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07/05/2015 | FRANCE | N°14NT00826

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 07 mai 2015, 14NT00826


Vu la requête, enregistrée le 28 mars 2014, présentée pour Mme D... C...demeurant..., par Me Schlosser, avocat au barreau de Caen ; Mme C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301226 du 28 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 mai 2013 par laquelle le maire de Créances a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison d'habitation sur un terrain cadastré section AX n° 122, 497, 500 et 501, situé au lieu-dit la " Mielle ", et a mis à sa charge une somme de 1 000 eu

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Vu la requête, enregistrée le 28 mars 2014, présentée pour Mme D... C...demeurant..., par Me Schlosser, avocat au barreau de Caen ; Mme C... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301226 du 28 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 mai 2013 par laquelle le maire de Créances a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison d'habitation sur un terrain cadastré section AX n° 122, 497, 500 et 501, situé au lieu-dit la " Mielle ", et a mis à sa charge une somme de 1 000 euros à verser à la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Créances une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- la desserte du terrain objet de la demande n'impliquant pas d'extension ou de renforcement du réseau public d'électricité, mais un simple branchement à une borne voisine située à environ 77 mètres de l'entrée de sa parcelle, le maire ne pouvait se fonder sur les dispositions de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme pour refuser le permis de construire, sans entacher sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le courrier d'ERDF du 11 avril 2013 faisant état, d'ailleurs à titre indicatif, de la nécessité de travaux d'extension du réseau, sur une longueur supérieure à 100 mètres, ne suffit pas à justifier un tel refus, dès lors qu'il existe une contradiction avec les autres pièces du dossier, notamment le courrier du SDEM 50 du 26 avril 2013, les certificats d'urbanisme positifs délivrés antérieurement en 1992 et 2009, et le constat d'huissier établi le 2 octobre 2013 ;

- le courrier du 11 avril 2013 est d'ailleurs entaché d'inexactitude matérielle, dès lors que l'emplacement du coffret tel qu'indiqué sur le plan produit par ERDF, à équidistance des limites ouest et est du terrain est erroné, puisque les parcelles n° 498 et 499 ne relèvent pas de sa propriété et que son projet de construction ne situe pas au milieu du terrain, mais dans la partie sud-ouest de la parcelle ;

- le coffret situé sur la parcelle n° 956 des épouxA..., qui ont donné leur accord à un raccordement, de même que M. et MmeB..., n'est pas destiné à ne raccorder qu'une seule habitation ;

- elle a donné son accord pour prendre en charge le financement du raccordement individuel au réseau d'électricité à partir d'une boîte de dérivation au niveau de la borne ;

- le maire de Créances ne justifie pas, faute de diligences appropriées, être dans l'impossibilité d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 30 juin 2014, présenté pour la commune de Créances, représentée par son maire en exercice, par Me Gorand, avocat au barreau de Caen, qui conclut au rejet de la requête, et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge de Mme C...au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- selon le plan joint au courrier d'ERDF du 11 avril 2013, une extension du réseau de 105 mètres est nécessaire pour assurer la desserte en électricité du terrain d'assiette du projet ;

- l'avis du SDEM 50, qui doit être exclu des débats en raison de son caractère illisible, ne peut se substituer à l'avis d'ERDF qui constitue l'interlocuteur unique de la commune ;

- le coffret électrique installé sur la parcelle AX n° 956, attenante à la propriétéB..., ainsi que l'a jugé la cour dans son arrêt du 13 juin 2014 (req. n° 13NT01709), et auquel Mme C...envisage de se raccorder, a été autorisé uniquement pour l'alimentation de la parcelle des épouxA..., conformément à l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme ;

- peu importe que Mme C...ait donné son accord pour prendre en charge le financement des travaux pour se rattacher au réseau d'électricité public ;

- à la date de la décision contestée, la commune n'envisageait pas la réalisation, à moyen ou court terme, de travaux d'extension du réseau public d'électricité dans un secteur naturel proche du rivage, classé en zone AI inconstructible du PLU en cours d'élaboration, qu'elle entendait protéger de l'urbanisation en vertu de l'article L. 146-4, II du code de l'urbanisme ;

- conformément aux dispositions de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, la commune était en situation de compétence liée pour refuser de délivrer un permis de construire ;

- elle a accompli les diligences nécessaires auprès d'ERDF afin de recueillir les indications nécessaires pour apprécier les travaux à exécuter sur le réseau public d'électricité ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 24 mars 2015, présenté pour Mme C...qui tend aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

elle soutient, en outre, qu'un autre point de raccordement au réseau public d'électricité est envisageable à proximité de la parcelle cadastrée section AX n°124, à moins de 70 mètres de son terrain, et qu'il n'est pas limité à l'alimentation d'une seule habitation ;

Vu le mémoire en production de pièces, enregistré le 30 mars 2015, présenté pour la commune de Créances ;

