La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/06/2016 | FRANCE | N°14NT02778

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 07 juin 2016, 14NT02778


Vu la procédure suivante :

La SAS Pavi Holding a demandé à la Commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision du 11 mars 2014 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial du Loiret lui a refusé l'autorisation de procéder à l'extension de la surface de vente de 1 310 m² d'un supermarché à l'enseigne " E. Leclerc Express " portant sa surface de vente de 990 m² à 2 300 m² à Malesherbes.

Par une décision n° 2273D du 16 juillet 2014, la commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a rejeté le recours et refusé le

projet de la SAS Pavi Holding.

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 ...

Vu la procédure suivante :

La SAS Pavi Holding a demandé à la Commission nationale d'aménagement commercial d'annuler la décision du 11 mars 2014 par laquelle la commission départementale d'aménagement commercial du Loiret lui a refusé l'autorisation de procéder à l'extension de la surface de vente de 1 310 m² d'un supermarché à l'enseigne " E. Leclerc Express " portant sa surface de vente de 990 m² à 2 300 m² à Malesherbes.

Par une décision n° 2273D du 16 juillet 2014, la commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a rejeté le recours et refusé le projet de la SAS Pavi Holding.

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 28 octobre 2014 et le 1er avril 2015, la SAS Pavi Holding, représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cette décision de la commission nationale d'aménagement commercial du 16 juillet 2014 ;

2°) d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial de procéder au réexamen du dossier et de statuer sur sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il ne ressort pas de la décision entreprise, d'une part, que la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) aurait été composée régulièrement, d'autre part, que l'ensemble des pièces utiles mentionnées à l'article R. 752-49 du code de commerce aurait été adressé aux membres de la CNAC ;

- il ne ressort pas davantage des pièces du dossier que l'avis émis pour les ministres en charge de l'urbanisme et de l'environnement, en application de l'article R. 752-51 du même code, aurait été signé par une personne dûment habilitée pour ce faire ;

- la décision de la CNAC est insuffisamment motivée, dès lors qu'elle ne justifie pas, en se bornant à indiquer que le projet ne participera pas à l'animation de la vie locale, que le projet contrevient à l'ensemble des critères légaux ;

- la présentation, à la demande des collectivités locales, de deux demandes distinctes, l'une portant sur cinq cellules commerciales, l'autre sur l'extension du supermarché existant, n'a pas constitué un fractionnement du projet qui aurait été de nature à empêcher la commission nationale d'apprécier pleinement et globalement leurs effets, ni abouti à un détournement des procédures d'autorisation d'exploitation commerciale, la commission ayant eu d'emblée une connaissance simultanée et complète de chacun des projets ;

- l'augmentation du nombre de véhicules qui accéderont au site n'est pas de nature à impacter significativement les flux de circulation aux abords du projet, alors que ces flux ne progresseront, sur l'axe emprunté par l'ensemble des clients, que de 4,4% suite à l'extension ou de 8% si l'on prend en compte le projet d'extension ainsi que celui relatif aux cellules commerciales ;

- en outre, les voies de circulation existantes seront à même d'absorber ces nouveaux flux, dès lors qu'un giratoire de 33 mètres de diamètre à été aménagé à l'été 2013, à l'entrée et à la sortie du site où le projet est implanté, à l'intersection de la rue de Vauluizard et de la rue du 19 mars 1962 ;

- les consommateurs pourront par ailleurs emprunter les transports en commun, la distance de 600 mètres sécurisés par des trottoirs continus entre l'arrêt de bus interurbain de la gare RER et le projet ne pouvant être regardée comme rédhibitoire, ainsi que l'a reconnu la commission départementale d'aménagement commercial du Loiret ;

- le projet n'aboutit pas à la création d'un nouveau pôle commercial périphérique, puisqu'il s'agit de l'extension limitée d'un équipement commercial existant, lui-même situé dans une zone d'activités préexistante, sans emprise foncière nouvelle, compatible avec les orientations du schéma de cohérence territoriale du Pays Beauce-Gâtinais en Pithiverais Pays qui vise à consolider le pôle secondaire de Malesherbes ;

- le projet d'extension, qui bénéficie du soutien de l'Union commerciale et artisanale du Malesherbois, ne concurrencera pas les commerces du centre-ville et participera à l'animation de la vie urbaine en complétant et diversifiant l'offre commerciale ainsi qu'en limitant l'évasion commerciale vers les villes proches de Pithiviers ou d'Etampes, tout en garantissant le libre choix des consommateurs à Malesherbes ;

- la décision attaquée est entachée de contradiction, dès lors que, pour des projets similaires, la Commission nationale d'aménagement commercial a choisi de ne pas reconnaître au projet de la SAS Pavi Holding les qualités qu'elle a reconnues à celui d'Intermarché ;

- le projet est ainsi conforme aux objectifs de l'article L. 752-6 du code de commerce.

