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03/04/2015 | FRANCE | N°13NT02191

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 03 avril 2015, 13NT02191


Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2013, présentée pour Mme H... Meslon, demeurant..., par Me Brand, avocate au barreau de Caen ; Mme Meslon demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201914 du 24 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 juillet 2012 de l'inspectrice du travail de la 2ème section du Calvados accordant à Me A..., en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Tickner, l'autorisation de prononcer son licenciement pour motif économique ;

2°) d'annuler

cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat " ou des organes de la...

Vu la requête, enregistrée le 26 juillet 2013, présentée pour Mme H... Meslon, demeurant..., par Me Brand, avocate au barreau de Caen ; Mme Meslon demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201914 du 24 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 juillet 2012 de l'inspectrice du travail de la 2ème section du Calvados accordant à Me A..., en sa qualité d'administrateur judiciaire de la société Tickner, l'autorisation de prononcer son licenciement pour motif économique ;

2°) d'annuler cette décision ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat " ou des organes de la liquidation judiciaire " une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- l'auteur de la demande de licenciement était incompétent; sa demande était insuffisamment motivée ;

- la convocation à l'entretien préalable au licenciement a été signée, et l'entretien conduit, par une personne incompétente ;

- le délai de deux jours entre l'entretien préalable le 4 juillet 2012 et la réunion de la délégation unique du personnel le 6 juillet suivant était insuffisant ;

- cette réunion n'a pas été présidée par l'administrateur judiciaire ; l'information donnée aux représentants du personnel n'était ni sérieuse, ni précise ni exhaustive, ne leur permettant pas d'émettre un avis autorisé sur les licenciements envisagés ;

- la décision de l'inspectrice du travail est insuffisamment motivée en ce qu'elle ne fait pas apparaître la situation économique du groupe auquel est rattachée la société Tickner, ne rappelle pas les causes économiques de licenciement et ne fait pas état de l'obligation conventionnelle de recherche de reclassement pesant sur l'employeur et notamment de la saisine de la commission paritaire de l'emploi du bâtiment ;

- les catégories professionnelles définies pour la cession de l'entreprise ont été artificiellement démultipliées dans un but discriminatoire, en conséquence le licenciement du requérant doit être regardé comme présentant un lien avec son mandat ;

- l'inspectrice du travail n'a pas examiné si l'employeur avait satisfait à son obligation de recherche de reclassement en externe ;

- l'employeur n'a satisfait à ses obligations de recherche de reclassement ni en interne, ni en externe ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 8 octobre 2014, présenté pour MeB..., agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Tickner, par Me Apéry, avocat au barreau de Caen, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat ou de MM. C..., D..., F..., G..., E...et J...une somme de 1000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; il soutient que :

- Mme I..., qui a conduit la procédure, avait reçu délégation de Me A... pour mener à bien l'ensemble de la procédure de licenciement ;

- la saisine de l'inspection du travail en vue du licenciement était suffisamment motivée ;

- le délai de deux jours séparant l'entretien préalable au licenciement de la réunion de la délégation unique du personnel était suffisant au regard de la jurisprudence, la requérante ayant été préalablement informée le 8 juin 2012 sur la détermination des catégories professionnelles et les critères d'ordre des licenciements envisagés, le 11 juin sur l'éventualité d'un licenciement pour motif économique et le 18 juin sur la teneur du jugement du tribunal de commerce de Lisieux, ces éléments étant rappelés dans la lettre de convocation à l'entretien préalable;

- les représentants du personnel ont reçu une information complète ;

- la décision litigieuse est suffisamment motivée car le motif économique et la liste des postes non repris, déterminés par le jugement du tribunal de commerce, étaient opposables à l'inspectrice du travail ; celle-ci a visé ce jugement et mentionné ces éléments dans la décision contestée ;

