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01/03/2016 | FRANCE | N°14NT00841

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 01 mars 2016, 14NT00841


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Caen :

- à titre principal, de condamner la commune d'Agneaux à lui verser la somme de 192 900 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable du 27 décembre 2012, en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité fautive de la décision du 8 juillet 2011 par laquelle le maire de la commune n'a pas renouvelé son contrat de directeur de l'école de musique communale ;

- à titre sub

sidiaire, de condamner la commune à lui verser la somme de 201 052,94 euros, assortie des int...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... a demandé au tribunal administratif de Caen :

- à titre principal, de condamner la commune d'Agneaux à lui verser la somme de 192 900 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable du 27 décembre 2012, en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité fautive de la décision du 8 juillet 2011 par laquelle le maire de la commune n'a pas renouvelé son contrat de directeur de l'école de musique communale ;

- à titre subsidiaire, de condamner la commune à lui verser la somme de 201 052,94 euros, assortie des intérêts au taux légal dans les mêmes conditions, en paiement des heures supplémentaires effectuées en qualité de professeur territorial d'enseignement artistique et en réparation de son préjudice moral.

Par un jugement n° 1301269 du 28 janvier 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 1er avril 2014 et 9 novembre 2015, M. C..., représenté par MeE..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 28 janvier 2014 ;

2°) de condamner la commune d'Agneaux, à titre principal, à lui verser la somme de 192 900 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de sa réclamation préalable du 27 décembre 2012, en réparation des préjudices subis du fait de l'irrégularité de son recrutement dans le grade de catégorie B d'assistant territorial spécialisé d'enseignement artistique ne correspondant pas à la nature de ses fonctions de directeur de l'école municipale de musique qui relevaient du niveau de la catégorie A, à titre subsidiaire, à lui verser une somme de 203 676,20 euros au titre des heures supplémentaires effectuées du 1er janvier 2007 au 1er septembre 2011 lui restant dues, ou à tout le moins la somme de 105 222 si la cour estime qu'il a effectué ces heures supplémentaires en qualité d'assistant d'enseignement artistique et non en tant que professeur territorial ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Agneaux une somme de 2 500 euros par application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne la responsabilité de la commune :

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé qu'il n'exerçait pas des fonctions de catégorie A, alors que les fonctions de direction qui lui sont confiées depuis son engagement contractuel en 2008, au titre de l'article 3 5ème alinéa de la loi du 26 janvier 1984, relèvent du cadre d'emploi des professeurs territoriaux d'enseignement artistique, régi par le décret n°91-857 du 2 septembre 1991 portant statut particulier, et en vertu duquel elles ressortissent de la catégorie A ;

- dès lors qu'il occupe depuis 1990 un emploi permanent, le contrat conclu en 2008 l'a été sur le fondement de l'article 3 de la loi du 26 janvier 1984 ; la décision de non-renouvellement de son contrat, en date du 8 juillet 2011, est par suite intervenue en méconnaissance du 4ème alinéa de l'article 38 du décret n°88-145 du 15 février 1988 prévoyant la notification de l'intention de non-renouvellement au début du 3ème mois précédant le terme, et un entretien préalable ;

- s'agissant en outre d'une décision prise en considération de la personne, M. C...aurait dû être mis à même de consulter son dossier, et la décision aurait dû comporter une motivation en fait et en droit ;

- cette décision constitue en réalité un licenciement, intervenu en méconnaissance des dispositions des articles 40, 42 et 43 du décret n°88-145 du 15 février 1988, il aurait dû bénéficier d'un préavis et d'une indemnité de licenciement ;

- les motifs invoqués, dont la matérialité n'est aucunement établie, ne sont pas de nature à justifier son licenciement, alors qu'il a donné toute satisfaction en qualité de directeur de l'école municipale de musique pendant 20 ans ;

- la rupture de son contrat est motivée par des considérations étrangères à l'intérêt et au bon fonctionnement du service ;

- l'illégalité de la décision du 8 juillet 2011 constitue une faute entraînant la responsabilité de la commune d'Agneaux ;

- prenant acte de l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes n°12NT02217, rendu le 20 juin 2014, M. C...renonce à fonder sa demande sur l'illégalité fautive de la décision du 8 juillet 2011, mais substitue à ce fondement la faute commise par la commune d'Agneaux à l'avoir recruté sur un emploi de catégorie B, nonobstant l'exercice de fonctions de catégorie A, ce qui a eu pour effet de le priver du bénéfice des dispositions sur la requalification du contrat en contrat à durée indéterminée ;

