La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/04/2016 | FRANCE | N°14NT01076

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 19 avril 2016, 14NT01076


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...E...et la SCI Veb ont demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de Mesquer à leur verser la somme de 271 108,74 euros, en réparation des préjudices résultant de l'illégalité fautive entachant le plan d'occupation des sols communal.

Par un jugement n° 1105203 du 21 février 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée les 23 avril 2014, Mme E...et la SCI Veb, représentées pa

r MeD..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 février 2014 du tribunal admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...E...et la SCI Veb ont demandé au tribunal administratif de Nantes de condamner la commune de Mesquer à leur verser la somme de 271 108,74 euros, en réparation des préjudices résultant de l'illégalité fautive entachant le plan d'occupation des sols communal.

Par un jugement n° 1105203 du 21 février 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée les 23 avril 2014, Mme E...et la SCI Veb, représentées par MeD..., demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 21 février 2014 du tribunal administratif de Nantes ;

2°) de condamner la commune de Mesquer à leur verser la somme de 271 108,74 euros

assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 février 2011 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Mesquer une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'illégalité du classement, par le document d'urbanisme communal, de leur terrain dans une zone constructible est de nature à engager la responsabilité de la commune à leur égard ; par l'arrêt du 30 juin 2006 de la cour, qui confirme le jugement du 16 juin 2005 du tribunal administratif de Nantes, le juge a affirmé le caractère illégal du classement, par le plan d'occupation des sols, de leur parcelle en zone UB ;

-contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Nantes, leur créance n'était pas prescrite ; le 24 février 2006, soit antérieurement à l'arrêt du 30 juin 2006 par lequel la cour a confirmé le jugement du 16 juin 2005 du tribunal administratif de Nantes annulant le permis de construire du 16 mai 2002 délivré par le maire de Mesquer, ils ont obtenu un nouveau permis de construire sur le même terrain ; la jurisprudence rendue à propos de l'application de la loi littoral a évolué ; ils doivent donc être regardés comme ayant été maintenus dans une incertitude légitime quant à l'existence de leur créance ; le délai de prescription quadriennale n'a commencé à courir qu'à compter du 1er janvier 2011 ;

- elles justifient de la réalité des préjudices qu'ils invoquent ; ils demandent réparation des préjudices correspondant à la perte de valeur vénale de leur terrain, aux frais de notaire et d'agence liés à l'acquisition de ce terrain, aux frais d'architecte, de géomètre, d'huissier, de raccordement au réseau d'assainissement, aux frais postaux, engagés en vain, et aux frais d'avocat exposés dans le cadre des différentes procédures judiciaires qui ont été diligentées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 septembre 2014, la commune de Mesquer conclut, à titre principal, au rejet de la requête et à la condamnation de Mme E... et la SCI Veb à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à titre subsidiaire, à la condamnation de la compagnie d'assurance Groupama Loire Bretagne et la SMACL à la garantir de toute condamnation éventuelle, et à la condamnation de ces dernières à lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Elle soutient que les moyens invoqués par Mme E...et la SCI Veb ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Vu l'ordonnance du 15 septembre 2015 fixant la clôture d'instruction au 30 septembre 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique:

- le rapport de Mme Buffet, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;

- les observations de MeC..., substituant MeD..., représentant Mme E...et la SCI Veb et les observations de MeG..., substituant MeB..., représentant la commune de Mesquer.

1. Considérant que Mme E... et la SCI Veb relèvent appel du jugement du 21 février 2014 par lequel le tribunal administratif a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la commune de Mesquer à leur verser la somme de 271 108,74 euros, en réparation des préjudices résultant l'illégalité fautive entachant le plan d'occupation des sols communal ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 relative à la prescription des créances sur l'Etat, les départements, les communes et les établissements publics, alors applicable : " Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis./ Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public " ; (qu'en vertu de l'article 2 de cette loi : " La prescription est interrompue par (... ) / Tout recours formé devant une juridiction relatif au fait générateur, à l'existence, au montant ou au paiement de la créance, quel que soit l'auteur du recours et même si la juridiction saisie est incompétente pour en connaître et si l 'administration qui aura finalement la charge du règlement n'est pas partie à l'instance./ Un nouveau délai de quatre ans court à compter du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle a eu lieu l'interruption. Toutefois, si l'interruption résulte d'un recours juridictionnel, le nouveau délai court à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle la décision est passée en force de chose jugée ") ; enfin, qu'aux termes de l'article 3 de la même loi : " La prescription ne court ni contre le créancier qui ne peut agir, soit par lui-même, soit par l'intermédiaire de son représentant légal, soit pour une cause de force majeure, ni contre celui qui peut être légitimement regardé comme ignorant l'existence de sa créance ou de la créance de celui qu'il représente légalement " ;

