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13/07/2015 | FRANCE | N°13NT01789

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 13 juillet 2015, 13NT01789


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Exrad a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner le centre hospitalier de Pithiviers à lui verser la somme de 699 468,66 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des préjudices résultant de la résiliation du marché d'interprétation à distance de clichés radio-photographiques dont elle était titulaire.

Par un jugement n° 1204152 du 18 avril 2013, le tribunal administratif d'Orléans a condamné le centre hospitalier de Pithivie

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Exrad a demandé au tribunal administratif d'Orléans de condamner le centre hospitalier de Pithiviers à lui verser la somme de 699 468,66 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation, en réparation des préjudices résultant de la résiliation du marché d'interprétation à distance de clichés radio-photographiques dont elle était titulaire.

Par un jugement n° 1204152 du 18 avril 2013, le tribunal administratif d'Orléans a condamné le centre hospitalier de Pithiviers à lui verser la somme de 15 000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 décembre 2012.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 20 juin 2013, la SARL Exrad dont le siège social est sis 59 rue d'Illiers, Orléans (45 000), représentée par MeA..., demande à la cour :

1°) de réformer le jugement du 18 avril 2013 du tribunal administratif d'Orléans en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions indemnitaires ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Pithiviers à lui verser la somme totale de 699 468,66 euros avec intérêts au taux légal en réparation des gains manqués, des pertes subies et de son préjudice d'image issus de la résiliation du marché dont elle était bénéficiaire ;

3°) de mettre à la charge de centre hospitalier de Pithiviers la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle ne s'était engagée contractuellement que pour une rémunération de 130 000 euros, laquelle ne comprend qu'une année de prestation ; l'acte d'engagement du 1er mars 2007 est insuffisamment précis ; le montant total minimum du marché est de 520 000 euros minimum pour quatre années ;

- elle justifie d'un taux de marge de 90 % compte tenu du fait qu'un contrat similaire lui permettait de compenser ses charges fixes, ce que ne conteste pas sérieusement le centre hospitalier ; c'est à tort que le tribunal n'a pas retenu son mode de calcul ;

- la somme de 15 000 euros retenue par les premiers juges est très insuffisante concernant une prestation intellectuelle avec forte valeur ajoutée portant sur 80 000 actes par an.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 septembre 2013, le centre hospitalier de Pithiviers demande à la cour :

1°) de rejeter la requête ;

2°) par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement du tribunal administratif d'Orléans du 18 avril 2013 en tant qu'il n'a pas retenu l'exception de prescription quadriennale s'agissant des créances nées au courant de l'année 2007 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de la SARL Exrad une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il était fondé à prononcer la résiliation du marché pour des motifs d'intérêt général ;

- les créances nées au courant de l'année 2007 sont prescrites au titre de la déchéance quadriennale ;

- la fixation de l'indemnité à laquelle peut prétendre la société requérante est déterminée au vu des stipulations du cahier des clauses administratives générales des fournitures courantes et services, applicable au marché en litige, notamment ses articles 24 et 31 ;

- les préjudices invoqués ne sont ni certains ni en lien avec la résiliation prononcée ;

- l'acte d'engagement ne faisait état que d'un montant de 130 000 euros pour une durée d'un an sans contenir une clause de tacite reconduction ;

- les sommes avancées au titre du gain manqué par la SARL Exrad correspondent à la totalité des dépenses annuelles du service de radiologie incluant le personnel, les équipements et charges financières ; le montant réclamé est équivalent à celui des recettes perçues par l'assurance maladie et non à la rémunération d'un prestataire tel que le fournisseur actuel du centre hospitalier ;

- les sommes dont se prévaut la SARL Exrad au titre des pertes subies ne sont pas en lien avec la résiliation du marché litigieux ;

- la société requérante ne justifie pas davantage un quelconque préjudice d'image.

Un courrier a été adressé aux parties le 4 décembre 2014 en application de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative.

