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16/02/2016 | FRANCE | N°15NT01400

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 16 février 2016, 15NT01400


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...et M. C...D...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler les arrêtés du 14 octobre 2014 par lesquels le préfet d'Indre-et-Loire a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel ils seraient reconduits d'office.

Par un jugement n° 1500344,1500346 du 31 mars 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la

cour :

Par une requête, enregistrée le 30 avril 2015, M. et MmeD..., représentés par Me R...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...et M. C...D...ont demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler les arrêtés du 14 octobre 2014 par lesquels le préfet d'Indre-et-Loire a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays à destination duquel ils seraient reconduits d'office.

Par un jugement n° 1500344,1500346 du 31 mars 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 30 avril 2015, M. et MmeD..., représentés par Me Rouillé-Mirza, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 31 mars 2015 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet d'Indre-et-Loire du 14 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet d'Indre-et-Loire de leur délivrer une carte de séjour temporaire, dans un délai de 15 jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat, au bénéfice de son conseil, le versement d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Ils soutiennent que :

- les décisions prises sur le fondement de l'article L. 741-4 2° n'ont pas été précédées d'un examen individuel de chaque situation particulière ;

- l'obligation de quitter le territoire méconnaît les articles 8 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'alinéa 2 de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'UE ;

- la décision fixant le pays de renvoi est contraire à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 juin 2015, le préfet d'Indre-et-Loire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par les requérants ne sont pas fondés.

Mme D... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 17 août 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lainé, président de chambre.

1. Considérant que M. et MmeD..., ressortissants arméniens, sont entrés irrégulièrement en France le 24 août 2011 ; que M.D..., après avoir été reconduit à la frontière le 10 juillet 2013, est entré à nouveau irrégulièrement sur le territoire en décembre 2013 ; que la demande d'asile de Mme D...a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) par décision du 11 février 2013, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile ; que sa demande de réexamen a également été rejetée par une décision de l'OFPRA, statuant selon la procédure prioritaire, du 11 juin 2014 ; que la demande formée par M. D... a été rejetée, par une décision de l'OFPRA du 30 juillet 2014, statuant également selon la procédure prioritaire ; que le préfet d'Indre-et-Loire, par des arrêtés du 14 octobre 2014 a refusé de leur délivrer le titre de séjour sollicité, leur a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de leur renvoi en cas d'exécution forcée ; que, par la requête susvisée, M. et Mme D...relèvent appel du jugement du 31 mars 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes d'annulation de ces arrêtés ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si : (...) / 2° L'étranger qui demande à bénéficier de l'asile a la nationalité d'un pays pour lequel ont été mises en oeuvre les stipulations du 5 du C de l'article 1er de la convention de Genève susmentionnée ou d'un pays considéré comme un pays d'origine sûr. Un pays est considéré comme tel s'il veille au respect des principes de la liberté, de la démocratie et de l'état de droit, ainsi que des droits de l'homme et des libertés fondamentales. La prise en compte du caractère sûr du pays d'origine ne peut faire obstacle à l'examen individuel de chaque demande ; (...) " ; que le deuxième alinéa de l'article L. 723-1 de ce code dispose : " L'office statue par priorité sur les demandes émanant de personnes auxquelles le document provisoire de séjour prévu à l'article L.742-1 a été refusé ou retiré pour l'un des motifs mentionnés aux 2° à 4° de l'article L.741-4, ou qui se sont vu refuser pour l'un de ces motifs le renouvellement de ce document. " ; qu'aux termes de l'article L.742-6 : " L'étranger présent sur le territoire français dont la demande d'asile entre dans l'un des cas visés aux 2° à 4° de l'article L.741-4 bénéficie du droit de se maintenir en France jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, lorsqu'il s'agit d'une décision de rejet. En conséquence, aucune mesure d'éloignement mentionnée au livre V du présent code ne peut être mise à exécution avant la décision de l'office. (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que les décisions par lesquelles le préfet refuse, en fin de procédure, le séjour à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA et l'oblige à quitter le territoire français ne sont pas prises pour l'application de la décision par laquelle le préfet statue, en début de procédure, sur l'admission provisoire au séjour en qualité de demandeur d'asile et la décision prise sur l'admission au séjour ne constitue pas davantage la base légale du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; qu'il en résulte que si les requérants entendent soutenir que le préfet d'Indre-et-Loire aurait irrégulièrement rejeté leur demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile, au motif qu'il n'aurait pas procédé à un examen individuel de leurs demandes, et si ils ont entendu ainsi invoquer, par voie d'exception, l'illégalité des décisions rejetant leurs demandes d'admission provisoire au séjour, ce moyen ne peut être utilement invoqué à l'appui du recours dirigé contre les décisions par lesquelles le préfet, après la notification du rejet par l'OFPRA de la demande d'asile traitée dans le cadre de la procédure prioritaire, refuse le séjour et oblige l'étranger à quitter le territoire français ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que les requérants sont entrés irrégulièrement sur le territoire national ; que s'ils font valoir qu'ils y résident depuis plusieurs années et que la dernière de leurs deux filles, qui sont âgées de quatre et deux ans, y est née et qu'elles sont scolarisées, les intéressés ne justifient pas d'une réelle insertion en France ; que les deux membres du couple font l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'ainsi, rien ne s'oppose à ce que la cellule familiale se reconstitue en Arménie, où résident les parents, un frère et une soeur de Mme D...; que dans ces conditions, le préfet d'Indre-et-Loire, en assortissant le refus de titre de séjour qu'il leur opposait d'une obligation de quitter le territoire français, n'a pas porté une atteinte excessive à leur droit au respect de leur vie privée et familiale ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne dont les droits et libertés reconnus dans la présente Convention ont été violés, a droit à l'octroi d'un recours effectif devant une instance nationale, alors même que la violation aurait été commise par des personnes agissant dans l'exercice de leurs fonctions officielles. " ;

