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16/07/2015 | FRANCE | N°14NT01361

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 16 juillet 2015, 14NT01361


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'établissement public de santé mentale de Caen à lui verser une indemnité de 15 000 euros en réparation des préjudices résultant des agissements de harcèlement moral dont il estimait avoir été victime dans l'exercice de ses fonctions.

Par un jugement n° 1300732 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistr

és les 16 mai 2014 et 19 juin 2015, M. C...A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Caen de condamner l'établissement public de santé mentale de Caen à lui verser une indemnité de 15 000 euros en réparation des préjudices résultant des agissements de harcèlement moral dont il estimait avoir été victime dans l'exercice de ses fonctions.

Par un jugement n° 1300732 du 20 mars 2014, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 16 mai 2014 et 19 juin 2015, M. C...A..., représenté par Me B..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Caen du 20 mars 2014 ;

2°) de condamner l'établissement public de santé mentale de Caen à lui verser la somme de 15 000 euros assortie des intérêts au taux légal à compter de la date de sa réclamation préalable ;

3°) de mettre à la charge de l'établissement public de santé mentale de Caen la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'ont retenu les premiers juges, l'agression verbale dont il a été victime le 28 mai 2008 est établie et cet incident a donné lieu à un arrêt de travail dont l'imputabilité à cet incident a été reconnue par la commission de réforme du département du Calvados dans sa séance du 4 novembre 2008 ;

- le contrôle de ses horaires de travail le 26 juin 2009, l'absence d'évolution de sa notation au titre de l'année 2008, ainsi que le refus de lui accorder un poste de chef d'équipe des services de sécurité incendie et d'assistance à personnes (SSIAP2) et la tenue vestimentaire correspondante constituent des agissements répétés de harcèlement moral alors qu'il avait une évolution de carrière satisfaisante ;

- la situation de harcèlement moral n'a cessé qu'avec son affectation dans un autre service à partir du mois de février 2010, mais il a subi durant cette période une souffrance au travail et il est désormais privé du déroulement de carrière qu'il souhaitait dans le secteur de la sécurité et de l'assistance aux personnes et aux biens ;

- la responsabilité de l'établissement est engagée du fait de ces agissements fautifs et il est fondé à demander le versement d'une indemnité de 15 000 euros en réparation de l'ensemble des préjudices subis.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 octobre 2014, l'établissement public de santé mentale de Caen, représenté par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. A... la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Specht,

- les conclusions de M. Giraud, rapporteur public,

- et les observations de M.A....

1. Considérant que M.A..., employé au sein du centre hospitalier spécialisé de Caen depuis 1988 en qualité d'ouvrier professionnel puis, depuis 2012, de maître ouvrier, était affecté en service de nuit au service accueil-sécurité de l'établissement jusqu'en février 2010, date à laquelle il a été affecté en qualité de magasinier dans un autre service ; qu'il a adressé le 20 décembre 2012 au directeur de l'établissement une demande de versement d'une indemnité de 15 000 euros en réparation des préjudices subis du fait d'agissements de harcèlement moral dont il estimait avoir été victime depuis un incident survenu le 28 mai 2008 jusqu'à la décision de changement de service en février 2010 ; qu'il relève appel du jugement du 20 mars 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'établissement hospitalier à lui verser la somme demandée ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.... " ; que, d'une part, il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement ; qu'il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement ; que la conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile ; que, d'autre part, pour apprécier si des agissements dont il est allégué qu'ils sont constitutifs d'un harcèlement moral revêtent un tel caractère, le juge administratif doit tenir compte des comportements respectifs de l'agent auquel il est reproché d'avoir exercé de tels agissements et de l'agent qui estime avoir été victime d'un harcèlement moral ;

