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08/10/2015 | FRANCE | N°14NT00776

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 08 octobre 2015, 14NT00776


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Philippe Dupuis a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1203232 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregist

rés le 17 mars 2014 et le 27 juillet 2015, la SARL Philippe Dupuis, représentée par Me B..., demande à...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Philippe Dupuis a demandé au tribunal administratif d'Orléans de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1203232 du 21 janvier 2014, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 17 mars 2014 et le 27 juillet 2015, la SARL Philippe Dupuis, représentée par Me B..., demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif d'Orléans du 21 janvier 2014 ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros hors taxes au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que, d'une part, elle a été privée d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification de comptabilité et devant la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires et, d'autre part, que les propositions de rectification des 15 décembre 2010 et 28 juin 2011 sont insuffisamment motivées ;

- le rejet de sa comptabilité et le rehaussement de ses bases d'imposition ne sont pas justifiés ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 août 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Philippe Dupuis ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau,

- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., substituant Me B..., représentant la SARL Philippe Dupuis.

1. Considérant que la société à responsabilité limitée (SARL) Philippe Dupuis, qui exerce une activité de démolition à Vierzon, a fait l'objet d'une procédure de vérification de comptabilité portant sur les exercices clos en 2007, 2008 et 2009 ; qu'elle relève appel du jugement en date du 21 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2007, 2008 et 2009 et des pénalités correspondantes ;

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Considérant que la société requérante soutient, en premier lieu, que l'administration a entaché d'irrégularité la procédure d'imposition en méconnaissant l'obligation de tenir avec le contribuable vérifié un débat oral et contradictoire ; que toutefois si, eu égard aux garanties dont le livre des procédures fiscales entoure la mise en oeuvre d'une vérification de comptabilité, l'administration est tenue, lorsque, faisant usage de son droit de communication, elle consulte au cours d'une vérification tout ou partie de la comptabilité tenue par l'entreprise vérifiée mais se trouvant chez un tiers, de soumettre l'examen des pièces obtenues à un débat oral et contradictoire avec le contribuable, il n'en est pas de même lorsque lui sont communiqués des documents ne présentant pas le caractère de pièces comptables de l'entreprise vérifiée ; que, comme l'ont relevé les premiers juges, l'administration n'était en conséquence pas tenue de soumettre à un débat oral et contradictoire avec la SARL Philippe Dupuis les documents, obtenus par l'exercice de son droit de communication auprès de l'entreprise Mempontel, consistant en des bons d'achat établis par cette dernière et conservés par elle à l'appui de sa propre comptabilité ; que, par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que la société aurait été privée de la possibilité d'avoir avec le vérificateur, au cours de cette vérification, un débat oral et contradictoire, dès lors qu'il n'est pas établi que celui-ci se serait refusé, au cours des visites sur place au sein des locaux de l'entreprise, à tout échange de vues ; que les projets de rectification ont d'ailleurs été exposés, en ce qui concerne l'exercice clos en 2007, les 23 novembre et 6 décembre 2010, et s'agissant des exercices clos en 2008 et 2009, le 22 juin 2011 aux gérants de la société ; que, dans ces conditions, le moyen tiré du défaut de débat oral et contradictoire au cours de la vérification de comptabilité doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales : " Lorsque l'une des commissions visées à l'article L. 59 est saisie d'un litige ou d'un redressement, l'administration supporte la charge de la preuve en cas de réclamation, quel que soit l'avis rendu par la commission (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les vices de forme ou de procédure dont serait entaché l'avis de la commission départementale des impôts et des taxes sur le chiffre d'affaires n'affectent pas la régularité de la procédure d'imposition et ne sont, par suite, pas de nature à entraîner la décharge de l'imposition établie à la suite des rectifications ou redressements soumis à l'examen de la commission ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que cette commission, dans sa séance du 15 novembre 2011, n'a pas examiné les justificatifs produits en séance par la SARL Philippe Dupuis est inopérant à l'appui de la demande de décharge de l'imposition contestée ;

4. Considérant, en troisième lieu, que les propositions de rectification des 15 décembre 2010 en ce qui concerne 1'exercice clos en 2007 et 28 juin 2011 en ce qui concerne les exercices clos en 2008 et 2009 indiquent chacune, s'agissant des rehaussements afférents à des ventes de métaux aux établissements Mempontel ne figurant pas dans la comptabilité de la SARL Philippe Dupuis, les textes fondant les rehaussements, le montant de ceux-ci pour chacune des années concernées, les éléments recueillis par le service auprès de la société Mempontel dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, détaillés en annexe de chacune des propositions de rectification, exercice par exercice ; que ces annexes retracent l'ensemble des " bons d'achat " établis par la société Mempontel, avec, pour chacun, le montant total des achats, ventilé selon les modes de paiement, ainsi que, pour les paiements par chèque, le numéro de la formule de chèque correspondante ; que, dans ces conditions, les deux propositions de rectification étaient suffisamment motivées pour permettre au contribuable de présenter utilement ses observations, conformément aux prescriptions de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ; que le moyen tiré de ce que l'administration n'aurait pas reconstitué son chiffre d'affaires sur la base de plusieurs méthodes de reconstitution, comme le préconise la documentation administrative 4 G 334 n° 3, qui se rapporte au bien-fondé des impositions, est sans incidence sur la motivation des propositions de rectification et, par suite, sur la régularité de la procédure d'imposition ;

Sur le bien-fondé des impositions :

