Vu la requête, enregistrée le 4 septembre 2013, présentée pour M. D...E...domicilié..., représenté par MeF... ; M. E...demande à la cour :
1°) d'annuler l'article 4 du jugement n°s 1000359 et 104455 du 4 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence de la somme de 10 532 euros et lui avoir accordé le bénéfice d'une demi-part supplémentaire au titre des années 2006 et 2007, a rejeté le surplus de ses demandes tendant, d'une part, à la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007 et, d'autre part, à la décharge des suppléments de contributions sociales mis à sa charge au titre des années 2005 et 2006 ;
2°) de prononcer la décharge de ces suppléments d'imposition et de contributions ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- le tribunal a estimé à tort qu'il n'avait pas fait élection de domicile chez son avocat et ne lui avait pas donné mandat pour recevoir les courriers de l'administration dans le cadre de la procédure de redressement ; un avocat n'a pas à justifier de son mandat ; la réponse aux observations du contribuable du 29 juillet 2009 n'ayant pas été adressée à son représentant, la procédure d'imposition est irrégulière ;
- les services postaux n'ayant pas distribué la proposition de rectification au motif erroné qu'il n'habitait pas à l'adresse mentionnée sur le courrier la contenant, son envoi n'a pas interrompu le cours de la prescription ; cette proposition méconnaît l'article L. 57 du livre des procédures fiscales ;
- contrairement à ce qu'elle soutient, les justificatifs des charges déductibles des revenus fonciers ont été communiqués à l'administration ;
- selon la réponse C...(AN 24 avril 1981, p. 1745 n° 38995), la liste des pièces justificatives des frais réels engagés par un salarié ne peut pas être fixée de manière limitative ; selon les instructions 5 F-16-75 du 16 juin 1975 et 5 F-1-99 n° 10 du 30 décembre 1998 et la documentation 5 F-2541 n° 4 du 10 février 1999, les frais dont la justification précise est pratiquement impossible mais dont le caractère professionnel est incontestable sont déductibles ; selon la réponse B...(AN 25-5-1987 p. 3026 n° 18488), un agenda professionnel précis et détaillé peut justifier du kilométrage parcouru ; il a justifié de manière suffisante en première instance du kilométrage parcouru ; l'administration s'est fondée sur ses agendas pour procéder à des redressements mais refuse de les prendre en compte pour évaluer les frais de déplacement ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2014, présenté par le ministre délégué chargé du budget ; le ministre délégué chargé du budget conclut au rejet de la requête ;
il soutient que :
- le courrier de l'avocat de M. E...du 15 juillet 2009, qui n'est pas un mandat émanant du contribuable mais une déclaration unilatérale de son avocat, n'emporte pas élection de domicile ; de ce fait, la réponse aux observations du contribuable du 29 juillet 2009 a été régulièrement adressée au domicile du requérant ;
- la proposition de rectification du 4 février 2009 a été envoyée à la dernière adresse connue du service ; de nombreuses correspondances et factures attestent d'une situation de double résidence ayant conduit à plusieurs reprises le requérant à faire réacheminer son courrier par La Poste ; s'il ne justifie pas d'un réacheminement de son courrier à Nantes à la date du 6 février 2009 à laquelle le pli a été présenté au Marillais, ses propres négligences ou une erreur de La Poste ne sont pas imputables à l'administration fiscale ;
- le requérant, qui doit être regardé comme maintenant implicitement sa demande de demi-part supplémentaire au titre de l'année 2005, ne justifie pas avoir assuré à titre exclusif ou principal la charge de l'entretien de son fils, né en 1998, lequel vit chez sa mère ;
- il ne justifie pas de la déductibilité de ses revenus fonciers des charges remises en cause par le service ;
- les kilométrages parcourus ont été réévalués sur la base des agendas qu'il a produits ; il ressort de ces agendas que de nombreux déplacements ont été effectués, en totalité ou en partie, à titre privé ;
- en l'absence de litige né et actuel, les conclusions du requérant tendant au remboursement des frais résultant de la consignation des fonds et le paiement des intérêts ne sont pas recevables ;
Vu le mémoire complémentaire, enregistré le 27 mai 2014, présenté pour M. E...qui conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens ;
il ajoute que :
- il n'avait pas à communiquer à l'administration le mandat donné à son conseil ; l'élection de domicile a été portée à la connaissance du service dès le 20 février 2009 dans le cadre de la réponse à la proposition de rectification du 23 décembre 2008 de son avocat ; le courrier de son avocat du 15 juillet 2009 informant le contrôleur en charge de son dossier de son absence de son domicile du 9 juillet au 31 août 2009, la réponse aux observations du 29 juillet 2009 a été irrégulièrement envoyée à son adresse ;
