Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010.
Par un jugement n° 1202818 du 17 décembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 17 février 2015 et 1er juin 2016, M. et MmeA..., représentés par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 17 décembre 2014 ;
2°) à titre principal, de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010 ;
3°) à titre subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré et des intérêts de retard dont les suppléments d'imposition ont été assortis ;
4°) à titre infiniment subsidiaire, de prononcer la décharge de la majoration pour manquement délibéré dont les mêmes suppléments d'imposition ont été assortis ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- l'administration ne pouvait pas s'opposer à l'émission d'un avis par la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires que M. A...avait saisie directement ;
- la saisine de la commission par le contribuable est prévue par le paragraphe 330 du BOI-CF-CMSS-20-30 du 24 novembre 2014 ;
- l'administration devait produire un rapport de la commission ainsi que le prévoit le paragraphe 330 du BOI-16-CNSS-20-30 du 24 novembre 2014 ;
- la commission devait se prononcer elle-même sur sa compétence ;
- la commission n'était pas incompétente pour connaître du litige portant sur la seule majoration pour manquement délibéré, en application de l'article L. 250 du livre des procédures fiscales ;
- le paragraphe 60 du BOI-CTX-GCX-10-40-30 le prévoit expressément ;
- ils n'ont pas seulement contesté l'application de la majoration mais également le rehaussement des bénéfices non commerciaux réalisés en 2008 par M. A... tant dans leurs observations que dans leur réclamation ;
- en barrant la mention relative à la saisine de la commission départementale des impôts sur la réponse aux observations, l'administration a porté atteinte aux droits de la défense au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;
- les manquements constatés par le service n'étaient pas délibérés.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 octobre 2015 et 17 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- la réclamation n'ayant porté que sur l'application de la majoration pour manquement délibéré, les conclusions tendant à la décharge des droits dus à titre principal ne sont pas recevables ;
- les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert,
- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.
1. Considérant que M. et Mme A... relèvent appel du jugement du 17 décembre 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010, à raison de l'activité libérale de médecin-psychiatre de M.A..., imposée dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (...) " ; qu'il résulte des observations qu'ils ont présentées que M. et Mme A... ont expressément accepté les redressements portant sur les bénéfices non commerciaux réalisés par le requérant en 2008, 2009 et 2010, se bornant à demander la remise gracieuse de l'imposition des bénéfices réalisés en 2008 en raison de l'erreur que le service aurait commise en ne prenant pas en compte une déclaration complémentaire qu'ils lui auraient adressée ;
3. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 250 du livre des procédures fiscales : " Les demandes présentées par les contribuables en vue d'obtenir la remise des majorations prévues par l'article 1729 du code général des impôts sont soumises pour avis à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires (...) lorsque ces majorations sont consécutives à des rectifications relevant de la compétence de l'une ou l'autre de ces commissions, telle qu'elle est définie aux articles L. 59, L. 59 A et L. 59 C du présent livre. " ; que ces dispositions ne s'appliquent qu'aux demandes ressortissant à la juridiction gracieuse qui tendent à la remise ou la modération de majorations déjà mises en recouvrement ; qu'il résulte également des observations présentées par les requérants qu'ils ont informé le service de leur désaccord sur l'application de la majoration pour manquement délibéré aux suppléments d'imposition résultant des redressements portant sur les bénéfices non commerciaux réalisés par M. A... sans en demander la remise gracieuse ; qu'il suit de là que le différend portant sur l'application de cette majoration opposant M. et Mme A... à l'administration ne relève pas de la commission départementale des impôts ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les requérants ne sont pas fondés à soutenir, sur le terrain de la loi, que la commission était compétente pour connaître du différend les opposant à l'administration et qu'en rayant la mention relative à sa saisine sur le formulaire de réponse aux observations du contribuable, le service a porté atteinte aux droits de la défense au sens de l'article L. 80 CA du livre des procédures fiscales ;
5. Considérant qu'un contribuable n'est pas fondé à se prévaloir, au soutien de moyens par lesquels il conteste la régularité de la procédure d'imposition, de l'interprétation administrative de la loi ; que, dès lors, les précisions apportées par l'administration, d'une part, sur la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires au paragraphe 60 du BOI-CTX-GCX-10-40-20 et, d'autre part, sur la saisine directe par le contribuable de cette commission au paragraphe 30 du BOI-CF-CMSS-20-30 du 24 novembre 2014 sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
6. Considérant qu'ainsi qu'il est dit au point 4 du présent arrêt, la commission départementale des impôts n'était pas compétente pour connaître du litige opposant M. et Mme A... à l'administration ; que, dès lors, le moyen tiré de l'absence d'établissement du rapport par lequel l'administration soumet le différend à la commission départementale des impôts, invoqué sur le fondement de l'article L. 60 du livre des procédures fiscales et du commentaire administratif de ce texte au paragraphe 330 du BOI-16-CNSS-20-30 du 24 novembre 2014 est, en tout état de cause, inopérant ;
Sur le bien-fondé de la majoration pour manquement délibéré :
7. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
8. Considérant que l'application de la majoration pour manquement délibéré aux redressements portant sur les bénéfices non commerciaux réalisés par M. A...en 2008, 2009 et 2010 est fondée sur l'absence de report, sur la déclaration de revenus globale des requérants relative à l'année 2008, des bénéfices non commerciaux mentionnés sur la déclaration catégorielle, sur l'absence de déclaration de ces bénéfices sur la version papier des déclarations de revenus relatives aux années 2009 et 2010 qu'ils ont signées et sur leur minoration, à hauteur de 89 % en 2009 et de 35 % en 2010, sur les déclarations dématérialisées relatives à ces deux années que les intéressés ont parallèlement transmises à l'administration fiscale ; que le vérificateur a en outre estimé que la circonstance que M. et Mme A... n'ont pas été imposables pendant deux années consécutives, alors que les revenus provenant de l'activité de médecin-psychiatre du requérant avaient plus que doublé, auraient dû les conduire à s'interroger sur la pertinence de leurs déclarations ; qu'il a également relevé le nombre des erreurs ainsi commises et l'importance de l'impôt qu'elles ont toutes permis d'éluder ; que l'explication invoquée par les requérants selon laquelle M. A..., qui n'avait perçu que des traitements jusqu'en 2007, ne disposait pas des compétences comptables et fiscales requises pour remplir correctement ses déclarations de revenus n'est pas de nature à les justifier ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'administration a appliqué la majoration pour manquement délibéré ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée en défense, que M. et Mme A...ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. et Mme A...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... A... et au ministre de l'économie et des finances.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Bougrine, conseiller.
Lu en audience publique, le 16 décembre 2016
Le rapporteur
S. AubertLe président
F. Bataille
Le greffier
C. Croiger
La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00568