Vu la requête, enregistrée le 24 avril 2013, présentée pour M. C... B..., demeurant..., par Me A... ; M. B...demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1202151 du 7 mars 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à la décharge des cotisations d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2002 à 2007 et des droits de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés sur la période allant du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2007, à titre subsidiaire, la décharge partielle des mêmes impositions, et celle des pénalités correspondantes ;
2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités contestées ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
il soutient que :
- il était dans l'incapacité juridique et matérielle d'exercer une activité individuelle occulte de vente de fruits et légumes au cours des années et de la période en litige ;
- la procédure d'imposition d'office des résultats tirés de cette activité est irrégulière dès lors qu'il n'a pas agi pour son propre compte mais pour celui des sociétés Delta Fruits et B...Primeur dont il a été successivement le dirigeant et qu'en conséquence la procédure de rectification aurait dû être menée auprès de ces sociétés ;
- l'administration ayant reconnu lors de la vérification de comptabilité de la société B...Primeur portant sur la période allant du 1er janvier 2007 au 31 octobre 2009 que les achats de fruits et légumes effectués sous le nom d'emprunt Zizou ont été effectués par la société B...Primeur, il est fondé à se prévaloir de cette prise de position pour les années 2002 à 2007 ;
- l'administration ne pouvait mettre en oeuvre la procédure d'évaluation d'office prévue par les dispositions des articles L. 68 et L. 73 du livre des procédures fiscales, dès lors que les mises en demeure de déposer des déclarations relatives à son activité professionnelle dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux étaient irrégulières, faute de faire référence à la qualité du professionnel défaillant, à l'activité professionnelle supposée, à la date à laquelle les déclarations auraient dû être déposées et à défaut d'être motivées ;
- il entend sur ce point se prévaloir de la doctrine 13 L 1551 n° 85 publiée au bulletin officiel des impôts ;
- les bases d'imposition arrêtées par l'administration sont exagérées dès lors qu'elles reposent sur des coefficients de marge brute insuffisamment précis et distincts de celui des entreprises qu'il a dirigées ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 17 octobre 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui conclut au rejet de la requête ;
il soutient que :
- le droit de communication exercé auprès de la société Delta Prim a permis de mettre en évidence l'exercice d'une activité occulte exercée à titre professionnel par M.B... ;
- M. B...disposait des moyens juridiques, matériels et humains pour l'exercice de cette activité ;
- la procédure d'imposition d'office n'est pas irrégulière, dès lors que l'administration n'était pas tenue de lui adresser une mise en demeure de déposer des déclarations professionnelles ;
- le requérant n'établit pas que les bases d'imposition retenues sont manifestement exagérées, en se prévalant des coefficients de marge brut des deux sociétés qu'il a dirigées, dès lors qu'elles exercent dans des régions différentes ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 février 2015 :
- le rapport de Mme Allio-Rousseau, premier conseiller,
- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;
1. Considérant que M. C...B...a exercé à titre individuel, de 1993 à 1997, l'activité de marchand ambulant de fruits et légumes ; que, par la suite, il a été associé de la société à responsabilité limitée (SARL) Delta Fruits créée le 1er décembre 1997 et radiée pour cause de cessation d'activité le 23 novembre 2003, qui avait pour activité le négoce de fruits, légumes et végétaux ; que M. B...a également été associé et gérant de la SARL EtablissementsB..., créée le 1er mars 2002 qui exerce une activité de commerce de détail de fruits et légumes, puis de la SARL B...Primeur, créée en février 2004 ayant la même activité ; que des informations et documents recueillis le 23 juillet 2008 dans le cadre de l'exercice par l'administration de son droit de communication auprès de la société Delta Prim à Rungis ont révélé des achats de fruits et légumes effectués par M. B...en son nom personnel et réglés en espèces, pour les montants de 15 931 euros en 2002, 168 436 euros en 2003, 182 458 euros en 2004, 235 674 euros en 2005, 241 047 euros en 2006 et 233 333 euros en 2007 ; que, compte tenu de l'importance et de la fréquence de ces achats, l'administration a estimé qu'ils caractérisaient l'exercice par M. B...à titre individuel d'une activité commerciale d'achat-revente de fruits et légumes, imposable dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux en application de l'article 34 du code général des impôts ; que constatant que cette activité n'avait pas, d'une part, été déclarée auprès d'un centre de formalité des entreprises ou au greffe d'un tribunal de commerce et n'avait donné lieu, d'autre part, à aucune déclaration fiscale, l'administration lui a adressé le 13 novembre 2008 une proposition de rectification d'office, portant évaluation d'office des résultats commerciaux, en application des articles L. 73 et L. 68 du livre des procédures fiscales, et taxation d'office de la taxe sur la valeur ajoutée due, en application des dispositions du 3° de l'article L. 66 du même livre, pour la période correspondant aux années 2002 à 2007 ; que M. B...relève appel du jugement en date du 7 mars 2013 par lequel le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et des pénalités correspondantes ;
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :
