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13/10/2016 | FRANCE | N°16NT00425

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 13 octobre 2016, 16NT00425


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Seris Security a demandé au tribunal administratif de Nantes la restitution de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises qu'elle a acquittée au titre de l'année 2012.

Par un jugement no 1310054 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2016, la SAS Seris Security, représentée par Me A..., demande à la

cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 décembre 2015 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiée (SAS) Seris Security a demandé au tribunal administratif de Nantes la restitution de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises qu'elle a acquittée au titre de l'année 2012.

Par un jugement no 1310054 du 10 décembre 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2016, la SAS Seris Security, représentée par Me A..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 décembre 2015 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler la décision du 19 novembre 2013 du directeur départemental des finances publiques de la Loire-Atlantique rejetant sa réclamation ;

3°) de lui accorder la restitution demandée ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les dispositions de l'article 39 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, méconnaissent, du fait de leur caractère rétroactif, les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les dispositions de l'article 39 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, dont le caractère rétroactif repose seulement sur un motif financier, méconnaissent les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les dispositions de l'article 39 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012, en distinguant selon que les contribuables ont déposé leur demande de restitution de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée avant ou après le 11 juillet 2012, méconnaissent les stipulations des articles 13 et 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peuvent être utilement invoquées en matière fiscale ;

- les autres moyens soulevés par la SAS Seris Security ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, par application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation de la décision de rejet de la réclamation préalable.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bougrine,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public,

1. Considérant que, par une décision du 19 novembre 2013, le directeur départemental des finances publiques de la Loire-Atlantique a rejeté la réclamation du 10 juin 2013 par laquelle la société par actions simplifiée (SAS) Seris Security a sollicité auprès de l'administration fiscale la restitution de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises dont elle s'était acquittée spontanément au titre de l'année 2012 ; que cette société relève appel du jugement du 10 décembre 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la restitution de cette taxe ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de rejet de la réclamation :

2. Considérant que la décision de rejet de la réclamation de la SAS Seris Security, prise par le directeur départemental des finances publiques de la Loire-Atlantique le 19 novembre 2013, n'est pas susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; qu'il suit de là que les conclusions tendant à son annulation sont irrecevables et doivent, dès lors, être rejetées ;

Sur les conclusions à fin de restitution :

3. Considérant que la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises dont il est demandé la restitution a été liquidée sur le fondement des dispositions de l'article 1600 du code général des impôts, dans leur rédaction issue de la loi n° 2010-1657 du 29 décembre 2010 de finances pour 2011 ; que le I de l'article 39 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative pour 2012 a introduit, après les huit premiers alinéas du III de cet article 1600 du code général des impôts, un 1 bis précisant les modalités de recouvrement de cette taxe additionnelle ; que le II de ce même article 39 précise que : " Le I s'applique aux impositions dues à compter du 1er janvier 2011, sous réserve des impositions contestées avant le 11 juillet 2012 " ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international. / Les dispositions précédentes ne portent pas atteinte au droit que possèdent les Etats de mettre en vigueur les lois qu'ils jugent nécessaires pour réglementer l'usage des biens conformément à l'intérêt général ou pour assurer le paiement des impôts ou d'autres contributions ou des amendes. " ; qu'une personne ne peut prétendre au bénéfice de ces stipulations que si elle peut faire état de la propriété d'un bien qu'elles ont pour objet de protéger et à laquelle il aurait été porté atteinte ; qu'à défaut de créance certaine, l'espérance légitime d'obtenir une somme d'argent doit être regardée comme un bien au sens de ces stipulations ;

5. Considérant que, par une décision n° 2012-298 QPC du 28 mars 2013, le Conseil constitutionnel a déclaré contraires aux droits et libertés que la Constitution garantit les dispositions des huit premiers alinéas du III de l'article 1600 du code général des impôts, dans leur rédaction résultant de la loi de finances pour 2011, au motif que celles-ci ne prévoyaient pas les modalités de recouvrement de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises ; que, toutefois, à la date à laquelle la société requérante a introduit sa réclamation, le 10 juin 2013, l'article 39 de la loi n° 2012-958 du 16 août 2012 de finances rectificative était entré en vigueur ; que les dispositions du I de cet article définissent explicitement les modalités de recouvrement de la taxe additionnelle ; que les dispositions de son II, lesquelles ont été, au demeurant, jugées conformes à la Constitution, par une décision n° 2013-327 QPC du 21 juin 2013 du Conseil constitutionnel, prévoient une application rétroactive aux impositions dues à compter du 1er janvier 2011, en vue de prévenir les contestations à compter du 11 juillet 2012 ; que, par suite, la société requérante ne pouvait se prévaloir, à cette date, d'une espérance légitime d'obtenir la restitution de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises acquittée au titre de l'année 2012 ; que, dès lors, elle ne peut utilement invoquer les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation. " ; qu'aux termes de l'article 13 de cette convention : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles. " ; que si la SAS Seris Security soutient que les dispositions de l'article 39 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative, en distinguant selon que les contribuables ont déposé leur demande de restitution de la taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée avant ou après le 11 juillet 2012, méconnaissent ces stipulations, il ressort des termes mêmes de celles-ci qu'elles ne peuvent être invoquées que lorsqu'est en cause un droit ou une liberté reconnu par cette convention et ses protocoles ; que la société requérante, n'invoquant dans ses écritures, la méconnaissance d'aucun autre droit ainsi protégé que le droit au recours effectif de l'article 13 et le principe de non-discrimination de l'article 14, ces moyens doivent être écartés ;

7. Considérant, en troisième lieu, que, pour faire échec aux dispositions de l'article 39 de la loi du 16 août 2012 de finances rectificative, la société requérante se prévaut des stipulations du 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, cependant, ces stipulations ne peuvent être utilement invoquées pour contester les droits de taxe additionnelle à la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises en litige devant le juge de l'impôt, qui ne statue pas en matière pénale et ne tranche pas des contestations sur des droits et obligations à caractère civil ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SAS Seris Security n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à la SAS Seris Security de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Seris Security est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Seris Security et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 29 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- Mme Bougrine, conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2016.

Le rapporteur,

K. BougrineLe président,

F. BatailleLe greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 16NT004252


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16NT00425
Date de la décision : 13/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Karima BOUGRINE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : CABINET FIDAL (NANTES)

Origine de la décision
Date de l'import : 22/11/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-10-13;16nt00425 ?
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