Vu la procédure suivante :
I- Sous le n° 15NT00133, par une requête et des mémoires enregistrés les 17 janvier, 29 juillet 2015, 25 avril 2016 et 29 avril 2016, l'association Fédération des artisans et commerçants de Caen, la société Ethnika, M. C... G..., Mme E...H..., représentés par MeB..., demandent à la cour :
1°) d'annuler la décision n°s 1332T-1357T-1358T-1359T-1360T du 1er octobre 2014 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a délivré à la société Inter Ikea Centre Fleury, l'autorisation préalable en vue de créer un ensemble commercial à Fleury-sur-Orne (Calvados).
2°) de mettre à la charge de la société Inter Ikea Centre Fleury une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la décision du 1er octobre 2014 est insuffisamment motivée ;
- le projet n'est pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) ; il conduit à une consommation excessive d'espace agricole ; le projet est construit sur un seul niveau ; il se situe à l'écart des zones d'habitat ; il est en contradiction avec la structuration de l'appareil commercial ; il ne renforce pas le potentiel commercial de la ville de Caen ;
- il ne répond pas aux objectifs énoncés à l'article L. 752-6 du code de commerce, en ce qui concerne notamment ses effets sur l'animation de la vie urbaine et sur le développement durable.
Une intervention a été présentée, les 18 janvier 2015 et 25 avril 2016, par la ville de Caen, qui demande qu'il soit fait droit aux conclusions de la requête n°15NT00133 par les mêmes moyens que ceux qui sont exposés par l'association Fédération des artisans et commerçants de Caen et autres.
Un mémoire de production de pièces a été présenté le 5 mars 2015 par la Commission nationale d'aménagement commercial.
Des mémoires en défense ont été présentés, les 13 avril 2015 et 22 avril 2016, pour la société Inter Ikea centre Fleury qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de chacun des requérants à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'intervention de la ville de Caen n'est pas recevable ; le maire n'a pas été autorisé à agir en justice ; la ville de Caen a renoncé à exercer son recours contre la précédente décision du 2 février 2012 de la Commission nationale d'aménagement commercial ;
- les moyens soulevés par l'association Fédération des artisans et commerçants de Caen et autres ne sont pas fondés.
II- Sous le n° 15NT00149, par une requête et des mémoires enregistrés les 19 janvier et 16 juin 2015, et 29 avril 2016 l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2 et la société les Comptoirs de l'Univers, représentées par Me I...et MeF..., demandent à la cour :
1°) d'annuler la décision n°s 1332T-1357T-1358T-1359T-1360T du 1er octobre 2014 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a délivré à la société Inter Ikea Centre Fleury, l'autorisation préalable en vue de créer un ensemble commercial à Fleury-sur-Orne (Calvados) ;
2°) de saisir la Cour de justice de l'Union européenne d'une question préjudicielle portant sur la nécessité de soumettre les autorisations d'aménagement commercial à l'obligation de participation du public ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la société Inter Ikea Centre Fleury une somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
- dans une précédente décision du 30 mai 2012, la Commission nationale d'aménagement commercial a refusé de délivrer l'autorisation sollicitée pour un projet identique ;
- la décision du 1er octobre 2014 est insuffisamment motivée ;
- l'autorisation accordée le 21 novembre 2008 par la Commission nationale d'aménagement commercial était périmée de sorte que la demande de modification substantielle devait être déclarée irrecevable ;
- cette décision a été prise en méconnaissance du principe de participation du public énoncé à l'article L 120-1-1du code de l'environnement ;
- les dispositions de l'article R. 752-27 du code de commerce ont été méconnues ;
- le projet ne répond pas aux objectifs énoncés à l'article L. 752-6 du code de commerce ; il n'est pas compatible avec l'objectif d'aménagement du territoire ; il ne contribue pas à l'animation de la vie locale ; il va accroître le déséquilibre commercial dans l'agglomération de Caen ; il méconnaît le SCOT ; il ne se situe pas dans une zone urbanisée ou en continuité de celle-ci ; il ne prévoit pas la réalisation du stationnement en ouvrage ; il ne comporte pas au moins deux niveaux ; il n'est pas justifié de l'effectivité de la réalisation avant l'ouverture de l'équipement au public, des aménagements routiers annoncés par le pétitionnaire ; le projet ne satisfait pas aux critères fixés par le législateur en matière de développement durable ; il est mal desservi ; son insertion paysagère et environnementale n'est pas satisfaisante.
