La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

13/10/2015 | FRANCE | N°14NT00116

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 13 octobre 2015, 14NT00116


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler, d'une part, les notations qui lui ont été attribuées au titre des années 2009, 2010 et 2011 et, d'autre part, la décision du 31 décembre 2012 par laquelle le directeur de l'enseigne La Poste de Basse-Normandie lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quinze jours, dont huit jours avec sursis ; elle a également demandé de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 5 000 euros en réparation

du préjudice moral subi et une indemnité de 5 000 euros en réparation du pr...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...D...a demandé au tribunal administratif de Caen d'annuler, d'une part, les notations qui lui ont été attribuées au titre des années 2009, 2010 et 2011 et, d'autre part, la décision du 31 décembre 2012 par laquelle le directeur de l'enseigne La Poste de Basse-Normandie lui a infligé la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quinze jours, dont huit jours avec sursis ; elle a également demandé de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi et une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice financier.

Par un jugement n°1300348 du 7 novembre 2013, le tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 6 janvier et 17 novembre 2014, Mme B...D..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 17 novembre 2013 ;

2 ) d'annuler les notations qui lui ont été attribuées au titre des années 2009, 2010 et 2011 ;

3°) d'annuler la sanction de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quinze jours, dont huit jours avec sursis, qui lui a été infligée par décision du 31 décembre 2012 ;

4°) de condamner La Poste à lui verser une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice moral subi et une indemnité de 5 000 euros en réparation du préjudice financier ;

5°) de mettre à la charge de La Poste une somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il y a contradiction manifeste entre l'évaluation positive de ses compétences et le maintien de la note globale " A améliorer " ;

- la sanction contestée est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière ;

- subsidiairement, au fond, cette sanction est injustifiée dès lors que la matérialité de ses motifs n'est pas établie ;

- la sanction disciplinaire infligée est également totalement injustifiée au regard de son comportement ;

- ces décisions illégales lui ont causé un préjudice moral et ont fait obstacle à son avancement de carrière.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 16 juillet et 12 décembre 2014, la Direction des affaires juridiques Bretagne/Pays de la Loire de La Poste conclut au rejet de la requête et demande que soit mis à la charge de Mme D...le versement d'une somme de 2 000 euros par application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les demandes indemnitaires sont irrecevables du fait de l'absence de réclamation préalable auprès de l'administration et qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 modifiée relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;

- le décret n° 90-1111 du 12 décembre 1990 modifié portant statut de La Poste ;

- le décret 2001-614 du 9 juillet 2001 relatif à la notation des fonctionnaires de La Poste et des fonctionnaires de France Télécom ;

- l'arrêté du 9 juillet 2001 déterminant la liste des éléments à prendre en compte dans l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de La Poste ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Loirat, président-assesseur,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public,

- et les observations de MmeD....

1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeD..., agent technique et de gestion de deuxième niveau, est entrée dans l'administration des postes et télécommunications le 13 juin 1978 ; qu'à compter du 1er juillet 1982, elle a été affectée à l'établissement de Flers ; qu'à la suite de ses évaluations au titre des années 2009, 2010 et 2011, elle s'est vu attribuer la note A, signifiant que sa valeur professionnelle " est partiellement adaptée aux exigences du poste ", cette notation lui étant maintenue depuis 2003 ; que, par une décision du 31 décembre 2012, le directeur de l'enseigne La Poste de Basse-Normandie a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire d'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de quinze jours dont huit avec sursis ; que par la présente requête, Mme D...relève appel du jugement du 7 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes d'annulation de ces décisions et de condamnation de La Poste à réparer les préjudices moral et financier consécutifs ;

Sur les conclusions en annulation :

En ce qui concerne la notation au titre des années 2009, 2010 et 2011 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 29 de la loi du 2 juillet 1990 modifiée relative à l'organisation du service public de la poste et des télécommunications : " Les personnels de La Poste et de France Télécom sont régis par des statuts particuliers, pris en application de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires et de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 9 juillet 2001 susvisé : " La notation qui exprime la valeur professionnelle des fonctionnaires de La Poste et des fonctionnaires de France Télécom est établie annuellement et comporte pour chaque fonctionnaire : 1° Une appréciation d'ordre général qui rend compte de sa manière de servir, notamment de l'évolution de sa valeur professionnelle par rapport à l'année précédente ainsi que de son aptitude à exercer, dans l'immédiat ou dans l'avenir, au besoin après une formation appropriée, des fonctions différentes de même niveau ou d'un niveau supérieur ; 2° L'indication d'un niveau de valeur qui est déterminé d'après une échelle de cotation à quatre niveaux " ; qu'aux termes de l'article 2 du même décret : " La notation définie à l'article 1er ci-dessus est arrêtée par le chef de service après un entretien qui réunit le fonctionnaire et son supérieur hiérarchique pour un examen des éléments qui caractérisent la valeur professionnelle de ce fonctionnaire. Elle donne lieu à l'établissement d'une notice individuelle de notation. " ; qu'aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 9 juillet 2001 susvisé : " Les éléments à prendre en compte dans l'appréciation de la valeur professionnelle des fonctionnaires de La Poste, prévus à l'article 1er du décret du 9 juillet susvisé, sont fixés conformément aux dispositions des articles 2 et 3 du présent arrêté. " ; qu'aux termes de l' article 2 du même arrêté : " Pour tous types d'emplois, ces éléments sont : les compétences techniques ; les capacités à appliquer ces compétences ; le comportement relationnel ; l'efficacité personnelle ; le niveau de réalisation des objectifs fixés ; l'aptitude à exercer des fonctions différentes de même niveau ou d'un niveau supérieur " ; qu'il résulte de ces dispositions que la notation d'un fonctionnaire de La Poste constitue une appréciation, par le chef de service, des qualités et des aptitudes dont il a fait preuve pendant la période de notation ;

