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14/12/2016 | FRANCE | N°16NT00247

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 14 décembre 2016, 16NT00247


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 2 novembre 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande d'acquisition de la nationalité française.

Par un jugement n° 1303606 du 20 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2016, M.B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du t

ribunal administratif de Nantes du 20 juillet 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 2 novembre 2012 ;

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 2 novembre 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande d'acquisition de la nationalité française.

Par un jugement n° 1303606 du 20 juillet 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 janvier 2016, M.B..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 20 juillet 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 2 novembre 2012 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur ou au préfet de l'Hérault de faire droit à sa demande d'acquisition de la nationalité française ou, subsidiairement, et sous astreinte, de réexaminer sa demande, dans un délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ;

4°) de condamner l'Etat à verser à son conseil la somme de 2 000 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que la décision du ministre de l'intérieur contestée est entachée d'erreurs manifeste d'appréciation dès lors que la décision d'ajournement à deux ans est hors de proportion par rapport aux faits retenus, et en retenant les motifs tirés de l'insuffisance des ressources et de ses obligations fiscales ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 4 février 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés et s'en rapporte, à titre subsidiaire, pour le surplus, à ses écritures déposées en première instance concernant l'exposé des motifs de la décision contestée.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

­ le code civil ;

­ la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

­ le décret n° 93-1362 du 30 décembre modifié ;

­ le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A...'hirondel a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant marocain, relève appel du jugement du 20 juillet 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 2 novembre 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande d'acquisition de la nationalité française ;

Sur les conclusions tendant à l'annulation de la décision du ministre de l'intérieur :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article 45 du décret du 30 décembre 1993 que les décisions par lesquelles le ministre en charge des naturalisations statue sur les recours préalables obligatoires se substituent à celles des autorités préfectorales qui lui sont soumises ; que, par suite, le ministre, qui n'était pas lié par la décision prise par le préfet de l'Hérault, était seul compétent pour fixer, au regard des motifs retenus dans sa décision, la durée d'ajournement ; que la circonstance qu'il ait mentionné, à tort, que cette durée était réduite par rapport à celle initialement décidée par le préfet, est sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

3. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'en vertu de l'article 27 du même code, l'administration a le pouvoir de rejeter ou d'ajourner une demande de naturalisation ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande " ; qu'il appartient ainsi au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'autonomie matérielle du postulant ainsi que les renseignements défavorables recueillis sur son comportement ;

4. Considérant, d'une part, que M. B...indique qu'après avoir été salarié pendant de très nombreuses années, il a créé le 12 août 2010 sa propre entreprise de peinture et revêtement de sol dont le chiffre d'affaire a été de 9 910 euros pour l'exercice 2010, de 17 575 euros pour l'exercice 2011 et de 14 577 euros pour les six premiers mois de l'exercice 2012 et qu'il dispose pour ce dernier exercice de cinq devis pour un montant total de près de 14 000 euros ; qu'il fait alors valoir que le chiffre d'affaire de son entreprise croît régulièrement alors qu'il a eu de gros problèmes de santé qui l'ont obligé à s'arrêter souvent à partir d'octobre 2010 ; que son épouse n'a, par ailleurs, quasiment jamais été sans activité entre novembre 2010 et mai 2012 ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que le foyer, composé de quatre personnes, n'a déclaré, au titre de l'impôt sur le revenu que la somme de 11 011 euros pour l'année 2010, 358 euros pour l'année 2009, 383 euros pour l'année 2008, et que le couple a perçu pour l'année 2012 le revenu de solidarité active ; que, dans ces conditions, et après avoir constaté que le postulant ne disposait pas de revenus suffisants pour subvenir durablement au besoin de son foyer dont les ressources étaient principalement constituées de prestations sociales, le ministre a pu décider, sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation, qu'un délai s'avérait nécessaire pour apprécier la pérennité de sa société et la stabilité des ressources qu'elle pourrait générer ;

5. Considérant, d'autre part, qu'il est constant que M. B...ne s'est pas acquitté spontanément des impositions dont il était redevable, n'ayant acquitté qu'après majoration l'impôt sur le revenu dû au titre de l'année 2008 et la taxe d'habitation due au titre de l'année 2009 ; qu'ainsi, alors même que depuis les trois dernières années précédant sa demande, M. B...n'aurait pas fait l'objet de majoration, cette circonstance constituait un renseignement défavorable sur le postulant que le ministre pouvait également prendre en considération dans sa décision sans l'entacher d'une erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant qu'il suit de là que dans le cadre de son large pouvoir d'appréciation de l'opportunité d'accorder la nationalité française, le ministre a pu, à bon droit, ajourner à deux ans la demande d'acquisition de la nationalité française déposée par M. B... ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'appelle aucune mesure d'exécution et que, par suite, celles tendant à ce qu'il soit ordonné au ministre de faire droit à la demande d'acquisition de la nationalité française présentée par M. B..., ou de la réexaminer, ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande le conseil de M.B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 29 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- M. A...'hirondel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 décembre 2016.

Le rapporteur,

M. E...Le président,

J-F. MILLET

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16NT00247


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00247
Date de la décision : 14/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: M. Michel LHIRONDEL
Rapporteur public ?: Mme PILTANT
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-12-14;16nt00247 ?
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