Un mémoire de production de pièces a été présenté, le 5 mars 2015, par la Commission nationale d'aménagement commercial.
Des mémoires en défense ont été présentés, les 13 avril 2015, 22 et 29 avril 2016, pour la société Inter Ikea centre Fleury qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2 et de la société les Comptoirs de l'Univers à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2 et la société les Comptoirs de l'Univers ne sont pas fondés.
III- Sous le n° 15NT00210, par une requête et des mémoires enregistrés les 23 janvier 2015 et 13 avril 2016, la société Cora, représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler la décision n°s 1332T-1357T-1358T-1359T-1360T du 1er octobre 2014 par laquelle la Commission nationale d'aménagement commercial (CNAC) a délivré à la société Inter Ikea Centre Fleury, l'autorisation préalable en vue de créer un ensemble commercial à Fleury-sur-Orne (Calvados);
2°) de mettre à la charge de la société Inter Ikea Centre Fleury une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- il n'est pas justifié de ce que le président de la Commission aurait été empêché de présider la séance au cours de laquelle a été prise la décision du 1er octobre 2014 litigieuse et donc de signer cette décision ;
- il ne ressort pas des mentions de la décision du 1er octobre 2014 que les membres de la Commission nationale d'aménagement commercial ont été régulièrement convoqués, ni qu'ils ont reçu dans un délai raisonnable l'ensemble des documents nécessaires aux délibérations de la Commission, ni que les avis des ministres intéressés ont été rendus par des personnes habilitées à le faire ; la Commission n'a pas justifié de la régularité de la procédure, s'agissant de la convocation de ses membres et de la transmission à ces derniers de l'ensemble des pièces utiles ; - les avis des ministres n'ont pas été signés par une personne habilitée à le faire ;
- il n'est pas établi que la formalité prévue par les dispositions de l'article R. 752-47 du code de commerce a été respectée ;
- la décision du 1er octobre 2014 est insuffisamment motivée ;
- le dossier de demande d'autorisation est incomplet ; il ne comporte pas la signature des demandeurs de l'autorisation, les justificatifs de la maîtrise foncière du terrain d'assiette du projet ; la zone de chalandise n'est pas délimitée en fonction des modes de transports doux ainsi que l'exige l'article 1.5 de l'annexe 2 de l'arrêté du 21 août 2009 ; la carte de la page 156 ne mentionne pas les équipements commerciaux implantés en dehors de la zone de chalandise sur les territoires des communes de Rennes et de Rouen, les équipements publics existants sur le territoire des communes de Fleury-sur-Orne et d'Ifs et l'emplacement de l'arrêt de la ligne de bus n°4 ; les développements consacrés à l'insertion paysagère ne sont pas suffisants ; la composition du dossier n'a pas permis à la commission nationale de se prononcer en toute connaissance de cause ;
- le dossier de demande d'autorisation comporte des modifications substantielles par rapport au premier dossier présenté devant la Commission nationale d'aménagement commercial ayant donné lieu à une décision de refus annulée par décision du 11 juin 2014 du Conseil d'Etat statuant au contentieux ; une nouvelle demande d'autorisation devait donc être déposée devant la commission départementale d'aménagement commercial du Calvados ;
- le projet n'est pas compatible avec le schéma de cohérence territoriale (SCOT) ;
- le projet ne répond pas aux objectifs énoncés à l'article L. 752-6 du code de commerce.
Un mémoire de production de pièces a été présenté, le 5 mars 2015, par la Commission nationale d'aménagement commercial.
