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17/04/2015 | FRANCE | N°14NT01860

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 17 avril 2015, 14NT01860


Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2014, présentée pour Mme B...D...A...épouse C...demeurant..., par Me Merle, avocat au barreau de Montargis ; Mme A...épouse C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201952 du 20 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 décembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a, sur recours hiérarchique, maintenu l'ajournement à quatre ans de sa demande de naturalisation ;>
2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre a...

Vu la requête, enregistrée le 15 juillet 2014, présentée pour Mme B...D...A...épouse C...demeurant..., par Me Merle, avocat au barreau de Montargis ; Mme A...épouse C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201952 du 20 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 décembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a, sur recours hiérarchique, maintenu l'ajournement à quatre ans de sa demande de naturalisation ;

2°) d'annuler cette décision pour excès de pouvoir ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de procéder au réexamen de sa demande, à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

elle soutient que :

- la décision d'ajournement à quatre ans, qui présente d'ailleurs une durée excessive, se trouve entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- d'abord, son séjour irrégulier ne peut être retenu, dès lors qu'il est de courte période et qu'elle bénéficie d'un titre de séjour régulièrement renouvelé depuis 2003 ;

- ensuite, si elle s'est trouvée en difficulté en 2011 pour s'acquitter de sa taxe d'habitation, ce fait est resté isolé et elle s'est acquittée de cet impôt avec une majoration de 10%, ce qui ne constitue nullement un défaut de loyalisme ;

- enfin, le tribunal a admis l'insuffisance de son insertion professionnelle, sans examiner, à la lumière de la circulaire Valls, la continuité des CDD et contrats d'intérim dont elle bénéficie depuis plusieurs années, et alors qu'elle est dorénavant employée en CDI ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 25 août 2014, présenté par le ministre de l'intérieur qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- s'il est vrai que l'ancienneté du séjour irrégulier ne permet pas à lui seul de fonder la décision contestée, il aurait pris la même décision en se fondant sur les autres motifs tirés du comportement fiscal sujet à critiques de Mme A...et de son défaut d'insertion professionnelle ;

- Mme A...s'est acquittée avec retard et après majoration de ses taxes d'habitation pour 2008, 2009 et 2010 et reconnaît elle-même sa négligence pour payer ses dettes ;

- les circulaires des 16 octobre 2012 et 21 juin 2013, auxquelles l'intéressée fait référence, sont dépourvues de caractère impératif et d'ailleurs postérieures à la décision contestée, de sorte qu'elles ne peuvent être utilement invoquées ;

- à la date de cette décision, Mme A...travaillait dans le cadre d'un contrat à durée déterminée qui s'achevait le 11 février 2012 et elle avait perçu à titre de salaires 7319 euros en 2008 et 8678 euros en 2009, revenus qui ne lui permettaient pas de subvenir durablement aux besoins de son foyer et étaient complétés par l'APL et l'allocation de soutien familial ;

- il a pu, dans ces conditions, ajourner à quatre ans la demande de naturalisation de Mme A...sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, le juge ne contrôlant pas la proportionnalité des mesures d'ajournement au regard du but poursuivi ;

Vu la décision du 22 octobre 2014 par laquelle le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes a accordé à Mme A...le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 mars 2015 ;

- le rapport de M. Millet, président-assesseur ;

1. Considérant que Mme A... épouseC..., de nationalité sénégalaise, relève appel du jugement du 20 mai 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 20 décembre 2011 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a, sur recours hiérarchique, maintenu l'ajournement à quatre ans de sa demande de naturalisation ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " (...) l'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret du 30 décembre 1993 susvisé : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration dans la nationalité sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions. (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre chargé des naturalisations de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la naturalisation à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte le degré d'insertion professionnelle du postulant, le niveau et la stabilité de ses ressources, ainsi que les renseignements défavorables recueillis sur le comportement de l'intéressé ;

3. Considérant que pour ajourner à quatre ans la demande de naturalisation de Mme A..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé à la fois sur le fait que l'intéressée avait séjourné irrégulièrement sur le territoire français de 2002 à 2003, sur son comportement fiscal sujet à critiques et sur le caractère récent et précaire de son insertion professionnelle ;

4. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, et qu'il n'est pas contesté, que Mme A... a séjourné de manière irrégulière sur le territoire français de février 2002 à novembre 2003 et qu'elle y séjourne régulièrement depuis cette date ; qu'eu égard à l'ancienneté de ces faits, dont le terme remonte à plus de huit ans par rapport à la date de la décision contestée, le ministre, ainsi qu'il l'admet lui-même, a entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en lui opposant ce premier motif ;

5. Considérant, toutefois, en deuxième lieu, que le ministre chargé des naturalisations s'est également fondé, comme il a été dit ci-dessus, pour ajourner la demande de naturalisation de Mme A... sur deux autres motifs ; qu'il ressort des pièces du dossier que la requérante a, d'une part, acquitté avec retard et après majorations la taxe d'habitation dont elle était redevable au titre des années 2008, 2009 et 2010 ; que, d'autre part, il est constant qu'à la date de la décision contestée, l'intéressée effectuait un remplacement en qualité d'agent des services hôteliers dans le cadre d'un contrat à durée déterminée (CDD) dont le terme était fixé au 11 février 2012 ; que si la requérante fait valoir qu'elle a continué à bénéficier de tels contrats de travail régulièrement renouvelés et a été recrutée en contrat à durée indéterminée (CDI) à partir du mois de juin 2012, cette circonstance postérieure à la décision contestée est sans influence sur sa légalité qui s'apprécie à la date à laquelle elle est intervenue ; que l'intéressée a perçu à titre de salaires 7319 euros en 2008 et 8678 euros en 2009 ; que ces revenus ne lui permettaient pas de subvenir durablement aux besoins de son foyer et étaient complétés en 2011 notamment par l'aide personnalisée au logement et par l'allocation de soutien familial ; qu'ainsi, en se fondant sur le comportement de la postulante au regard de ses obligations fiscales, et sur l'insuffisance de son insertion professionnelle, le ministre n'a pas entaché sa décision d'ajournement à quatre ans d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'il résulte de l'instruction qu'il aurait pris la même décision s'il n'avait retenu que ces derniers motifs ;

6. Considérant, en troisième et dernier lieu, que Mme A...ne saurait se prévaloir utilement des circulaires des 16 octobre 2012 et 21 juin 2013 relatives aux procédures d'accès à la nationalité française qui sont postérieures à la décision contestée et dépourvues de valeur réglementaire ;

7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A... épouse C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de Mme A... épouseC..., n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin de réexamen de sa demande, sous astreinte, ne peuvent être accueillies ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...épouse C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D...A...épouse C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 24 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. François, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 avril 2015.

Le rapporteur,

J-F. MILLET

Le président,

A. PÉREZ

Le greffier,

K. BOURON

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT01860


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01860
Date de la décision : 17/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Jean-Frédéric MILLET
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : MERLE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-17;14nt01860 ?
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