En ce qui concerne le préjudice à réparer :

Sur ses demandes présentées à titre principal :

- son préjudice moral lié au non respect de la procédure de licenciement et au défaut de versement de l'indemnité de licenciement sera évalué à la somme de 5 000 euros ;

- sa dernière rémunération étant de 3 200 euros, il a droit à une indemnité de licenciement de 27 900 euros ;

- compte tenu de son âge et de la difficulté à trouver un poste similaire dans une autre collectivité, son préjudice économique sera réparé par l'attribution d'une indemnité de 150 000 euros ;

- la rupture irrégulière de son contrat lui a causé un préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence dont il sera fait une juste réparation à hauteur de 10 000 euros ;

Sur ses demandes présentées à titre subsidiaire :

- son contrat stipulait 4 heures de gestion, portées à 8 heures par avenant du 10 décembre 1992 ; toutes les autres heures travaillées par M.C..., employé à temps plein, correspondaient nécessairement à des heures d'enseignement, et constituaient des heures supplémentaires en tant qu'elles excédaient les 16 heures hebdomadaires prévues par l'article 2 du décret n°91-857 du 2 septembre 1991 ; ces heures supplémentaires devront être indemnisées à hauteur d'une somme de 131 052,94 euros ; sa demande sur ce point, tient compte de la prescription quadriennale ;

- son préjudice moral sera réparé à hauteur de 70 000 euros.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 22 septembre 2014 et 2 décembre 2015, la commune d'Agneaux, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de M. C...le versement d'une somme de 2 000 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la demande nouvelle, formée en cours d'instance et présentée pour la première fois en cause d'appel, est irrecevable et qu'aucun des moyens soulevés par M. C... n'est, en tout état de cause, fondé.

Par ordonnance du 9 octobre 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 9 novembre 2015, en application des dispositions de l'article R. 631-1 du code de justice administrative, puis reportée au 3 janvier 2016 par ordonnance du 3 novembre 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée ;

- la loi n° 2005-843 du 26 juillet 2005 ;

- le décret n° 88-145 du 15 février 1988 modifié ;

- le décret n° 91-861 du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des assistants territoriaux d'enseignement artistique ;

- le décret n° 91-857 du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emploi des professeurs territoriaux d'enseignement artistique ;

- le décret n°91-859 du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emploi des assistants territoriaux spécialisés d'enseignement artistique ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public.

1. Considérant que, par un arrêté du 13 décembre 1990, le maire de la commune d'Agneaux a recruté M. C...pour exercer, durant la saison 1990/1991 et à raison de 4 heures par semaine, les fonctions de directeur de l'école municipale de musique, ces heures de gestion pouvant être remplacées par des heures d'enseignement ; que cet engagement a été régulièrement renouvelé, sur la base d'un nombre d'heures fixé trimestriellement, jusqu'à la fin de l'année scolaire 2007/2008 ; qu'à compter du 1er septembre 2008, il a été engagé par un contrat d'une durée de trois ans, pour assurer les fonctions de directeur de l'école de musique " au grade d'assistant spécialisé d'enseignement artistique " ; que, par le courrier du 8 juillet 2011, le maire d'Agneaux lui a fait part de sa décision de ne pas renouveler ce contrat ; que M. C...a saisi le tribunal administratif de Caen d'une demande tendant, à titre principal, à la condamnation de la commune d'Agneaux à lui verser la somme de 192 900 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation des préjudices subis du fait de l'illégalité fautive de la décision du 8 juillet 2011, à titre subsidiaire, à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 201 052,94 euros, assortie des intérêts au taux légal, correspondant à des heures supplémentaires impayées effectuées en qualité de professeur territorial d'enseignement artistique et à la réparation du préjudice moral qui en résulterait et, à titre encore plus subsidiaire, à la condamnation de la commune à lui verser la somme de 105 222 euros correspondant à des heures supplémentaires impayées effectuées en qualité d'assistant territorial spécialisé d'enseignement artistique ; que par la présente requête, M. C...relève appel du jugement n°1301269 du 28 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions principales :

