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28/06/2016 | FRANCE | N°15NT02891

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 28 juin 2016, 15NT02891


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 2014 par lequel le préfet de Loir-et-Cher a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1404921 du 23 avril 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 septembre 2015, MmeB..., représentée par Me D..., deman

de à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 avril 2015 du tribunal administratif d'Orléans ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...a demandé au tribunal administratif d'Orléans l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 2014 par lequel le préfet de Loir-et-Cher a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1404921 du 23 avril 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 17 septembre 2015, MmeB..., représentée par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 avril 2015 du tribunal administratif d'Orléans ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher du 15 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Loir-et-Cher, à titre principal de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, et de la munir, dans l'attente, dans un délai de quarante huit heures, d'une autorisation provisoire de séjour et de travail, et à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, ces mesures étant prises sous astreinte de 300 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros, au profit de son conseil, à condition que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- eu égard à son état de santé, l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 313-11-11° et l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'avis du médecin inspecteur de l'agence régionale de santé, qui n'est pas signé, a été pris par une autorité incompétente;

- eu égard à sa situation, l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 313-14 du même code, ainsi que l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnait l'article 8 de cette même convention et l'article L. 313-11-7° du CESEDA puisqu'elle a une soeur qui réside en France et qu'elle y a créé des liens ;

- il méconnaît la directive n° 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 puisqu'elle est titulaire d'un titre de séjour portant la mention " carte de séjour membre de la famille d'un citoyen de l'Union ".

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 novembre 2015, le préfet de Loir-et-Cher conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 août 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive n° 2003/109/CE du Conseil du 25 novembre 2003 relative au statut des ressortissants de pays tiers résidents de longue durée ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante camerounaise, relève appel du jugement du 23 avril 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher du 15 octobre 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que le docteur Nadia Dahmane, médecin de l'agence régionale de santé (ARS) du Centre, a été désignée, par un arrêté du 20 novembre 2010 régulièrement publié, pour rendre les avis sur les demandes de titres de séjour pour raisons médicales présentées en application du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, d'autre part, l'avis rendu par le médecin de l'agence régionale de santé du Centre le 4 août 2014 sur la demande de titre de séjour de MmeB..., pour raisons médicales, comporte les nom, prénom et qualité de son auteur, le docteur Nadia Dahmane, ainsi que la signature de celle-ci ; que par suite, les moyens tirés de l'incompétence du médecin de l'ARS, du défaut de signature de l'avis rendu et de la méconnaissance de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, doivent être écartés ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ;

4. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

5. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé correspondant à ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ;

6. Considérant que, par l'avis rendu le 4 août 2014, le médecin de l'ARS du Centre a estimé que si l'état de santé de Mme B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il existait un traitement approprié dans son pays d'origine pour sa prise en charge médicale ; que ni les certificats médicaux produits, qui se bornent à attester que Mme B...souffre d'épilepsie, ni les ordonnances produites, qui établissent la nécessité d'un traitement médical, ne sont de nature à établir que le traitement nécessaire à Mme B...ne serait pas disponible au Cameroun ; que, dans ces conditions, en refusant de délivrer un titre de séjour à MmeB..., le préfet de Loir-et-Cher n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. (...) " ;

8. Considérant que si Mme B...soutient qu'elle vit en France depuis avril 2012, qu'elle a une soeur qui vit régulièrement en France et qu'elle a créé des liens sociaux stables en France, il ressort des pièces du dossier qu'elle n'est arrivée en France qu'à l'âge de vingt sept ans et qu'elle n'est pas dépourvue d'attache familiale au Cameroun, où résident notamment ses deux filles ; que par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés ;

9. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...) " ;

10. Considérant que si Mme B...soutient qu'elle a été victime de violences conjugales en Belgique, elle ne produit aucun pièce pour établir la réalité de celles-ci ; que son état de santé ne peut suffire à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant, en cinquième lieu, que si Mme B...invoque la directive 2003/109/CE du 25 novembre 2003 susvisée, qui permet aux étrangers qui bénéficient d'un titre de séjour portant la mention " résident de longue durée-CE ", de résider dans les autres Etats membre de l'Union européenne, cette directive a été transposée en droit français, notamment par l'article L. 313-4-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers en France ; qu'en tout état de cause, il ne ressort pas des pièces du dossier que le titre de séjour délivré à Mme B...par les autorités belges, en sa qualité d'épouse d'un ressortissant belge, était un titre de séjour portant la mention " résident de longue-durée-CE " ; que par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de la directive du 25 novembre 2003 doit, en tout état de cause, être écarté ;

12. Considérant, enfin, que si Mme B...invoque les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en faisant valoir que les violences conjugales sont des traitements inhumains et dégradants, d'une part, ainsi qu'il a été dit, elle ne produit aucun document de nature à établir la réalité des violences conjugales dont elle se dit victime, et d'autre part, à supposer qu'elle retourne en Belgique, l'arrêté attaqué fixant comme pays de destination le Cameroun ou la Belgique, elle n'y serait pas exposée à des traitements inhumains ou dégradants, cet Etat disposant d'une législation à même de protéger les femmes victimes de violences conjugales ; que par suite, ce dernier moyen doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 23 avril 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de Loir-et-Cher du 15 octobre 2014 ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que les conclusions présentées au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...C...épouse B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...épouse B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet de Loir-et-Cher.

Délibéré après l'audience du 7 juin 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 juin 2016.

Le rapporteur,

S. RIMEU

Le président,

L. LAINE

Le greffier,

V. DESBOUILLONS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°15NT028912


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02891
Date de la décision : 28/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SOUAMOUNOU

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-06-28;15nt02891 ?
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