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22/01/2015 | FRANCE | N°14NT00813

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 22 janvier 2015, 14NT00813


Vu la requête, enregistrée le 26 mars 2014, présentée pour M. et Mme A...B...demeurant..., par Me Renard, avocat ; M. et Mme B... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306807-1306808 du 18 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 6 août 2013 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination dans l'hypothèse d'une exécut

ion d'office des mesures d'éloignement ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) d...

Vu la requête, enregistrée le 26 mars 2014, présentée pour M. et Mme A...B...demeurant..., par Me Renard, avocat ; M. et Mme B... demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306807-1306808 du 18 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 6 août 2013 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer un titre de séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination dans l'hypothèse d'une exécution d'office des mesures d'éloignement ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de leur délivrer, dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, des cartes de séjour ou à tout le moins de procéder à un nouvel examen de leur situation aux fins de délivrance de titres de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à leur conseil d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent que :

- les décisions contestées ne sont pas suffisamment motivées ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leur situation ;

- l'obligation de quitter le territoire français a été prise en violation du droit d'être entendu ;

- le préfet a porté une atteinte disproportionnée à leur droit au respect de leur vie privée et familiale et méconnu les stipulations de l'article 3.1 de la convention internationale des droits de l'enfant en refusant de leur délivrer un titre de séjour et en les obligeant à quitter le territoire français ;

- les obligations de quitter le territoire français doivent être annulées en raison de l'illégalité des refus de séjour ;

- les décisions fixant le pays de destination méconnaissent les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elles doivent être annulées en raison de l'illégalité des refus de séjour et des obligations de quitter le territoire français ;

Vu le jugement et les arrêtés attaqués ;

Vu l'ordonnance en date du 2 octobre 2014 fixant la clôture de l'instruction au 31 octobre 2014 ;

Vu les décisions de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 24 février 2014 admettant M. et Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de ces instances et désignant Me Renard pour les représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu l'arrêt rendu par la Cour de justice de l'Union européenne le 5 novembre 2014, dans l'affaire C 166/13 ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 8 janvier 2015 le rapport de M. Etienvre, premier conseiller ;

1. Considérant que M. et Mme B..., ressortissants algériens, entrés en France selon leurs déclarations le 24 décembre 2011, relèvent appel du jugement du 18 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des arrêtés du 6 août 2013 par lesquels le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de leur délivrer un titre de séjour en qualité de réfugié, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination dans l'hypothèse d'une exécution d'office des mesures d'éloignement ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne les refus de séjour :

2. Considérant que les demandes de M. et Mme B...tendant à l'octroi du statut de réfugié ayant été rejetées tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 25 octobre 2012 que par la Cour nationale du droit d'asile le 20 juin 2013, le préfet de la Loire-Atlantique était dès lors tenu de refuser de délivrer aux intéressés les titres de séjour qu'ils avaient sollicités sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il s'ensuit que M. et Mme B...ne peuvent utilement soutenir que les décisions contestées sont insuffisamment motivées, que le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de leurs situations, et que ces décisions ont été prises en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

En ce qui concerne les obligations de quitter le territoire français :

3. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : "I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...)" ;

4. Considérant que les refus de séjour contestés comportent l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; qu'ils sont, dès lors, suffisamment motivés ; qu'en application des dispositions précitées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les mesures portant obligation de quitter le territoire français dont le préfet de la Loire-Atlantique a assorti ses décisions de refus de titre de séjour n'avaient pas à faire l'objet d'une motivation distincte ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi que l'a jugé la Cour de justice de l'Union européenne par l'arrêt Mukarubega du 5 novembre 2014 (C-166/13), le droit d'être entendu dans toute procédure ne s'oppose pas à ce qu'une autorité nationale n'entende pas le ressortissant d'un pays tiers spécifiquement au sujet d'une décision de retour lorsque, après avoir constaté le caractère irrégulier de son séjour sur le territoire national à l'issue d'une procédure ayant pleinement respecté son droit d'être entendu, elle envisage de prendre à son égard une telle décision, que cette décision de retour soit consécutive ou non à un refus de titre de séjour ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le droit d'être entendu de M. et Mme B...a été satisfait avant que n'interviennent les refus de titre de séjour litigieux ; que, dans ces conditions, les requérants ne sont pas fondés à faire valoir que les obligations de quitter le territoire français qui leur ont été adressées méconnaissent leur droit d'être entendu, protégé par le droit de l'Union en tant que partie intégrante des droits de la défense ;

7. Considérant, en troisième lieu, que les décisions portant refus de titre de séjour n'étant pas illégales, eu égard à ce qui vient d'être dit, le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de ces décisions, que M. et Mme B...invoquent à l'encontre des décisions les obligeant à quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Loire-Atlantique a procédé à un examen particulier de la situation personnelle des intéressés ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'en vertu de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ;

10. Considérant que M. et Mme B...se prévalent de leur entrée en France en décembre 2011, de leur volonté d'intégration, de la scolarisation de leur premier enfant, de l'absence d'attaches familiales en Algérie et de la présence en France de membres de la famille de M.B..., en particulier de ses parents titulaires de titres de séjour ; qu'il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier que la vie familiale des intéressés et de leurs enfants ne pourrait se poursuivre hors du territoire français ; que, par suite, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment des conditions de séjour des requérants en France et du caractère récent de leur entrée, le préfet n'a pas porté à leur droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels les décisions contestées ont été prises ;

11. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 : "Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale" ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

12. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intérêt des enfants de M. et MmeB..., compte tenu de leur âge, n'a pas été pris en considération ; que les requérants ne peuvent par ailleurs utilement invoquer une méconnaissance des stipulations précitées motif pris que les décisions contestées seraient sources de stress pour MmeB..., enceinte de leur troisième enfant ;

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de destination :

13. Considérant, en premier lieu, qu'en indiquant que les décisions contestées ne contrevenaient pas à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dans la mesure où les intéressés ne justifiaient pas faire l'objet de menaces ou d'un risque pour leur sécurité ou leur vie en cas de retour en Algérie, le préfet a suffisamment motivé ses décisions ;

14. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation personnelle des intéressés ;

15. Considérant, en troisième lieu, que les décisions portant refus de titre de séjour et les obligations de quitter le territoire français n'étant pas illégales, le moyen tiré par voie d'exception de l'illégalité de ces décisions, que M. et Mme B...invoquent à l'encontre des décisions fixant le pays de destination, ne peut qu'être écarté ;

16. Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales :"Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants" ;

17. Considérant que les requérants, dont les demandes tendant à l'octroi du statut de réfugié ont été rejetées tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile, ne justifient pas de la réalité des actes de banditisme dont ils prétendent avoir été victimes en Algérie et, par suite, du bien-fondé des craintes qu'ils déclarent éprouver en cas de retour dans ce pays ;

18. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leurs demandes ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

19. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions des intéressés tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de la Loire-Atlantique de leur délivrer un titre de séjour ou d'examiner à nouveau leurs situations doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

20. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 8 janvier 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 janvier 2015.

Le rapporteur,

F. ETIENVRELe président,

F. BATAILLE

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT00813


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14NT00813
Date de la décision : 22/01/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Franck ETIENVRE
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : RENARD OLIVIER

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2015-01-22;14nt00813 ?
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