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28/07/2015 | FRANCE | N°14NT02621

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 28 juillet 2015, 14NT02621


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part l'arrêté du 2 octobre 2014 du préfet de la Loire-Atlantique décidant sa remise aux autorités autrichiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté pris le même jour par le préfet de la Loire-Atlantique portant assignation à résidence.

Par un jugement n° 1408338 du 6 octobre 2014, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant

la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 octobre 2014, MmeF..., représentée par MeD......

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F...a demandé au tribunal administratif de Nantes d'annuler, d'une part l'arrêté du 2 octobre 2014 du préfet de la Loire-Atlantique décidant sa remise aux autorités autrichiennes responsables de l'examen de sa demande d'asile et, d'autre part, l'arrêté pris le même jour par le préfet de la Loire-Atlantique portant assignation à résidence.

Par un jugement n° 1408338 du 6 octobre 2014, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nantes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 10 octobre 2014, MmeF..., représentée par MeD..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat délégué du tribunal administratif de Nantes du 6 octobre 2014 ;

2°) d'annuler les arrêtés du préfet de la Loire-Atlantique du 2 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour en tant que demandeur d'asile dans un délai de trente jours suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté portant remise aux autorités autrichiennes est insuffisamment motivé en ce qui concerne les éléments essentiels d'application de la procédure Dublin, notamment la preuve de sortie de l'Union européenne et le lien marital, de nature à révéler une absence d'examen suffisant ; il incombait à l'autorité administrative de démontrer en quoi les pièces qu'elle a produites étaient douteuses pour le mentionner dans l'arrêté contesté ;

- l'autorité administrative n'a pas respecté le droit à l'information du demandeur d'asile tel que prévu par les articles 4 et 5 du règlement 604/2013/UE dès lors qu'il n'est pas établi qu'elle s'est vue remettre les brochures spécifiques prévues par ces dispositions ; l'information qui lui a été donnée n'a d'ailleurs pas été complète ;

- contrairement à ce qu'a estimé le premier juge, elle est fondée à exciper de l'illégalité de la décision lui refusant l'admission au séjour dès lors qu'elle n'a pas disposé des garanties prévues par les articles 4 et 5 du règlement 604/2013/UE et alors qu'au moment où elle a été prise la demande d'asile ne relevait pas encore des autorités autrichiennes ;

- la décision de réadmission méconnaît aussi le 2 de l'article 19 du règlement 604/2013/UE, dès lors qu'elle est sortie du territoire de l'Union européenne durant plus de trois mois et qu'ainsi sa demande d'asile devait être regardée comme une première demande ; elle méconnaît également les dispositions du 3 du même article, les obligations des autorités autrichiennes ayant pris fin puisque sa demande d'asile y a déjà été rejetée ;

- c'est à tort que le premier juge a estimé que les preuves de sa sortie de l'Union européenne étaient insuffisantes alors que les éléments produits sont constitutifs d'un faisceau d'indices ;

- l'arrêté portant remise aux autorités autrichiennes vise les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales sans toutefois procéder à un examen précis et personnalisé des risques encourus en cas de retour en Géorgie ;

- les dispositions de l'article 17 du Règlement 604/2013/UE ont été méconnues dans la mesure où le préfet n'a pas fait usage des clauses discrétionnaires et humanitaires, sans prendre en compte sa situation maritale ni son état de santé en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté portant assignation à résidence a été signé par une autorité incompétente et est insuffisamment motivé ;

- elle est fondée à exciper de l'illégalité de l'arrêté portant remise aux autorités autrichiennes en ce qui concerne l'assignation à résidence ;

- les dispositions des articles L. 561-2 et du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ont été méconnues en l'absence de risque de fuite.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 janvier 2015, le préfet d'Ille-et-Vilaine conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le signataire des arrêtés contestés disposait d'une délégation de compétence ;

- l'arrêté portant remise aux autorités autrichiennes est suffisamment motivé ; il y est fait mention des allégations de la requérante sur sa sortie de l'Union européenne ainsi que des pièces qu'elle a produit ;

- la requérante s'est vue remettre l'ensemble des documents requis au titre de son information et notamment le guide du demandeur d'asile ainsi qu'en atteste sa signature apposée sur le formulaire de demande d'admission au séjour au titre de l'asile ;

- Mme F...a bénéficié de l'entretien prévu à l'article 5 du règlement 604/2013/UE ;

- la requérante n'est pas fondée à exciper d'un éventuel manquement aux dispositions des articles 4 et 5 du règlement 604/2013/UE entachant le refus d'admission provisoire au séjour ;

