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05/12/2016 | FRANCE | N°16NT01543

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 05 décembre 2016, 16NT01543


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 novembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de réintégration dans la nationalité française.

Par un jugement n° 1200338 du 12 février 2014, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision.

Par un arrêt n° 14NT00964 du 30 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé ce jugement.

Par une décision n° 388836, du 11 mai 2016

le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 30 décembre 2014 et a renvoyé l'affaire à la cour administra...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 23 novembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur a ajourné à deux ans sa demande de réintégration dans la nationalité française.

Par un jugement n° 1200338 du 12 février 2014, le tribunal administratif de Nantes a annulé cette décision.

Par un arrêt n° 14NT00964 du 30 décembre 2014, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé ce jugement.

Par une décision n° 388836, du 11 mai 2016 le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt du 30 décembre 2014 et a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Nantes.

Procédure devant la cour :

Par un mémoire du 11 avril 2014, le ministre de l'intérieur a demandé à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1200338 du 12 février 2014 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) de rejeter la demande de M.C....

Le ministre soutient que c'est sans erreur de droit, de fait ou d'erreur manifeste d'appréciation qu'il avait pu décider d'ajourner à deux ans la demande de réintégration dans la nationalité française de M. C...dès lors que ce dernier n'avait pas de ressources personnelles lui assurant une autonomie matérielle et qu'il ne subvenait à ses besoins qu'à l'aide de prestations sociales provenant principalement de l'allocation d'adulte handicapé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2014, présenté pour M. B... C..., demeurant... ;

M. C... conclut au rejet du recours, à la condamnation de l'Etat à lui verser la somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral et matériel, à ce qu'il soit enjoint au ministre de l'intérieur de le réintégrer sans délai dans la nationalité française et à ce que soit mise à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

Il soutient que :

- son handicap présente un taux d'incapacité égal ou supérieur à 80 % et un taux de capacité de travail inférieur à 5 % ; il bénéficie désormais de l'allocation de solidarité aux personnes âgées ;

- il est parfaitement intégré à la communauté nationale ; son père a combattu dans une unité française pendant la seconde guerre mondiale et cumulé 23 années de service au sein du ministère français de la défense ;

- les huit années de procédure découlant de l'attitude de l'administration lui ont causé un préjudice moral et matériel certain ;

Par un mémoire enregistré le 15 octobre 2014, le ministre de l'intérieur a maintenu ses conclusions initiales en précisant que les circonstances que le postulant perçoive désormais l'allocation de solidarité aux personnes âgées, soit intégré à la communauté française et que son père ait combattu dans l'armée française sont sans influence sur la légalité de la décision contestée ;

Par un nouveau mémoire enregistré le 21 juin 2016, M. C...a maintenu ses conclusions présentées le 15 septembre 2014 tout en demandant à ce que la somme versée au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative soit portée à un montant de 3000 euros ;

M. C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 25 juillet 2016.

Par un nouveau mémoire en date du 29 juillet 2016, le ministre s'en est remis à la sagesse de la cour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lenoir, président, a été entendu au cours de l'audience publique.

Sur les conclusions du ministre à fin d'annulation du jugement du 12 février 2014 :

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que, pour rejeter la demande de réintégration dans la nationalité française présentée par M.C..., le ministre de l'intérieur s'est fondé sur la seule circonstance que l'intéressé ne disposait pas de revenus personnels et ne subvenait à ses besoins qu'à l'aide de prestations sociales ; qu'il ressort de la lecture des mêmes pièces que M.C... s'était vu reconnaître un taux d'incapacité d'au moins 80 % et un taux de capacité de travail inférieur à 5 % ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " (...) Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'il appartient ainsi au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ou de réintégrer ce dernier dans la nationalité française ; que, si, dans le cadre de cet examen d'opportunité, le ministre peut légalement prendre en compte le degré de l'insertion professionnelle et d'autonomie matérielle du postulant, il ne peut, en revanche, se fonder exclusivement ni sur l'existence d'une maladie ou d'un handicap ni sur le fait que les ressources dont dispose le postulant ont le caractère d'allocations accordées en compensation d'un handicap ; qu'ainsi, en estimant que la demande de M. C...pouvait faire l'objet d'un ajournement de deux ans au seul motif tiré de ce que ses seules ressources n'étaient constituées que de l'allocation aux adultes handicapés alors que, par ailleurs, M. C...s'était vu reconnaître un taux d'incapacité supérieur à 80 %, le ministre a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède le ministre n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a annulé sa décision du 23 novembre 2011 par laquelle il a ajourné à deux ans la demande de réintégration dans la nationalité française de M.C... ;

Sur les conclusions de M.C... tendant à la condamnation de l'Etat :

4. Considérant que si M. C...fait valoir que la longueur de la procédure résultant de la résistance de l'administration à lui accorder la nationalité française a été de nature à lui causer un préjudice moral et matériel qu'il évalue à une somme de 5000 euros, ce préjudice n'est pas établi dès lors que la réintégration dans la nationalité française n'est pas un droit pour les étrangers qui remplissent les conditions légales pour y prétendre mais constitue une faveur accordée par l'Etat dont l'octroi peut nécessiter une instruction de longue durée ; que, par suite, il y a lieu, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité, de rejeter les conclusions de l'intéressé à fin d'indemnisation ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que, comme le demande M.C..., il soit enjoint au ministre de l'intérieur de le réintégrer dans la nationalité française ; qu'il y a lieu cependant d'enjoindre au ministre de procéder à une nouvelle instruction de la demande de M. C...dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que M. C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me A...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de ce dernier le versement à Me A...d'une somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de l'intérieur est rejeté.

Article 2 : L'Etat versera à MaîtreA..., conseil de M.C..., une somme de 1 500 euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que l'intéressé renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Il est enjoint au ministre de l'intérieur de procéder à une nouvelle instruction de la demande de M. C...dans un délai de un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. C...est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 18 novembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 décembre 2016.

Le président-assesseur

J. FRANCFORT

Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

C.GOY

2

N° 16NT01543


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16NT01543
Date de la décision : 05/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Hubert LENOIR
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : FRON

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-12-05;16nt01543 ?
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