Vu le mémoire en production de pièces, enregistré les 31 mars et 2 avril 2015, présenté pour MmeC... ;

Vu le mémoire, enregistré le 1er avril 2015, présenté pour la commune de Créances, qui persiste dans ses précédentes écritures ;

Vu le mémoire, enregistré le 3 avril 2015, présenté pour MmeC..., qui persiste dans ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 7 avril 2015 :

- le rapport de M. Millet, président-assesseur,

- les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public,

- les observations de Me Schlosser, avocat de MmeC... ;

- et les observations de Me Gorand, avocat de la commune de Créances ;

1. Considérant que Mme C...relève appel du jugement du 28 janvier 2014 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 mai 2013 par laquelle le maire de Créances a refusé de lui délivrer un permis de construire une maison d'habitation sur un terrain cadastré section AX n° 122, 497, 500 et 501, situé au lieu-dit la " Mielle ", et a mis à sa charge une somme de 1 000 euros à verser à la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 111-4 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : " Lorsque, compte tenu de la destination de la construction ou de l'aménagement projeté, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte du projet, le permis de construire (...) ne peut être accordé si l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 332-15 du même code : " L'autorité qui délivre l 'autorisation de construire, (...) exige, en tant que de besoin, du bénéficiaire de celle-ci la réalisation et le financement de tous travaux nécessaires à la viabilité et à l'équipement de la construction, (...) , notamment en ce qui concerne (...), l'alimentation en (...) électricité (...) / (...) / L'autorisation peut également, avec l'accord du demandeur et dans les conditions définies par l'autorité organisatrice du service public (...) de l'électricité, prévoir un raccordement aux réseaux (...) d'électricité empruntant, en tout ou partie, des voies ou emprises publiques, sous réserve que ce raccordement n'excède pas cent mètres et que les réseaux correspondants, dimensionnés pour correspondre exclusivement aux besoins du projet, ne soient pas destinés à desservir d'autres constructions existantes ou futures " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions qu'un permis de construire doit être refusé lorsque, d'une part, des travaux d'extension ou de renforcement de la capacité des réseaux publics de distribution d'électricité sont nécessaires à la desserte de la construction projetée et, d'autre part, lorsque l'autorité compétente n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public ces travaux doivent être exécutés, après avoir, le cas échéant, accompli les diligences appropriées pour recueillir les informations nécessaires à son appréciation ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis rendu le 11 avril 2013 par les services d'Electricité réseau distribution France (ERDF), que la desserte de la parcelle supportant la construction envisagée nécessite une extension de 105 mètres du réseau électrique existant ; qu'en produisant un devis du syndicat départemental d'énergie de la Manche (SDEM 50) et un constat d'huissier du 2 octobre 2013, qui mesure une distance de 77 mètres du coffret d'alimentation électrique au niveau de la parcelle n° 956 jusqu'à l'entrée de sa parcelle, Mme C...ne démontre pas qu'un simple raccordement au réseau public de distribution d'électricité suffirait à alimenter la maison dont elle projette l'édification, alors que ce coffret n'est prévu que pour l'alimentation d'une seule habitation ; que si dans le dernier état de ses écritures, la requérante évoque un autre point de raccordement à 70 mètres au droit de la parcelle cadastrée section AX n° 124 située en face de sa propriété, une telle possibilité de raccordement n'a jamais été envisagée par ERDF ou le SDEM 50, et rien ne démontre qu'elle serait envisageable ; qu'ainsi, l'extension du réseau d'électricité doit être regardée comme nécessaire ; que, toutefois, alors même qu'à la date de la décision contestée, la commune de Créances ne manifestait aucune intention d'urbaniser le secteur d'implantation de la parcelle concernée, laquelle était classée en zone AI non constructible du plan local d'urbanisme (PLU) en cours d'élaboration, elle n'a cependant pas justifié avoir accompli, conformément aux dispositions précitées de l'article L.111-4 du code de l'urbanisme, les diligences appropriées, notamment auprès du SDEM 50, gestionnaire du réseau, lui permettant de déterminer le délai et les modalités de réalisation des travaux d'extension du réseau public d'électricité dans le secteur d'assiette du projet;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeC..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Créances demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'en revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Créances le versement à Mme C...d'une somme de 1 500 euros au titre des frais de même nature qu'elle a exposés ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Caen du 28 janvier 2014, et la décision du 6 mai 2013 par laquelle le maire de Créances a refusé de délivrer un permis de construire à MmeC..., sont annulés.

Article 2 : La commune de Créances versera à Mme C...une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C... et à la commune de Créances.

Délibéré après l'audience du 7 avril 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 mai 2015.

Le rapporteur,

J-F. MILLET

Le président,

A. PEREZ

Le greffier,

S. BOYERE

La République mande et ordonne au ministre du logement, de l'égalité des territoires et de la ruralité, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00826


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00826
Date de la décision : 07/05/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : SELARL VEVE et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-05-07;14nt00826 ?
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