Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...A...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les décisions du 14 octobre 2011 et du 31 janvier 2012, par lesquelles le président du conseil général d'Ille-et-Vilaine, d'une part, a suspendu son agrément d'assistante maternelle pour une durée de quatre mois, et d'autre part, lui a retiré cet agrément.
Par un jugement n° 1104754 et n° 1201297 du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les demandes de MmeA....
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 7 juillet 2014, MmeA..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 27 mars 2014 ;
2°) d'annuler les décisions du président du conseil général d'Ille-et-Vilaine des 14 octobre 2011 et 31 janvier 2012 ;
3°) de mettre à la charge du département d'Ille-et-Vilaine, au profit de son avocat, à condition que celle-ci renonce à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, la somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- le tribunal n'a pris en compte que les pièces versées par le département et non les pièces qu'elle a produites ;
- la procédure de retrait d'agrément a été méconnue car elle n'a pas eu communication d'une pièce dont il a été fait état lors de la commission consultative paritaire du 11 janvier 2012 ;
- la décision du 14 octobre 2011 n'est pas suffisamment motivée ;
- aucune situation d'urgence ne justifiait que son agrément soit suspendu ;
- les faits qui justifient les décisions contestées sont erronés ; aucun des griefs du conseil général n'est fondé ;
- les décisions contestées sont entachées d'erreur d'appréciation ;
- la sanction de retrait d'agrément est totalement disproportionnée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 2 février 2015, le département d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête et demande que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme A...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le tribunal s'est fondé sur l'ensemble des pièces produites par les parties ;
- le fait que Mme A...n'ait pas été destinataire de l'attestation de Mme B...ne constitue pas un vice de procédure dés lors que cette attestation ne sert pas à justifier la décision de retrait d'agrément ; cette attestation, comme d'autres témoignages, devait rester anonyme.
- la décision de suspension est motivée par l'urgence de la situation, qui ressort des signalements, du rapport de contrôle et du dépassement de la capacité d'accueil ;
- le dépassement de la capacité d'accueil est avéré car Mme A...ne bénéficiait pas d'un agrément pour quatre enfants et, en tout état de cause, le jour de la visite de contrôle, elle s'apprêtait à en accueillir un 5ème ;
- les décisions contestées, qui sont fondées sur des signalements et un rapport de contrôle, ne sont entachées ni d'erreur de fait ni d'erreur d'appréciation ;
- la sanction n'est pas disproportionnée puisqu'un dépassement de la capacité d'accueil justifie un retrait d'agrément.
Par ordonnance du 11 mars 2016, prise en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative, la clôture d'instruction a été fixée avec effet immédiat.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 septembre 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller,
- et les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
1. Considérant que MmeA..., agréée en qualité d'assistante maternelle depuis le 13 novembre 1998, relève appel du jugement du 27 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du président du conseil général d'Ille-et-Vilaine des 14 octobre 2011 et 31 janvier 2012, portant respectivement suspension de son agrément d'assistante maternelle pour une durée de quatre mois et retrait de cet agrément ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'il ressort du jugement attaqué du 27 mars 2014 que le tribunal administratif de Rennes a pris en compte l'ensemble des pièces et mémoires produits devant lui par MmeA... ; que, par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que ce jugement serait exclusivement fondé sur les éléments produits par le département d'Ille-et-Vilaine ; qu'il suit de là que le jugement attaqué n'est pas entaché de l'irrégularité alléguée ;
Sur le bien fondé du jugement :
En ce qui concerne la décision de suspension d'agrément du 14 octobre 2011 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles, dans sa rédaction applicable à la date des décisions litigieuses : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil général du département où le demandeur réside. (...) / L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 421-6 du même code, dans sa rédaction applicable au litige : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil général peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. En cas d'urgence, le président du conseil général peut suspendre l'agrément. Tant que l'agrément reste suspendu, aucun enfant ne peut être confié. / Toute décision de retrait de l'agrément, de suspension de l'agrément ou de modification de son contenu doit être dûment motivée et transmise sans délai aux intéressés. (...) " ;
4. Considérant, d'une part, que la décision du 14 octobre 2011 comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde ; qu'elle est donc suffisamment motivée au regard des exigences des dispositions précitées de l'article L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles ;