La Commission nationale d'aménagement commercial a produit des pièces par un bordereau enregistré le 30 janvier 2015.

Une lettre d'information a été adressée aux parties le 18 mars 2016 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Un avis d'audience emportant clôture d'instruction immédiate a été adressé aux parties le 21 avril 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce ;

- la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Millet,

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public,

- et les obsevations de MeB..., substituant MeA..., représentant la SAS Pavi Holding.

Sur la légalité de la décision attaquée ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission (...) se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : 1° En matière d'aménagement du territoire : a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ;b) L'effet du projet sur les flux de transport (...) 2° En matière de développement durable : a) La qualité environnementale du projet ; b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs. " ;

2. Considérant qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles se prononcent sur un projet d'exploitation commerciale soumis à autorisation en application de l'article L. 752-1 du code de commerce, d'apprécier la conformité de ce projet aux objectifs prévus à l'article 1er de la loi du 27 décembre 1973 et à l'article L. 750-1 du code de commerce, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du même code ; que l'autorisation ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet compromet la réalisation de ces objectifs ;

3. Considérant que pour rejeter, par la décision contestée du 16 juillet 2014, le recours présenté par la SAS Pavi Holding contre la décision du 11 mars 2014 de la commission départementale d'aménagement commercial du Loire et refuser le projet d'extension du supermarché à l'enseigne " E. Leclerc Express ", la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) s'est fondée sur les motifs tirés respectivement de ce que la SAS Pavi Holding, en scindant le projet global en plusieurs phases après une première décision de rejet de la commission départementale d'aménagement commercial du Loiret du 23 avril 2013, n'avait pas permis à la commission nationale d'apprécier les effets du projet dans leur globalité, de ce que le projet entraînera une augmentation des flux de circulation de 97,5% et n'est pas desservi par les transports en commun, et enfin de ce qu'il contribuera à la création d'un nouveau pôle commercial périphérique et ne participera pas ainsi à l'animation du centre-ville de Malesherbes ;

4. Considérant, en premier lieu, que la SAS Pavi Holding a déposé, le 25 février 2013, une demande d'autorisation en vue de la création d'un ensemble commercial d'une surface de vente de 2958 m² au sein de la zone d'activités de Vauluizard, en continuité d'urbanisation, à Malesherbes ; que cette demande, de même d'ailleurs que celle relative au projet d'extension d'un magasin sous l'enseigne Intermarché présenté par son concurrent direct, ont fait l'objet d'une décision de rejet de la commission départementale d'aménagement commercial du Loiret le 23 avril 2013 ; que, contrairement à son concurrent, qui a vu son projet autorisé le 6 juin 2013 par la CNAC, le pétitionnaire n'a pas déposé devant cette instance de recours contre la décision de la commission départementale ; que, sur le fondement d'un permis de construire qui avait été délivré par le maire de Malesherbes le 6 août 2012, la SAS Pavi Holding a ouvert sur le site en octobre 2013 un supermarché " E. Leclerc Express ", d'une surface de vente inférieure à 1 000 m² ; que la société a ensuite déposé, le 2 décembre 2013, une demande d'autorisation pour l'exploitation de cinq cellules commerciales d'une surface de vente totale de 1 450 m² à proximité immédiate du supermarché ; que cette demande a fait l'objet d'une décision favorable de la commission départementale le 14 janvier 2014, confirmée par la CNAC lors de sa séance du 4 juin 2014 ; que le pétitionnaire a également déposé, le 3 février 2014, une demande d'extension de 1 310 m² de la surface de vente du supermarché à l'enseigne " E. Leclerc Express ", le projet d'extension devant s'effectuer sur les réserves du bâtiment construit en 2013 ; que ce projet d'extension a été refusé par la commission départementale le 11 mars 2014 puis par la CNAC par la décision attaquée ;

5. Considérant, d'une part, qu'il résulte des éléments mentionnés au point précédent que la société était titulaire d'un permis de construire délivré en 2012 portant sur l'ouverture d'un supermarché non soumise à autorisation au titre de l'urbanisme commercial ; qu'elle ne peut ainsi être regardée comme ayant procédé à la scission de son projet initial en trois phases après la décision de rejet de la commission départementale du 23 avril 2013 ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que, lorsque la CNAC s'est prononcée sur le projet d'extension de la surface commerciale du supermarché " E. Leclerc Express ", elle avait déjà autorisé le 4 juin 2014 la création des cinq cellules commerciales en confirmant la décision favorable de la commission départementale et avait alors à cette dernière date en sa possession le recours qu'elle avait reçu le 25 avril 2014 et qui a été formé par la société requérante contre le refus d'autorisation de ce projet d'extension ; qu'ainsi la CNAC avait en sa possession les deux demandes d'autorisation de la société et pouvait apprécier dans sa globalité (cellules commerciales et extension de la surface commerciale initiale) le projet de la société ; qu'au surplus, la société fait valoir sans être contredite que les deux demandes qu'elle a déposées en décembre 2013 et en février 2014 ont fait suite à la décision de la CNAC d'autoriser le 6 juin 2013 l'extension du magasin Intermarché en portant sa surface de vente de 1960 m² à 3467 m² ;