2. Considérant qu'en vertu des dispositions de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, l'administration peut évaluer d'office les bénéfices imposables selon le régime du forfait ou un régime de bénéfice réel qu'un contribuable tire d'une entreprise industrielle, commerciale ou artisanale lorsqu'il n'a pas déposé la déclaration annuelle afférente à ces revenus dans le délai légal ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 68 du même livre, auxquelles celles de l'article L. 73 renvoient, cette procédure n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure ; que, toutefois, aux termes de cet article L. 68, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable (...) ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du tribunal de commerce ou d'un organisme consulaire,(...) " ; qu'il résulte de ces dispositions qu'elles autorisent l'administration à imposer selon la procédure d'évaluation d'office les bénéfices industriels ou commerciaux qu'un contribuable a omis de déclarer sans adresser à ce contribuable une mise en demeure de régulariser sa situation préalablement à la proposition de rectification dans les cas qu'elles énumèrent limitativement ;
3. Considérant, en premier lieu, que M. B...fait valoir, comme en première instance, que l'administration n'a pas engagé la procédure de taxation d'office à l'encontre du véritable redevable, dès lors qu'il n'est pas l'auteur de l'activité occulte de vente de fruits et légumes, cette activité non déclarée ayant été en réalité exercée pour le compte des sociétés Delta Fruits et B...Primeur dont il était l'associé et le gérant ;
4. Considérant qu'il résulte toutefois de l'instruction que les factures établies par la société Delta Prim, grossiste à Rungis, dont les copies ont été obtenues par l'administration dans l'exercice de son droit de communication, indiquent sans ambiguïté comme bénéficiaire " M. B...C... ", son adresse personnelle durant les années 2002 à 2007 et ne comportent aucun numéro d'identification à la taxe sur la valeur ajoutée ou de numéro Siret ; qu'elles ont toutes été réglées en espèces ; que la vérification de comptabilité de la SARL B...Primeur qui a concerné la période allant du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2008, étendue jusqu'au 31 octobre 2009 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, a permis de constater que cette société disposait d'un compte client distinct chez le grossiste qui lui adressait pour ses achats des factures établies à son nom comportant son numéro d'identification de redevable de taxe sur la valeur ajoutée et son numéro Siret ; que ces factures étaient réglées par chèques et comptabilisées ; que s'agissant des achats de fruits et légumes effectués sous les noms d'emprunt qu'invoque M.B..., il a été établi, lors de cette vérification de comptabilité, suivant les déclarations mêmes du requérant, que les marchandises avaient été réintégrées dans ses écritures par la société, à l'inverse des achats en litige, dont il n'est pas établi qu'ils auraient été ultérieurement comptabilisés par les sociétés Delta Fruits et B...Primeur ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que la société Delta Prim serait à l'origine d'une confusion sur le véritable acheteur des fruits et légumes facturés à titre personnel à M.B... ; que, par ailleurs, si les quantités achetées sont importantes et nécessitent en conséquence des moyens matériels, humains et financiers adaptés pour leur revente, il résulte de l'instruction qu'eu égard à ses qualités et fonctions au sein des sociétés Delta Fruits et B...Primeur, M.B..., qui était propriétaire d'ailleurs d'un camion plateau du 24 novembre 2003 au 20 février 2008, était en situation de disposer des moyens de ces sociétés ; que dans ces conditions, il résulte de l'instruction que M. B...a exercé, pendant les années 2002 à 2007, une activité occulte de vente de fruits et légumes en son nom personnel ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que l'administration a entaché la procédure d'irrégularité faute d'avoir imposé le véritable auteur de l'activité occulte de commerce de fruits et légumes ;
5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant que M. B...ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises, du greffe du tribunal de commerce ou d'un organisme consulaire ; qu'ainsi qu'il a été rappelé au point 2, l'administration pouvait à bon droit constater qu'il n'avait pas produit les déclarations qu'il était tenu de souscrire et évaluer d'office, sans l'envoi préalable d'une mise en demeure, les bénéfices industriels et commerciaux réalisés en application de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales et la taxe sur la valeur ajoutée due sur le fondement de l'article L. 66 du livre des procédures fiscales ; que, dans ces conditions, les éventuelles irrégularités qui affecteraient les mises en demeure de déposer les déclarations professionnelles relatives aux bénéfices industriels et commerciaux et les déclarations annuelles de taxe sur la valeur ajoutée, qui lui ont été adressées le 9 octobre 2008, sont sans incidence sur la régularité de la procédure d'imposition ;
En ce qui concerne l'interprétation de la loi fiscale :
6. Considérant que M. B...ne peut se prévaloir des recommandations exprimées dans la documentation administrative 13 L 1551 relatives à la procédure d'imposition qui ne comportent aucune interprétation d'un texte fiscal au sens de la garantie prévue par l'article L.80 A du livre des procédures fiscales ;
Sur la méthode de reconstitution :
7. Considérant que M.B..., qui supporte la charge de la preuve du caractère exagéré des impositions établies d'office mises à sa charge en vertu des dispositions de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales, n'apporte aucun élément sur les conditions de l'activité exercée en son nom propre de sorte qu'il n'établit pas que les coefficients de marge retenus par l'administration, par référence au coefficient moyen de marge brute ressortant d'un échantillon représentatif de six entreprises du département d'Eure-et-Loir exerçant la même activité commerciale, parmi lesquelles figure la SARL B...Primeur, seraient significativement excessifs et imprécis ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Orléans a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat qui n'a pas, dans la présente instance, la qualité de partie perdante, verse à M. B...la somme qu'il réclame à ce titre ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et au ministre des finances et des comptes publics.
Délibéré après l'audience du 5 février 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Bataille, président de chambre,
- Mme Loirat, président assesseur,
- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 26 février 2015.
Le rapporteur,
M-P. ALLIO-ROUSSEAULe président,
F. BATAILLE
Le greffier,
C. CROIGER
La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13NT01177