- la convention collective applicable n'est pas celle du bâtiment mais celle du travail mécanique du bois, qui est dépourvue de commission paritaire nationale ; en tout état de cause la consultation d'une telle commission demeure facultative ;

- les catégories professionnelles et la liste des postes non repris par le cessionnaire ont été arrêtées par le jugement du 18 juin 2012 du tribunal de commerce de Lisieux, lequel ne peut être remis en cause par l'inspecteur du travail ; les salariés intéressés, préalablement entendus par le tribunal, avaient émis un avis favorable sur ces points ;

- aucun reclassement n'était envisageable au sein des sociétés du groupe Tickner ; la recherche menée auprès de l'actionnaire majoritaire est demeurée infructueuse ; l'employeur a par ailleurs procédé à une recherche approfondie de reclassement en externe ;

- le licenciement de la requérante n'a pas de lien avec son mandat ;

Vu l'ordonnance du 30 octobre 2014 fixant la clôture de l'instruction au 18 décembre 2014 à 16 heures ;

Vu le mémoire, enregistré le 18 décembre 2014, présenté pour Mme Meslon, qui conclut aux mêmes fins que sa requête, par les mêmes moyens ;

Vu l'ordonnance du 19 décembre 2014 ordonnant la réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire, enregistré le 13 janvier 2015, présenté pour MeB..., qui conclut aux mêmes fins que précédemment par les mêmes moyens qu'il développe ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 3 mars 2015, présenté par le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social qui conclut au rejet de la requête ; il soutient que :

- Mme I... était compétente pour présenter à l'inspection du travail la demande de licenciement, ayant reçu délégation à cet effet de l'administrateur judiciaire ;

- la demande de licenciement était suffisamment motivée, la référence au jugement du 18 juin 2012 du tribunal de commerce de Lisieux constituant un énoncé suffisant de la cause économique ; par ailleurs la demande indique les conséquences de ce jugement sur l'emploi ;

- la décision de l'inspectrice du travail, qui ne pouvait que s'en tenir au jugement du tribunal de commerce au demeurant rappelé dans sa décision, est suffisamment motivée ;

- l'examen du respect par l'employeur de l'obligation de reclassement externe échappe à l'autorité administrative ; par ailleurs, le défaut de mention relative aux obligations conventionnelles de l'employeur ne peut avoir pour effet d'entacher d'irrégularité la décision contestée ;

- le pouvoir donné par l'administrateur judiciaire à Mme I... comportait la conduite des entretiens préalables au licenciement et la signature des convocations afférentes ;

- un délai suffisant a été respecté entre la tenue des entretiens préalables et la réunion de la délégation unique du personnel, les salariés concernés ayant déjà été informés et consultés les 8, 11 et 20 juin 2012, en tant que salariés protégés, sur la procédure en cours, les licenciements envisagés par catégorie professionnelle, les critères d'ordre et le projet de restructuration mis en oeuvre, ces éléments étant en outre rappelés dans la lettre de convocation ;

- la délégation unique du personnel a reçu une information exhaustive sur les motifs des licenciements et les recherches de reclassement ; l'absence d'avis émis par cette instance n'est pas imputable à l'administrateur judiciaire,

- il n'appartient pas à l'autorité administrative de remettre en cause la détermination des catégories professionnelles, définies conjointement par l'administrateur judiciaire et la délégation unique du personnel lors de la réunion du 8 juin 2012 et validée par la juridiction judiciaire ;

- aucun reclassement interne n'était envisageable, la société CRB faisant l'objet d'une procédure collective, la société Abaque n'ayant plus d'activité et l'actionnaire CORPIH ne disposant pas de poste ;

- aucune consultation de la commission paritaire nationale ne pouvait être effectuée pour la recherche de reclassement en externe, une telle commission n'existant pas dans le cadre de la convention collective nationale du travail mécanique du bois, seule applicable aux activités de l'entreprise ;

- la détermination des catégories professionnelles n'était pas discriminatoire à l'encontre des salariés protégés ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de commerce ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 10 mars 2015 :

