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01/10/2015 | FRANCE | N°15NT00703

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 01 octobre 2015, 15NT00703


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...née B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 4 avril 2013 du maire de Dinan prononçant son licenciement pour inaptitude physique et de condamner la commune à lui verser la somme globale de 35 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'illégalité de son licenciement.

Par un jugement n° 1302498 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté contesté mais a rejeté les conclusions indemn

itaires de l'intéressée.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D...A...née B...a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler l'arrêté du 4 avril 2013 du maire de Dinan prononçant son licenciement pour inaptitude physique et de condamner la commune à lui verser la somme globale de 35 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'illégalité de son licenciement.

Par un jugement n° 1302498 du 18 décembre 2014, le tribunal administratif de Rennes a annulé l'arrêté contesté mais a rejeté les conclusions indemnitaires de l'intéressée.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 février 2015, Mme D...A..., représentée par MeC..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Rennes du 18 décembre 2014 en tant qu'il a rejeté ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner la commune de Dinan à lui verser la somme globale de 35 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de cette commune le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son préjudice moral, qui est la conséquence même de son licenciement, a été particulièrement important compte tenu de son âge et a été aggravé par les agissements fautifs de la commune qui n'a pas procédé à de véritables recherches de reclassement ; il devra être indemnisé à hauteur de 10 000 euros ;

- son préjudice matériel résulte du fait qu'elle a été privée d'une chance très sérieuse de conserver un emploi rémunérateur et qu'elle se trouve désormais dans une situation très difficile ; ce préjudice peut être évalué à 25 000 euros.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 mai 2015, la commune de Dinan, représentée par Me Gosselin, conclut au rejet de la requête, par la voie de l'appel incident à l'annulation du jugement attaqué en tant qu'il annulé l'arrêté du 4 avril 2013 du maire de la commune prononçant le licenciement de Mme A...et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de cette dernière au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le poste de Mme A...ne pouvait être adapté à son état de santé ;

- la commune a respecté son obligation de recherche de reclassement mais les deux options de reclassement envisageables n'étaient pas compatibles avec l'état de santé de l'intéressée, qui doit éviter le port de charges lourdes et les flexions régulières et répétées ;

- il ne peut lui être reproché de ne pas avoir recherché de postes adaptés dans d'autres collectivités ;

- le maire était en droit de prononcer le licenciement de Mme A...pour inaptitude physique ;

- l'intéressée ne justifie pas de la réalité du préjudice moral qu'elle invoque ;

- la requérante n'établit pas davantage avoir perdu une chance de reclassement.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- le décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 relatif au reclassement des fonctionnaires territoriaux reconnus inaptes à l'exercice de leurs fonctions ;

- le décret n°91-298 du 20 mars 1991 portant dispositions statutaires applicables aux fonctionnaires territoriaux nommés dans des emplois permanents à temps non complet ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Gélard,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public ;

- et les observations de Me Gosselin, avocat de la commune de Dinan.

1. Considérant que MmeA..., qui est née le 4 septembre 1964, a été recrutée en 1985 par la commune de Dinan en qualité d'agent d'entretien ; que le 1er janvier 2001, elle a été nommée stagiaire à temps non-complet puis titularisée, le 4 février 2002, en qualité d'adjoint technique de 2ème classe ; que, par un arrêté du 4 avril 2013, le maire de Dinan a prononcé son licenciement pour inaptitude physique ; que l'intéressée a saisi le tribunal administratif de Rennes d'une demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de la commune à lui verser la somme globale de 35 000 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis en raison de l'illégalité de son licenciement ; que, par un jugement du 18 décembre 2014, les juges de première instance ont annulé l'arrêté litigieux mais rejeté les conclusions indemnitaires présentées par MmeA... ; que l'intéressée relève appel de ce jugement dans cette dernière mesure ; que, par la voie de l'appel incident, la commune de Dinan conteste le même jugement en tant qu'il a annulé l'arrêté de son maire du 4 avril 2013 prononçant le licenciement pour inaptitude physique de MmeA... ;

