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25/02/2016 | FRANCE | N°14NT01712

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 25 février 2016, 14NT01712


Vu la procédure :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010.

Par un jugement n° 1301758 du 29 avril 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juin 2014 et 6 août 2015, M. et MmeA..., repr

sentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orl...

Vu la procédure :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010.

Par un jugement n° 1301758 du 29 avril 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juin 2014 et 6 août 2015, M. et MmeA..., représentés par MeC..., demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 29 avril 2014 ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010.

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- aucun avis de vérification de comptabilité n'a été adressé à Mme A...alors que le service a découvert son activité occulte de détournement de fonds avant l'engagement de l'examen contradictoire de sa situation personnelle et que ses diligences ont largement dépassé l'exercice d'un simple contrôle de cohérence des revenus, en méconnaissance de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales et de la réponse ministérielle Léquiller du 23 avril 2013 ;

- compte tenu de ses modalités, le contrôle des comptes bancaires constitue une vérification de comptabilité ; ils se prévalent sur ce point de l'instruction 13 K-111 n° 13 et 14 du 1er juin 2001 ;

- dans l'attente du jugement pénal à intervenir, les sommes que Mme A...a reversées à une personne qu'elle a mise en cause dans le cadre de la procédure pénale doivent être déduites du bénéfice imposable résultant de son activité occulte ;

- les charges liées à cette activité peuvent être forfaitairement évaluées à 30% ;

- le service n'ayant pas établi leur intention frauduleuse de minorer le montant des revenus imposables, l'application de la majoration pour manquement délibéré n'est pas fondée ;

- l'application de la majoration de 80% pour activité occulte, dont le cumul avec la majoration pour manquement délibéré entraîne une imposition supérieure aux revenus tirés de l'activité occulte et la perception d'un impôt supérieur aux sommes imposées, est contraire aux principes constitutionnels et à la jurisprudence du Conseil d'Etat et du Conseil constitutionnel.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 décembre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Aubert,

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public.

1. Considérant que M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 29 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2008 à 2010 résultant de la réintégration dans leurs bases d'imposition de revenus fonciers, de salaires perçus par M. A...et de revenus tirés de l'activité occulte de détournement de fonds de MmeA..., non déclarés ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " (...) une vérification de comptabilité ne peut être engagée sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 47 C du même livre : " Lorsque, au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, sont découvertes des activités occultes ou mises en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité d'un contribuable, l'administration n'est pas tenue d'engager une vérification de comptabilité pour régulariser la situation fiscale du contribuable au regard de cette activité " ;

3. Considérant, d'une part, que les dispositions de l'article L. 47 C du livre des procédures fiscales ont pour seul objet de dispenser l'administration de l'obligation d'engager une vérification de comptabilité dans l'hypothèse où la découverte d'activités occultes ou la mise en évidence des conditions d'exercice non déclarées de l'activité interviennent au cours d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'un contribuable ; qu'il suit de là que la seule circonstance que l'activité occulte de détournement de fonds exercée par Mme A...au détriment de l'association d'aide aux personnes âgées qui l'employait était connue du service avant le début de l'examen contradictoire de la situation fiscale personnelle des requérants, n'imposait pas au vérificateur de procéder au contrôle fiscal de cette activité dans le cadre d'une vérification de comptabilité ;

4. Considérant, d'autre part, que le droit de communication reconnu à l'administration fiscale par les articles L. 81 à L. 96 du livre des procédures fiscales, notamment auprès des entreprises industrielles ou commerciales ou des membres de certaines professions non commerciales, a seulement pour objet de permettre au service, pour l'établissement et le contrôle de l'assiette d'imposition, de demander à un tiers ou, éventuellement au contribuable lui-même, sur place ou par correspondance, de manière ponctuelle, des renseignements disponibles sans que cela nécessite d'investigations particulières, ou dans les mêmes conditions, de prendre connaissance, et le cas échéant, copie de certains documents existants qui se rapportent à l'activité professionnelle de la personne auprès de laquelle ce droit est exercé ; qu'en revanche, l'administration procède à la vérification de comptabilité d'une entreprise ou d'un membre d'une profession non commerciale lorsqu'en vue d'assurer l'établissement d'impôts ou de taxes totalement ou partiellement éludés par les intéressés, elle contrôle sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par cette entreprise ou ce contribuable en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont elle prend alors connaissance et dont le cas échéant elle peut remettre en cause l'exactitude ; que l'exercice régulier du droit de vérification de comptabilité suppose le respect des garanties légales prévues en faveur du contribuable vérifié, au nombre desquelles figure notamment l'envoi ou la remise de l'avis de vérification auquel se réfère l'article L. 47 du livre des procédures fiscales ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le vérificateur a déterminé le montant des revenus tirés par Mme A...de son activité occulte de détournement de fonds en examinant les relevés de comptes bancaires que les requérants lui avaient remis ainsi qu'un certain nombre de chèques obtenus dans le cadre de l'exercice du droit de communication auprès de leur établissement bancaire ; que ces modalités de contrôle ne caractérisent pas l'existence d'une vérification de comptabilité irrégulièrement engagée, en l'absence d'envoi d'un avis de vérification ;

