La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2016 | FRANCE | N°15NT02271

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 07 juin 2016, 15NT02271


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 11 février 2015 de la préfète du Cher portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant comme pays de destination la République démocratique du Congo ou tout pays pour lequel il établit être admissible.

Par un jugement n° 1500890 du 25 juin 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2015, M. A...C..., représenté par MeB..., ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 11 février 2015 de la préfète du Cher portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant comme pays de destination la République démocratique du Congo ou tout pays pour lequel il établit être admissible.

Par un jugement n° 1500890 du 25 juin 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 23 juillet 2015, M. A...C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 25 juin 2015 du tribunal administratif d'Orléans ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté du 11 février 2015 ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Cher de lui délivrer une carte de séjour temporaire, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à défaut, de réexaminer sa situation dans le même délai et sous la même astreinte, et de le munir d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

5°) de condamner l'Etat aux entiers dépens.

Il soutient que :

- le refus de titre de séjour a été pris en méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; il nécessite une prise en charge médicale qui ne pourra être assurée dans son pays d'origine ; la circonstance que les médicaments utilisés dans le traitement de sa pathologie soient mentionnés sur la liste nationale des médicaments essentiels ne signifie pas qu'ils soient disponibles et encore moins accessibles ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire est contraire à l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; cette décision a pour effet de rompre le seul lien affectif qu'il a et de mettre un terme à son suivi médical ; il est dépourvu de toute attache familiale dans son pays ;

- la décision fixant le pays de renvoi a été prise en violation de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; la décision de la Cour nationale du droit d'asile du 3 décembre 2012 est très peu motivée ; la décision du 16 août 2012 par laquelle la préfète du Cher a envisagé de réserver une suite favorable à sa demande de titre de séjour pour raison de santé a pu influencer la décision de cette instance d'asile.

Par un mémoire en défense, enregistré le 14 septembre 2015, la préfète du Cher conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés et s'en remet, pour le surplus, à ses écritures de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. François premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.C..., ressortissant de la République démocratique du Congo, relève appel du jugement du 25 juin 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 11 février 2015 de la préfète du Cher portant refus de lui délivrer un titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative.(...) " ; qu'aux termes de l'article R.313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L.313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, (...) " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : / - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; / - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; / - s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; / - la durée prévisible du traitement. (...). Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. (...) " ;

3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;

4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui vient au soutien de ses dires doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le médecin de l'agence régionale de santé du Centre a estimé, dans un avis du 10 août 2012, que l'état de santé de M. C...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il n'existait pas de traitement approprié dans son pays d'origine pour sa prise en charge, tout en indiquant que les soins devaient être poursuivis pendant une période de douze mois ; qu'en réponse à une nouvelle demande d'avis, il a estimé, le 22 avril 2014, que l'état de santé de M. C...nécessitait une prise en charge dont le défaut ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'un traitement approprié existait dans son pays d'origine et que l'intéressé pouvait voyager sans risque ; qu'il n'est pas contesté que ce dernier avis a été rendu après que le médecin de l'agence régionale de santé eut été destinataire du certificat médical établi par un médecin gastro-entérologue, faisant état de l'absence de tout traitement médicamenteux ; que le certificat médical postérieur du 16 mars 2015 produit par le requérant, qui atteste que l'hépatite chronique B dont il souffre nécessite une surveillance biologique trimestrielle qui ne peut être faite dans son pays d'origine, ne comporte pas de précision suffisante permettant de remettre en cause l'appréciation portée par le médecin de l'agence régionale de santé dans son avis du 22 avril 2014 ; que le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit, dès lors, être écarté ;

Sur la décision faisant obligation de quitter le territoire français :

6. Considérant que le requérant ne conteste pas que ses deux enfants, nés d'une précédente union, résident dans son pays d'origine ainsi que son frère ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier que son épouse a fait l'objet d'une mesure d'éloignement qu'elle n'a pas contestée ; qu'enfin, aucune circonstance ne fait obstacle à ce qu'ils repartent ensemble en République démocratique du Congo ; que M. C...ne peut pour les raisons mentionnées au point 5 invoquer le fait qu'il sera mis un terme à son suivi médical ; que, par suite, l'arrêté préfectoral contesté n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, dès lors, l'arrêté ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision fixant le pays de renvoi :

7. Considérant que si M.C..., dont les demandes d'obtention du statut de réfugié ont été rejetées successivement les 30 mai 2012 et 3 décembre 2012 par des décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, soutient qu'il encourrait le risque de subir des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour en République démocratique du Congo, il n'apporte aucun élément de nature à établir la réalité de ses allégations ; que le requérant ne peut en outre utilement se prévaloir, à l'encontre de la décision fixant le pays de renvoi, des irrégularités qui entacheraient, selon lui, la décision de la Cour nationale du droit d'asile ; que, par suite, en prenant la décision contestée fixant le pays de renvoi, la préfète du Cher n'a pas méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

9. Considérant que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions à fin d'injonction présentées par M. C...ainsi que celles tendant au bénéfice de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée à la préfète du Cher.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. François, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juin 2016.

Le rapporteur,

E. FRANÇOISLe président,

G. BACHELIER

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

1

N° 15NT02271 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02271
Date de la décision : 07/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : CASTELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-06-07;15nt02271 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award