Sur la légalité de l'arrêté du 4 avril 2013 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 81 de la loi du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : "Les fonctionnaires territoriaux reconnus, par suite d'altération de leur état physique, inaptes à l'exercice de leurs fonctions peuvent être reclassés dans un autre cadre d'emplois, emplois ou corps s'ils ont été déclarés en mesure de remplir les fonctions correspondantes. Le reclassement est subordonné à la présentation d'une demande par l'intéressé." ; qu'aux termes de l'article 41 du décret du 20 mars 1991 susmentionné : "Le fonctionnaire qui est définitivement inapte physiquement à l'exercice de ses fonctions à l'issue d'un congé de maladie, de grave maladie, d'accident de travail, de maternité ou d'adoption ou de période de disponibilité accordée au titre de l'article 40 ci-dessus et qui ne peut être reclassé en application du décret n° 85-1054 du 30 septembre 1985 susvisé est licencié." ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le comité médical a émis le 7 septembre 2011 un avis défavorable sur l'aptitude de Mme A...à reprendre ses fonctions ; que cet avis a été confirmé le 5 décembre 2012, avec mention favorable au placement de l'agent en disponibilité et à la recherche d'un reclassement ; que le maire de la commune a, par l'arrêté contesté du 4 avril 2013, prononcé le licenciement de l'intéressée pour inaptitude physique définitive en dépit de l'avis défavorable émis par la commission administrative paritaire le 25 mars 2013 ; que si la commune de Dinan indique avoir proposé le 5 janvier 2012 à Mme A...de financer un bilan de compétences pour évaluer ses possibilités de reclassement, lequel a été réalisé du 7 septembre au 16 novembre 2012 par le centre de formation professionnelle de Quévert, elle se borne toutefois à indiquer sans apporter d'élément justificatif que les deux postes de reclassement envisageables, en restauration scolaire ou en bibliothèque, n'offraient pas de possibilités réelles de reclassement pour l'intéressée, soit en raison des restrictions médicales liées à la pathologie de Mme A..., soit en raison de l'absence de compétence de l'intéressée dans les métiers du livre ou dans le domaine administratif ; que ces affirmations ne suffisent pas à établir la réalité des efforts de reclassement de la commune, dont l'existence a été contestée par la commission administrative paritaire dans sa séance du 25 mars 2013 ; que, dès lors, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que l'arrêté du maire du 4 avril 2013 prononçant le licenciement de Mme A...était entaché d'une illégalité justifiant son annulation ;

Sur les conclusions indemnitaires de MmeA... :

4. Considérant que si l'illégalité tirée de l'insuffisance de recherche de reclassement est constitutive d'une faute, cette dernière n'est de nature à engager la responsabilité de la commune de Dinan à l'égard de l'agent qu'à raison des préjudices qui lui seraient directement imputables ;

5. Considérant qu'alors même que la commune de Dinan ne justifie pas avoir effectué des recherches de reclassement suffisantes pour MmeA..., il ne résulte pas de l'instruction que l'aptitude physique et professionnelle de l'intéressée aurait permis à celle-ci de conserver un emploi au sein de cette collectivité ; que, par suite, la requérante ne peut prétendre que l'illégalité fautive rappelée au point 3 l'aurait privée d'une chance sérieuse de conserver un emploi et les rémunérations qui s'y attachent ; qu'il est constant, par ailleurs, qu'avant la mesure de licenciement litigieuse Mme A... ne percevait plus, d'abord au titre de ses droits à congé maladie puis dans sa position de mise en disponibilité, qu'un salaire mensuel de 455,41 euros, alors qu'elle a ensuite bénéficié d'une prime de licenciement de 4 980 euros puis de l'allocation d'aide au retour à l'emploi à hauteur de 756,90 euros par mois à compter du 21 mai 2013 pour 730 jours ; que, dans ces conditions, la requérante ne peut être regardée comme établissant la réalité du préjudice matériel et financier évalué à 25 000 euros qu'elle invoque ;

6. Considérant, en revanche, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, que les circonstances dans lesquelles a eu lieu le licenciement litigieux de MmeA..., laquelle produit en appel un certificat médical faisant état d'un syndrome anxieux et de troubles du sommeil ayant nécessité un suivi médical, sont de nature à établir la réalité de troubles dans ses conditions d'existence, dont il sera fait une juste évaluation en lui allouant à ce titre une indemnité de 2 000 euros ;

7. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est fondée que dans la limite mentionnée au point 6 à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ; que les conclusions d'appel incident de la commune de Dinan doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de MmeA..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement à la commune de Dinan de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Dinan le versement à Mme A...de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1302498 du tribunal administratif de Rennes en date du 18 décembre 2014 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions indemnitaires présentées par MmeA....

Article 2 : La commune de Dinan est condamnée à verser à Mme A...la somme de 2 000 euros.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... et les conclusions présentées par la commune de Dinan devant la cour sont rejetées.

Article 4 : La commune de Dinan versera à Mme A...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A...et à la commune de Dinan.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Gélard, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er octobre 2015.

Le rapporteur,

V. GÉLARDLe président,

I. PERROT

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15NT00703


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 15NT00703
Date de la décision : 01/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Valérie GELARD
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : LEMAIRE VINCENT

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-10-01;15nt00703 ?
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