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07/07/2016 | FRANCE | N°14NT02998

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 07 juillet 2016, 14NT02998


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 et 2007 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1209334 du 9 octobre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2014, M. et MmeB..., repr

ésentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administrati...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2006 et 2007 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1209334 du 9 octobre 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 26 novembre 2014, M. et MmeB..., représentés par Me C..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 9 octobre 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le tribunal, qui n'a pas invité l'administration à produire les éléments de preuve en sa possession, n'a pas respecté le caractère contradictoire de la procédure ;

- dès lors que le vérificateur a examiné, dans le cadre de l'examen de leur situation fiscale personnelle, les documents comptables de la société Maçonnerie Bâtiment 44 après la fin de la vérification de comptabilité de cette société, la procédure d'imposition de la société ainsi que celle les concernant sont irrégulières ;

- en contraignant Mme B...à reconnaître que des sommes encaissées sur son compte bancaire personnel correspondaient aux montants de chèques émis par des clients de la société, l'administration a manqué à son devoir de loyauté ;

- l'administration n'avait pas été autorisée par Mme B...à obtenir de sa banque ses relevés bancaires ;

- l'administration n'a pas indiqué sur la proposition de rectification la procédure qu'elle avait suivie en matière de contributions sociales ;

- le montant des charges retenu par l'administration est excessivement faible dès lors que, d'une part, ce montant résulte de l'application d'un taux de charges de 10 % non pas au montant toutes taxes comprises des recettes mais à leur montant hors taxes et que, d'autre part, les salaires versés ainsi que les charges sociales supportées n'ont pas été pris en compte ;

- ne maîtrisant pas la langue française et ne connaissant pas les règles fiscales françaises, ils ne pouvaient éluder l'impôt délibérément.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 avril 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 février 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jouno,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.

1. Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) Maçonnerie Bâtiment 44, dont M. B...était gérant et associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité ayant porté, en matière d'impôt sur les sociétés, sur la période du 13 février 2006 au 31 décembre 2007 ; que les opérations de contrôle ont mis en évidence que cette société avait réalisé un bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés non déclaré ; qu'à l'issue d'un examen de la situation fiscale personnelle de M. et MmeB..., l'administration a estimé que ce bénéfice constituait un revenu distribué entre leurs mains en vertu du 1° du 1 de l'article 109 du code général des impôts ; qu'a en outre été regardé comme revenu distribué, sur le fondement du 2° du 1 de l'article 109 du même code, le profit sur le trésor révélé par la vérification de comptabilité de la société ; qu'en conséquence, l'administration a mis à la charge de M. et Mme B...des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2006 et 2007, assortis de la majoration de 40 % prévue par l'article 1729 du code général des impôts en cas de manquement délibéré ainsi que de l'intérêt de retard ; qu'après le rejet partiel de leur réclamation, M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des impositions supplémentaires et des pénalités restant à leur charge ; que, par le jugement attaqué, dont ils relèvent appel, cette demande a été rejetée ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que la circonstance que le tribunal n'a pas invité l'administration à produire des éléments de preuve de nature à étayer les allégations de M. et Mme B...ne porte pas atteinte au caractère contradictoire de la procédure suivie en première instance, alors au surplus, qu'il n'a pas été saisi d'une telle demande ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Considérant, en premier lieu, que, compte tenu de l'indépendance entre, d'une part, la procédure menée à l'égard de la SARL Maçonnerie Bâtiment 44, soumise à l'impôt sur les sociétés, et d'autre part, celle concernant M. et MmeB..., ces derniers ne peuvent utilement soutenir que l'administration aurait, en méconnaissance de l'article L. 51 du livre des procédures fiscales, procédé à une nouvelle vérification des écritures comptables de la SARL Maçonnerie Bâtiment 44 au regard de l'impôt sur les sociétés après l'achèvement de la vérification de comptabilité dont elle a fait l'objet ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si les requérants soutiennent que le vérificateur ne pouvait affirmer que des sommes inscrites au crédit du compte personnel de Mme B...provenaient de chèques remis à la SARL Maçonnerie Bâtiment 44 par des clients de cette dernière sans consulter la copie de ces chèques et les factures correspondantes, il résulte de l'instruction que l'origine de ces sommes a été déterminée à partir de la seule réponse apportée par MmeB..., par un courrier du 15 septembre 2008, à une demande de justifications du service ; que les requérants ne sont dès lors pas fondés à soutenir que le vérificateur a irrégulièrement pris connaissance des pièces comptables de la société que constituent les chèques qui lui sont remis et les factures qu'elle établit ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme B...ait été contrainte d'indiquer au vérificateur qu'elle avait encaissé sur ses comptes bancaires personnels des chèques émis par des clients de la SARL Maçonnerie Bâtiment 44 ; qu'ainsi, le manquement allégué au devoir de loyauté, auquel est tenu l'administration, n'est pas établi ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que l'exercice par l'administration du droit de communication qu'elle tient des articles L. 83 et L. 85 du livre des procédures fiscales n'est, contrairement à ce que soutiennent les requérants, pas subordonné à l'accord du contribuable ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que, lorsque l'administration entend procéder à un redressement, il lui appartient de mentionner, dans la proposition de rectification, la nature de la procédure d'imposition qu'elle entend suivre à cette fin ; que, toutefois, l'omission de cette mention ou l'erreur que la proposition de rectification pourrait comporter sur ce point n'entache pas d'irrégularité la procédure suivie lorsque cette omission ou erreur n'a pas eu pour effet de priver le contribuable de l'une des garanties de procédure dont il était en droit de bénéficier ; que si la proposition de rectification adressée à M. et Mme B...le 28 octobre 2008 ne mentionne pas la procédure de redressement contradictoire suivie par l'administration s'agissant des contributions sociales, elle invitait les contribuables à présenter leurs observations ou leur acceptation dans un délai de trente jours ; qu'il suit de là que M. et Mme B...n'ont été privés d'aucune des garanties auxquelles ils avaient droit, parmi lesquelles ne figure pas, s'agissant de contributions sociales perçues sur des revenus de capitaux mobiliers, la possibilité de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, cet organisme n'étant pas compétent pour émettre un avis sur un redressement portant sur de tels revenus ; que, dès lors, cette omission n'entache pas d'irrégularité la procédure suivie ;

