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12/10/2015 | FRANCE | N°14NT01359

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 12 octobre 2015, 14NT01359


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 18 août 2009 par laquelle le président du conseil général de Loir-et-Cher a rejeté sa demande d'attribution du revenu de solidarité active.

Par une ordonnance n° 0903333 du 26 janvier 2010, le vice-président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de MmeA....

Par un arrêt n° 10NT00495 du 26 janvier 2012, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé cette ordonnance du 26 janvier 2010

ainsi que la décision du président du conseil général de Loir-et-Cher du 18 août 2009.

P...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B...A...a demandé au tribunal administratif d'Orléans d'annuler la décision du 18 août 2009 par laquelle le président du conseil général de Loir-et-Cher a rejeté sa demande d'attribution du revenu de solidarité active.

Par une ordonnance n° 0903333 du 26 janvier 2010, le vice-président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté la demande de MmeA....

Par un arrêt n° 10NT00495 du 26 janvier 2012, la cour administrative d'appel de Nantes a annulé cette ordonnance du 26 janvier 2010 ainsi que la décision du président du conseil général de Loir-et-Cher du 18 août 2009.

Par une décision n° 357900 du 30 avril 2014, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Nantes du 26 janvier 2012 et renvoyé l'affaire devant la même cour.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés les 6 et 12 mars 2010, 12 et 13 avril 2010, 3 mai 2010, 22 septembre 2010, 22 décembre 2010, 19 avril 2011 et 27 juin 2014, MmeA..., représentée par MeC..., demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler la décision du président du conseil général de Loir-et-Cher du 18 août 2009 ;

2°) de lui ouvrir droit au bénéfice du revenu de solidarité active à compter du 1er juin 2009 ;

3°) d'enjoindre au président du conseil général de Loir-et-Cher de liquider ses droits dans un délai de trois mois à compter de l'arrêt à rendre ;

4°) de mettre à la charge du département de Loir-et-Cher le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- sa requête n'est pas tardive ;

- l'ordonnance attaquée est irrégulière, dès lors que les moyens de la demande de Mme A...n'étaient pas inopérants ;

- en effet, le président du conseil général n'était pas tenu de rejeter sa demande de revenu de solidarité active ;

- en estimant que Mme A...ne réside pas de manière stable et effective en France au motif qu'elle travaille plusieurs mois par an à l'étranger, le président du conseil général a commis une erreur de droit ;

- il résulte des dispositions des articles L. 262-2 du code de l'action sociale et des familles et de l'article R. 262-5 du même code que la circonstance qu'elle travaille plusieurs mois par an à l'étranger n'implique pas qu'elle ne réside pas en France de manière stable et effective, mais a pour seul effet de ne lui permettre de prétendre au bénéfice du revenu de solidarité active que pour les seuls mois civils complets de présence en France ;

- de juillet 2002 au 31 août 2009, elle a demeuré de manière stable et effective au Plessis-Dorin ;

- depuis le 31 août 2009, elle réside chez une tierce personne en raison de soucis financiers ;

- ses liens sociaux et familiaux sont en France ;

- les séjours successifs de plusieurs mois qu'elle a accomplis en Egypte l'ont été pour y travailler, faute de trouver un emploi en France, mais elle n'a jamais été expatriée ;

- le président du conseil général a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant qu'elle serait en situation de vie maritale avec le propriétaire du logement qu'elle louait au Plessis-Dorin ;

- dès lors qu'elle bénéficie de l'aide juridictionnelle, elle peut demander l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 25 novembre 2010, le 22 mars 2011 et le 3 septembre 2014, le département de Loir-et-Cher, représenté par la Selarl Casadei-Jung, avocats associés, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de Mme A...le versement de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 29 avril 2015, la clôture d'instruction a été fixée au 22 mai 2015.

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 4 août 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Mony,

- les conclusions de M. Durup de Baleine, rapporteur public.

1. Considérant que, par une décision du 18 août 2009, le président du conseil général de Loir-et-Cher a refusé à Mme A...le bénéfice du revenu de solidarité active, qu'elle avait sollicité le 14 mai précédent ; qu'elle relève appel de l'ordonnance du 26 janvier 2010 par laquelle le vice-président du tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ; que, dans le dernier état de ses écritures, elle demande à la cour, après avoir annulé la décision du 18 août 2009, de l'admettre au bénéfice du revenu de solidarité active à compter du 1er juin 2009 ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " Les présidents de tribunal administratif et de cour administrative d'appel, le vice-président du tribunal administratif de Paris et les présidents de formation de jugement des tribunaux et des cours peuvent, par ordonnance : / (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé " ;

3. Considérant qu'à l'appui de sa demande de première instance, Mme A...contestait ne pouvoir être regardée comme résidant en France de manière stable et effective ; que ce moyen n'était pas inopérant ; que, dès lors, en statuant par l'ordonnance attaquée prise au titre des dispositions du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, à une date à laquelle la demande de Mme A...ne relevait pas des cas alors énumérés à l'article R. 222-13 du même code et, par suite, devait être jugée par la formation collégiale prévue à l'article R. 222-18 de ce code, le premier juge a commis une irrégularité ; que, pour cette raison, Mme A...est fondée à soutenir que l'ordonnance du 26 janvier 2010 doit être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif d'Orléans ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice du revenu de solidarité active :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles : " Le revenu de solidarité active a pour objet d'assurer à ses bénéficiaires des moyens convenables d'existence, d'inciter à l'exercice d'une activité professionnelle et de lutter contre la pauvreté de certains travailleurs, qu'ils soient salariés ou non salariés " ; qu'aux termes de l'article L. 262-2 du même code : " Toute personne résidant en France de manière stable et effective, dont le foyer dispose de ressources inférieures à un revenu garanti, a droit au revenu de solidarité active (...) " ; que l'article R. 262-5 du même code dispose que : " Pour l'application de l'article L. 262-2, est considérée comme résidant en France la personne qui y réside de façon permanente ou qui accomplit hors de France un ou plusieurs séjours dont la durée de date à date ou la durée totale par année civile n'excède pas trois mois. (...) / En cas de séjour hors de France de plus de trois mois, l'allocation n'est versée que pour les seuls mois civils complets de présence sur le territoire " ;

6. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, pour bénéficier de l'allocation de revenu de solidarité active, une personne doit remplir la condition de ressources qu'elles mentionnent et résider en France de manière stable et effective ; que, pour apprécier si cette seconde condition est remplie, il y a lieu de tenir compte de son logement, de ses activités, ainsi que de toutes les circonstances particulières relatives à sa situation, parmi lesquelles le nombre, les motifs et la durée d'éventuels séjours à l'étranger et ses liens personnels et familiaux ; que la personne qui remplit les conditions pour bénéficier de l'allocation de revenu de solidarité active a droit, lorsqu'elle accomplit hors de France un ou plusieurs séjours dont la durée de date à date ou la durée totale par année civile n'excède pas trois mois, au versement sans interruption de cette allocation ; qu'en revanche, lorsque ses séjours à l'étranger excèdent cette durée de trois mois, le revenu de solidarité active ne lui est versé que pour les mois civils complets de présence en France ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'entre le mois de juillet 2002 et le 31 août 2009, Mme A...était locataire d'un logement au Plessis-Dorin (Loir-et-Cher) ; que, depuis le 1er septembre 2009, elle indique résider, lors de ses séjours en France, chez sa mère l'accueillant gracieusement dans son domicile, en Seine-et-Marne ; qu'ayant trouvé en 2006 un emploi à caractère saisonnier dans un établissement hôtelier en Egypte, Mme A...a, pour cette raison, séjourné dans ce pays des mois de septembre 2006 à mars 2007, des mois de septembre 2007 à mars 2008 et des mois de septembre 2008 à mai 2009 ; qu'elle est revenue en France le 14 mai 2009, à l'issue de l'année scolaire en Egypte, sa fille née en 2003 étant, comme l'indique MmeA..., scolarisée dans ce pays ; que, si la requérante soutient que, depuis le mois de juin 2009, elle réside en permanence en France, il résulte toutefois de l'instruction qu'elle est, en fait, retournée en Egypte dès le mois de septembre 2009, à nouveau pour y exercer une activité professionnelle, au moins jusqu'au mois de mars 2010 ; que, dans sa requête, en date du 6 mars 2010, elle indique travailler encore quelques mois en Egypte ; qu'il ressort de l'une des pièces produites en appel qu'au 7 septembre 2010 elle se trouvait dans ce pays ; que, si Mme A...louait un logement en France jusqu'au 31 août 2009, elle a indiqué qu'elle y était remplacée pendant ses absences hors de France, les pièces du dossier, en particulier la facture de consommation d'eau pour la période du 1er juillet 2008 au 30 juin 2009, ne permettant pas de caractériser une résidence stable de Mme A...dans ce logement pendant cette période ; que, depuis le 1er septembre 2009, elle ne justifie pas disposer d'une résidence en France, l'accueil gracieux par un tiers ne constituant pas une telle disposition ni, par suite, une résidence stable ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'entre juin et septembre 2009, la requérante aurait exercé une activité professionnelle en France ou y aurait effectivement cherché un emploi et ce, en dépit d'une inscription auprès de Pôle Emploi ; que, si MmeA..., qui est célibataire, indique conserver en France l'ensemble de ses liens personnels et familiaux, elle ne fournit toutefois, sur ce point, aucune précision, alors que, comme déjà dit, elle indique que sa fille a été scolarisée en Egypte jusqu'au mois de mai 2009 et qu'il ne ressort pas du dossier que, depuis, cette enfant aurait à un quelconque moment été scolarisée en France ; que la circonstance que la mère de la requérante réside en Seine-et-Marne ne permet de caractériser une résidence stable et effective de Mme A...en France ; qu'enfin, il résulte également de l'instruction que, revenue d'Egypte depuis le mois de juin 2013, Mme A...bénéficie du revenu de solidarité active depuis le mois de novembre 2013 ; qu'ainsi, le président du conseil général de Loir-et-Cher s'est livré à une exacte application des dispositions des articles L. 262-2 et R. 262-5 du code de l'action sociale et des familles en estimant que, faute pour Mme A...de résider en France de manière stable et effective, elle ne pouvait bénéficier de l'allocation de revenu de solidarité active à compter du mois de juin 2009 ; que, dès lors, les conclusions de la demande de Mme A...tendant à ce que ce bénéfice lui soit reconnu à compter du même mois ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné au président du conseil départemental de liquider les droits de Mme A...à l'allocation de revenu de solidarité active à compter du mois de juin 2009 doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge du département de Loir-et-Cher, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement d'une somme à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance du vice-président du tribunal administratif d'Orléans du 26 janvier 2010 est annulée.

Article 2 : La demande présentée par Mme A...devant le tribunal administratif d'Orléans et le surplus de ses conclusions en appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A...et au département de Loir-et-Cher.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président assesseur,

- M. Mony, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 octobre 2015.

Le rapporteur,

A.MONYLe président,

H. LENOIR

Le greffier,

C. GOY

2

N° 14NT01359


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01359
Date de la décision : 12/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Arnaud MONY
Rapporteur public ?: M. DURUP de BALEINE
Avocat(s) : SELARL CASADEI-JUNG et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 17/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-10-12;14nt01359 ?
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