La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

30/04/2015 | FRANCE | N°13NT03479

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 30 avril 2015, 13NT03479


Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2013, présentée pour Mme C...A..., demeurant..., par Me Bansaye, avocat ;

Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102936 du 24 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2006 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3

°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du ...

Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2013, présentée pour Mme C...A..., demeurant..., par Me Bansaye, avocat ;

Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1102936 du 24 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2006 et des pénalités correspondantes ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- elle est victime des agissements du responsable bancaire qui fait l'objet d'une procédure pénale en cours ;

- la société civile immobilière (SCI) la Huchonnière a bénéficié en 2006 d'une offre de prêt modulable de 200 000 euros, les sommes mises en cause par l'administration au titre de l'année 2006 et s'élevant à 166 888 euros proviennent du déblocage partiel de ce prêt et par suite, il n'y avait pas lieu à rehaussement dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

- la somme de 150 000 euros perçue à titre personnel au titre de l'année 2004 provient d'un prêt consenti par la Caisse d'Epargne ; le virement de 4 000 euros sur son compte personnel au titre de l'année 2006 a été effectué sans son accord par la banque ; c'est donc à tort que ces sommes ont été imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 31 mars 2014, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- Mme A...n'établit pas l'existence d'un prêt accordé par l'établissement bancaire à la SCI la Huchonnière dont elle est gérante et associée à hauteur de 50% ;

- la requérante n'établit pas davantage l'existence du prêt personnel prétendument consenti par la Caisse d'Epargne ni ne justifie sérieusement la provenance de la somme de 4 000 euros sur son compte courant personnel ;

- la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a confirmé le 24 juin 2010 la position de l'administration ;

- les pénalités de l'article 1729 du code général des impôts sont justifiées compte tenu des montants significatifs des sommes perçues sans relation avec des prêts et de l'intention de Mme A...d'éluder l'impôt sur ces revenus ;

Vu le mémoire enregistré le 3 janvier 2015 présenté pour Mme A...qui conclut aux mêmes fins ;

elle soutient que :

- pour pouvoir taxer, dans le cadre de la procédure contradictoire comme en l'espèce, des sommes sur le fondement de l'article 92 du code général des impôts, l'administration doit établir qu'il s'agit de profits tirés d'une activité ;

- l'administration n'apporte pas en l'espèce la preuve que les sommes qu'elle a appréhendées sont des revenus tirés d'une activité déterminée ;

- en particulier, elle n'établit pas l'existence de l'activité de détournement de fonds par le contribuable dès lors que M.B..., son concubin et associé dans la SCI " la Huchonnière " a été relaxé du chef de recel de bien obtenu à l'aide d'un abus de confiance et elle-même n'a fait l'objet d'aucune poursuite ;

- à titre subsidiaire, les sommes en cause constituent des avances de trésorerie qui ne sont dès lors pas taxables ;

Vu le mémoire, enregistré le 17 février 2015, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui conclut au rejet de la requête ;

il ajoute que :

- l'administration n'a pas, au cas particulier, à démontrer l'existence d'un détournement de fonds par l'appelante, dès lors que les sommes litigieuses n'ont pas été perçues à l'occasion de l'exercice de son activité d'associée et qu'elles ne correspondent à la rétribution d'aucun service ;

- les sommes versées sur ses comptes bancaires personnels et chez le notaire chargé de la rédaction des actes d'acquisition des biens immobiliers de la SCI ne sauraient être regardées comme des avances ayant pour but de procurer des facilités de crédit nécessaires au financement intégral d'opérations d'investissement ;

- à titre subsidiaire, il demande une substitution de base légale, conformément aux dispositions de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales, s'agissant de l'imposition des sommes perçues par Mme A...par le biais de la SCI " La Huchonnière " tendant à l'application des dispositions des articles 8 et 14 du code général des impôts pour les taxer dans la catégorie des revenus fonciers ;

Vu l'ordonnance en date du 24 février 2015 fixant la clôture d'instruction au 27 mars 2015, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 mars 2015, présenté pour Mme A...qui conclut aux mêmes fins que sa requête ;

elle ajoute que :

- la substitution de base légale doit être rejetée dès lors que la perception des sommes en litige aurait eu pour effet d'assujettir la SCI à l'impôt sur les sociétés ;

Vu l'ordonnance en date du 27 mars 2015 portant réouverture de l'instruction en application de l'article 613-4 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 1er avril 2015, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- la SCI la Huchonnière, qui a pour objet la location de différents biens immobiliers, relève des dispositions des articles 8 et 14 du code général des impôts et dépose d'ailleurs des déclarations de revenus fonciers ;

- à titre subsidiaire, il demande une substitution de base légale, conformément aux dispositions de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales, s'agissant de l'imposition des sommes perçues par Mme A...par le biais de la SCI " La Huchonnière " tendant à l'application des dispositions des articles 109 et 111 du code général des impôts pour les taxer dans la catégorie des revenus de capitaux mobiliers ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 9 avril 2015 :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau, premier conseiller ;

- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

1. Considérant que, conformément aux dispositions des articles L 82 C et L 101 du livre des procédures fiscales, l'administration a exercé son droit de communication auprès du tribunal de grande instance de la Roche-sur-Yon, afin d'y consulter un dossier ouvert à l'encontre d'un responsable bancaire suite au dépôt d'une plainte par plusieurs de ses clients ; que, dans le cadre de cette procédure, il a été constaté que le responsable financier d'une agence bancaire de la Caisse d'épargne avait procédé depuis 2002 à des prélèvements sur les comptes de certains clients pour alimenter les comptes d'autres personnes, tenus au sein de la même agence bancaire, dont celui de MmeA... ; qu'à l'issue d'un contrôle sur pièces engagé, au titre des années 2004 à 2006, l'administration a procédé au rehaussement des revenus imposables de MmeA..., dans la catégorie des bénéfices non commerciaux prévue au 1 de l'article 92 du code général des impôts, à raison de sommes perçues à titre personnel et par le biais de la société civile immobilière (SCI) la Huchonnière, dont elle est gérante et associée à 50%, en 2004 et 2006 ; que Mme A...relève appel du jugement en date du 24 octobre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles elle a été assujettie au titre des années 2004 et 2006 et des pénalités correspondantes ;

Sur le bien-fondé des impositions :

2. Considérant, en premier lieu, que Mme A...invoque l'autorité de la chose jugée qui s'attacherait, selon elle, au jugement du tribunal de grande instance de La Roche-sur-Yon, siégeant en audience correctionnelle, en date du en date du 27 mai 2013, confirmé par un arrêt, en date du 14 février 2014, de la cour d'appel de Poitiers devenu définitif, aux termes desquels seul le responsable bancaire de l'agence de la Caisse d'épargne a été reconnu coupable d'abus de confiance et d'usage de faux en écritures, M. B...ayant fait l'objet d'une relaxe ; que si l'autorité de la chose jugée des décisions des juges répressifs devenues définitives s'attache à la constatation matérielle des faits qui sont le support de la condamnation et à la qualification de ces faits sur le plan pénal, il ressort de l'examen des décisions pénales mentionnées, que ni le tribunal de grande instance ni la cour d'appel ne se sont prononcés sur la question de savoir si Mme A...a, en ce qui concerne les sommes qualifiées de profits, perçu des revenus ; que, dès lors, contrairement à ce qu'elle soutient, la solution du litige sur le plan fiscal n'est pas déterminée par une constatation faite par le juge pénal à laquelle s'attacherait l'autorité de la chose jugée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que Mme A...a bénéficié, d'une part, de sommes créditées sur son compte personnel ouvert à la Caisse d'épargne des Pays de la Loire, pour un montant total de 150 000 euros en 2004 et un versement de 4 000 euros en 2006 et, d'autre part, de la moitié de sommes perçues par la SCI La Huchonnière en 2006 pour un montant total de 166 888 euros, qui, à hauteur de 145 888 euros, ont fait l'objet d'un virement auprès du notaire rédacteur de l'acte d'acquisition par la SCI d'un immeuble situé dans la commune de Cholet ; que l'administration, estimant que ces sommes constituaient une source de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus, les a imposées dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;

5. Considérant, d'une part, que si Mme A...soutient que les sommes portées à son compte courant au sein de la SCI la Huchonnière, respectivement les 29 juillet et 3 octobre 2006, et le virement effectué au profit d'un notaire proviennent d'une offre de prêt modulable consentie par l'établissement bancaire titulaire du compte de la société, elle n'apporte toutefois aucune justification de l'existence d'une telle offre de prêt ni des modalités consenties par l'établissement bancaire pour sa mise en oeuvre effective, et n'établit pas davantage que la SCI la Huchonnière aurait procédé à des remboursements ; que ces versements, qui n'ont pas été effectués en rémunération d'un droit attaché à la propriété et concédé à des tiers, ne constituent pas des revenus imposables entre les mains de MmeA..., associé de la SCI La Huchonnière, dans la catégorie des revenus fonciers définis aux articles 14 et 29 du code général des impôts;

6. Considérant, d'autre part, que s'agissant de la somme de 150 000 euros créditée sur son compte bancaire personnel en 2004, si Mme A...soutient qu'elle provient d'un prêt consenti par la Caisse d'épargne en vue de l'acquisition d'un bateau elle n'apporte toutefois aucun commencement de justification à l'appui de ces allégations ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que la somme de 4 000 euros a été versée spontanément et sans son accord par l'établissement bancaire ;

7. Considérant qu'en conséquence Mme A...a de façon régulière appréhendé des sommes enregistrées sur ses comptes bancaires au cours des années 2004 et 2006 et bénéficié par l'intermédiaire de la SCI La Huchonnière, au prorata de ses droits sociaux, d'avantages financiers sous couvert d'opérations de prêts dont elle n'a pu justifié l'existence ; que, dans ces conditions, alors même que Mme A...n'exerçait pas une profession non commerciale, c'est à bon droit que l'administration a regardé les sommes en cause comme constituant des profits imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux en vertu des dispositions du 1. de l'article 92 ;

8. Considérant que Mme A...ne développe aucun moyen propre à l'application des pénalités prévues à l'article 1729 du code général des impôts ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de procéder aux substitutions de base légale demandées, que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à Mme A... la somme qu'elle réclame à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 9 avril 2015, où siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Aubert, président assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 avril 2015.

Le rapporteur,

M-P. ALLIO-ROUSSEAULe président,

F. BATAILLE

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 13NT03479


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT03479
Date de la décision : 30/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Autres

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : SCP AVOCATS CONSEILS REUNIS

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-30;13nt03479 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award