2. Considérant qu'au cours de la présente instance, M.C..., tirant les conséquences de l'arrêt de la cour n°12NT02217 du 20 juin 2014 qui confirme le jugement du 31 mai 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande d'annulation de la décision de non renouvellement de son contrat du 8 juillet 2011, a déclaré renoncer à se prévaloir de l'illégalité fautive de cette décision et maintenir sa demande tendant à mettre en oeuvre la responsabilité de la commune d'Agneaux, sur le fondement de la faute commise par celle-ci en le recrutant sur un emploi correspondant au grade d'assistant spécialisé d'enseignement artistique, ne correspondant pas à la nature des fonctions de direction de l'école municipale de musique qui lui étaient confiées ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 2 du décret n°91-859 du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emploi des assistants spécialisés d'enseignement artistique : " (...) / Les fonctionnaires du cadre d'emplois sont chargés, selon leur spécialité, de tâches d'enseignement dans les conservatoires à rayonnement régional, départemental, communal ou intercommunal classés et les établissements d'enseignement de la musique, de la danse et de l'art dramatique non classés et dans les écoles d'arts plastiques qui ne sont pas habilitées à dispenser un enseignement sanctionné par un diplôme national ou par un diplôme agréé par l'Etat. / Ils sont également chargés d'apporter une assistance technique ou pédagogique aux professeurs de musique, de danse et d'arts plastiques. / Ils peuvent notamment être chargés de missions prévues à l'article 7 de la loi du 6 janvier 1988 susvisée. / Les assistants spécialisés d'enseignement artistique assurent un service hebdomadaire de vingt heures. /Les assistants spécialisés d'enseignement artistique sont placés, pour l'exercice de leurs fonctions, sous l'autorité du fonctionnaire chargé de la direction de l'établissement dans lequel ils exercent leurs fonctions " ; qu'aux termes de l'article 2 du décret n°91-857 du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des professeurs territoriaux d'enseignement artistique : " Pour les spécialités Musique, Danse et Art dramatique, ils exercent leurs fonctions dans les conservatoires à rayonnement régional, départemental, communal ou intercommunal classés par l'Etat. / (...) / Les professeurs d'enseignement artistique assurent un enseignement hebdomadaire de seize heures. / Les professeurs d'enseignement artistique sont placés, pour l'exercice de leurs fonctions, sous l'autorité du directeur de l'établissement d'enseignement artistique. / Ils assurent la direction pédagogique et administrative des conservatoires à rayonnement communal ou intercommunal et, par dérogation aux dispositions du deuxième alinéa, des établissements d'enseignement de la musique, de la danse et de l'art dramatique non classés et des écoles d'arts plastiques qui ne sont pas habilitées à dispenser tout ou partie de l'enseignement conduisant à un diplôme d'Etat ou à un diplôme agréé par l'Etat " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que ce n'est que par une décision du 17 octobre 2008, obtenue et produite postérieurement à la conclusion du contrat conclu avec la commune d'Agneaux le 1er septembre 2008, que la commission d'équivalence des diplômes pour l'accès à la fonction publique territoriale a reconnu l'équivalence du deuxième prix de cornet, du premier prix de trompette et de l'expérience professionnelle de M. C...avec le certificat d'aptitude aux fonctions de professeur de musique lui permettant de se présenter aux épreuves du concours externe de professeur territorial d'enseignement artistique spécialité musique ; que dans ces conditions, M.C..., qui à la date de conclusion de son contrat ne possédait pas les diplômes requis pour prétendre à des fonctions de professeur territorial d'enseignement artistique, ne peut en tout état de cause être fondé à soutenir que la commune d'Agneaux aurait commis une faute en l'engageant irrégulièrement sur un emploi relevant du cadre d'emplois des assistants spécialisés d'enseignement artistique, du niveau de la catégorie B ;

Sur les conclusions subsidiaires :

5. Considérant que la réalité des heures supplémentaires invoquées n'est pas établie ; que M. C...ne peut prétendre au paiement d'heures supplémentaires en se fondant sur les décrets du 2 septembre 1991 portant statut particulier du cadre d'emplois des professeurs territoriaux d'enseignement artistique ou du cadre d'emplois des assistants territoriaux spécialisés d'enseignement artistique dès lors que ceux-ci n'étaient pas applicables à sa situation ; que ni le contrat dont il a bénéficié à compter du 1er septembre 2008, ni l'arrêté ayant antérieurement procédé à son recrutement ne prévoyaient un quelconque droit au paiement d'heures supplémentaires ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune d'Agneaux, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M. C...au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C...le versement à la commune d'Agneaux d'une somme de 1 500 euros à ce même titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : M. C...versera la somme de 1 500 euros à la commune d'Agneaux en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et à la commune d'Agneaux.

Délibéré après l'audience du 9 février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er mars 2016.

Le rapporteur,

C. LOIRATLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. B...

La République mande et ordonne au préfet de la Manche en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00841


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00841
Date de la décision : 01/03/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Cécile LOIRAT
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SEP LABRUSSE FROMENT

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-03-01;14nt00841 ?
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