Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler la décision du 13 juin 2013 par laquelle le recteur de l'académie de Caen a refusé de lui accorder un congé de longue maladie.
Par un jugement n° 1301377 du 30 janvier 2014, le tribunal administratif a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 21 juillet 2014 et le 25 février 2015, MmeC..., représentée par Me Giraudeau, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Caen du 30 janvier 2014 ;
2°) à titre principal, d'annuler la décision du 13 juin 2013 par laquelle le recteur de l'académie de Caen a refusé de lui accorder un congé de longue maladie ;
3°) à titre subsidiaire, d'ordonner une expertise médicale ;
4°) d'enjoindre au recteur de l'académie de Caen de lui accorder un congé de longue maladie à compter du 19 octobre 2012 ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision contestée est entachée d'erreur d'appréciation dès lors que le certificat médical d'un psychiatre concluait à une pathologie mentale grave justifiant l'octroi d'un congé de longue maladie ; le second médecin s'est borné à examiner sa situation sur le seul terrain rhumatologique alors que sa demande concernait l'ensemble de sa pathologie ;
- le tribunal a dénaturé les faits en s'appuyant sur les précédentes expertises et demandes de congés ; les comptes-rendus opératoires produits établissent le caractère invalidant de sa pathologie rhumatologique ;
- une expertise médicale complémentaire est justifiée.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2015, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche demande à la cour de rejeter la requête ;
Il soutient qu'aucun des moyens invoqués par Mme C...n'est fondé.
Par une ordonnance du 5 novembre 2015 la clôture d'instruction a été fixée au 21 décembre 2015 et par une ordonnance du 23 décembre 2015 la date de la clôture de l'instruction a été reportée au 23 janvier 2016 à 12 heures.
Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes du 20 mai 2014.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;
- le décret n° 78-252 du 8 mars 1978 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Auger, premier conseiller ;
- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.
1. Considérant que MmeC..., professeure certifiée d'espagnol affectée en établissement privé sous contrat, a été admise à la retraite sur sa demande à compter du 1er septembre 2013 ; qu'elle avait sollicité en janvier 2009 l'octroi d'un congé de longue maladie pour état dépressif qui a été refusé par décision du 6 juillet 2009 du recteur de l'académie de Caen ; qu'elle a déposé le 20 juin 2012 une nouvelle demande de congé de longue maladie ; que le comité médical départemental a émis le 9 octobre 2012 un avis défavorable ; qu'elle a sollicité, par courrier du 17 octobre 2012, un réexamen devant le comité médical supérieur, lequel a confirmé le 17 avril 2013 l'avis initial ; que le recteur de l'académie de Caen, par décision du 13 juin 2013, l'a placé en congé ordinaire de maladie du 19 octobre 2011 au 18 octobre 2012 et a refusé de lui accorder le congé de longue maladie sollicité ; que Mme C...relève appel du jugement du 30 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de cette dernière décision ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 du décret du 8 mars 1978 portant règles générales déterminant les conditions de service de certains maîtres contractuels ou agréés des établissements d'enseignement privé sous contrat et les mesures sociales applicables à ces personnels : " Les maîtres contractuels ou agréés, mentionnés à l'article 1 er du présent décret, bénéficient, dans les mêmes conditions que les maîtres titulaires de l'enseignement public, du régime des congés de toute nature et d'autorisation d'absence, des avantages accordés en cas de maladie professionnelle ou d'accident de service (...) " ; qu'aux termes de l'article 34 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) 3° A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans les cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaire un traitement et des soins prolongés et qu'elle présente un caractère invalidant et de gravité confirmée. Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. Les dispositions du deuxième alinéa du 2° du présent article sont applicables au congé de longue maladie. (...) " ;
3. Considérant qu'il ressort du dossier, notamment du certificat médical du 26 juin 2012 de son médecin traitant adressé au comité médical, que la demande d'octroi d'un congé de longue maladie était motivée par un état de santé dégradé associant des douleurs aux épaules avec un syndrome dépressif dans un contexte d'antécédents cancéreux ; que le comité médical départemental a émis un avis défavorable le 9 octobre 2012 au vu du rapport du 17 septembre 2012 d'un médecin généraliste agréé se prononçant essentiellement sur les scapulalgies de MmeC... ; que, suite à sa demande de réexamen devant le comité médical supérieur, deux expertises médicales ont été diligentées à la demande de l'administration ; que le rapport du 29 novembre 2012 d'un psychiatre agréé a conclu, après un examen précis des antécédents et des symptômes de la patiente, à la présence d'une névrose dépressive sur une personnalité pathologique associée à des atteintes somatiques qu'il a estimé invalidantes et a indiqué que l'intéressée, se trouvant dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, pouvait bénéficier d'un congé de longue maladie au titre des maladies mentales ; qu'en revanche celui du 15 décembre 2012 d'un médecin généraliste agréé ne proposait pas l'octroi d'un congé de longue maladie au motif que, si la pathologie somatique était indéniable, il estimait difficile de se prononcer sur son caractère invalidant ; qu'il ressort ainsi des différentes pièces médicales du dossier que l'état de santé de Mme C...relève d'un polypathologie complexe associant un syndrome dépressif sévère avec un état algique ; que le certificat de son médecin traitant et le rapport du psychiatre sont de nature à infirmer les avis des deux médecins généralistes agréés qui ne se sont prononcés que sur les seules affections somatiques, sans d'ailleurs remettre expressément en cause le caractère invalidant de celles-ci ; que dans ces conditions, en ne prenant pas en compte la globalité de l'état de santé de Mme C...alors surtout qu'une expertise psychiatrique avait été diligentée à la demande de l'administration, le recteur de l'académie de Caen a commis une erreur d'appréciation en refusant, par sa décision du 13 juin 2013, d'accorder à Mme C...le congé de longue maladie qu'elle sollicitait ;
4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise médicale, que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
5. Considérant que le présent arrêt, qui prononce l'annulation de la décision du 13 juin 2013 du recteur de l'académie de Caen, en constatant que l'état de santé de la requérante justifiait l'octroi d'un congé de longue maladie, implique nécessairement qu'il soit enjoint à l'autorité administrative d'accorder à Mme C...le congé de longue maladie qu'elle sollicitait ;
Sur les conclusions tendant à l'application des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que Mme C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Giraudeau, avocat de MmeC..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de ce dernier le versement à cet avocat d'une somme de 1 500 euros ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du 30 janvier 2014 du tribunal administratif de Caen et la décision du recteur de l'académie de Caen du 13 juin 2013 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche, d'accorder à MmeC..., dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, le congé de longue maladie qu'elle sollicitait.
Article 3 : L'Etat versera à Me Giraudeau, avocat de MmeC..., une somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que cet avocat renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...C...et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Délibéré après l'audience du 15 mars 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- M. Auger, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 5 avril 2016.
Le rapporteur,
P. AUGERLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. A...
La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT02018