- les dispositions du 1° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile permettent de refuser la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour lorsqu'il ressort de l'examen du dossier que la demande d'asile relève d'un autre état membre ;

- au vu des dispositions du 2° et du 3° de l'article 19 du règlement 604/2013/UE, il appartient désormais au seul Etat requis d'établir que la requérante avait quitté le territoire autrichien en exécution d'une mesure d'éloignement ; les autorités autrichiennes ne l'ont pas établi dès lors qu'elles ont accepté sa prise en charge ; l'acte de mariage qu'elle produit ne peut être retenu en tant qu'élément de preuve et la réalité de cette union n'est pas corroborée par le récit de celui qu'elle présente comme son mari ; les autres pièces ne sont pas de nature à attester la réalité d'un séjour hors Union européenne ;

- la requérante ne peut sérieusement invoquer la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales s'agissant de la remise aux autorités autrichiennes dès lors que l'Autriche est un pays de l'Union européenne et partie à la convention de Genève ;

- il n'était pas tenu de faire usage de la clause discrétionnaire prévue par les dispositions de l'article 17 du Règlement 604/2013/UE alors que sa situation ne comportait aucun circonstance d'ordre médical ou familial le justifiant ;

- l'arrêté l'assignant à résidence est suffisamment motivé ;

- la requérante n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de l'arrêté portant remise aux autorités autrichiennes en ce qui concerne l'assignation à résidence ;

- le risque de fuite était avéré.

Mme F...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du président de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes du 14 janvier 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement (CE) n° 2725/2000 du conseil du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin ;

- le règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auger.

- et les observations de Me D...pour MmeF....

1. Considérant que MmeF..., ressortissante géorgienne, serait entrée en France le 3 juin 2014 selon ses déclarations ; qu'elle a sollicité le statut de réfugié auprès du préfet de la Loire-Atlantique le 6 août 2014 ; que, le 12 août 2014, le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de l'admettre provisoirement au séjour, la consultation du fichier Eurodac ayant montré que ses empreintes digitales avaient été enregistrées par les autorités autrichiennes le 6 décembre 2006 et l'a informée de ce qu'il avait sollicité ces autorités en vue de sa réadmission ; que celles-ci ont accepté le 13 août 2014 de reprendre en charge MmeF... ; que le préfet a notamment estimé que, si la requérante alléguait avoir regagné son pays d'origine au mois de janvier 2011 après être entrée en Autriche, elle ne l'établissait pas ; que, le 2 octobre 2014, le préfet a pris une décision portant remise de l'intéressée aux autorités autrichiennes, ainsi qu'un arrêté l'assignant à résidence dans le département de la Loire-Atlantique pour une durée de quarante cinq jours ; que Mme F...relève appel du jugement du 6 octobre 2014 par lequel le magistrat délégué du tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions ;

En ce qui concerne la décision du 2 octobre 2014 portant remise aux autorités autrichiennes :

2. Considérant que Mme F...soutient, par voie d'exception, que la décision litigieuse serait illégale en raison de l'illégalité qui affecte la décision du 12 août 2014 du préfet de la Loire-Atlantique rejetant sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile, au motif que cette décision serait intervenue sans qu'aient été respectées les obligations d'information imposées par les articles 4 et 5 du règlement (UE) n° 604/2013 du parlement européen et du conseil en date du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des Etats membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 susvisé : " Droit à l'information /1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un Etat membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : /a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un Etat membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un Etat membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'Etat membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée ; /b) des critères de détermination de l'Etat membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un Etat membre peut mener à la désignation de cet Etat membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères ; /c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les Etats membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations ; /d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert ; /e) du fait que les autorités compétentes des Etats membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement ; /f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. /2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les Etats membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3. /Si c'est nécessaire à la bonne compréhension du demandeur, les informations lui sont également communiquées oralement, par exemple lors de l'entretien individuel visé à l'article 5.FR 29.6.2013 Journal officiel de l'Union européenne L. 180/37/3. La commission rédige, au moyen d'actes d'exécution, une brochure commune ainsi qu'une brochure spécifique pour les mineurs non accompagnés, contenant au minimum les informations visées au paragraphe 1 du présent article. Cette brochure commune comprend également des informations relatives à l'application du règlement (UE) n° 603/2013 et, en particulier, à la finalité pour laquelle les données relatives à un demandeur peuvent être traitées dans Eurodac. La brochure commune est réalisée de telle manière que les Etats membres puissent y ajouter des informations spécifiques aux Etats membres. Ces actes d'exécution sont adoptés en conformité avec la procédure d'examen visée à l'article 44, paragraphe 2, du présent règlement. " ; qu'aux termes de l'article 5 du même règlement : " Afin de faciliter le processus de détermination de l'État membre responsable, l'État membre procédant à cette détermination mène un entretien individuel avec le demandeur. Cet entretien permet également de veiller à ce que le demandeur comprenne correctement les informations qui lui sont fournies conformément à l'article 4 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le demandeur d'asile auquel l'administration entend faire application du règlement du 26 juin 2013 doit se voir remettre, dès le moment où le préfet est informé de ce qu'il est susceptible d'entrer dans le champ d'application de ce règlement, et, en tous cas, avant la décision par laquelle l'autorité administrative décide de refuser l'admission provisoire au séjour de l'intéressé au motif que la France n'est pas responsable de sa demande d'asile, une information complète sur ses droits, par écrit et dans une langue qu'il comprend ; que cette information doit comprendre l'ensemble des éléments prévus au paragraphe 1 de l'article 4 du règlement ; qu'eu égard à la nature desdites informations, la remise par l'autorité administrative de la brochure prévue par les dispositions précitées constitue pour le demandeur d'asile une garantie ;

