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21/04/2016 | FRANCE | N°15NT02693

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 21 avril 2016, 15NT02693


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... F...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les arrêtés du 8 avril 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant, d'une part, à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination et ordonnant, d'autre part, son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1501644 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. F.chez un ami et qu'il a effectué des démarches auprès de l'autorité préfectorale en vue de sa

régularisation, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a déclaré lors de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... F...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler les arrêtés du 8 avril 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant, d'une part, à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination et ordonnant, d'autre part, son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1501644 du 25 juin 2015, le tribunal administratif de Rennes a rejeté la demande de M. F.chez un ami et qu'il a effectué des démarches auprès de l'autorité préfectorale en vue de sa régularisation, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a déclaré lors de son audition du 8 avril 2015 par les services de polices être dépourvu de document d'identité et de domicile fixe et qu'il a fait l'objet, le 24 janvier 2012, d'une obligation de quitter le territoire français qu'il n'a pas exécutée

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 31 août 2015, M. F..., représentée par MeE..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 25 juin 2015 ;

2°) d'annuler les arrêtés du 8 avril 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Ille-et-Vilaine, à titre principal et sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour dans un délai de trois jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve que celui-ci renonce à percevoir la part contributive de l'État au titre de l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une omission à statuer en tant que les premiers juges n'ont pas répondu aux moyens tirés de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français était entachée d'une erreur manifeste d'appréciation et d'une erreur de fait, de ce que le préfet n'avait pas procédé à un examen complet de sa situation, de l'illégalité externe de la décision fixant le pays de destination ;

- les premiers juges ont statué ultra petita en écartant le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté de placement en rétention administrative qui n'avait pas été invoqué ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'une insuffisance de motivation et d'un défaut d'examen de sa situation ;

- cette décision est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- qu'en ne statuant pas préalablement sur sa demande de titre de séjour, le préfet a entaché sa décision d'une erreur de fait et d'une erreur de droit ;

- la décision portant refus de délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de dispositions du 3° d) et f) du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une insuffisance de motivation ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- en l'absence de perspectives raisonnables d'éloignement, l'arrêté ordonnant son placement en rétention administrative a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article L. 554-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée le 23 septembre au préfet d'Ille-et-Vilaine qui n'a pas produit de mémoire.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 23 juillet 2015.

Vu la décision du 15 mars 2016 du président de la cour désignant M. FrançoisLemoine en qualité de rapporteur public pour l'audience du 31 mars 2016.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coiffet,

- et les observations de MeB..., substituant MeE..., représentant M. F.chez un ami et qu'il a effectué des démarches auprès de l'autorité préfectorale en vue de sa régularisation, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé a déclaré lors de son audition du 8 avril 2015 par les services de polices être dépourvu de document d'identité et de domicile fixe et qu'il a fait l'objet, le 24 janvier 2012, d'une obligation de quitter le territoire français qu'il n'a pas exécutée

1. Considérant que M. F... relève appel du jugement du 25 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation des arrêtés du 8 avril 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français sans délai et fixant le pays de destination d'une part, et ordonnant son placement en rétention administrative d'autre part ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant, en premier lieu, que, contrairement à ce que soutient M. F..., les premiers juges, qui ont relevé que le préfet d'Ille-et-Vilaine avait fait état de l'absence de risque avéré en cas de retour en Angola et procédé à un examen individuel de sa situation, ont répondu aux moyens tirés de l'insuffisance de la motivation de la décision fixant le pays de destination et du défaut d'examen de sa situation ; que, toutefois, le tribunal n'a pas répondu aux moyens, qui n'étaient pas inopérants, invoqués par M. F... et tirés de ce que la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français était entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et d'une erreur de fait ; que le jugement doit, en raison de cette omission, être annulé en tant qu' il a rejeté les conclusions dirigées contre cette décision ;

3. Considérant, en second lieu, qu'en écartant le moyen tiré du défaut de motivation de l'arrêté ordonnant le placement de M. F... en rétention administrative, qui n'était pas soulevé, le tribunal a statué d'office sur un moyen qui n'était pas d'ordre public ; que, toutefois, ce moyen ayant été écarté, cette circonstance n'a pas eu pour effet d'entacher d'irrégularité sur ce point le jugement attaqué, qui rejette les conclusions dirigées contre cet arrêté ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions de la demande présentée par M. F... devant le tribunal administratif de Rennes dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français contenue dans l'arrêté du 8 avril 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine et de statuer, par l'effet dévolutif de l'appel, sur les autres conclusions présentées par l'intéressé ;

Sur la légalité des arrêtés contestés :

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français sans délai :