5. Considérant que, compte tenu des informations recueillies dans le cadre de l'exercice de son droit de communication, et après avoir constaté qu'aucun produit de cession de métaux, à quelque client que ce fût, n'était comptabilisé dans les comptes de la société requérante, alors même qu'elle avait réalisé de multiples et importants chantiers de démolition et déconstruction au cours de la période vérifiée, l'administration a écarté la comptabilité présentée comme non probante au motif des graves irrégularités l'affectant tenant notamment à l'absence de comptabilisation des recettes issues de la vente de ferrailles et autres métaux à la société Mempontel et des travaux réalisés pour la société Peradon au titre de l'exercice clos en 2009 ; qu'ainsi, elle a constaté que les 25 opérations de vente de ferrailles et autres métaux enregistrées par les établissements Mempontel au cours de l'année 2007, 30 au cours de l'année 2008 et 23 au cours de l'année 2009 n'avaient pas été retracées dans la comptabilité de la SARL Philippe Dupuis ; que ces gravats faisaient l'objet de contrats prévoyant leur évacuation sous la responsabilité de la SARL Philippe Dupuis jusqu'à leur évacuation par la société Mempontel ; qu'il est constant que cette société remettait par ailleurs en paiement des gravats un chèque ou des espèces à des salariés de la SARL Philippe Dupuis ou à l'un de ses gérants ; que, dans ces conditions, l'administration était fondée à regarder la comptabilité présentée comme irrégulière et, par suite, comme dépourvue de valeur probante ; que les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés ont été établis conformément à l'avis de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ; qu'il en résulte qu'en application des dispositions de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales, la SARL Philippe Dupuis supporte la charge de la preuve de l'exagération de ses bases d'imposition ; qu'elle peut, dès lors qu'elle n'est pas en mesure d'établir le montant exact de son bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés en s'appuyant sur une comptabilité régulière et probante, soit critiquer la méthode d'évaluation que l'administration a suivie et qu'elle doit faire connaître au contribuable, en vue de démontrer que cette méthode aboutit à une exagération des bases d'imposition, soit encore, aux mêmes fins, soumettre à l'appréciation du juge une nouvelle méthode d'évaluation permettant de déterminer les bases d'imposition avec une précision meilleure que celle qui pouvait être atteinte par la méthode utilisée par l'administration ;

6. Considérant que l'administration, pour reconstituer le montant des recettes omises afférentes à ces ventes de ferrailles et métaux, s'est fondée sur les bons d'achat établis par la société Mempontel, correspondant au compte " fournisseur " ouvert dans ses écritures comptables au titre de chacun des exercices en litige et a retenu les sommes y figurant ; qu'elle a ainsi rehaussé les résultats de la SARL Philippe Dupuis d'un montant de 154 460 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2007, 315 099 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2008 et de 70 182 euros au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2009 ;

7. Considérant, en premier lieu, que si la société requérante fait valoir qu'elle n'était pas propriétaire des gravats présents sur les chantiers, il résulte de l'instruction qu'ils faisaient l'objet de contrats prévoyant leur évacuation sous la responsabilité de la SARL Philippe Dupuis qui les a cédés à la société Mempontel ; que, dans ces conditions, alors même que les bons d'achats établis par cette société ne mentionnent pas l'intitulé complet de la SARL Philippe Dupuis, la société requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe de l'exagération de ses bases d'imposition ;

8. Considérant, en second lieu, que l'administration a rehaussé le chiffre d'affaires de la société requérante d'une somme de 29 000 euros hors taxes, correspondant à une facture d'un montant total toutes taxes comprises de 34 684 euros, émise à l'attention de la société Péradon, en date du 17 décembre 2009 ; que la SARL Philippe Dupuis a réalisé des travaux dans le cadre de la restructuration de la caserne Lariboisière à Bourges ; que l'examen de la comptabilité et des pièces justificatives présentées lors des opérations de vérification a permis de constater que la facture n° 13/12/09 du 17 décembre 2009 d'un montant de 29 000 euros hors taxes et 5 684 euros de taxe sur la valeur ajoutée adressée à la société Péradon n'a pas été comptabilisée et qu'aucun document n'a été apporté, au cours de la procédure, attestant de la nécessité d'établir un avoir du même montant avant la clôture de 1'exercice 2009 ; que la facture en cause a été acquittée par la société Péradon ; que si la société requérante fait valoir que cette facture a été émise par erreur et constitue une double facturation de prestations et se prévaut de l'établissement des deux avoirs établis en février et novembre 2010, il résulte de l'instruction que le montant des avoirs qu'elle a établis ne concorde pas avec celui de la facture du 17 décembre 2009 ; que, dans ces conditions, elle n'apporte pas la preuve qui lui incombe du caractère exagéré de ses bases d'imposition au titre de l'exercice clos en 2009 ;

Sur le bien-fondé des pénalités :

9. Considérant que la SARL Philippe Dupuis se borne à reprendre en appel, sans plus de précisions, le moyen qu'elle avait déjà présenté devant le tribunal administratif d'Orléans tiré de ce que l'application de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 du code général des impôts n'est pas justifiée, compte tenu des erreurs commises par l'administration sur le bénéficiaire des paiements effectués par la société Mempontel ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption du motif par lequel les premiers juges l'ont eux-mêmes, à bon droit, écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Philippe Dupuis n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme sollicitée par la SARL Philippe Dupuis au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Philippe Dupuis est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Philippe Dupuis et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 17 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 octobre 2015.

Le rapporteur,

M-P. Allio-Rousseau Le président,

F. Bataille

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00776


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00776
Date de la décision : 08/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : GARITEY

Origine de la décision
Date de l'import : 21/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-10-08;14nt00776 ?
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