Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme B...ont demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008.
Par un jugement n° 1210613 du 22 mai 2014, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 juillet 2014, M. et MmeB..., représentés par MeC..., demandent à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nantes du 22 mai 2014 ;
2°) de prononcer la décharge ou, à défaut, la réduction des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- M. B...n'a pas appréhendé la somme de 68 843 euros portée au crédit du compte courant ouvert à son nom dans la société à responsabilité limitée (SARL) Turquoise, cette somme ayant été utilisée pour payer des charges dues par une autre société et inscrite par erreur sur ce compte ;
- l'application de la majoration pour manquement délibéré n'est pas fondée ;
- à titre subsidiaire, il ne détient que 55% du capital social de la SARL Turquoise et n'a donc pu bénéficier de revenus distribués que dans cette proportion ;
- le jugement est entaché d'une contradiction entre l'un de ses motifs et son dispositif.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 janvier 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Aubert,
- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.
1. Considérant que M. et Mme B...relèvent appel du jugement du 22 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 en raison de l'intégration, dans leurs bases d'imposition, de revenus distribués par la société à responsabilité limitée (SARL) Turquoise à M.B..., associé et gérant de cette société ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant que les suppléments d'imposition contestés résultent de l'imposition, entre les mains de M. et MmeB..., de l'intégralité des revenus distribués par la SARL Turquoise correspondant au montant des sommes portées au crédit du compte courant ouvert au nom de M. B...dans cette société ; qu'après avoir mentionné au point 5 de son jugement que " M. B...devait (...) être réputé avoir appréhendé les bénéfices dissimulés (...) à concurrence de sa participation dans le capital de la société ", soit 55% des parts, le tribunal a rejeté en totalité la demande de M. et MmeB... ; que le jugement est ainsi entaché d'une contradiction entre l'un de ses motifs et son dispositif ; que cette irrégularité est de nature à entraîner son annulation ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de statuer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande présentée par M. et Mme B...devant le tribunal administratif de Nantes ;
Sur le bien-fondé de l'imposition :
4. Considérant qu'aux termes 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) " ; que les sommes inscrites au crédit d'un compte courant d'associé doivent, sauf preuve contraire apportée par l'associé titulaire du compte, être regardées comme mises à disposition dès cette inscription et ont le caractère de revenus imposables à l'impôt sur le revenu et aux contributions sociales dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;
5. Considérant qu'ayant constaté que le compte courant d'associé ouvert dans les comptes de la SARL Turquoise au nom de M.B..., son gérant et principal associé, a été crédité, au cours de l'exercice clos le 31 décembre 2008, de la somme totale de 68 843 euros, le vérificateur a estimé que ces versements n'ont pas eu pour contrepartie, ainsi que le soutiennent les requérants, d'une part, le paiement à l'URSSAF de la somme de 26 775,70 euros due à cet organisme par la société Int. Ingenierie, lequel figure au débit de ce compte et, d'autre part, le remboursement par M. B...de la somme totale de 45 000 euros de prêts contractés auprès de tiers par cette société ;
6. Considérant, d'une part, que les requérants établissent par la production d'une copie du chèque d'un montant de 26 775,70 euros et d'une attestation établie le 14 juin 2010 par le comptable de l'URSSAF de Paris-région parisienne que la SARL Turquoise a effectué ce paiement à la place de la société Int. Ingénierie le 4 décembre 2012 ; que s'ils l'expliquent par la reprise, à compter du 1er octobre 2008, de l'activité de la société Int. Ingénierie par la SARL Turquoise, ils n'apportent aucun élément de nature à en apporter la preuve alors que ce fait est contesté en défense ; que M. B...doit dès lors être regardé comme ayant eu à sa disposition la somme de 26 775,70 euros portée au crédit de son compte courant d'associé ;
7. Considérant, d'autre part, que les éléments produits par M. et Mme B...n'établissent pas l'existence de deux prêts contractés par la société Int. Ingénierie auprès des deux personnes auxquelles la SARL Turquoise a respectivement versé les sommes de 20 000 euros et 25 000 euros ; que M. B...doit dès lors être regardé comme ayant eu à sa disposition ces sommes portées au crédit de son compte courant d'associé qu'il soutient avoir été utilisées pour procéder au remboursement de ces deux prêts ;
8. Considérant que l'administration fait valoir que l'imposition, entre les mains de M. et MmeB..., de l'intégralité des revenus distribués par la SARL Turquoise est fondée sur la qualité de maître de l'affaire de M.B... ; que cette qualité résulte, ainsi que le fait valoir l'administration, du fait que M. B...est le gérant et le principal associé de la société, qu'il dispose seul de la signature bancaire et qu'il a été, au cours du contrôle fiscal dont elle a fait l'objet, le seul interlocuteur du service ; qu'il est ainsi réputé avoir appréhendé la totalité des sommes distribuées et n'apporte pas la preuve contraire ; qu'il n'est dès lors pas fondé à contester, à titre subsidiaire, l'imposition de ces sommes entre ses mains au-delà de sa part dans le capital social, fixée à 55% ; qu'au surplus, les sommes ont toutes été portées au crédit du compte courant d'associé de M.B... ;
Sur la majoration de 40% pour manquement délibéré :
9. Considérant que, pour appliquer la majoration de 40% prévue par l'article 1729 du code général des impôts, l'administration s'est fondée à bon droit sur l'appréhension par M. B...des sommes portées au crédit de son compte courant d'associé dans le but d'éluder l'impôt et sur le montant de l'impôt ainsi éludé ;
10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la demande présentée par M. et Mme B...devant le tribunal administratif de Nantes doit être rejetée ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
DECIDE :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 22 mai 2014 est annulé.
Article 2 : La demande présentée par M. et Mme B...devant le tribunal administratif de Nantes et le surplus de leur requête sont rejetés.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 10 mars 2016, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 31 mars 2016.
Le rapporteur,
S. AubertLe président,
F. Bataille
Le greffier,
E. Haubois
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14NT01932 3
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