- l'erreur commise par les services postaux est opposable à l'administration ;
- il maintient son argumentation relative à la demi-part supplémentaire à laquelle il a droit au titre de l'année 2005 ;
Vu le mémoire, enregistré le 30 juin 2014, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui maintient ses conclusions en défense ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 mars 2015 :
- le rapport de Mme Aubert, président-assesseur ;
- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;
- et les observations de MeA..., substituant MeF..., pour M.E... ;
1. Considérant que M.E..., qui a exercé une activité de représentant de commerce jusqu'en 2008, demande l'annulation de l'article 4 du jugement du 4 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes, après avoir prononcé un non-lieu à statuer à concurrence de la somme de 10 532 euros et lui avoir accordé le bénéfice d'une demi-part supplémentaire au titre des années 2006 et 2007, a rejeté le surplus de ses demandes tendant, d'une part, à la décharge en droits et pénalités des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2005 à 2007 et, d'autre part, à la décharge des suppléments de contributions sociales mis à sa charge au titre des années 2005 et 2006 ;
Sur l'année 2005 :
En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...). / Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée. " ; que, pour l'application de ces dispositions, lorsque le mandat donné à un conseil ou à tout autre mandataire par un contribuable pour l'assister dans ses relations avec l'administration ne contient aucune mention expresse habilitant le mandataire à recevoir l'ensemble des actes de la procédure d'imposition, ce mandat n'emporte pas élection de domicile auprès de ce mandataire ; que, dans ce cas, l'administration n'entache pas la procédure d'imposition d'irrégularité en notifiant l'ensemble des actes de la procédure au contribuable ;
3. Considérant que M. E...produit, d'une part, la réponse de son conseil du 20 février 2009 à la proposition de rectification du 23 décembre 2008 relative à l'année 2005 mentionnant que son client a élu domicile à son cabinet pour le besoin des présentes et de leurs suites et, d'autre part, une lettre de son conseil du 15 juillet 2009 indiquant que son client a élu domicile à son cabinet pour la période du 9 juillet au 31 août 2009 ; que par ces éléments, qui sont extérieurs au mandat lui-même, M. E...n'établit pas avoir fait élection de domicile auprès de son mandataire ; qu'il suit de là que l'administration n'a pas entaché la procédure d'imposition d'irrégularité en notifiant à l'adresse du requérant et non à celle de son mandataire la réponse aux observations du 29 juillet 2009 relative à l'année 2005 ;
En ce qui concerne le bien-fondé de l'imposition :
S'agissant des frais kilométriques :
4. Considérant qu'aux termes de l'article 83 du code général des impôts relatif à l'imposition des traitements et salaires : " Le montant net du revenu imposable est déterminé en déduisant du montant brut des sommes payées et des avantages en argent ou en nature accordés : (...) 3° Les frais inhérents à la fonction ou à l'emploi lorsqu'ils ne sont pas couverts par des allocations spéciales. La déduction à effectuer du chef des frais professionnels est calculée forfaitairement en fonction du revenu brut (...) ; elle est fixée à 10 % du montant de ce revenu. (...) / Les bénéficiaires de traitements et salaires sont également admis à justifier du montant de leurs frais réels (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, pour pouvoir déduire ses frais réels, le contribuable doit fournir des justifications suffisamment précises permettant d'apprécier le montant des frais effectivement exposés par lui à l'occasion de l'exercice de sa profession ; que la référence au barème kilométrique forfaitaire publié par l'administration pour le calcul de ses frais de déplacement ne dispense pas le contribuable d'établir au préalable l'importance des déplacements effectués avec le véhicule ;
5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que l'administration s'est fondée sur les documents intitulés " agendas " produits par M. E...pour admettre, au cours de l'instance engagée devant le tribunal, que les frais kilométriques déductibles des revenus professionnels se sont élevés à 20 784 kms au lieu de 7 939 kms en 2005, à 24 268 kms au lieu de 4 459 kms en 2006 et à 10 365 kms au lieu de 5 357 kms en 2007 et refuser d'admettre une déduction plus importante au motif, notamment, que la nature professionnelle de certains des trajets mentionnés n'est pas établie ; que M.E..., auquel incombe la charge de la preuve, n'apporte aucun élément de nature à établir le caractère déductible des frais kilométriques non admis par l'administration ;