Des mémoires en défense ont été présentés, les 13 avril 2015 et 22 avril 2016, pour la société Inter Ikea centre Fleury qui conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la société Cora à lui verser la somme de 6 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens soulevés par la société Cora ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Charte de l'environnement ;
- le code de commerce ;
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Buffet,
- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public,
- les observations de MeB..., représentant l'association des artisans et commerçants de Caen et autres, de MeF..., représentant l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2 et autres, de MeJ..., substituant MeK..., représentant la société Cora et de MeA..., représentant la SAS Inter Ikéa centre Fleury.
1. Considérant que les requêtes n° 15NT00133 présentée pour l'association Fédération des artisans et commerçants de Caen et autres, n° 15NT001149 présentée pour l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2 et la société les Comptoirs de l'Univers et n° 15NT00210 présentée pour la société Cora sont dirigées contre la même décision du 1er octobre 2014 de la Commission nationale d'aménagement commercial ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt;
2. Considérant que, par la décision du 1er octobre 2014, la Commission nationale d'aménagement commercial a accordé à la société Inter Ikea Centre Fleury, l'autorisation préalable en vue de créer un ensemble commercial à Fleury-sur-Orne (Calvados) ; que cette décision fait suite au réexamen de la demande du pétitionnaire par la Commission nationale d'aménagement commercial, consécutivement à l'annulation, par une décision du 11 juin 2014 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux, d'une précédente décision de refus qu'elle avait opposée le 30 mai 2012 ;
Sur l'intervention de la ville de Caen :
3. Considérant que, compte tenu de l'implantation et de la surface de vente de l'ensemble commercial litigieux, la ville de Caen a intérêt à l'annulation de la décision attaquée ; qu'ainsi son intervention est recevable ; qu'en outre, par délibération du 14 avril 2014, le conseil municipal a, en application de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, régulièrement habilité le maire de Caen à intenter, au nom de la commune, les actions en justice ; qu'ainsi, et alors même qu'elle aurait renoncé à exercer un recours contre la précédente décision de la Commission nationale d'aménagement commercial, son intervention est recevable ;
Sur la légalité de la décision du 1er octobre 2014 de la Commission nationale d'aménagement commercial:
Sur la compétence du signataire de la décision :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 751-8 du code de commerce, dans sa rédaction alors en vigueur : " Le président de la Commission nationale d'aménagement commercial est suppléé, en cas d'absence ou d'empêchement, par le membre de la Cour des comptes (...) " ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le président de la Commission nationale d'aménagement commercial n'ait pas été absent ou empêché à la date de la décision du 1er octobre 2014 ; que, par suite, le moyen tiré de ce que cette décision, signée par M. Valdiguié, conseiller maître honoraire à la Cour des comptes, membre de la Commission, aurait été prise par une autorité incompétente ne peut qu'être écarté ;
Sur la procédure suivie devant la Commission nationale d'aménagement commercial ;
5. Considérant qu'il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que les décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial doivent comporter des mentions attestant de la convocation régulière de ses membres, de l'envoi dans les délais de l'ordre du jour et des documents nécessaires à ses délibérations ou de ce que les avis des ministres intéressés ont été rendus par des personnes habilitées ; que, si la société Cora invoque des irrégularités dans la transmission aux membres de la Commission de l'ensemble des pièces utiles et dans la convocation des membres de la commission, ces allégations d'irrégularité de la procédure devant la Commission nationale ne sont pas assorties de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ;
6. Considérant, par ailleurs, que s'il est soutenu, sans aucune précision, que les avis des ministres n'ont pas été signés par une personne habilitée, il ressort des pièces du dossier que ce moyen manque en fait ;
7. Considérant, enfin, que le moyen tiré de ce que l'article R. 752-47 du code de commerce en application duquel " Pour chaque recours exercé, le président de la Commission nationale d'aménagement commercial informe le préfet du dépôt du recours " aurait été méconnu n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé ; qu'en tout état de cause, la seule circonstance que le préfet n'aurait pas été informé du dépôt du recours est sans incidence sur la régularité de la décision litigieuse ;