- le rapport de M. François, premier conseiller ;

- et les conclusions de M. Delesalle, rapporteur public ;

1. Considérant que la société Tickner exerçait une activité de fabrication et de vente de maisons à ossature bois et d'abris de jardin, garages et gloriettes en bois ; que le tribunal de commerce de Lisieux, qui avait ouvert une procédure de redressement judiciaire le 21 mars 2012, a, par un jugement devenu définitif du 18 juin 2012, arrêté un plan de cession des activités de la société Tickner à la société Mayol prévoyant la reprise de 22 contrats de travail, 3 contrats d'apprentissage et un contrat de qualification, mais également le licenciement pour motif économique de 25 salariés, dont Mme Meslon, secrétaire exerçant le mandat de membre du comité d'hygiène et de sécurité et des conditions de travail ; que, par décision du 30 juillet 2012, l'inspectrice du travail de la 2ème section du Calvados a accordé à MeA..., administrateur judiciaire de la société Tickner, l'autorisation de prononcer le licenciement de Mme Meslon ; que celle-ci relève appel du jugement du 24 mai 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 30 juillet 2012 ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1233-3 du code du travail : " Constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d'une suppression ou transformation d'emploi ou d'une modification, refusée par le salarié, d'un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques. Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail (...) résultant de l'une des causes énoncées au premier alinéa " ; qu'en vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que le licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est fondée sur un motif de caractère économique, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si la situation de l'entreprise justifie le licenciement du salarié, en tenant compte, notamment de la nécessité des réductions envisagées d'effectifs et de la possibilité d'y assurer le reclassement du salarié dans l'entreprise ou au sein du groupe auquel appartient cette dernière, y compris lorsque l'entreprise fait l'objet d'une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire ;

3. Considérant, en premier lieu, que Mme I... salariée de la société FHB, laquelle comprend Me A...au nombre de ses associés, avait, par courrier du 2 janvier 2012, reçu délégation de MeA..., administrateur judiciaire, pour signer l'ensemble des documents afférents à une " procédure collective ", y compris ceux relatifs aux licenciements, convoquer les institutions représentatives du personnel, tenir les réunions correspondantes et mener à bien l'ensemble de la procédure requise ; que la " période d'observation " évoquée dans cette délégation doit s'entendre également, comme il est d'usage constant, de la poursuite d'activité durant la période de liquidation judiciaire et de la mise en oeuvre du plan de cession arrêté par le tribunal ; que par suite, doivent être écartés les moyens tirés de ce que la lettre du 22 juin 2012 convoquant Mme Meslon à l'entretien préalable au licenciement, la convocation de cette dernière à la réunion du comité d'entreprise et la lettre du 9 juillet 2012 saisissant l'inspection du travail de l'autorisation de licenciement de salariés protégés n'ont pas été signées par l'administrateur judiciaire, ainsi que ceux tirés de ce que Me A... n'a pas conduit personnellement l'entretien préalable au licenciement avec l'intéressée ni présidé la réunion de la délégation unique du personnel ;

