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21/10/2015 | FRANCE | N°15NT01335

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre b, 21 octobre 2015, 15NT01335


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 3 janvier 2012 par laquelle le préfet du territoire de Belfort a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ensemble la décision du 4 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a, sur recours hiérarchique, rejeté sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1207465 du 27 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a

rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...épouse B...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler la décision du 3 janvier 2012 par laquelle le préfet du territoire de Belfort a ajourné à deux ans sa demande de naturalisation, ensemble la décision du 4 juin 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a, sur recours hiérarchique, rejeté sa demande de naturalisation.

Par un jugement n° 1207465 du 27 février 2015, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 28 avril 2015, MmeB..., représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 27 février 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 4 juin 2012 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration ainsi que la décision du 3 janvier 2012 du préfet du territoire de Belfort ;

3°) d'ordonner au ministre de réexaminer sa demande.

Elle soutient que :

- il ne saurait lui être reproché d'avoir, en saisissant les instances d'asile, fait preuve de manoeuvres dilatoires afin de se maintenir en France ; elle a obtenu en 2006 un titre de séjour ;

- son état de santé l'empêche, depuis 2002, d'exercer une activité professionnelle ; elle a un taux d'incapacité permanente de 15% ; Pôle emploi n'est pas en mesure de lui proposer un travail compte tenu de ses problèmes de santé ; son époux dispose de revenus dans le cadre d'un contrat de travail à durée indéterminée ;

- elle est mère de quatre enfants scolarisés et justifie d'efforts d'assimilation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 mai 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de ce que la requérante remplit les conditions de recevabilité afin d'obtenir un titre de séjour de 10 ans est inopérant ;

- pour le surplus, les moyens soulevés par Mme B...ne sont pas fondés ;

- subsidiairement, il demande à la cour de prendre en considération le cas échéant, par substitution, un nouveau motif de rejet de la demande de la requérante, tenant à ce qu'elle s'est systématiquement déclaré mariée auprès de l'administration fiscale, au moins de 2007 à 2010 alors qu'elle est célibataire.

Mme B...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 21 mai 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Bachelier, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante kosovare, relève appel du jugement du 27 février 2015 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 3 janvier 2012 du préfet du territoire de Belfort ajournant à deux ans sa demande de naturalisation, ainsi que la décision du 4 juin 2012 du ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration rejetant son recours hiérarchique contre cette décision ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision préfectorale du 3 janvier 2012 :

2. Considérant que la décision en date du 4 juin 2012 du ministre chargé des naturalisations, saisi par Mme B...d'un recours administratif préalable obligatoire en application de l'article 45 du décret susvisé du 30 décembre 1993, s'est substituée à celle du préfet du territoire de Belfort du 3 janvier 2012 ; que, par suite, les conclusions de la requête dirigées contre cette décision préfectorale ne peuvent qu'être rejetées comme irrecevables ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision ministérielle du 4 juin 2012 :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. Ce délai une fois expiré ou ces conditions réalisées, il appartient à l'intéressé, s'il le juge opportun, de déposer une nouvelle demande " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ainsi que son degré d'insertion professionnelle et d'autonomie matérielle ;

4. Considérant que, pour rejeter, par sa décision du 4 juin 2012, la demande de naturalisation de MmeB..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur la triple circonstance que l'intéressée avait eu recours de façon dilatoire aux procédures de demande d'asile pour se maintenir en France, qu'elle avait séjourné de manière irrégulière sur le territoire de 2002 à 2006 et, enfin, qu'elle n'avait pas acquis son autonomie matérielle, notamment par l'exercice d'une activité professionnelle compatible avec son handicap ; que les premiers juges, après avoir neutralisé le motif tiré des manoeuvres dilatoires de la requérante pour demeurer en France, ont estimé que le ministre avait pu légalement rejeter la demande dont il était saisi pour les deux seuls autres motifs ;

5. Considérant, en premier lieu, que le ministre soutient sans être contredit que la requérante a séjourné irrégulièrement sur le territoire de 2002 à 2006 ; que le ministre était en droit de se fonder notamment sur ce motif, s'agissant de faits de séjour irrégulier qui, remontant à moins de huit ans à la date de la décision contestée, n'étaient pas anciens ;

6. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date de la décision contestée Mme B...ne justifiait pas de revenus lui assurant une autonomie financière, notamment par l'exercice d'une activité professionnelle ; que la requérante, qui a subi un préjudice psychologique très important lors d'un vol avec armes et en réunion dans un bureau de poste, fait valoir qu'elle a un taux d'incapacité permanente chiffré par un expert à 15% et que Pôle emploi n'est pas en mesure de lui proposer un travail compte tenu de ses problèmes de santé ; que la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées lui avait accordé l'allocation adulte handicapé du 18 décembre 2009 au 31 décembre 2011, en raison d'un taux d'incapacité compris entre 50 et 79% et d'une restriction substantielle pour l'accès à l'emploi ; que, toutefois, il n'est pas établi qu'elle était inapte à l'exercice de toute activité professionnelle ; que, par suite et sans que l'intéressée puisse utilement se prévaloir de certificats médicaux établis postérieurement à la décision contestée et indiquant que sa situation ne lui permettait pas de travailler, le ministre n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en retenant ce motif pour rejeter sa demande de naturalisation ;

7. Considérant, en dernier lieu, que si Mme B...allègue qu'elle est la mère de quatre enfants scolarisés en France et qu'elle a justifié " dans le cadre de la présente procédure des efforts d'assimilation ", ces circonstances sont, compte tenu des motifs mentionnés ci-dessus, sans incidence sur la légalité de la décision litigieuse ; que la requérante ne peut davantage utilement se prévaloir des revenus que son époux tire d'un contrat de travail à durée indéterminée, au demeurant conclu postérieurement à la décision contestée ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la demande de substitution de motifs présentée à titre subsidiaire par le ministre, que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

9. Considérant que les conclusions à fin d'injonction présentées par Mme B...doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...épouse B...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 14 octobre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- Mme Buffet, premier conseiller,

- Mme Piltant, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 octobre 2015.

L'assesseur le plus ancien

dans l'ordre du tableau,

C. BUFFET

Le président-rapporteur,

G. BACHELIER

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre b
Numéro d'arrêt : 15NT01335
Date de la décision : 21/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. le Pdt. Gilles BACHELIER
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : ACTEMIS AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 03/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-10-21;15nt01335 ?
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