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14/06/2016 | FRANCE | N°15NT02629

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 14 juin 2016, 15NT02629


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des décisions du préfet de la Loire-Atlantique des 3 mai 2013 et 8 juillet 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1304528 et n° 1406838 du 8 avril 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 août 2015 et le 29 mars 2016, MmeB..., représentée par Me E...C..., demande à la cour :

1

) d'annuler ce jugement du 8 avril 2015 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler les décis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...a demandé au tribunal administratif de Nantes l'annulation des décisions du préfet de la Loire-Atlantique des 3 mai 2013 et 8 juillet 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour.

Par un jugement n° 1304528 et n° 1406838 du 8 avril 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 août 2015 et le 29 mars 2016, MmeB..., représentée par Me E...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 avril 2015 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de la Loire-Atlantique des 3 mai 2013 et 8 juillet 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 75 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, sous réserve que celle-ci renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- il n'est pas justifié que la personne qui a signé les décisions litigieuses bénéficiait bien d'une délégation de signature ;

- les décisions attaquées méconnaissent les stipulations de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles méconnaissent également l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 novembre 2015, le préfet de la Loire-Atlantique conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 août 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rimeu, premier conseiller.

1. Considérant que MmeB..., épouseF..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement du 8 avril 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Loire-Atlantique des 3 mai 2013 et 8 juillet 2014 refusant de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'il appartient à l'autorité administrative qui envisage de refuser de régulariser la situation d'un ressortissant étranger en situation irrégulière et de procéder à son éloignement d'apprécier si, eu égard notamment à la durée et aux conditions de son séjour en France, ainsi qu'à la nature et à l'ancienneté de ses liens familiaux sur le territoire français, l'atteinte que cette mesure porterait à sa vie familiale serait disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision serait prise ; que la circonstance que l'étranger relèverait, à la date de cet examen, des catégories ouvrant droit au regroupement familial ne saurait, par elle-même, intervenir dans l'appréciation portée par l'administration sur la gravité de l'atteinte à la situation de l'intéressé ; que cette dernière peut en revanche tenir compte le cas échéant, au titre des buts poursuivis par sa décision, de ce que le ressortissant étranger en cause ne pouvait légalement entrer en France pour y séjourner qu'au seul bénéfice du regroupement familial et qu'il n'a pas respecté cette procédure ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeB..., vit en France, où elle est régulièrement entrée, depuis le 23 juillet 2005 et y a épousé le 29 janvier 2011 M.F..., compatriote résidant en France sous couvert d'un certificat de résidence d'une durée de validité de dix ans ; que le couple a eu une enfant née le 25 décembre 2012 ; que si Mme B...a des frères et soeurs en Algérie, l'une de ses soeurs réside régulièrement en France et son père, aujourd'hui décédé, a longtemps vécu régulièrement en France ; que si M. F...travaille, il n'a pas de contrat à durée indéterminée et ses revenus, qui se sont élevés à environ 13 000 euros en 2012, lui permettront difficilement de remplir les conditions de ressources nécessaires pour que son épouse bénéficie du regroupement familial ; que, dans ces conditions, le refus de séjour opposé à Mme B...aura pour conséquence de séparer durablement les membres de la famille et de priver l'enfant de l'un ou l'autre de ses parents ; que par suite, l'atteinte portée par les décisions contestées au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme B...doit être regardée comme disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elles ont été prises ; qu'il suit de là que les décisions du préfet de la Loire-Atlantique des 3 mai 2013 et 8 juillet 2014 méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et doivent, pour ce motif, être annulées ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme B...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

5. Considérant que le présent arrêt implique nécessairement que le préfet de la Loire-Atlantique délivre à MmeB..., sous réserve de changement dans les circonstances de droit ou de fait, un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu de lui enjoindre d'y procéder dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; qu'il n'y a pas lieu en revanche d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que Mme B...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me E...C...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de celui-ci le versement à Me E...C...de la somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1304528 et 1406838 du 8 avril 2015 du tribunal administratif de Nantes et les décisions du préfet de la Loire-Atlantique des 3 mai 2013 et 8 juillet 2014 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de la Loire-Atlantique de délivrer à Mme B...un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à Me E...C...la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, sous réserve que Me E...C...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...B..., épouseF..., et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 24 mai 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 14 juin 2016.

Le rapporteur,

S. RIMEULe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°15NT026293


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02629
Date de la décision : 14/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Sophie RIMEU
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : RODRIGUES-DEVESAS

Origine de la décision
Date de l'import : 21/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-06-14;15nt02629 ?
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