Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2014 par lequel le préfet du Loiret a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti cette décision de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Par un jugement n°1403872 du 20 janvier 2015, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté ces demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête, enregistrée le 28 mai 2015, MmeA..., représentée par MeD..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 20 janvier 2015 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 2 juillet 2014 du préfet du Loiret ;
3°) d'enjoindre au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale ", ou subsidiairement de réexaminer sa demande, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.
Elle soutient que :
S'agissant du refus de titre de séjour :
- le préfet a commis une erreur d'appréciation en estimant qu'un traitement approprié de son affection est disponible en Côte d'Ivoire ;
- les médicaments prescrits le 18 juin 2014 suite à son opération du genou droit et la nécessité de procéder également à une arthroplastie du genou gauche, démontrent qu'elle ne peut retourner dans son pays d'origine ;
- cette circonstance humanitaire exceptionnelle justifiait que le préfet sollicite l'avis préalable du directeur de l'agence régionale de santé avant de prendre sa décision, en application de l'article R. 313-22 al. 3;
- qu'ayant fui son pays en 2010 pour échapper aux exactions perpétrées à l'encontre de sa famille pour avoir soutenu Laurent Gbagbo, la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;
S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :
- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de titre de séjour.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 août 2015, le préfet du Loiret conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par Mme A...n'est fondé.
Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 15 avril 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur.
1. Considérant que MmeA..., ressortissante ivoirienne, est entrée en France le 9 août 2013, selon ses déclarations ; qu'elle a sollicité le 17 avril 2014 la délivrance d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade ; que, par l'arrêté du 2 juillet 2014 contesté, le préfet du Loiret a rejeté sa demande, a assorti cette décision de l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement ; que par la présente requête, l'intéressée relève appel du jugement du 20 janvier 2015 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entrainer pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence (...) " ; que l'article R. 313-22 du même code prévoit que : " L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé. Quand la commission médicale régionale a été saisie dans les conditions prévues à l'article R. 313-26, l'avis mentionne cette saisine. / Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé " ;
3. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve à l'une des parties, il appartient au juge administratif, au vu des pièces du dossier, et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d 'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si l'état de santé d 'un étranger nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle ;
4. Considérant que la partie qui justifie d'un avis du médecin de l'agence régionale de santé qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour ; que, dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect du secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et d'établir l'existence ou l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires ; qu'en cas de doute, il lui appartient de compléter ces échanges en ordonnant toute mesure d'instruction utile ;
5. Considérant que Mme A...produit un certificat médical du 18 juin 2014 prescrivant un traitement antalgique et des séances de kinésithérapie pendant son séjour en centre de convalescence après l'intervention d'arthroplastie de son genou droit réalisée le 11 juin 2014, ainsi qu'un certificat médical du 22 septembre 2014 constatant qu'elle présente également une gonarthrose gauche tri-compartimentale, moins évoluée et susceptible de s'aggraver lentement, pour laquelle une nouvelle intervention d'arthroplastie serait indiquée par confort ; que, par avis du 6 juin 2014, le médecin de l'agence régionale de santé, saisi par le préfet du Loiret a indiqué que si l'état de santé de Mme A...nécessite une prise en charge médicale dont le défaut est susceptible d'entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, elle pourra bénéficier d'un traitement approprié en Côte d'Ivoire, son pays d'origine ; que les certificats médicaux produits par l'intéressée, au demeurant établis postérieurement à la décision contestée du préfet du Loiret, ne sont pas de nature à remettre en cause le bien-fondé de cet avis, dès lors que la requérante n'établit aucunement qu'elle devra continuer à prendre les médicaments qui lui avaient été prescrits le temps de sa convalescence post-opératoire ni qu'une nouvelle intervention d'arthroplastie ne pourrait être réalisée en Côte d'Ivoire ; que dans ces conditions, non constitutives de circonstance humanitaire exceptionnelle, le préfet du Loiret n'a pas méconnu les dispositions précitées de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne sollicitant pas l'avis complémentaire du directeur général de l'agence régionale de santé et n'a pas davantage commis d'erreur dans l'appréciation de l'état de santé de l'intéressée pour l'application des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du même code ;
6. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance... " ; que si MmeA..., entrée irrégulièrement en France le 9 août 2013 selon ses déclarations, fait valoir qu'elle a dû fuir son pays d'origine compte tenu des exactions perpétrées à l'encontre des membres de sa famille ayant apporté leur soutien à l'ancien président Gbagbo, et qu'elle ne peut y retourner en raison de l'instabilité politique persistante, il ressort en tout état de cause des pièces du dossier qu'elle n'apporte pas de justifications à l'appui de ses dires, qu'elle est entrée en France à l'âge de 57 ans, est mère de cinq enfants majeurs résidant tous en Côte d'Ivoire et qu'elle n'a pas d'attaches familiales en France ; que dans ces conditions, le préfet du Loiret n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale et n'a dès lors pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
7. Considérant que la décision portant refus de titre de séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de ce refus, que Mme A...invoque à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions à fin d'injonction :
9 Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de MmeA..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, ses conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet du Loiret de lui délivrer une carte de séjour temporaire doivent être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E...A...et au ministre de l'intérieur.
Une copie en sera transmise au préfet du Loiret.
Délibéré après l'audience du 6 octobre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- Mme Loirat, président-assesseur,
- M.C..., faisant fonction de premier conseiller.
Lu en audience publique, le 27 octobre 2015.
Le rapporteur,
C. LOIRATLe président,
L. LAINÉ
Le greffier,
M. B...
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.