Sur la méconnaissance du droit de toute personne de participer à l'élaboration des décisions publiques ayant une incidence sur l'environnement ;
8. Considérant, d'une part, que les autorisations délivrées en application des articles L. 752-1 à L. 752-24 du code de commerce ont pour seul objet de permettre l'exploitation de commerces, sans préjudice de l'application ultérieure des dispositions du code de l'environnement, notamment de ses articles L. 120-1-1 et L. 123-2, qui prévoient des procédures de participation du public pour des décisions ayant une incidence directe et significative ou notable sur l'environnement ;
9. Considérant, d'autre part, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 752-6 du code de commerce, aux termes desquelles : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / (...) 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ; / b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs ", que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut légalement être délivrée si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation d'un des objectifs énoncés par la loi, et notamment l'objectif de développement durable ; que, dès lors, une telle autorisation, délivrée, sous le contrôle du juge, en application des articles L. 752-1 à L. 752-24 du code de commerce, n'est pas susceptible d'avoir une incidence directe et significative sur l'environnement ; qu'ainsi, les autorisations délivrées en application des articles L. 752-1 à L. 752-24 du code de commerce ne sont pas au nombre des décisions visées à l'article 7 de la Charte de l'environnement ;
10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de saisir la Cour de justice de l'Union européenne de la question préjudicielle sollicitée, que les moyens tirés de ce que la procédure serait entachée d'irrégularité au regard de l'article 7 de la Charte de l'environnement et de l'article L. 120-1-1 du code de l'environnement doivent être écartés ;
Sur la motivation de la décision :
11. Considérant que si, eu égard à la nature, à la composition et aux attributions de la Commission nationale d'aménagement commercial, les décisions qu'elle prend doivent être motivées, cette obligation n'implique pas que la commission soit tenue de prendre explicitement parti sur le respect, par le projet qui lui est soumis, de chacun des objectifs et critères d'appréciation fixés par les dispositions législatives applicables ; qu'il ressort des pièces du dossier que la Commission a suffisamment motivé sa décision en précisant que le projet est implanté sur le territoire de la commune de Fleury-sur-Orne, identifiée par le document d'orientations générales du SCOT Caen-Métropole, avec lequel il est compatible, comme une localisation préférentielle pour les projets à vocation régionale, qu'il est desservi par plusieurs voies routières et par les transports collectifs, qu'il présente une architecture novatrice et une bonne insertion paysagère et offre des garanties en termes de développement durable ; que, par suite, la décision litigieuse est suffisamment motivée ;
Sur la péremption de l'autorisation accordée le 21 novembre 2008 par la Commission nationale d'aménagement commercial :
12. Considérant qu'aux termes de l'article R. 752-27 du code de commerce, dans sa rédaction alors en vigueur : " (...) Lorsque la réalisation d'un projet autorisé est subordonnée à l'obtention d'un permis de construire, l'autorisation est périmée si un dossier de demande de permis de construire considéré comme complet au regard des articles R. 423-19 à R. 423-22 du code de l'urbanisme n'est pas déposé dans un délai de deux ans à compter de la date fixée au premier alinéa. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 752-15 du code de commerce, dans sa rédaction alors en vigueur : " L'autorisation d'exploitation commerciale est délivrée préalablement à l'octroi du permis de construire s'il y a lieu, ou avant la réalisation du projet si le permis de construire n'est pas exigé./L'autorisation est accordée par mètre carré de surface de vente./Une nouvelle demande est nécessaire lorsque le projet, en cours d'instruction ou dans sa réalisation, subit des modifications substantielles dans la nature du commerce ou des surfaces de vente. Il en est de même en cas de modification de la ou des enseignes désignées par le pétitionnaire.(...) " ;
