Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... D...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 24 décembre 2012 par laquelle le directeur du centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de l'accident vasculaire cérébral dont elle a été victime le 10 mai 2012, ensemble la décision du 18 avril 2013 rejetant son recours gracieux.
Par un jugement n° 1301075 du 30 avril 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.
Par une ordonnance n° 382086 du 22 septembre 2014, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Nantes le jugement de la requête, enregistrée le 2 juillet 2014, dont l'avait saisi MmeD....
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 2 juillet 2014, 26 novembre 2014 et 6 mai 2016, Mme A...D..., représentée par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 30 avril 2014 ;
2°) d'annuler les décisions contestées du directeur du CHU de Caen des 24 décembre 2012 et 18 avril 2013 ;
3°) de mettre à la charge du CHU de Caen la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement est irrégulier car il n'a pas visé le mémoire récapitulatif produit ;
- ce jugement n'est pas suffisamment motivé en ce qui concerne les raisons pour lesquelles l'environnement professionnel ne pouvait être pris en considération dans l'appréciation du lien de causalité ;
- l'expertise réalisée à la demande de la commission de réforme par le docteur Scheffer doit être écartée en application des articles R. 4127-105 et R. 4127-106 du code de la santé publique, pour méconnaissance du principe d'impartialité en raison des liens du médecin avec le CHU de Caen, où il exerce comme praticien attaché ;
- l'accident, qui s'est produit durant le temps de travail et sur le lieu de travail, doit être regardé comme imputable au service ; le lien de causalité entre une situation de stress au travail et un malaise doit être admis ; son malaise est survenu à l'issue d'une intense journée d'activité dans un service hospitalier en sous-effectif ;
- les circonstances de son accident remplissent également les conditions d'imputabilité au service prévues par l'instruction de l'administration du 9 février 2012 relative à la protection sociale des fonctionnaires hospitaliers contre les risques de maladie et d'accidents de service ; les risques psycho-sociaux dans la fonction publique s'appliquent également aux accidents cardio-vasculaires sur le lieu de travail ;
- elle était en bon état de santé avant l'accident ; aucun état antérieur n'est susceptible d'expliquer l'accident vasculaire cérébral, qui est dû à une situation d'épuisement professionnel avéré ; le jour de l'accident elle avait pris ses fonctions à 6h30 et à l'heure de l'accident, à 13h55, elle arrivait au terme de sa journée et avait travaillé pendant 7h30, sans pause.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 juin 2015, le centre hospitalier universitaire de Caen, représenté par MeE..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de Mme D... la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que :
- le tribunal administratif n'a pas retenu le moyen d'ordre public tiré du caractère tardif de la demande de première instance ; or le recours gracieux, formé par un délégué syndical qui ne justifiait d'aucun mandat, n'a pas eu pour effet de conserver le délai de recours contentieux à l'égard de la décision du 24 décembre 2012 ; la demande de Mme D..., enregistrée le 17 juin 2013, était donc tardive ;
- Mme D... n'a pas produit la minute du jugement ; dès lors le moyen tiré de l'absence de visa de son mémoire récapitulatif dans les visas du jugement est inopérant ;
- le moyen de légalité externe soulevé pour la première fois en appel et tiré de l'irrégularité de l'avis de la commission de réforme n'est pas recevable car Mme D...n'a soulevé devant le tribunal administratif que des moyens de légalité interne ;
- sur le fond, les moyens soulevés par Mme D...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires applicables à la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Specht,
- et les conclusions de M. Giraud, rapporteur public.
1. Considérant que MmeD..., née en 1972, qui occupait un emploi d'aide soignante au sein de la résidence pour personnes âgées de la Charité relevant du centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen, a été victime le 10 mai 2012 à 13h55, alors qu'elle se trouvait sur son lieu de travail, d'un accident vasculaire cérébral dont elle garde des séquelles ; que, par une décision du 24 décembre 2012 rendue après une expertise médicale du 9 novembre 2012, et suivant l'avis du 18 décembre 2012 de la commission de réforme, le CHU de Caen a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de cet accident ; que, saisi d'un recours gracieux formé par un représentant syndical, l'établissement a, par une décision du 18 avril 2013, confirmé le refus opposé à MmeD... ; que cette dernière relève appel du jugement du 30 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la minute du jugement attaqué comporte le visa du mémoire en réplique intitulé " mémoire récapitulatif " produit par la requérante, enregistré le 7 mars 2014 ; que le moyen tiré du caractère incomplet des visas manque en fait ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que le jugement attaqué énonce de manière suffisante les motifs sur lesquels le tribunal s'est fondé pour écarter le moyen tiré de ce que le contexte de travail de Mme D...ne pouvait être retenu comme établissant un lien de causalité direct avec son accident ; que le jugement est, dès lors, suffisamment motivé ;
Sur la légalité des décisions contestées :
Sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir soulevée par le CHU de Caen tirée du caractère tardif de la demande présentée par MmeD... :
4. Considérant, en premier lieu, que le moyen soulevé par Mme D... tiré du vice de procédure qui entacherait l'avis rendu par la commission de réforme en raison de l'absence d'impartialité du médecin ayant émis au préalable un avis médical sur son état de santé, qui n'est pas d'ordre public, relève d'une cause juridique distincte de celle, relative à la légalité interne de la décision contestée, qui était seule discutée en première instance ; qu'invoqué pour la première fois en appel, ce moyen n'est pas recevable et ne peut, dès lors, qu'être écarté ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 41 de la loi susvisée en date du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de la maladie ou de l'accident est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales. (...) " ;
6. Considérant que Mme D... soutient que l'accident vasculaire cérébral par rupture d'anévrisme dont elle a été victime le 10 mai 2012 en fin de service a été causé par une surcharge de travail en raison d'un sous-effectif dans le service, dans un contexte d'épuisement professionnel, et produit des éléments établissant la lourdeur du travail et l'insuffisance du personnel dans les services de la résidence pour personnes âgées où elle était affectée ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que la rupture d'anévrisme intracrânien dont a été victime Mme D... est survenue durant les transmissions inter-équipes, et qu'il n'est pas établi que l'intéressée aurait, au cours des heures précédentes, fourni un effort physique exceptionnel lié à l'exécution de son service ou subi un stress aigu ; que, par ailleurs, il n'est pas contesté que, durant les mois précédant l'accident, Mme D...avait bénéficié régulièrement des jours de repos auxquels elle avait droit ; que, dans ces conditions, et alors même que l'intéressée ne présentait pas d'antécédent cardiovasculaire, le lien entre le malaise dont a été victime Mme D... le 10 mai 2012 et l'exécution du service ne peut être regardé comme établi ;
7. Considérant, enfin, que Mme D... ne peut utilement soutenir qu'elle remplirait les conditions déterminées par l'instruction n° DGOS/RH3/DGCS/4B/2012/70 du 9 février 2012 relative à la protection sociale des fonctionnaires hospitaliers contre les risques de maladie et d'accidents de service, qui est dépourvue de caractère règlementaire ;
8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Caen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que Mme D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande présentée au même titre par le CHU de Caen ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire de Caen tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D...et au centre hospitalier universitaire de Caen.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Specht, premier conseiller,
- Mme Gélard, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 2 juin 2016.
Le rapporteur,
F. SpechtLe président,
I. Perrot
Le greffier,
M. C...
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT02542