4. Considérant qu'il est constant que Mme F...a reçu une brochure d'information prévue par les dispositions de l'article 4 précité, ainsi qu'en atteste le formulaire de demande d'admission au séjour au titre de l'asile, signé par l'intéressée le 6 août 2014 ; qu'il ressort notamment des pièces du dossier qu'elle s'est précisément vue remettre, d'une part, le document A " J'ai demandé l'asile dans l'Union européenne - quel pays sera responsable de ma demande d'asile ' " dans sa version actualisée du mois avril 2014 et, d'autre part, le document B " Je suis sous procédure Dublin - qu'est-ce que cela signifie ' ", lequel comprend les informations désormais nécessaires aux demandeurs d'une protection internationale en vertu de l'article 4 du Règlement (UE) n°604/2013 ; qu'ainsi et quand bien même la version du guide du demandeur d'asile qui lui a été remise n'était pas celle réécrite pour l'application du règlement précité, la requérante a bien bénéficié d'une information complète sur ses droits ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier que Mme F...a bénéficié d'un entretien individuel de quarante-cinq minutes avec l'assistance d'un interprète en langue géorgienne ; que, dans ces conditions, Mme F...n'est pas fondée à soutenir qu'elle a été privée de la garantie prévue par les dispositions précitées ; qu'il suit de là que l'exception d'illégalité du refus d'admission en qualité de demandeur d'asile doit être écarté ;

5. Considérant que la décision contestée a été signée par Mme A...G..., chef du service l'immigration et de l'intégration en vertu d'une délégation de signature consentie par un arrêté du 31 août 2014 du préfet de la Loire-Atlantique, régulièrement publié au recueil des actes administratifs, dont l'article 2 prévoit qu'en cas d'absence ou d'empêchement de M.C..., directeur de la réglementation et des libertés publiques, elle est habilitée à signer les décisions relatives aux attributions du service de l'immigration et de l'intégration, lesquelles incluent spécifiquement les décisions de réadmission dans un pays de l'Union européenne ; que, dès lors, le moyen tiré de l'incompétence de son auteur manque en fait ;

6. Considérant que la décision litigieuse comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement ; qu'en particulier le préfet mentionne que Mme F... avait précédemment déposé une demande d'asile auprès des autorités autrichiennes en 2005 et ne produisait pas de pièces de nature à démontrer un retour en Géorgie en janvier 2011 ; que le préfet a également fait état de la présence de celui qu'elle présente comme son compagnon, lequel a fait l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'elle est, dès lors, régulièrement motivée ;

7. Considérant qu'il ressort des termes mêmes de la décision contestée que le préfet s'est livré à l'examen particulier de la situation personnelle et familiale de la requérante et a tenu compte de l'ensemble des éléments qui lui étaient soumis ;