Sur le bien-fondé des impositions :

8. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 109 du code général des impôts : " Sont considérés comme revenus distribués : / 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article 110 du même code : " Pour l'application du 1° du 1 de l'article 109 les bénéfices s'entendent de ceux qui ont été retenus pour l'assiette de l'impôt sur les sociétés. " ;

9. Considérant qu'aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts, applicable pour la détermination de l'impôt sur les sociétés en vertu de l'article 209 du même code : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant (...) notamment : 1° Les frais généraux de toute nature (...) " ; qu'en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées de l'article 39 du code général des impôts de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité ; qu'en ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ;

10. Considérant que les recettes de la SARL Maçonnerie Bâtiment 44, qui se trouvait en situation de taxation d'office en vertu du 2° de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales, ont été reconstituées par l'administration à partir d'informations qu'elle a obtenues dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès, d'une part, des établissements bancaires dans lesquels cette société et M. et Mme B...sont titulaires de comptes et, d'autre part, de clients de la société ; qu'aucune facture d'achat ni aucun justificatif de frais n'ayant été produit en cours de contrôle, le vérificateur a, " afin de tenir compte de la réalité économique ", admis en déduction des charges dont le montant a été évalué forfaitairement à 10 % des recettes reconstituées ;

11. Considérant, en premier lieu, que si M. et Mme B...allèguent que le vérificateur n'a pas tenu compte de l'ensemble des charges de la SARL Maçonnerie Bâtiment 44 et, notamment, des salaires versés et des charges sociales supportées, ils ne produisent pas de documents autres que des bulletins de salaires, présentés postérieurement au contrôle, et écartés par l'administration en raison des anomalies qu'ils présentaient, susceptibles de prouver la réalité et la nature des charges qu'elle aurait supportées ;

12. Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de ce que les revenus distribués perçus par M. et Mme B...ont été déterminés sur la base des recettes augmentées de la taxe sur la valeur ajoutée doit, en tout état de cause, être écarté comme manquant en fait ;

Sur les pénalités :

13. Considérant que seuls les suppléments d'impôt sur le revenu mis à la charge de M. et Mme B...sont assortis de la majoration prévue par l'article 1729 du code général des impôts en cas de manquement délibéré ; qu'en se prévalant de la qualité de maître de l'affaire du requérant, de l'encaissement sur les comptes bancaires personnels de M. et Mme B...de recettes réalisées par la société qu'il dirigeait, de l'importance des droits éludés par les requérants et du caractère répété des manquements à leurs obligations déclaratives, l'administration établit que l'absence de déclaration d'une partie de leurs revenus résulte de leur volonté délibérée d'éluder l'impôt et non, ainsi que le soutiennent les requérants, de leur manque de maîtrise de la langue française et de leur ignorance des règles fiscales ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, la somme que M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 16 juin 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Aubert, président de chambre,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,

- M. Jouno, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juillet 2016.

Le rapporteur,

T. JounoLe président,

S. AubertLe greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT02998


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02998
Date de la décision : 07/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme AUBERT
Rapporteur ?: M. Thurian JOUNO
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : LEFEUVRE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-07-07;14nt02998 ?
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