3.Considérant qu'au titre de chacune des années concernées, les différents " manager-appréciateurs " de Mme D...lui ont attribué le niveau de valeur " A ", correspondant à la catégorie d'agents dont les résultats sont à améliorer ; qu'il ressort des pièces du dossier que parmi les quatre items " compétences techniques ", " capacités à appliquer ces compétences ", " efficacité personnelle " et " comportement relationnel ", les évaluateurs ont tous relevé que Mme D...avait un niveau " nettement supérieur " s'agissant des " compétences techniques " ; qu'en revanche si, en 2009 et 2011, les évaluateurs indiquent que la requérante est " parfaitement adaptée " pour les items " capacités à appliquer ces compétences " et " efficacité personnelle ", le notateur pour l'année 2010, les a estimés " partiellement adaptés " ; que les évaluateurs se sont par ailleurs accordés pour estimer que le comportement relationnel de l'intéressée était partiellement adapté aux exigences du poste, son défaut de communication tant avec ses collègues qu'avec sa hiérarchie nuisant à la réalisation des objectifs ; que dans ces conditions, en l'absence de contestation sérieuse des difficultés relationnelles ressortant de ces évaluations, les appréciations successives portées sur la manière de servir de la requérante ne sont pas entachées de la contradiction alléguée et l'intéressée n'établit pas que la notation qui lui a été attribuée pour les années 2009, 2010 et 2011 serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ou procéderait d'une animosité de ses supérieurs à son encontre ;

4. Considérant que la circonstance que les notations contestées risqueraient de nuire à l'avancement et à l'évolution de la rémunération de Mme D...est sans incidence sur la légalité de cette décision ;

En ce qui concerne la sanction d'exclusion temporaire de quinze jours dont huit jours avec sursis prononcée le 31 décembre 2012 :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. / Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée à droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté. (...) " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un courrier d'information du 24 octobre 2012 relatif à une future sanction relevant du conseil de discipline a informé Mme D...de ses droits à communication de son dossier administratif, de la possibilité d'être assistée d'un défenseur de son choix et de faire entendre des témoins devant le conseil de discipline ; que la requérante a fait valoir son droit de consultation de son dossier le 30 octobre 2012 ; qu'un second courrier du 19 novembre 2012 de convocation devant le conseil de discipline du 6 décembre 2012 l'a informée qu'une sanction d'exclusion temporaire de fonction pour une durée d'un mois était proposée à son encontre et a précisé les motifs de cette sanction ; qu'à la demande de l'intéressée, la réunion du conseil de discipline a été reportée au 10 décembre 2012 ; que par lettre du 6 décembre 2012, il a été procédé à la rectification de la lettre de convocation devant le conseil de discipline en indiquant que la sanction proposée était une exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois dont deux mois avec sursis et non une sanction d'exclusion temporaire de fonction pour une durée d'un mois ; que par ses différents courriers, La Poste a effectivement informé Mme D...de l'engagement d'une procédure disciplinaire à son encontre en détaillant les griefs reprochés et lui a indiqué qu'elle pouvait obtenir la communication intégrale de son dossier et se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix ; que, dans ces conditions, la notification tardive de la rectification précitée de la nature de la sanction proposée n'a pu avoir pour effet de méconnaître les droits de la défense de l'intéressée ; que l'arrêté en litige n'est dès lors pas intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 28 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 :

" Tout fonctionnaire, quel que soit son rang dans la hiérarchie, est responsable de l'exécution des tâches qui lui sont confiées. Il doit se conformer aux instructions de son supérieur hiérarchique, sauf dans le cas où l'ordre donné est manifestement illégal (...) " ; qu'aux termes de l'article 29 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale " ;

8. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la sanction contestée a été motivée par la réitération et la persistance de manquements professionnels tels que le non respect de la procédure d'archivage des pièces comptables et de l'obligation de flashage des lettres recommandées le jour même de leur arrivée, le refus de se conformer aux instructions et directives de sa hiérarchie, aggravé par un refus de s'expliquer, le non respect des horaires de levée du courrier et le refus de fermer sa vacation ayant pour effet d'empêcher sa collègue de procéder à certaines vérifications comptables ; que contrairement à ce que soutient MmeD..., la matérialité de chacun de ces griefs est établie par différents compte-rendu, procès verbaux de carence et demandes d'explication, précis et circonstanciés, ainsi que par un rapport du chef d'établissement en date du 10 octobre 2012 ; que cette méconnaissance caractérisée de l'obligation d'obéissance hiérarchique prévue par l'article 28 du titre I du statut général des fonctionnaires n'a pas été sanctionnée de manière disproportionnée par l'infliction de la sanction du deuxième groupe d'exclusion temporaire des fonctions pour une durée de quinze jours dont huit jours avec sursis ;

Sur les conclusions indemnitaires :

9. Considérant que faute d'établir l'illégalité tant des notations des années 2009, 2010 et 2011, que de la sanction disciplinaire du 31 décembre 2012, Mme D...ne peut prétendre à la condamnation de La Poste à réparer les préjudices moral et financier qu'elle estime avoir subis du fait de ces différentes décisions ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B...D...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté ses demandes ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que La Poste, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamnée à verser à Mme D...la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit à la demande de La Poste tendant au remboursement des frais de même nature qu'elle a supportés ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de La Poste tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...et à La Poste.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- Mme Rimeu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 13 octobre 2015.

Le rapporteur,

C. LOIRATLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00116
Date de la décision : 13/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Cécile LOIRAT
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : SELARL ERIC STRUJON

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-10-13;14nt00116 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award