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05/10/2016 | FRANCE | N°15NT02116

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 05 octobre 2016, 15NT02116


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 11 juin 2015 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1502653 du 16 juin 2015, le magistrat délégué du tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 11 juin 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 juillet 2015, le préfet d'Ille-et-Vilaine demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du

tribunal administratif de Rennes du 16 juin 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 11 juin 2015 par lequel le préfet d'Ille-et-Vilaine a ordonné son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1502653 du 16 juin 2015, le magistrat délégué du tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté du 11 juin 2015.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 15 juillet 2015, le préfet d'Ille-et-Vilaine demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 16 juin 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif ;

3°) de condamner M. B...au paiement de la somme de 500 euros à verser à l'Etat, au titre du préjudice subi.

Il soutient que :

- le tribunal a commis une erreur sur les faits en ne rappelant pas l'entièreté du parcours de M. B...depuis son arrivée en France ;

- le jugement repose sur un raisonnement erroné en droit en ce qu'il se fonde sur un texte qui n'est pas applicable.

Une mise en demeure a été adressée le 8 septembre 2015 à MeC.avec leur mère

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 septembre 2016, M.B..., représenté par MeC..., conclut au rejet de la requête et à ce que l'Etat soit condamné à verser à son conseil une somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête du préfet d'Ille-et-Vilaine n'est fondé.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 2 septembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lainé, président de chambre.

1. Considérant que le préfet d'Ille-et-Vilaine relève appel du jugement du 16 juin 2015 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Rennes a annulé son arrêté du 11 juin 2015 décidant le placement en rétention administrative de M. B...au motif que le préfet n'avait pas envisagé la possibilité d'assigner celui-ci à résidence sous surveillance électronique et avait ainsi commis une erreur d'appréciation ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 562-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, lorsque l'étranger est père ou mère d'un enfant mineur résidant en France dont il contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation dans les conditions prévues à l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans et lorsque cet étranger ne peut pas être assigné à résidence en application de l'article L. 561-2 du présent code, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence sous surveillance électronique, après l'accord de l'étranger. La décision d'assignation à résidence sous surveillance électronique est prise par l'autorité administrative pour une durée de cinq jours. La prolongation de la mesure par le juge des libertés et de la détention s'effectue dans les mêmes conditions que la prolongation de la rétention administrative prévue au chapitre II du titre V du présent livre " ; qu'aux termes de l'article L. 562-2 du même code : " L'assignation à résidence avec surveillance électronique emporte, pour l'étranger, interdiction de s'absenter de son domicile ou de tout autre lieu désigné par l'autorité administrative ou le juge des libertés et de la détention en dehors des périodes fixées par ceux-ci. / Le contrôle de l'exécution de la mesure est assuré au moyen d'un procédé permettant de détecter à distance la présence ou l'absence de l'étranger dans le seul lieu désigné par le juge des libertés et de la détention pour chaque période fixée. La mise en oeuvre de ce procédé peut conduire à imposer à la personne assignée le port, pendant toute la durée du placement sous surveillance électronique, d'un dispositif intégrant un émetteur. / Le procédé utilisé est homologué à cet effet par le ministre chargé de l'immigration et le ministre de la justice. Sa mise en oeuvre doit garantir le respect de la dignité, de l'intégrité et de la vie privée de la personne. / Le contrôle à distance de la mesure est assuré par des fonctionnaires de la police ou de la gendarmerie nationales qui sont autorisés, pour l'exécution de cette mission, à mettre en oeuvre un traitement automatisé de données nominatives. / La mise en oeuvre du dispositif technique permettant le contrôle à distance peut être confiée à une personne de droit privé habilitée dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. / Dans la limite des périodes fixées dans la décision d'assignation à résidence avec surveillance électronique, les agents chargés du contrôle peuvent se rendre sur le lieu de l'assignation pour demander à rencontrer l'étranger. Ils ne peuvent toutefois pénétrer au domicile de la personne chez qui le contrôle est pratiqué sans l'accord de celle-ci. / Le non-respect des prescriptions liées à l'assignation à résidence avec surveillance électronique est sanctionné dans les conditions prévues à l'article L. 624-4 " ; qu'aux termes de l'article L. 562-3 du même code : " Les modalités d'application du présent chapitre sont fixées par décret en Conseil d'État " ;