4. Considérant, en deuxième lieu que l'administrateur judiciaire a suffisamment motivé la demande de licenciement pour motif économique en se référant au jugement du 18 juin 2012 du tribunal de commerce de Lisieux et en indiquant les suppressions d'emploi qui découlaient de ce jugement ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'en vertu des dispositions combinées des articles R. 2421-8 et R. 2421-9 du code du travail, l'entretien préalable au licenciement d'un salarié bénéficiant d'une protection particulière doit obligatoirement précéder la consultation de la délégation unique du personnel sur le projet de licenciement, cette délégation exprimant son avis après audition de l'intéressé ; qu'il ressort des pièces du dossier que l'entretien préalable avec Mme Meslon s'est déroulé le 4 juillet 2012 alors que la consultation de la délégation unique du personnel sur les licenciements est intervenue le 6 juillet suivant ; que, dans ces conditions, la requérante a bénéficié d'un délai suffisant pour préparer son audition devant le comité d'entreprise après l'entretien préalable ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que le courrier du 28 juin 2012 convoquant les membres de la délégation unique du personnel afin qu'elle se prononce sur les licenciements se réfère au jugement rendu le 18 juin 2012 par le tribunal de commerce de Lisieux en précisant que ce dernier a arrêté le plan de cession et autorisé le licenciement pour motif économique des salariés occupant les postes de travail non repris, mentionnant ensuite les salariés concernés et les emplois qu'ils occupaient ; qu'ainsi, conformément aux dispositions de l'article L. 2324 du code du travail, la délégation unique du personnel a disposé d'informations précises de nature à lui permettre de formuler un avis motivé, alors même qu'elle a finalement refusé d'émettre cet avis ;

7. Considérant, en cinquième lieu, et alors au surplus que l'inspectrice du travail n'était pas tenue de faire état de procédures conventionnelles spécifiques dès lors que la convention collective du travail mécanique du bois, seule applicable aux activités de la société Tickner, n'en prévoit pas, qu'il y a lieu d'écarter le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision contestée par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

8. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article L. 642-5 du code de commerce : " Après avoir recueilli l'avis du ministère public et entendu ou dûment appelé le débiteur, le liquidateur, l'administrateur lorsqu'il en a été désigné, les représentants du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel et les contrôleurs, le tribunal retient l'offre qui permet dans les meilleures conditions d'assurer le plus durablement l'emploi attaché à l'ensemble cédé, le paiement des créanciers et qui présente les meilleures garanties d'exécution (...) Le jugement qui arrête le plan en rend les dispositions applicables à tous. (...) Lorsque le plan prévoit des licenciements pour motif économique, il ne peut être arrêté par le tribunal qu'après que la procédure prévue au I de l'article L. 1233-58 du code du travail a été mise en oeuvre (...) Le plan précise notamment les licenciements qui doivent intervenir dans le délai d'un mois après le jugement sur simple notification du liquidateur ou de l'administrateur lorsqu'il en a été désigné, sous réserve des droits de préavis prévus par la loi, les conventions ou les accords collectifs du travail (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 642-3 de ce code : " (...) Le jugement arrêtant le plan indique le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées. " ;

9. Considérant que, si la cession de l'entreprise en redressement judiciaire arrêtée par un jugement du tribunal de commerce entraîne de plein droit le transfert d'une entité économique autonome conservant son identité et, par voie de conséquence, la poursuite par le cessionnaire des contrats de travail attachés à l'entreprise cédée, il résulte de ces dispositions qu'il peut être dérogé à cette règle lorsque le plan de redressement prévoit des licenciements pour motif économique, à la condition que le jugement arrêtant le plan indique le nombre de salariés dont le licenciement est autorisé, ainsi que les activités et catégories professionnelles concernées ;

10. Considérant que le jugement du 18 juin 2012 du tribunal de commerce de Lisieux autorise le licenciement de 25 salariés occupant les postes non repris par le cessionnaire, après application des critères définis au cours de la consultation de la délégation unique du personnel et énumère les postes concernés ; qu'il ressort des procès-verbaux de réunion figurant au dossier que, le 8 juin 2012, les membres de la délégation unique du personnel ont été consultés sur la détermination des catégories professionnelles retenues et les critères d'ordre des licenciements envisagés et ont émis un avis favorable à la répartition des salariés entre ces catégories, cette répartition étant d'ailleurs confirmée lors de la réunion du 11 juin 2012 ; que, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 642-5 du code de commerce, le tribunal de commerce a procédé le 13 juin 2012 à l'audition des représentants du personnel qui ont affirmé " avoir déterminé en connaissance de cause les catégories professionnelles retenues " ; qu'il n'appartenait pas à l'inspecteur du travail de remettre en cause les catégories professionnelles ainsi définies ; qu'ainsi doit être écarté le moyen tiré de ce que la démultiplication artificielle des catégories professionnelles n'aurait pas permis d'établir la réalité des suppressions de poste envisagées et de faciliter en conséquence le licenciement des représentants du personnel ;

