La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

05/02/2015 | FRANCE | N°13NT03085

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 05 février 2015, 13NT03085


Vu le recours, enregistré le 8 novembre 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1008969 du 18 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, sur demande de la société par actions simplifiée (SAS) M3, réduit d'une somme de 24 860 euros la base de l'impôt sur les sociétés fixée à la SAS M3 au titre de l'exercice clos en 2006 et accordé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés correspondante ;

2°) de rétablir la SAS M3 aux rôles de l'impôt sur

les sociétés à raison de l'intégralité des droits qui lui ont été assignés au titre de ...

Vu le recours, enregistré le 8 novembre 2013, présenté par le ministre délégué chargé du budget qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1008969 du 18 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a, sur demande de la société par actions simplifiée (SAS) M3, réduit d'une somme de 24 860 euros la base de l'impôt sur les sociétés fixée à la SAS M3 au titre de l'exercice clos en 2006 et accordé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés correspondante ;

2°) de rétablir la SAS M3 aux rôles de l'impôt sur les sociétés à raison de l'intégralité des droits qui lui ont été assignés au titre de l'exercice clos en 2006 ;

il soutient que :

- la société n'ayant pas justifié que le cours du jour des pièces en cause était inférieur au prix de revient, la provision litigieuse n'était pas déductible ;

- il est par suite fondé à demander que ce nouveau motif soit substitué à celui retenu par l'administration à hauteur du montant rehaussé ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2014, présenté pour la SAS M3 par Me Vanhove, avocat ; elle conclut au rejet du recours et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le motif invoqué par le ministre n'est pas un moyen nouveau au sens de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales ;

- les premiers juges ont en effet considéré qu'elle n'avait pas justifié du montant de la provision avec une approximation suffisante ;

- le ministre ne peut pas renoncer à évaluer comme le service l'a fait le montant de la provision litigieuse ;

- en tout état de cause, la méthode qu'elle a employée était suffisamment précise ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 6 février 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics ; il persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 24 février 2014, présenté pour la SAS M3 ; elle persiste dans ses conclusions par les mêmes moyens ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 18 mars 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui persiste dans ses conclusions en faisant savoir que le dernier mémoire de la SAS M3 n'appelle pas d'observations de sa part ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 22 janvier 2015 :

- le rapport de M. Etienvre, premier conseiller,

- les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public,

- et les observations de Me Vanhove, avocat, représentant la SAS M3 ;

1. Considérant qu'à l'issue de la vérification de comptabilité dont la société par actions simplifiée (SAS) M3 a fait l'objet en 2008, l'administration fiscale a notamment estimé que le montant de 49 755 euros de la provision pour dépréciation du stock, comptabilisée au titre de l'exercice clos le 31 décembre 2006, n'était pas justifié et a, après avoir évalué ce montant à la somme de 24 895 euros, procédé à la réintégration dans les résultats d'une somme de 24 860 euros ; que la SAS M3 a saisi le tribunal administratif de Nantes d'une demande tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés en résultant ; que, par jugement du 18 juillet 2013, le tribunal a jugé que c'est à bon droit que l'administration a estimé que la SAS M3 ne justifiait pas du montant des provisions comptabilisées avec une approximation suffisante et qu'en revanche, la SAS M3 était fondée à contester la méthode mise en oeuvre par l'administration pour déterminer le montant de la provision à réintégrer ; que le ministre relève appel de ce jugement en demandant à la cour de substituer au motif, sur lequel l'administration s'est fondée, tiré du caractère injustifié du montant de la provision litigieuse celui tiré de ce que la société n'a pas justifié que la valeur probable de réalisation des pièces en cause était inférieure au prix de revient ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 39 du code général des impôts rendu applicable à l'impôt sur les sociétés par l'article 209 du même code : "1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : (...) 5° Les provisions constituées en vue de faire face à des pertes ou charges nettement précisées et que des événements en cours rendent probables, à condition qu'elles aient été effectivement constatées dans les écritures de l'exercice (...)" ; qu'aux termes de l'article 38 de ce code : "1. Sous réserve des dispositions des articles 33 ter, 40 à 43 bis et 151 sexies, le bénéfice imposable est le bénéfice net, déterminé d'après les résultats d'ensemble des opérations de toute nature effectuées par les entreprises, y compris notamment les cessions d'éléments quelconques de l'actif, soit en cours, soit en fin d'exploitation. / 2. Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés (...) / 3. Pour l'application des 1 et 2, les stocks sont évalués au prix de revient ou au cours du jour de la clôture de l'exercice, si ce cours est inférieur au prix de revient (...)" ; qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que, lorsqu'une entreprise constate que l'ensemble des matières ou produits qu'elle possède en stock ou une catégorie déterminée d'entre eux a, à la date de clôture de l'exercice, un cours ou une valeur probable de réalisation inférieure au prix de revient, elle est en droit de constituer, à concurrence de l'écart constaté, une provision pour dépréciation ; que pareille provision ne peut cependant être admise que si l'entreprise est en mesure de justifier de la réalité de cet écart et d'en déterminer le montant avec une approximation suffisante ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 199 C du livre des procédures fiscales : "L'administration, ainsi que le contribuable dans la limite du dégrèvement ou de la restitution sollicités, peuvent faire valoir tout moyen nouveau, tant devant le tribunal administratif que devant la cour administrative d'appel, jusqu'à la clôture de l'instruction (...) " ;

4. Considérant que si l'administration peut, à tout moment de la procédure, invoquer un nouveau motif de droit propre à justifier l'imposition, une telle substitution de base légale ne saurait avoir pour effet de priver le contribuable de la faculté, prévue par les articles L. 59, L. 59 A et L. 59 C du livre des procédures fiscales, de demander la saisine de la Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires lorsque celle-ci est compétente pour connaître du différend ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la SAS M3 ne justifie pas, par la seule étude qu'elle a menée en son sein sur la durée de détention dans ses stocks de pièces invendues, que la valeur probable de réalisation des pièces pour lesquelles la provision litigieuse a été comptabilisée était, à la clôture de l'exercice 2006, inférieure au prix de revient ; que le ministre est dès lors fondé à soutenir que la société ne justifiant pas de la réalité de la dépréciation invoquée, la provision en litige n'était en tout état de cause pas déductible ; que la société n'étant privée d'aucune garantie procédurale dès lors que la Commission nationale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a émis le 4 décembre 2009 un avis favorable au maintien du rehaussement au motif que la société n'avait pas justifié que le cours du jour ou la valeur probable de réalisation des pièces détachées à la clôture de l'exercice étaient inférieurs à leur coût de revient, il y a lieu de substituer, comme le demande le ministre, ce motif à celui tiré du caractère injustifié du montant de la provision ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède et en l'absence d'autre moyen invoqué par la SAS M3 devant être examiné par la Cour dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, que le ministre des finances et des comptes publics est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a, sur demande de la SAS M3, réduit d'une somme de 24 860 euros la base de l'impôt sur les sociétés fixée à la SAS M3 au titre de l'exercice clos en 2006 et accordé à celle-ci la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés correspondante ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la SAS M3 demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes en date du 18 juillet 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la SAS M3 devant le tribunal administratif de Nantes est rejetée.

Article 3 : La cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle la SAS M3 a été assujettie au titre de l'exercice clos en 2006 est rétablie.

Article 4 : Les conclusions de la SAS M3 tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS M3 et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 22 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 février 2015.

Le rapporteur,

F. ETIENVRELe président,

F. BATAILLE

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 13NT03085


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT03085
Date de la décision : 05/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : SELARL JURICA

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-02-05;13nt03085 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award