3. Considérant que M. A...soutient avoir été victime, le 28 mai 2008, dans le cadre de ses fonctions d'agent d'accueil et de surveillance, d'une agression verbale et de menaces de la part d'un collègue de travail nouvellement embauché alors qu'il intervenait dans une altercation opposant un de ses collègues à cet agent, et avoir été, le lendemain, désavoué par le directeur adjoint des services économiques, qui lui a adressé des reproches injustifiés sur son comportement, l'a menacé de sanction et de l'affecter en service de jour, et a développé une attitude hostile à son égard ; qu'il indique avoir subi à la suite de cet incident un contrôle de ses horaires de présence le 26 juin 2009, une absence d'évolution de sa notation au titre de l'année 2008, des refus injustifiés de congés et un refus de le nommer sur un poste correspondant au diplôme de chef d'équipe des services de sécurité incendie et d'assistance à personnes (SSIAP2) qu'il détenait et de lui attribuer la tenue vestimentaire correspondant à ces fonctions, ce qui lui aurait permis le déroulement de carrière souhaité dans le secteur de la sécurité incendie et de l'assistance aux personnes ; qu'il fait valoir que ces faits ont eu sur lui un retentissement psychologique important qui a justifié plusieurs arrêts de travail ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que si la commission de réforme du département du Calvados a admis, dans son avis du 4 novembre 2008, l'imputabilité au service de l'arrêt de travail du 29 mai au 13 juin 2008 consécutif aux menaces et insultes dont M. A...avait fait l'objet, l'attitude partiale et négative à l'encontre de l'agent du directeur adjoint des services économiques, qui l'aurait menacé de sanction et de modifier ses heures de service à la suite de cet incident, n'est en revanche pas établie ; qu'au demeurant M. A... n'a subi aucune sanction ni changement d'affectation ou d'horaires de travail ; que, par ailleurs, les agissements reprochés à la direction du centre hospitalier spécialisé de Caen révélés, selon le requérant, par l'absence d'évolution de sa notation professionnelle au titre de l'année 2008, ou par la lettre qui lui a été adressée par le directeur adjoint des services économiques lui demandant des explications sur son départ prématuré avant la fin de son service le 26 juin 2009, plus d'un an après les faits invoqués, de même que les refus opposés aux demandes de congés de l'agent ne peuvent être regardés comme excédant le cadre de l'exercice normal du pouvoir hiérarchique et de l'intérêt du service ; qu'enfin les deux postes de responsables de la sécurité incendie que comptait l'établissement hospitalier au cours des deux années concernées avaient été confiés à deux agents ayant obtenu leurs qualification SSIAP 3 et SSIAP 2 avant M. A..., et aucun recrutement supplémentaire ni vacance de poste n'étaient prévus, de sorte que le requérant, qui ne détenait aucun droit à être nommé sur un tel poste du seul fait de la qualification qu'il avait obtenue, n'est pas fondé à soutenir qu'il aurait été volontairement privé par sa direction de l'affectation au poste de responsable adjoint de la sécurité incendie ainsi que de l'attribution de la tenue vestimentaire correspondante, ni que le déroulement de sa carrière dans le secteur de la sécurité incendie et l'assistance aux personnes en aurait pour cette raison été gravement affecté ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les faits invoqués par M. A..., même pris dans leur ensemble, et alors même qu'ils ont sensiblement affecté cet agent sur le plan psychologique, ne peuvent être regardés comme des agissements constitutifs de harcèlement moral au sens des dispositions précitées de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983, de nature à lui ouvrir droit à réparation ; qu'il suit de là que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'établissement public de santé mentale de Caen, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au même titre par l'établissement public de santé mentale de Caen ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'établissement public de santé mentale de Caen tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et à l'établissement public de santé mentale de Caen.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- Mme Perrot, président de chambre,

- Mme Specht, premier conseiller,

- Mme Gélard, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 16 juillet 2015.

Le rapporteur,

F. SPECHTLe président,

I. PERROT

Le greffier,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales de la santé et des droits des femmes en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01361


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01361
Date de la décision : 16/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme PERROT
Rapporteur ?: Mme Frédérique SPECHT
Rapporteur public ?: M. GIRAUD
Avocat(s) : SELARL JURIADIS

Origine de la décision
Date de l'import : 01/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-07-16;14nt01361 ?
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