8. Considérant qu'aux termes de l'article 18 du règlement (CE) du 26 juin 2013 : " 1. L'État membre responsable en vertu du présent règlement est tenu de : (...) d) reprendre en charge, dans les conditions prévues aux articles 23, 24, 25 et 29, le ressortissant de pays tiers (...) dont la demande a été rejetée et qui a présenté une demande auprès d'un autre État membre ou qui se trouve, sans titre de séjour, sur le territoire d'un autre État membre " ; qu'aux termes de l'article 19 du même règlement : " 2. Les obligations prévues à l'article 18, paragraphe 1, cessent si l'État membre responsable peut établir, lorsqu'il lui est demandé de prendre ou reprendre en charge un demandeur ou une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), que la personne concernée a quitté le territoire des États membres pendant une durée d'au moins trois mois, à moins qu'elle ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité délivré par l'État membre responsable. (...) / 3. Les obligations prévues à l'article 18, paragraphe 1, points c) et d), cessent lorsque l'État membre responsable peut établir, lorsqu'il lui est demandé de reprendre en charge un demandeur ou une autre personne visée à l'article 18, paragraphe 1, point c) ou d), que la personne concernée a quitté le territoire des États membres en exécution d'une décision de retour ou d'une mesure d'éloignement délivrée à la suite du retrait ou du rejet de la demande " ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que le ressortissant d'un pays tiers ayant présenté en France une demande d'asile peut être réadmis dans l'Etat membre auprès duquel il a déjà présenté une demande d'asile, même si celle-ci a été rejetée, dès lors que, d'une part, il n'a pas quitté cet Etat membre en exécution d'une décision de retour ou d'une mesure d'éloignement, et, d'autre part, qu'il n'a pas quitté le territoire des Etats membres durant au moins trois mois ;

9. Considérant que l'intéressée soutient que la décision de réadmission méconnaît les dispositions précitées en alléguant avoir quitté le territoire de l'Union européenne durant plus de trois mois ; que, toutefois les pièces produites par la requérante consistant en un certificat de mariage non corroboré par le récit de celui qu'elle présente comme son conjoint, une attestation d'un médecin géorgien du 20 avril 2014, une réservation d'un hôtel turc et un simple billet d'avion ne peuvent être regardés comme des indices suffisants pour témoigner d'une sortie du territoire autrichien durant plus de trois mois ; que, par ailleurs, les autorités de ce pays, compétentes en la matière, en acceptant la prise en charge de la requérante ont estimé qu'un tel départ n'était pas établi ;

10. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 7 du présent arrêt le préfet a apprécié la situation individuelle de Mme F... ; que la réalité d'une situation particulière sur le plan personnel ou médical ne ressort pas des pièces du dossier ; que, dès lors, le préfet de la Loire-Atlantique n'a pas méconnu l'article 17 du règlement (UE) 604/2013 du 26 juin 2013 en s'abstenant de faire usage du pouvoir discrétionnaire de conserver l'examen de sa demande d'asile ;

11. Considérant que Mme F... ne peut utilement invoquer le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où l'Autriche est un Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne la décision du 2 octobre 2014 portant assignation à résidence :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant réadmission vers l'Autriche doit être écarté ;

13. Considérant que pour les mêmes motifs que ceux évoqués au point 5 du présent arrêt, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision portant assignation à résidence doit être écarté ;

14. Considérant que cette décision vise les textes dont il est fait application, rappelle la situation administrative de l'intéressée, ses conditions d'hébergement et les garanties qu'elle présente ; que, dès lors, le moyen tiré de ce que cet arrêté serait insuffisamment motivé ne peut qu'être écarté ;

15. Considérant qu'aux termes de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans les cas prévus à l'article L. 551-1, l'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger pour lequel l'exécution de l'obligation de quitter le territoire demeure une perspective raisonnable et qui présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque, mentionné au II de l'article L. 511-1, qu'il se soustraie à cette obligation. Les trois derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve de la durée maximale de l'assignation, qui ne peut excéder une durée de quarante-cinq jours, renouvelable une fois. " ; qu'aux termes de l'article L. 551-1 du même code : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : 1° Doit être remis aux autorités compétentes d'un Etat membre de l'Union européenne en application des articles L. 531-1 ou L. 531-2 (...) " ; que l'assignation à résidence prévue par les dispositions précitées de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile constitue une mesure alternative au placement en rétention prévu par les dispositions de l'article L. 551-1 du même code, dès lors qu'une mesure d'éloignement demeure une perspective raisonnable et que l'étranger présente des garanties de représentation effectives propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à celle-ci ;

16. Considérant que, si elle n'a pas été placée en rétention administrative, il ressort des pièces du dossier que la requérante est susceptible de se soustraire à la mesure de remise aux autorités autrichiennes ; que, dès lors, le préfet de la Loire-Atlantique a pu, sans erreur de droit, décider de son assignation à résidence ;

17. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme F... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses demandes ; que, par voie de conséquence, les conclusions de la requérante aux fins d'injonction et d'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent également qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme F...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H...F...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique .

Délibéré après l'audience du 7 juillet 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- M.E..., faisant fonction de premier conseiller ,

- M. Auger, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 28 juillet 2015.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. B...

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N° 14NT02621


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT02621
Date de la décision : 28/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : NERAUDAU

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-07-28;14nt02621 ?
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