Une ordonnance du 5 janvier 2015 a porté clôture immédiate de l'instruction en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code des marchés publics ;

- la loi n°68-1250 du 31 décembre 1968 modifiée ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Auger,

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

- et les observations de Me D...pour la SARL Exrad.

1. Considérant que, par un avis publié le 12 octobre 2006, le centre hospitalier de Pithiviers a engagé une procédure adaptée, en application des articles 28 et 30 du code des marchés publics, en vue de la passation d'un marché portant sur des prestations d'interprétation à distance de clichés radiographiques, dites de " téléradiologie " ; que ce marché a été attribué à la SARL Exrad dont le gérant est le Dr B...; que l'acte d'engagement a été signé par le directeur du centre hospitalier le 7 mai 2007 ; que, par courrier du 25 septembre 2008, le directeur a notifié à la SARL Exrad la résiliation, pour motifs d'intérêt général, de ce marché, lequel n'avait pas fait l'objet d'un début d'exécution ; que, le 12 décembre 2012, la société a adressé au centre hospitalier une réclamation préalable tendant au paiement d'une somme de 699 468,66 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis au titre des gains manqués, pertes financières et préjudice d'image ; qu'elle relève appel de ce jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à ses conclusions indemnitaires en condamnant le centre hospitalier à lui verser une somme limitée à 15 000 euros ; que, par la voie de l'appel incident, le centre hospitalier demande à la cour de réformer ce jugement en tant qu'il n'a pas retenu l'exception de prescription quadriennale pour les créances nées au courant de l'année 2007 ;

Sur l'appel principal :

2. Considérant que l'administration contractante dispose du pouvoir, qu'elle tient des règles générales applicables aux contrats administratifs, de résilier unilatéralement le contrat pour des motifs d'intérêt général, sous réserve des droits à indemnité du cocontractant ; qu'en l'espèce, il résulte de l'instruction que la décision de résiliation du marché de téléradiologie conclu entre la requérante et le centre hospitalier de Pithiviers est fondée sur des motifs relevant de l'intérêt général, tenant à l'évolution de l'effectif de radiologues, deux nouveaux praticiens étant en poste dans l'établissement à la date de la décision en plus de celui qui exerçait déjà, la difficulté d'assurer le financement de la prestation aux conditions économiques définies par le contrat, dès lors que le déficit de l'établissement était important à l'issue de l'exercice budgétaire 2007, et l'existence d'une réflexion en cours sur la réorientation des partenariats de l'établissement dans une logique de rapprochement avec d'autres structures de soins publiques ; qu'en l'absence de toute faute de sa part, la SARL Exrad a droit à la réparation intégrale du préjudice résultant pour elle de la résiliation anticipée du contrat et compensant tant la perte subie que le gain manqué ;

3. Considérant que la société requérante soutient que c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle ne s'était engagée contractuellement que pour la seule rémunération de 130 000 euros ne comprenant qu'une année de prestation et se prévaut du dossier de consultation des entreprises mentionnant un montant annuel minima de 130 000 euros et maximum de 160 000 euros pour un montant total du marché compris entre 520 000 euros et 640 000 euros pour une durée de 4 ans à compter du 1er mars 2007 ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que le marché en cause ne comprenait ni cahier des clauses administratives générales ni cahier des clauses techniques particulières, ainsi que le reconnaît expressément le centre hospitalier dans ses écritures de première instance ; que, dans ces conditions, le seul document contractuel signé engageant les deux parties est l'acte d'engagement paraphé le 1er mars 2007 par le représentant de la société et le 7 mai 2007 par le directeur de l'hôpital, mentionnant sans autres précisions une offre de 130 000 euros pour la prestation requise ; que si la SARL Exrad fait valoir qu'elle justifie d'une marge bénéficiaire de 90 % au motif que des contrats similaires lui permettraient de compenser ses charges fixes et que le taux de marge retenu par le tribunal est très insuffisant pour une prestation intellectuelle à forte valeur ajoutée concernant 80 000 actes de radiologie par an, il résulte de l'instruction que les premiers juges ont retenu la somme de 15 000 euros proposée par le centre hospitalier, correspondant à un taux de marge de 11,54 % sur le montant précité de 130 000 euros, en l'absence de tout élément sérieux permettant de justifier un autre mode de calcul du bénéfice perdu par la société cocontractante ; qu'en se bornant à faire état du calcul théorique d'une perte de gains de 522 000 euros attendus sur quatre ans, alors qu'il résulte de l'instruction notamment que ce montant correspond au niveau de la totalité de son chiffre d'affaires annuel en radiographie pour l'année 2008, la SARL Exrad ne justifie d'aucun élément permettant de contester utilement la marge bénéficiaire retenue par le tribunal ;