6. Considérant que les requérants ne peuvent se prévaloir, au soutien de moyens par lesquels ils contestent la régularité de la procédure d'imposition, de l'interprétation administrative de la loi ; que, dès lors, les précisions apportées par l'administration, d'une part, sur la découverte d'une activité occulte avant l'engagement d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle, par la réponse ministérielle Lequiller publiée au JOAN du 23 avril 2013, p. 4464, sous le n° 16641 et par les paragraphes 13, 14 et 15 de l'instruction 13 K-111 du 1er juin 2011 et, d'autre part, sur la qualification des documents consultés par le vérificateur par la réponse ministérielle Bonnet publiée au JOAN du 15 mai 1977 p. 2969, sous le n° 31815 sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition mise en oeuvre à leur encontre ;

Sur le bien-fondé de l'imposition des bénéfices tirés d'une activité occulte :

7. Considérant que les bénéfices non commerciaux réalisés par Mme A...dans le cadre de son activité occulte de détournement de fonds ayant été taxés d'office en application des articles L. 66, L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales, les requérants supportent la charge de la preuve du caractère exagéré de l'imposition ;

En ce qui concerne le montant des recettes :

8. Considérant que M. et Mme A...n'apportent aucun élément de nature à établir qu'une partie des sommes imposées entre leurs mains auraient été détournées par une personne autre que la requérante ; que la circonstance qu'une partie des sommes que Mme A...a détournées, et dont elle a ainsi eu la libre disposition au sens de l'article 12 du code général des impôts, aurait été ultérieurement restituée à l'association ou à une tierce personne chargée de les lui remettre est sans incidence sur le bien-fondé de l'imposition ;

9. Considérant que l'autorité de la chose jugée qui appartient aux décisions des juges répressifs devenues définitives s'attache à la constatation des faits mentionnés dans les jugements et arrêts, support nécessaire du dispositif, et à leur qualification au regard de la loi pénale ; qu'en revanche, elle ne s'attache pas à l'appréciation de ces mêmes faits au regard de la loi fiscale ; qu'il résulte de ce qui est dit au point 8 du présent arrêt que la circonstance que le juge pénal est susceptible d'admettre, au terme de l'instance pénale en cours invoquée par les requérants, que Mme A...a restitué une partie des sommes détournées, est sans incidence sur l'appréciation des conséquences de ce détournement de fonds au regard de la loi fiscale ; que, dès lors, l'administration pouvait déterminer le montant des recettes réalisées par la requérante sans attendre l'issue de l'instance pénale alors en cours ;

En ce qui concerne les charges déductibles :

10. Considérant qu'en se bornant à soutenir que Mme A...a nécessairement supporté des charges dont le montant doit être fixé à 30% des recettes, les requérants n'apportent aucun élément de nature à établir que le service a surévalué les bénéfices réalisés en estimant qu'ils l'avaient entièrement été avec les moyens de l'association victime du détournement de fonds ;

Sur la majoration pour manquement délibéré :

11. Considérant que M. et Mme A...se bornent à reprendre en appel, sans apporter aucun élément nouveau, les moyens invoqués en première instance, au soutien de leurs conclusions tendant à la décharge de la majoration pour manquement délibéré appliquée aux redressements relatifs aux revenus fonciers et aux salaires du requérant non déclarés, tirés, sur le fondement de la loi, de l'insuffisance de motivation de la majoration et de l'absence d'intention d'éluder l'impôt, et sur le fondement de l'interprétation administrative de la loi, des précisions apportées par l'instruction 13 L-1-80 du 6 février 1980, relative à la procédure d'établissement des pénalités, et par l'instruction 13 L-2-92 du 25 février 1992 relative à leur motivation ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges ;

Sur la majoration pour activité occulte :

12. Considérant, d'une part, que l'administration a appliqué la majoration pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts aux seuls suppléments d'imposition résultant de l'imposition des salaires perçus par M. A...et des revenus fonciers non déclarés et la pénalité pour activité occulte prévue au c du 1 de l'article 1728 du code général des impôts aux seuls suppléments d'imposition résultant de l'imposition des bénéfices réalisés en 2010 par Mme A...dans le cadre de son activité de détournement de fonds ; que, d'autre part, il résulte de la proposition de rectification que, pour chacune des trois années d'imposition, le montant, en droits et pénalités, de la totalité des suppléments d'imposition est, contrairement à ce que soutiennent les requérants, inférieur au montant des sommes détournées par Mme A...; que, dès lors, les moyens tirés de la non-conformité à la Constitution d'un cumul de majorations et de la perception d'un impôt supérieur aux sommes imposées doivent être écartés comme manquant en fait ; qu'en tout état de cause et en l'absence d'une question prioritaire de constitutionnalité, il n'appartient pas au juge de l'impôt d'apprécier la conformité à la Constitution des dispositions du code général des impôts dont il est fait application ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui n'est pas entaché d'insuffisance de motivation, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. et Mme A...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B...A...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 4 février 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 février 2016.

Le rapporteur,

S. AubertLe président,

F. Bataille

Le greffier,

E. Haubois

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01712 3

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01712
Date de la décision : 25/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Sylvie AUBERT
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : SELAFA CHAINTRIER

Origine de la décision
Date de l'import : 08/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-02-25;14nt01712 ?
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