6. Considérant que, par suite, c'est à tort que la CNAC a estimé que la société requérante avait scindé son projet global en plusieurs phases après la décision de rejet de la commission départementale d'aménagement commercial du Loiret du 23 avril 2013 et ne lui avait pas permis d'apprécier les effets du projet dans leur globalité ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des comptages routiers réalisés en 2012, que le trafic journalier actuel, rue de Vauluizard, où est implanté le projet, est évalué à 5 376 véhicules/jour ; que le trafic généré par le magasin " E. Leclerc Express " est actuellement de 244 véhicules par jour ; que si l'on additionne les 213 nouveaux véhicules générés par les cellules commerciales et les 238 nouveaux véhicules générés par le projet d'extension, l'augmentation du nombre de véhicules qui accéderont au site n'est pas de nature à impacter significativement les flux de circulation aux abords du projet, dès lors que ces flux ne progresseront, sur l'axe emprunté par l'ensemble des clients, que de 4,4% suite à l'extension seule ou de 8% en prenant en compte, ainsi que le préconise la CNAC, le projet d'extension ainsi que celui relatif aux cellules commerciales ; qu'en outre, les voies de circulation existantes seront à même d'absorber ces nouveaux flux, dès lors qu'un giratoire de 33 mètres de diamètre à été aménagé à l'été 2013, à l'entrée et à la sortie du site où le projet est implanté, à l'intersection de la rue de Vauluizard et de la rue du 19 mars 1962 ; que les consommateurs pourront, par ailleurs, emprunter 2 lignes de transports en commun, la distance de 600 mètres entre l'arrêt de bus interurbain de la gare RER et le projet ne pouvant être regardée comme rédhibitoire ; que les piétons et cyclistes pourront, enfin, se rendre sur le site de l'équipement commercial par des voies sécurisées ; que, contrairement à ce qu'a estimé la commission nationale, le projet n'a donc pas méconnu sur ce point les objectifs de l'article L. 752-6 du code de commerce ;

8. Considérant, en troisième lieu et d'une part, que le projet a pour objet l'extension limitée d'un équipement commercial existant, lui-même situé au sein de la zone d'activités préexistante de Vauluizard, " proche du centre-ville ", sans emprise foncière nouvelle et compatible avec les orientations du schéma de cohérence territoriale du Pays Beauce-Gâtinais en Pithiverais qui vise à consolider le pôle secondaire de Malesherbes ; que contrairement à ce qu'a estimé la commission nationale, ce projet en cause n'a pas pour effet de " créer un nouveau pôle commercial périphérique " ;

9. Considérant que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier que le projet d'extension, qui bénéficie du soutien des commerçants du centre-ville, exprimé par l'accord de l'union commerciale et artisanale du Malesherbois, ne concurrencera pas les commerces du centre-ville ; qu'il participera à l'animation de la vie urbaine en complétant et diversifiant l'offre commerciale et en limitant l'évasion commerciale vers les villes proches de Pithiviers ou d'Etampes, tout en garantissant le libre choix des consommateurs à Malesherbes ;

10. Considérant que, par suite, le motif tiré par la commission nationale de ce que le projet contribuera à la création d'un nouveau pôle commercial périphérique et ne participera pas ainsi à l'animation du centre-ville de Malesherbes est entaché d'erreur d'appréciation ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que la SAS Pavi Holding est fondée à demander l'annulation de la décision qu'elle attaque ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

12. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que la demande de la SAS Pavi Holding soit réexaminée ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre à la Commission nationale d'aménagement commercial de procéder à ce réexamen dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la SAS Pavi Holding et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La décision de la Commission nationale d'aménagement commercial du 16 juillet 2014 est annulée.

Article 2 : Il est enjoint à la Commission nationale d'aménagement commercial de réexaminer la demande de la SAS Pavi Holding dans un délai de quatre mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à la SAS Pavi Holding une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Pavi Holding et à la Commission nationale d'aménagement commercial.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 juin 2016.

Le rapporteur,

J-F. MILLET

Le président,

G. BACHELIERLe greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'habitat durable, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 14NT02778

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02778
Date de la décision : 07/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-06-07;14nt02778 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award