13. Considérant que la demande d'autorisation préalable présentée par la société Inter Ikea Centre Fleury, en vue de créer un ensemble commercial comprenant, notamment, une surface alimentaire de 6 053 m2, des moyennes surfaces spécialisées dans l'équipement de la maison d'une surface de vente totale de 1 027 m2 et de 30 boutiques d'une surface de vente totale de 4 590 m2 constitue une nouvelle demande d'autorisation, distincte de celle autorisée le 21 novembre 2008 par la commission départementale d'équipement commercial du Calvados portant, notamment, sur une surface alimentaire de 2 450 m2, des moyennes surfaces spécialisées dans l'équipement de la maison d'une surface de vente totale de 8 130 m2 et 70 boutiques d'une surface de vente totale de 9 036 m2 ; que par suite, le moyen tiré de ce que l'autorisation initiale du 21 novembre 2008 était périmée est sans incidence sur la légalité de l'autorisation attaquée ;
Sur la composition du dossier de la demande :
14. Considérant, d'une part, que, contrairement à ce qui est soutenu, le dossier de demande d'autorisation comporte la signature des demandeurs de l'autorisation, les justificatifs de la maîtrise foncière des terrains d'assiette du projet, la délimitation de la zone de chalandise en fonction des modes de transports routiers et en commun ; qu'il mentionne les parcelles d'assiette du projet ; que les développements consacrés à la desserte du site par les pistes cyclables et cheminements piétons et à l'insertion paysagère sont suffisants ; qu'ainsi, et en tout état de cause, et alors que les circonstances que la localisation des équipements commerciaux, qui sont néanmoins répertoriés, implantés en dehors de la zone de chalandise sur les territoires des villes de Rennes et de Rouen, les équipements publics existants sur le territoire des villes de Fleury-sur-Orne et d'Ifs et l'emplacement de l'arrêt de la ligne de bus n°4 ne seraient pas reportés sur la carte de la page 156 sont sans incidence, le moyen tiré de ce que le dossier serait incomplet et qu'il n'aurait pas permis à la Commission de se prononcer en toute connaissance de cause doit être écarté ;
15. Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que les parcelles d'assiette du projet ne seraient pas identiques à celles du premier dossier de demande d'autorisation examiné par la Commission nationale d'aménagement commercial, ayant donné lieu à une décision de refus annulée par la décision susmentionnée du 11 juin 2014 du Conseil d'Etat, statuant au contentieux ; que, contrairement à ce qui est soutenu, ni le fait que quatre communes ont été ajoutées dans la zone de chalandise du projet, ni les modifications limitées apportées au projet à la suite de l'annulation contentieuse, relatives à la répartition des cellules commerciales, à l'implantation des restaurants, à certains aménagements extérieurs, au nombre d'emplacements de stationnement supplémentaires et au nombre d'arbres plantés ne peuvent être regardées comme constituant des modifications substantielles nécessitant le dépôt d'une nouvelle demande d'autorisation devant la commission départementale d'aménagement commercial du Calvados ;
Sur la compatibilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale de Caen Métropole:
16. Considérant qu'en vertu de l'article L. 122-1-15 du code de l'urbanisme, les autorisations délivrées par la Commission nationale d'aménagement commercial doivent être compatibles avec les schémas de cohérence territoriale ; qu'à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs ; qu'en matière d'aménagement commercial, s'il ne leur appartient pas, sous réserve des dispositions applicables aux zones d'aménagement commercial, d'interdire par des dispositions impératives certaines opérations de création ou d'extension relevant des qualifications et procédures prévues au titre V du livre VII du code de commerce, ils peuvent fixer des orientations générales et des objectifs d'implantations préférentielles des activités commerciales, définis en considération des exigences d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement ou de qualité de l'urbanisme ; que si de tels objectifs peuvent être pour partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux commissions d'aménagement commercial, non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent ;
17. Considérant, d'une part, que si le document d'orientations générales du schéma de cohérence territoriale de Caen Métropole prévoit, " en matière d'implantation commerciale ", " d'assurer l'équilibre de l'aménagement du territoire métropolitain ", de placer " la limitation de la consommation d'espace, particulièrement agricole, au premier rang de ses objectifs ", " de limiter la consommation d'espaces agricoles ou naturels (...)", " d'éviter les nouvelles implantations qui seraient localisées à l'écart des zones urbanisées et obéissant à la seule logique de captation de flux routiers ", " de renforcer le potentiel commercial de la ville de Caen (...) ", " de préserver la structuration de l'appareil commercial en limitant les capacités d'extension des grands équipements commerciaux périphériques ", ce document prévoit également " de localiser préférentiellement les projets présentant une vocation régionale dans le parc d'activités de Fleury-sur-Orne " ; qu'eu égard à sa nature et son ampleur, l'ensemble commercial en cause doit être regardé comme ayant une vocation régionale ; que, par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet, situé dans le Parc d'activités de Fleury et qui présente une bonne insertion dans son environnement, ne serait pas compatible avec l'objectif de ce document tendant à " rechercher la qualité architecturale, l'insertion urbaine et paysagère et éviter les nappes de parking en façades " ou à éviter de " compromettre la qualité des aménagements et de l'architecture des bâtiments " sur la route d'Harcourt à Fleury- sur-Orne, en entrée de ville ;
