ce règlement : " (...) 2. Une demande de protection internationale est réputée introduite à partir du moment où un formulaire présenté par le demandeur (...) est parvenu aux autorités compétentes de l'Etat membre concerné (...). " ; qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tout cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ;

3. Considérant que M. B...soutient que les dispositions précitées ont été méconnues dès lors que les brochures A " j'ai demandé l'asile dans l'Union européenne, quel pays sera responsable de ma demande ' " et B " je suis sous procédure Dublin, qu'est-ce que cela signifie ", lui ont été remises en langue russe, qu'il ne maîtrise pas suffisamment ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, d'une part, que l'intéressé a déclaré dans sa demande d'asile du 20 août 2015, comprendre le russe, et d'autre part, que l'entretien individuel du 27 août 2015 s'est déroulé avec l'assistance d'une tierce personne qui a tenu lieu d'interprète pour mener l'entretien en géorgien ; que dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le préfet d'Ille-et-Vilaine aurait méconnu les dispositions précitées de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 doit être écarté ;

En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 4 novembre 2015 de remise aux autorités tchèques :

4. Considérant qu'aux termes de l'article 12 du règlement européen n°604/2013 du 26 juin 2013 : " 2 - Si le demandeur est titulaire d'un visa en cours de validité, l'Etat membre qui l'a délivré est responsable de l'examen de la demande de protection internationale (...) " ; que M. B...soutient que la décision ordonnant sa réadmission en République tchèque sur le fondement de ces dispositions est entachée d'une erreur de droit dans la mesure où la validité de son visa avait expiré huit jours après son entrée sur le territoire Schengen le 6 août 2015 ; que, toutefois, et alors que l'intéressé a déclaré lors de l'entretien individuel du 27 août 2015, s'être fait voler son passeport, les données du fichier Visabio ont permis d'établir que son passeport était revêtu d'un visa de court séjour délivré par les autorités tchèques, valable jusqu'au 20 août 2015, qui était dès lors en cours de validité à la date de sa demande de protection internationale ; qu'ainsi, et alors en outre, que les autorités tchèques ont accepté de prendre en charge l'intéressé, le préfet a pu, sans commettre d'erreur de droit, fonder la décision contestée de réadmission de M. B...vers la République tchèque sur les dispositions précitées du 2 de l'article 12 du règlement du 26 juin 2013 ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du préfet d'Ille-et-Vilaine du 4 novembre 2015 portant réadmission en République tchèque ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

DECIDE :

Article 1er : la requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise pour information au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 janvier 2017.

Le rapporteur,

C. LOIRATLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00671
Date de la décision : 25/01/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Cécile LOIRAT
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 07/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2017-01-25;16nt00671 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award