3. Considérant, d'une part, que l'article L. 562-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile renvoie la définition des modalités d'application des dispositions relatives à l'assignation à résidence avec surveillance électronique à des mesures adoptées par la voie réglementaire tandis que l'article L. 562-2 du même code prévoit que le procédé utilisé est homologué par les ministres chargés de l'immigration et de la justice ; que ces dispositions réglementaires n'étaient pas intervenues à la date de la décision préfectorale contestée ; que, d'autre part, les articles L. 562-1 et L. 562-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'indiquent pas quelle est l'autorité administrative compétente, la nature du dispositif mis en oeuvre, les garanties procédurales encadrant cette mesure restrictive de liberté, telles que les conditions de recueil de l'accord de l'étranger et, le cas échéant, de la personne qui l'héberge, et les conditions de l'intervention de l'autorité médicale et ne définissent pas davantage les agents chargés de la pose et de la dépose du bracelet, ni les conditions de leur intervention ; que ces dispositions ne sont dès lors pas suffisamment précises pour servir de fondement à l'édiction de mesures individuelles ; que, dès lors, les dispositions précitées des articles L. 562-1 et L. 562-2 n'étaient pas entrées en vigueur à la date de l'arrêté du préfet d'Ille-et-Vilaine du 11 juin 2015 ; qu'ainsi, le préfet ne pouvait assigner à résidence sous surveillance électronique M.B... ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que le premier juge a annulé l'arrêté du 11 juin 2015 de placement en rétention pris à l'encontre de M. B...pour le motif sus- rappelé ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. B...devant le tribunal administratif de Rennes ;

5. Considérant que l'arrêté du 11 juin 2015 prononçant le placement en rétention de M. B... vise notamment les dispositions applicables du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, fait état des différentes obligations de quitter le territoire français édictées à son encontre, indique que l'intéressé, qui s'est soustrait aux précédentes mesures d'éloignement et ne justifie pas de document d'identité et de voyage en cours de validité, ne présente pas de garanties suffisantes de représentation ; que cet arrêté précise que la femme de M. B...fait également l'objet d'une obligation de quitter le territoire français ; qu'ainsi il comporte l'ensemble des éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement et est, par suite, suffisamment motivé ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'autorité préfectorale n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation personnelle de M.B... ;

6. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le placement en rétention administrative peut être décidé par l'autorité administrative pour une durée de cinq jours ; qu'en plaçant, pour la seconde fois, par l'arrêté contesté du 11 juin 2015, M. B...en rétention administrative pour une durée de cinq jours, le préfet n'a pas commis d'erreur de droit ;

7. Considérant que M. B...fait valoir qu'il est marié à une compatriote avec qui il a eu deux enfants nés en France respectivement le 20 janvier 2010 et le 4 janvier 2012, que ses enfants sont scolarisés en France et demeurent... ; que, toutefois, compte-tenu du délai court de séparation de M. B...avec sa famille durant le placement en rétention administrative et de la circonstance que ses enfants sont pris en charge par leur mère, qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement identique, la décision du préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise, et, par suite, n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet d'Ille-et-Vilaine est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Rennes a annulé sa décision du 11 juin 2015 ;

9. Considérant que les conclusions présentées par le préfet d'Ille-et-Vilaine directement devant la cour et qui tendent à la condamnation de M. B...au paiement de la somme de 500 euros au titre du préjudice subi par l'Etat ne peuvent, faute de précision sur leur fondement et sur le préjudice invoqué, qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1502653 du 16 juin 2015 du tribunal administratif de Rennes est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Rennes est rejetée.

Article 3 : Le surplus de la requête du préfet d'Ille-et-Vilaine est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A... B.avec leur mère

Une copie en sera transmise au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président assesseur,

- et Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 octobre 2016.

Le président, rapporteur,

L. LAINÉL'assesseur le plus ancien dans l'ordre du tableau,

C. LOIRAT

Le greffier,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT02116


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02116
Date de la décision : 05/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Laurent LAINE
Rapporteur public ?: M. BRECHOT
Avocat(s) : LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-10-05;15nt02116 ?
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