18. Considérant, d'autre part, que le document d'orientations générales du schéma de cohérence territoriale précise que " les documents d'urbanisme devront prévoir que (...)l'implantation des commerces de détail et des ensembles commerciaux se fera prioritairement au sein des zones urbanisées ou à défaut en continuité avec celles-ci ", que " les ensembles commerciaux portant sur une surface hors oeuvre nette de bâtiment de plus de 5 000 m2 devront prévoir la réalisation du stationnement en ouvrage (...)" et que " (...) les ensembles commerciaux portant sur une surface hors oeuvre nette de bâtiment de plus de 10 000 m2 devront prévoir également leur construction sur au moins deux niveaux (...) " ; que toutefois, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions applicables aux documents d'urbanisme ne peut utilement être invoqué à l'encontre de l'autorisation litigieuse, alors en outre que les autorisations délivrées en application du code de l'urbanisme et en application du code de commerce relèvent de législations distinctes et sont régies par des procédures indépendantes ;
19. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'incompatibilité du projet avec le schéma de cohérence territoriale de Caen Métropole ne peut qu'être écarté ;
Sur l'appréciation de la Commission nationale d'aménagement commercial :
20. Considérant qu'aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 4 août 2008 : " Lorsqu'elle statue sur l'autorisation d'exploitation commerciale visée à l'article L. 752-1, la commission départementale d'aménagement commercial se prononce sur les effets du projet en matière d'aménagement du territoire, de développement durable et de protection des consommateurs. Les critères d'évaluation sont : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et de montagne ; / b) L'effet du projet sur les flux de transport ; / c) Les effets découlant des procédures prévues aux articles L. 303-1 du code de la construction et de l'habitation et L. 123-11 du code de l'urbanisme ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet ; / b) Son insertion dans les réseaux de transports collectifs. " ;
21. Considérant qu'il résulte de ces dispositions combinées que l'autorisation d'aménagement commercial ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi ; qu'il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce ;
22. Considérant, en premier lieu, que, s'agissant des effets du projet sur l'aménagement du territoire, il ressort des pièces du dossier que celui-ci est implanté dans le Parc d'activités de Fleury, à 5 kilomètres de Caen, et est limitrophe de la zone d'aménagement concerté des Hauts de l'Orne qui comprend la réalisation de 1 800 logements environ, l'aménagement d'équipements publics, et l'implantation d'activités tertiaires ; que le projet contribuera à rééquilibrer l'offre commerciale dans le sud de l'agglomération de Caen ; qu'il concourra, également, à renforcer le potentiel commercial de la ville de Caen au niveau régional et à limiter les déplacements de la clientèle vers les équipements de même nature présents à Rouen et à Rennes ; qu'il n'est pas établi par les études versées au dossier que, compte tenu de ce qu'il est susceptible d'attirer une clientèle nouvelle au-delà de la zone de chalandise, de ce qu'il est implanté à proximité d'une nouvelle zone d'habitat et de ce qu'il intègre un pôle de loisirs, il ne contribuerait pas à l'animation de la vie urbaine, ni qu'il serait de nature à porter atteinte à l'activité des commerces du centre-ville de Caen; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier que le flux supplémentaire de véhicules pourra être absorbé par les infrastructures routières existantes ; que certains aménagements pour lesquels les pétitionnaires ont obtenu l'accord de l'aménageur de la ZAC des Hauts de l'Orne ont été prévus pour faire face à l'accroissement du trafic en fin de semaine ; qu'ainsi, et à défaut d'autres éléments apportés sur ce point par les requérants, leur réalisation doit être regardée comme suffisamment certaine ; que, par suite, et alors qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la Commission nationale d'aménagement commercial aurait omis d'examiner le projet au regard des effets sur l'animation de la vie urbaine, celle-ci a pu estimer, sans erreur d'appréciation, que celui-ci ne compromet pas l'objectif d'aménagement du territoire ;