4. Considérant que la SARL Exrad demande l'indemnisation des pertes qu'elle aurait subies au titre de prestations de la " Selarl du docteurB... ", dont le docteur B...est également gérant, en raison du temps de travail consacré par ce praticien à la mise en place du projet, de la charge correspondant au recrutement d'un second praticien par la Selarl du docteur B...pour faire face à l'accroissement d'activité et des frais d'acquisition et de maintenance de matériels ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que la Sarl Exrad ne justifie par aucune pièce, notamment comptable, avoir procédé au remboursement de prestations à la Selarl du docteur B...en raison du marché en cause ; qu'elle ne justifie pas davantage du lien entre le recrutement d'un radiologue par cette dernière société, qui constitue une personne morale distincte, et l'activité susceptible de résulter du marché résilié en se bornant à produire un bilan de la Selarl du docteur B...faisant état d'un montant de 63 220 euros de rétrocession d'honoraires ; qu'elle ne démontre pas enfin que le matériel dont elle demande le remboursement était destiné uniquement au marché litigieux alors qu'elle se prévaut elle-même de contrats similaires avec d'autres établissements d'hospitalisation ;

5. Considérant, enfin, qu'il résulte de l'instruction que la société requérante ne justifie pas d'un quelconque préjudice d'image en raison de la résiliation du marché dont s'agit ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que la SARL Exrad n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a limité à 15 000 euros la somme mise à la charge du centre hospitalier de Pithiviers en réparation des préjudices résultant de la résiliation du marché ;

Sur l'appel incident :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 31 décembre 1968 : "Sont prescrites, au profit de l'Etat, des départements et des communes, sans préjudice des déchéances particulières édictées par la loi, et sous réserve des dispositions de la présente loi, toutes créances qui n'ont pas été payées dans un délai de quatre ans à partir du premier jour de l'année suivant celle au cours de laquelle les droits ont été acquis. Sont prescrites, dans le même délai et sous la même réserve, les créances sur les établissements publics dotés d'un comptable public" ; que le marché dont s'agit n'ayant reçu aucun commencement d'exécution, la société requérante ne peut être regardée comme ayant acquis les droits correspondants à sa créance, au sens des dispositions précitées, qu'à compter de la notification de la lettre de résiliation pour motifs d'intérêt général du 25 septembre 2008 lui ouvrant un droit à indemnisation ; que, dans ces conditions, le délai de la prescription n'a commencé à courir qu'à compter du 1er janvier 2009 et n'était pas expiré à la date de la demande préalable reçue le 14 décembre 2012 par le centre hospitalier de Pithiviers ; qu'ainsi les conclusions d'appel incident du centre hospitalier de Pithiviers doivent être rejetées ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de laisser à la charge de chacune des parties à l'instance les frais non compris dans les dépens qu'elles ont exposés ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Exrad est rejetée.

Article 2 : L'appel incident du centre hospitalier de Pithiviers et ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Exrad et au centre hospitalier de Pithiviers.

Délibéré après l'audience du 23 juin 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Loirat président-assesseur,

- M. Auger, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 13 juillet 2015.

Le rapporteur,

P. AUGERLe président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. C...

La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT001789


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01789
Date de la décision : 13/07/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: M. Paul AUGER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : FAU

Origine de la décision
Date de l'import : 19/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-07-13;13nt01789 ?
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