5. Considérant que la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français, qui vise notamment les dispositions du 1° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et fait état de l'entrée irrégulière de M. F... en France et des éléments saillants de son parcours et de sa situation administrative et personnelle, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est, dès lors, suffisamment motivée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet d'Ille-et-Vilaine n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé préalablement à l'édiction de cette décision ;

6. Considérant que si M. F..., entré irrégulièrement en France en 2010, soutient qu'il a appris le français et que son état de santé nécessite la poursuite d'un traitement médical en France, il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé, qui ne justifie ni d'une particulière intégration ni des problèmes de santé qu'il allègue, est célibataire, n'a pas de famille en France et n'est pas dépourvu de toute attache familiale en Angola où il a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans et où réside notamment son enfant mineur, né en 2005 ; que, compte tenu des circonstances de l'espèce et notamment des conditions d'entrée et de séjour en France de M. F..., qui a fait l'objet d'une précédente mesure d'éloignement en 2012, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, en prenant cette décision, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'il n'a pas davantage entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant ;

7. Considérant que si M. F... soutient qu'il a manifesté son intention de solliciter la régularisation de sa situation, il n'établit pas, en se prévalant d'échanges de courriers électroniques au mois de mars 2015 avec les services de la préfecture, qu'il aurait formellement présenté une demande de titre de séjour ; que, par suite, les moyens tirés de ce qu'en n'examinant pas la demande de titre de séjour de l'intéressé le préfet d'Ille-et-Vilaine a entaché sa décision portant obligation de quitter le territoire français d'une erreur de fait et d'une erreur de droit doivent être écartés ;

8. Considérant qu'aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) - 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants :(...) - d) Si l'étranger s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; (...) - f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2. (...) " ;

9. Considérant que si M. F... soutient qu'il est domicilié... ; qu'ainsi, en refusant d'accorder un délai de départ volontaire à l'intéressé, le préfet d'Ille-et-Vilaine n'a pas fait une inexacte application des dispositions précitées du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant que la décision contestée fixant le pays de destination, qui vise notamment les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et indique que M. F... n'établit pas être personnellement menacé en cas de retour en cas de retour de son pays d'origine, comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'elle est, dès lors, suffisamment motivée ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision n'aurait pas été précédée d'un examen particulier de la situation de l'intéressé ;

11. Considérant que si M. F... soutient qu'il a fui l'Angola en 2010, après s'être évadé de la prison dans laquelle il avait été incarcéré en raison de son appartenance au mouvement politique du Flec, et qu'il a fait l'objet en 2011 d'une convocation dont il ne précise ni la nature ni l'objet, l'intéressé, dont les demandes d'asile et de réexamen ont été rejetées par les décisions du directeur de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides des 17 mai 2011, 6 avril 2012 et 16 juillet 2013 et par les décisions de la Cour nationale du droit d'asile des 21 novembre 2011 et 12 novembre 2014, ne produit, à l'appui de ses allégations, aucun élément de nature à établir qu'il serait personnellement exposé à des risques graves et actuels en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination aurait été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

En ce qui concerne la décision de placement en rétention :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) - 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé (...) " ;

13. Considérant qu'il est constant que M. F... fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français sans délai en date du 8 avril 2015 ; qu'il entrait ainsi dans le cas prévu au 6° de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettait au préfet de le placer en rétention administrative ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. F... n'est fondé ni à demander l'annulation de la décision du 8 avril 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine l'obligeant à quitter le territoire français, ni à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses conclusions dirigées contre les décisions du même jour refusant de lui accorder un délai de départ volontaire et fixant le pays de destination et la décision du 8 avril 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine ordonnant son placement en rétention administrative ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

15. Considérant que le présent arrêt, qui rejette la demande de M. F... et le surplus de ses conclusions d'appel, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction présentées par l'intéressé ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. F... et non compris dans les dépens ;

D E C I D E

Article 1er : Le jugement n° 1501644 du 25 juin 2015 du tribunal administratif de Rennes est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. F... dirigées contre la décision du 8 avril 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine portant obligation de quitter le territoire français.

Article 2 : La demande présentée par M. F... devant le tribunal administratif de Rennes tendant à l'annulation de la décision du 8 avril 2015 du préfet d'Ille-et-Vilaine portant obligation de quitter le territoire français et le surplus de ses conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet d'Ille-et-Vilaine.

Délibéré après l'audience du 31 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président,

- M. Coiffet, président-assesseur,

- Mme Gélard, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 avril 2016.

Le rapporteur,

O. Coiffet

Le président,

I. Perrot

Le greffier,

M. Laurent

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT026932


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT02693
Date de la décision : 21/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: M. Olivier COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMOINE
Avocat(s) : LE STRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 03/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-04-21;15nt02693 ?
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