6. Considérant qu'ainsi qu'il est dit au point 4 du présent arrêt et contrairement à ce que soutient le requérant, le service n'a pas refusé de prendre en compte les justificatifs que constituent ses agendas ni fixé de manière limitative la liste des pièces justificatives des frais réels engagés par un salarié, en méconnaissance de la réponse ministérielle à M. C..., député, publiée au Journal Officiel de l'Assemblée Nationale (JOAN) du 20 avril 1981 n° 38995 p. 1745 et de la réponse ministérielle à M.B..., député, publiée au JOAN du 25 mai 1987 n° 18488 p. 3026 ; que ces réponses ministérielles, qui ne donnent pas des dispositions précitées de l'article 83 du code général des impôts une interprétation différente de celle dont il a été fait application, ne sont pas susceptibles d'être invoquées sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales ; que les instructions 5 F-16-75 du 15 juin 1975, 5 F-1-99 du 30 décembre 1998 et 5 F-2541 du 10 février 1999, qui se bornent à recommander au service de faire preuve de souplesse dans l'appréciation de la justification des frais réels par les contribuables et ne contiennent ainsi aucune interprétation de la loi fiscale ne le sont pas davantage sur le même fondement ;
S'agissant des charges déductibles des revenus fonciers :
7. Considérant qu'en se bornant à soutenir qu'il avait communiqué au service les justificatifs des charges déduites des revenus fonciers, M. E...n'assortit pas sa critique de ce chef de redressement de précisions suffisantes pour permettre au juge d'en apprécier le bien-fondé ;
S'agissant du quotient familial :
8. Considérant qu'en se bornant à soutenir qu'il maintient son argumentation relative à la demi-part supplémentaire de quotient familial demandée au titre de l'année 2005, M. E...n'assortit sa critique du jugement d'aucune précision de nature à permettre au juge d'appel d'en apprécier le bien-fondé ;
Sur les années 2006 et 2007 :
9. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due." ; qu'aux termes de l'article L.189 du même livre : " La prescription est interrompue par la notification d'une proposition de rectification (...) " ; que, pour l'application de ces dispositions, la date d'interruption de la prescription est celle à laquelle le pli contenant la proposition de rectification est remis au contribuable ; que, dans le cas où le pli n'a pu lui être remis, la date à prendre en compte est celle à laquelle ce courrier avait été présenté à son adresse ;
10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le pli contenant la proposition de rectification relative aux années 2006 et 2007 a été adressé au lieu-dit " Le Chalonge " au Marillais (49410), présenté à cette adresse le 6 février 2009 et renvoyé au service avec la mention " N'habite pas à l'adresse indiquée " ; que si M. E...a parfois mentionné son autre adresse à Nantes dans plusieurs courriers envoyés au service et demandé à plusieurs reprises à La Poste le transfert de son courrier du Marillais vers Nantes pour des périodes déterminées, il est constant que l'adresse à laquelle la proposition de rectification a été présentée, le 6 février 2009, était la dernière adresse connue des services fiscaux et que, pour la période du 4 décembre 2007 au 12 mai 2009, le requérant n'avait accompli aucune formalité en vue du transfert de son courrier à une autre adresse ; que le renvoi du pli au service avec la mention " N'habite pas à l'adresse indiquée " résulte ainsi d'une erreur commise par les services postaux ; que, dans ces conditions, son envoi à la dernière adresse connue de l'administration fiscale ne peut être regardé comme ayant régulièrement interrompu le délai de prescription parvenu à son terme le 31 décembre 2009 en ce qui concerne l'imposition de l'année 2006 et le 31 décembre 2010 en ce qui concerne l'imposition de l'année 2007 ;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E...est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 et 2007 et des suppléments de contributions sociales mis à sa charge au titre de l'année 2006 ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. E...de la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
DECIDE :
Article 1er : M. E...est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2006 et 2007 et des suppléments de contributions sociales mis à sa charge au titre de l'année 2006.
Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nantes est annulé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. E...la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus de la requête de M. E...est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...E...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 26 mars 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Aubert, président-assesseur,
- M. Etienvre, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 avril 2015.
Le rapporteur,
S. AUBERTLe président,
F. BATAILLE
Le greffier,
E. HAUBOIS
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13NT02554 2
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