6. Considérant, d'une part, que le droit à un recours effectif, tel que garanti par les stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, n'implique pas que l'étranger qui fait l'objet de la procédure prioritaire prévue à l'article L. 723-1 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et dispose du droit de contester tant la décision de refus d'admission au séjour devant le juge administratif que la décision de rejet qui lui est opposée par l'OFPRA devant la Cour nationale du droit d'asile, où il peut se faire représenter, puisse se maintenir sur le territoire français jusqu'à l'issue de son recours devant cette juridiction ; que la circonstance que le recours devant cette cour ne présente pas un caractère suspensif ne suffit pas à faire regarder, contrairement à ce que soutiennent les requérants, les décisions prises sur le fondement des dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives à la procédure prioritaire d'examen des demandes d'asile comme méconnaissant les stipulations des articles 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

7. Considérant, d'autre part, qu'en application des dispositions de l'article L. 742-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, M. et Mme D...ne disposaient du droit de se maintenir sur le territoire respectivement que jusqu'aux 6 août 2014 et 1er juillet 2014, dates de notification des décisions de rejet de leurs demandes d'asile par l'OFPRA ; qu'ainsi, en décidant le 14 octobre 2014 de les obliger à quitter le territoire et en fixant leur pays d'origine comme pays de destination, alors même qu'ils avaient déposé un recours devant la Cour nationale du droit d'asile, devant laquelle ils pouvaient se faire représenter, le préfet d'Indre-et-Loire n'a pas méconnu le droit des intéressés à un recours effectif ;

8. Considérant, en quatrième et dernier lieu, que M. et Mme D...soutiennent qu'ils ne peuvent être renvoyés en Arménie en raison des risques qu'ils encourent pour leur vie à la suite des persécutions et violences dont ils ont été victimes du fait de l'engagement politique, au côté de Levon Ter Petrosyan, des parents de M. D...et notamment de la disparition du père de ce dernier lors des élections en 2008 ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier et notamment des décisions de l'OFPRA et de la Cour nationale du droit d'asile, que les faits allégués ne pouvaient être tenus pour établis ni les craintes énoncées comme fondées ; que les pièces produites au soutien de leur demande ne sont pas de nature à établir la réalité des risques personnels encourus en cas de retour en Arménie ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dirigé contre les décisions fixant le pays de renvoi, ne peut qu'être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté leurs demandes ; que doivent être rejetées par voie de conséquence leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au bénéfice des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...D...et à M. C... D...ainsi qu'au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée, pour information, au préfet d'Indre-et-Loire.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 février 2016.

Le président-rapporteur,

L. LAINÉL'assesseur le plus ancien,

C. LOIRAT

Le greffier,

M. GUÉRIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT01400


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT01400
Date de la décision : 16/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Laurent LAINE
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : ROUILLE-MIRZA

Origine de la décision
Date de l'import : 03/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2016-02-16;15nt01400 ?
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