3. Considérant que, par un arrêté du 5 septembre 2000, le maire de Mesquer a accordé à la SCI Veb, dont M. et Mme E...sont les gérants, un permis de construire une maison d'habitation sur la parcelle cadastrée à la section AB sous le numéro 106, classée en zone constructible UB par le plan d'occupation des sols de la commune ; que, par jugement du 4 avril 2001, le tribunal administratif de Nantes a ordonné le sursis à exécution de ce permis de construire ; que Mme E...a déposé une nouvelle demande de permis de construire pour le même projet sur la même parcelle ; que le maire a accordé l'autorisation sollicitée le 16 mai 2002 ; que ce permis de construire a été annulé par un jugement du 16 juin 2005 du tribunal administratif de Nantes, confirmé par un arrêt du 30 juin 2006 de la cour, au motif qu'il avait été délivré en méconnaissance des dispositions du I et du II du code de l'urbanisme ; que les requérantes ont déposé une nouvelle demande de permis de construire sur cette parcelle pour le même projet ; qu'un permis de construire tacite a été délivré le 24 février 2006 ; que ce permis a été annulé par un jugement du 20 janvier 2009 du tribunal administratif de Nantes, confirmé par un arrêt du 2 février 2010 de la cour ;

4. Considérant que Mme E... et la SCI Veb se bornent à soutenir, à l'appui de leur requête, que, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Nantes, le délai de prescription n'avait pas commencé à courir à compter du 1er janvier 2007 dès lors qu'elles pouvaient légitimement être regardées comme ignorant, à cette date, l'existence de la créance qu'elles détiennent à raison de " l'illégalité commise par la commune dans le zonage retenu " ayant conduit à la délivrance des permis de construire ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit plus haut, par le jugement du 16 juin 2005, confirmé par l'arrêt du 30 juin 2006 de la cour, le tribunal administratif de Nantes a annulé le permis de construire du 16 mai 2002 au motif, notamment, que leur terrain, situé à 150 mètres du rivage, qui jouxte des parcelles non bâties et est contigu, au sud-est, d'un vaste espace naturel constitué de marais salants et classé au plan d'occupation des sols en zone " ND L. 146 ", n'était pas en continuité avec une agglomération et un village existant de sorte qu'étaient méconnues les dispositions du I de l'article L.146-4 du code de l'urbanisme, alors même que le plan d'occupation des sols communal avait classé ce terrain en zone constructible ; que les intéressées doivent, ainsi, être regardées comme ayant eu connaissance, au plus tard à la date de notification qui leur a été faite de l'arrêt du 30 juin 2006 de la cour, du caractère inconstructible de leur parcelle au regard des prescriptions de la loi littoral et de l'illégalité, sur ce point, du classement de cette parcelle en zone UB par le plan d'occupation des sols ; que si elles font valoir qu'elle ont obtenu, le 24 février 2006, le permis de construire qu'elles avaient de nouveau sollicité, pour le même projet, cette circonstance n'est pas de nature à les faire légitimement regarder comme ignorant, à la date de notification de l'arrêt de la cour, l'existence de leur créance, au sens des dispositions de l'article 3 de la loi du 31 décembre 1968 susvisée, dès lors qu'elles avaient, à cette date, connaissance de l'existence, de l'origine et de l'étendue des préjudices résultant de ce classement illégal, alors, au surplus, que les requérantes sont des professionnels de l'immobilier ; que, par suite, le délai de la prescription quadriennale a commencé à courir le 1er janvier 2007 ; que, dès lors, la prescription quadriennale de la créance de Mme E... et la SCI Veb était acquise à la date du 17 février 2011 de leur réclamation préalable ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme E... et la SCI Veb ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;

6. Considérant, en tout état de cause, qu'en l'absence de condamnation prononcée à l'encontre de la commune de Mesquer, ses conclusions aux fins d'appel en garantie dirigées contre la compagnie d'assurance Groupama et la SMACL sont sans objet et ne peuvent, par suite, qu'être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Mesquer, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que Mme E... et la SCI Veb demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de Mme E... et la SCI Veb, le versement de la somme que la commune de Mesquer demande au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme E... et de la SCI Veb est rejetée.

Article 2 : Les conclusions d'appel en garantie et les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées par la commune de Mesquer sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...E..., à la SCI Veb et à la commune de Mesquer.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2016 à laquelle siégeaient :

- M. Millet, président,

- M. François, premier conseiller,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 avril 2016.

Le rapporteur,

C. BUFFET Le président,

J.F. MILLET

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'habitat durable, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

1

N°14NT01076 2

1


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01076
Date de la décision : 19/04/2016
Type d'affaire : Administrative

Composition du Tribunal
Président : M. MILLET
Rapporteur ?: Mme Catherine BUFFET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : LEXCAP RENNES LAHALLE - DERVILLERS et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/05/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-04-19;14nt01076 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award