11. Considérant en septième lieu, que l'article L. 1233-4 du code du travail dispose que : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré dans l'entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l'entreprise appartient (...) " ; que, saisie d'une demande d'autorisation de licenciement pour motif économique par une société appartenant à un groupe, l'administration est tenue de faire porter son examen sur les entreprises du groupe dont les activités ou l'organisation offrent à l'intéressé la possibilité d'exercer des fonctions comparables à celles qu' il exerçait ;

12. Considérant que la société Tickner appartient à un groupe détenu par l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Corpih ; que le 24 juillet 2012 la gérante de cette entreprise a indiqué à l'administrateur judiciaire qu'elle ne disposait pas de postes de reclassement ; que, par ailleurs, il ressort des pièces du dossier que si la société Tickner a une filiale, la SARL Abaque, chargée de commercialiser ses produits, cette dernière ne comprenait qu'un seul salarié et en conséquence aucun reclassement ne pouvait y être effectué ; qu'il ne pouvait davantage être procédé à des reclassements au sein de la SARL CRB, autre filiale de la société Tickner chargée de la pose des maisons à ossature bois, dans la mesure où celle-ci faisait également l'objet d'un plan de cession au profit de la société Mayol, arrêté par le jugement précité du tribunal de commerce du 18 juin 2012 ; que dans ces conditions, l'administrateur judiciaire a suffisamment justifié de son obligation de recherche de reclassement interne des salariés licenciés ;

13. Considérant, en huitième lieu, qu'il appartient à l'autorité administrative d'une part de s'assurer que les salariés protégés ont accès aux mesures de reclassement externe prévues par le plan de cession dans des conditions non discriminatoires et d'autre part d'apprécier, sous le contrôle du juge, si les règles conventionnelles préalables à sa saisine ont été respectées ; qu'il ressort des pièces du dossier qu'en vue de procéder, le cas échéant, à un tel reclassement pour les salariés dont le licenciement était envisagé, l'administrateur judiciaire a demandé par écrit aux entreprises du département du Calvados et de la région Basse-Normandie, relevant du même secteur d'activité que la société Tickner si elles disposaient de postes correspondant aux qualifications de ces salariés ; qu'il a également saisi la chambre de commerce du Pays d'Auge ; qu'une seule réponse favorable lui a été donnée et transmise à la requérante ; que, par ailleurs, comme il a été dit, la convention collective du travail mécanique du bois applicable aux activités de la société Tickner ne comporte pas de commission nationale paritaire susceptible d'être saisie dans l'hypothèse d'un licenciement ; qu'il en résulte que l'administrateur judiciaire a satisfait aux obligations de reclassement externe qui lui incombaient ;

14. Considérant enfin qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le licenciement de Mme Meslon présenterait un lien avec ses mandats représentatifs ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme Meslon n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à Mme Meslon de la somme qu'elle demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'accorder à Me B..., agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Tickner le bénéfice de ces mêmes dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme Meslon est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de MeB..., agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Tickner, tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme H... Meslon, au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et à Me B..., agissant en qualité de mandataire liquidateur de la société Tickner.

Délibéré après l'audience du 10 mars 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Pérez, président de chambre,

- M. François, premier conseiller,

- Mme Buffet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 3 avril 2015.

Le rapporteur,

E. FRANÇOIS Le président,

A. PÉREZ

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT02191


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02191
Date de la décision : 03/04/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. PEREZ
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. DELESALLE
Avocat(s) : CABINET BRAND et FAUTRAT

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-04-03;13nt02191 ?
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