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29/03/2016 | FRANCE | N°15NT01731

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 29 mars 2016, 15NT01731


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 8 novembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1204116 du 11 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 juin 2015, M. A...C..., représenté par MeB..

., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 février 2015 ;

2°) d'annuler pour exc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...C...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 8 novembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1204116 du 11 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande d'annulation.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 4 juin 2015, M. A...C..., représenté par MeB..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 11 février 2015 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 8 novembre 2011 ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de faire droit à sa demande de naturalisation, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision litigieuse est entachée d'une erreur de fait ; il travaille sans discontinuité depuis le 21 juin 2010 ;

- la décision contestée a été prise en méconnaissance de l'article 3 de la Constitution et du principe général du droit prohibant les discriminations non fondées de manière objective, comme celle fondée sur la fortune ;

- en ajournant sa demande le ministre a commis une erreur manifeste d'appréciation ; il a fixé ses intérêts matériels et moraux en France ; il a obtenu le droit d'asile et souhaite rendre à la France ce qu'elle lui a donné ; sa situation est stable puisque ses contrats de travail à durée déterminée sont systématiquement renouvelés et son poste est pérenne ;

- par sa circulaire du 16 octobre 2012, le ministre de l'intérieur a demandé que les efforts des travailleurs soient récompensés alors même qu'ils seraient employés dans le cadre de contrats à durée déterminée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juin 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de ce que sa décision priverait le requérant du droit de vote reconnu par l'article 3 de la Constitution aux nationaux est inopérant ;

- la circonstance que l'intéressé satisfait aux conditions de recevabilité de sa demande de naturalisation est inopérante ;

- la circulaire du 16 octobre 2012 ne présentant aucun caractère réglementaire, elle ne peut être utilement invoquée ;

- le requérant ne peut se prévaloir utilement de contrats de travail conclus postérieurement à la décision contestée ;

- pour le surplus, les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. A...C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle au taux de 15% par une décision du 22 avril 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pérez, président-rapporteur.

1. Considérant que M. A...C..., ressortissant soudanais, relève appel du jugement du 11 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 8 novembre 2011 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ajournant à deux ans sa demande de naturalisation;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'insertion professionnelle du postulant ainsi que le niveau et la stabilité de ses ressources ;

3. Considérant que, par la décision contestée du 8 novembre 2011, le ministre a ajourné à deux ans la demande de naturalisation présentée par M. A...C..., au motif que l'intéressé ne disposait pas d'une autonomie matérielle de manière pérenne ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée, M. A...C...était engagé depuis septembre 2010 en contrat d'accompagnement dans l'emploi, renouvelé pour une période de douze mois supplémentaires du 1er septembre 2011 au 31 août 2012 ; qu'il avait précédemment été employé, entre le 21 juin 2010 et le 31 octobre 2010, sous contrats de travail à durée déterminée à temps partiel, dans le cadre desquels le volume horaire de travail et la rémunération variaient chaque mois ; que, dans ces conditions, M. A...C...ne pouvait être regardé comme justifiant d'une activité professionnelle stable pour subvenir durablement à ses besoins ; qu'il ne saurait, en tout état de cause, utilement se prévaloir de la circulaire du 16 octobre 2012, postérieure à la décision contestée et dépourvue de caractère réglementaire ; que les contrats de travail à durée déterminée qu'il a conclus en qualité d'agent de service hospitalier qualifié sont postérieurs à la date de la décision en litige et, par suite, sans incidence sur sa légalité ; qu'il suit de là qu'en ajournant à deux ans, pour ce motif, la demande de naturalisation présentée par l'intéressé, le ministre, compte tenu du large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder ou de refuser la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, n'a entaché sa décision, ni d'une erreur de fait, ni d'une erreur manifeste d'appréciation ;

5. Considérant, en deuxième lieu, que la décision contestée n'a pas pour objet de priver M. A...C...du droit de vote reconnu par l'article 3 de la Constitution aux nationaux ; qu'ainsi le moyen tiré de ce que la décision contestée le priverait du droit de vote reconnu par la Constitution est inopérant ;

6. Considérant, en troisième lieu, que l'accès à la nationalité française ne constitue pas un droit pour l'étranger qui la sollicite ; que le refus d'accorder la naturalisation à un étranger au motif que son insertion professionnelle est insuffisante ne saurait dès lors constituer une discrimination dans l'accès à un droit fondamental ; qu'il suit de là que M. A...C...ne peut utilement invoquer une prétendue discrimination fondée notamment sur la fortune ;

7. Considérant, en dernier lieu, que M. A...C...ne saurait utilement soutenir qu'il satisfait aux conditions de recevabilité d'une demande de naturalisation énoncées par le code civil, dès lors que la décision du 8 novembre 2011 est fondée sur l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 ; que ce dernier ne saurait davantage utilement se prévaloir, eu égard au motif qui fonde la décision litigieuse, de ce qu'il a obtenu le statut de réfugié ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que les conclusions à fin d'injonction et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne sauraient, par suite, être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par M. A...C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président assesseur,

-Mme Buffet, premier-conseiller.

Lu en audience publique, le 29 mars 2016.

Le président assesseur,

JF. MILLET

Le président-rapporteur,

A. PEREZ

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT01731 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01731
Date de la décision : 29/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Alain PEREZ
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : SELARL MARY et INQUIMBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 09/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-03-29;15nt01731 ?
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