5. Considérant, d'autre part, que la décision de suspension, pour une durée de quatre mois, de l'agrément dont bénéficiait Mme A...repose sur deux motifs tirés, d'une part, du non respect de la capacité d'accueil prévue par son agrément, et d'autre part " de nouveaux éléments (...) parvenus à la mission agrément faisant état d'un climat familial difficile et perturbant pour les enfants accueillis, compromettant leur sécurité " ; que si la matérialité des faits du second motif, qui repose uniquement sur un appel téléphonique, dont la provenance reste inconnue, reçu par la " mission agrément " du département le 13 octobre 2011, n'est pas établie, il ressort des pièces du dossier que Mme A...accueillait en même temps quatre enfants alors qu'elle n'avait qu'un agrément pour trois enfants ; que ce seul motif est suffisant pour justifier de l'urgence à suspendre l'agrément de MmeA... ; que par suite, en estimant que l'urgence justifiait la suspension de l'agrément de MmeA..., le président du conseil général d'Ille-et-Vilaine n'a pas entaché sa décision du 14 octobre 2011 d'une erreur d'appréciation ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président du conseil général d'Ille-et-Vilaine du 14 octobre 2011 ;
En ce qui concerne la décision de retrait d'agrément du 31 janvier 2012 :
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-23 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction alors applicable : " Lorsque le président du conseil général envisage de retirer un agrément, d'y apporter une restriction ou de ne pas le renouveler, il saisit pour avis la commission consultative paritaire départementale mentionnée à l'article R. 421-27 en lui indiquant les motifs de la décision envisagée. / L'assistant maternel ou l'assistant familial concerné est informé, quinze jours au moins avant la date de la réunion de la commission avec demande d'avis de réception, des motifs de la décision envisagée à son encontre, de la possibilité de consulter son dossier administratif et de présenter devant la commission ses observations écrites ou orales. (...) " ;
8. Considérant que Mme A...soutient qu'elle n'a pas eu communication, avant la réunion de la commission consultative paritaire départementale, d'une attestation de la présidente de l'association d'assistantes maternelles " Les Petits Mousses ", ainsi que d'autres témoignages anonymes recueillis contre elle ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier, d'une part, que cette attestation n'a pas été évoquée en tant que telle lors de la réunion de la commission, d'autre part, que Mme A...avait connaissance des reproches, soulevés lors de la réunion de la commission, qui figurent dans cette attestation et dans les témoignages de parents, par la " lettre ouverte ", anonyme, établie par plusieurs parents et professionnels de la petite enfance, dont elle avait eu communication et par les entretiens des 11 octobre 2011 et 7 janvier 2012 avec les représentants du service, au cours desquels elle a pu répondre sur chacun des griefs qui lui étaient faits dans ces témoignages restés, pour elle, anonymes ; que dans ces conditions, la circonstance que Mme A...n'ait pas eu communication de l'attestation susmentionnée avant la réunion de la commission consultative paritaire départementales n'est pas de nature à porter atteinte aux droits de la défense et à entacher la procédure de retrait d'agrément d'irrégularité ;
9. Considérant, en second lieu, qu'il résulte des dispositions précitées des articles L. 421-3 et L. 421-6 du code de l'action sociale et des familles qu'il incombe au président du conseil général de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies ;
10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 5 ci-dessus, il ressort des pièces du dossier que Mme A...accueillait régulièrement quatre enfants en même temps alors que son agrément ne l'autorisait qu'à accueillir trois enfants ; que si elle avait déposé, en 2010, une demande d'extension de son agrément, celle-ci ne lui a jamais été accordée ; que la dérogation, accordée oralement en janvier 2011, pour que Mme A...puisse accueillir quelques matinées par semaine, à la demande des parents, une quatrième enfant, ne valait que pour quelques semaines jusqu'en avril 2011 ; que par suite, le motif tiré du dépassement des capacités d'accueil n'est entaché ni d'erreur de fait ni d'erreur d'appréciation ; qu'il apparaît suffisant pour que le président du conseil général d'Ille-et-Vilaine puisse légalement estimer que les conditions d'accueil ne permettaient pas d'assurer la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants et, par suite, pour justifier légalement le retrait d'agrément prononcé le 31 janvier 2012 ; que dès lors, à supposer même que le motif tiré d'un contexte familial difficile tenant aux problèmes de santé et à l'alcoolisme de M.A..., à l'origine de comportements inappropriés à l'égard des enfants, reposerait sur des faits matériellement non établis ou appréciés de manière erronée, il ressort des pièces du dossier que le président du conseil général d'Ille-et-Vilaine aurait pris la même décision de retrait d'agrément sur le fondement du seul motif, légal, du dépassement réitéré de la capacité d'accueil autorisée par l'agrément dont bénéficiait la requérante ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 27 mars 2014, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du président du conseil général d'Ille-et-Vilaine du 31 janvier 2012 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur ce fondement par MmeA..., partie perdante ;
13. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de rejeter les conclusions présentées par le département d'Ille-et-Vilaine au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le département d'Ille-et-Vilaine sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A...et au département d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 5 juillet 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Lenoir, président,
- Mme Rimeu, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 19 juillet 2016.
Le rapporteur,
S. RIMEULe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
V. DESBOUILLONS
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01788