23. Considérant, en deuxième lieu, que, s'agissant des effets du projet sur le développement durable, il ressort des pièces du dossier que le site est desservi directement par un arrêt d'autobus sur une ligne assurant sa desserte tous les 15 minutes ; qu'il est, également, desservi par des cheminements piétonniers ; que la seule circonstance, qui n'est au demeurant pas établie par les pièces du dossier, qu'il ne serait pas desservi par une piste cyclable ne justifie pas, à elle seule, le refus de l'autorisation sollicitée ; que, par ailleurs, le site d'implantation bénéficiera d'un traitement végétal assurant son insertion paysagère et que des dispositifs de réduction des consommations énergétiques ont été mis en place ; que la réduction de 2200 m2 à 2000 m2 de panneaux photovoltaïques sur la toiture du centre commercial, opérée par le pétitionnaire entre le projet présenté en 2012 et celui soumis à la Commission nationale d'aménagement commercial en 2014, ne suffit pas à démontrer que le projet compromettrait l'objectif de développement durable alors, en outre, que ce type de panneaux n'est imposé par aucun texte ; que les requérants ne démontrent pas en quoi le projet en litige, qui prévoit, notamment, la plantation de plus de 800 arbres et la végétalisation des toitures méconnaîtrait les dispositions du code de commerce relatives à la qualité environnementale et à la prise en compte du développement durable dans la réalisation de projets d'aménagement commerciaux ; qu'enfin, s'il est soutenu que " l'impact du projet sur la biodiversité sera considérable et que les mesures prises pour y pallier seront insuffisantes ", ce moyen n'est pas assorti de précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien fondé ;
24. Considérant, en dernier lieu, qu'en se bornant à évoquer la faiblesse de la desserte du projet par les modes de transport doux, les conditions de circulation des véhicules de livraison, dont il n'est pas établi que le flux aurait été sous-évalué, qui emprunteront le même accès que les autres véhicules pour se rendre au centre commercial ou la circonstance que le dossier serait muet sur les mesures prises pour assurer la sécurité de la clientèle aux abords du lac artificiel créé par le projet et aux toitures terrasses, la société Cora ne démontre pas que le projet contreviendrait à l'objectif de protection des consommateurs ;
25. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Commission nationale d'aménagement commercial n'a pas fait, par la décision attaquée, une inexacte application des dispositions rappelées ci-dessus du code de commerce ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à en demander l'annulation ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
26. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Inter Ikea Centre Fleury, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que l'association Fédération des artisans et commerçants de Caen et autres, l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2, la société les Comptoirs de l'Univers et la société Cora demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de l'association Fédération des artisans et commerçants de Caen et autres, de l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2, de la société les Comptoirs de l'Univers et de la société Cora, le versement des sommes que la société Inter Ikea Centre Fleury demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;
DÉCIDE :
Article 1er : L'intervention de la Ville de Caen est admise.
Article 2 : Les requêtes de l'association Fédération des artisans et commerçants de Caen et autres, de l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2 et de la société les Comptoirs de l'Univers et de la société Cora sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions de la société Inter Ikea Centre Fleury tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Fédération des artisans et commerçants de Caen, à la société Ethnika, à M. C... G..., à Mme E...H..., à l'association des commerçants du centre commercial régional de Mondeville 2, à la société les Comptoirs de l'Univers, à la société Cora, à la société Inter Ikea Centre Fleury, à la Ville de Caen et à la Commission nationale d'aménagement commercial.
Délibéré après l'audience du 3 mai 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Perez, président de chambre,
- M. Millet, président-assesseur,
- Mme Buffet, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 24 mai 2016.
Le rapporteur,
C. BUFFET Le président,
A. PEREZ
Le greffier,
K. BOURON
La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'habitat durable, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 15NT00133,15NT00149,15NT00210