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23/12/2014 | FRANCE | N°14NT01737

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 23 décembre 2014, 14NT01737


Vu la requête, enregistrée le 30 juin 2014, présentée pour M. D...C...A..., demeurant..., par Me Boezec, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201242 du 18 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 2011 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de naturalisation ainsi que de la décision du 25 novembre 2011 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler la décision du 31 mai 2

011 ;

3°) d'ordonner au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande d...

Vu la requête, enregistrée le 30 juin 2014, présentée pour M. D...C...A..., demeurant..., par Me Boezec, avocat, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201242 du 18 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 2011 par lequel le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a rejeté sa demande de naturalisation ainsi que de la décision du 25 novembre 2011 rejetant son recours gracieux ;

2°) d'annuler la décision du 31 mai 2011 ;

3°) d'ordonner au ministre de l'intérieur de réexaminer sa demande de naturalisation, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt à rendre, aux fins de lui accorder la nationalité française ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

il soutient que :

- la décision du 31 mai 2011 n'est pas régulièrement motivée ;

- l'appréciation du ministre ne repose sur aucun élément de fait ;

- le tribunal administratif n'a pas suffisamment motivé son jugement ;

- le ministre a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- il a le centre de ses intérêts en France, où son intégration est parfaite ;

- il est le père de quatre enfants, dont trois de nationalité française ;

- le ministre a commis une erreur de fait ;

Vu le jugement et la décision attaqués ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 11 juillet 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est de nature à justifier l'infirmation du jugement et l'annulation de la décision du 31 mai 2011 ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif à la manifestation de volonté, aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2014 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- et les observations de MeB..., substituant Me Boezec, avocat de M. C...A... ;

1. Considérant que M. C...A..., ressortissant syrien né en 1954, relève appel du jugement du 18 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 31 mai 2011 par laquelle le ministre chargé des naturalisations a rejeté sa demande d'acquisition de la nationalité française ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision du 31 mai 2011 comporte l'énoncé des raisons de droit et de fait sur lesquelles elle repose ; qu'elle est ainsi régulièrement motivée ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 21-15 du code civil : " L'acquisition de la nationalité française par décision de l'autorité publique résulte d'une naturalisation accordée par décret à la demande de l'étranger " ; qu'aux termes de l'article 48 du décret susvisé du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française : " Si le ministre chargé des naturalisations estime qu'il n'y a pas lieu d'accorder la naturalisation ou la réintégration sollicitée, il prononce le rejet de la demande. Il peut également en prononcer l'ajournement en imposant un délai ou des conditions (...) " ; qu'en vertu de ces dispositions, il appartient au ministre de porter une appréciation sur l'intérêt d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite ; que, dans le cadre de cet examen d'opportunité, il peut légalement prendre en compte les renseignements défavorables recueillis sur le comportement du postulant ;

4. Considérant que, pour rejeter la demande de naturalisation présentée par M. C...A..., le ministre a, tout d'abord, observé que, bien qu'ayant résidé plusieurs années en France, le postulant, qui exerce la profession de médecin, a décidé d'exercer entre 1998 et 2003 en Arabie Saoudite ; qu'il a, ensuite, estimé qu'il ressort des éléments du dossier que, dans le passé, le postulant était proche de la confrérie des Frères musulmans, qui prône un retour à un Islam rigoureux dont les valeurs sont contraires à celles de la communauté française ; que, d'ailleurs, le postulant a été en relation avec un individu réfugié de nationalité syrienne, membre de la confrérie des Frères musulmans et imam à la mosquée de la Croix-Rouge à Reims connue pour sa tendance fondamentaliste ; qu'enfin, le ministre a également retenu que, lors de l'audition de l'intéressé avec les services spécialisés, il avait déclaré avoir fait récemment la connaissance de plusieurs hauts responsables de ce mouvement ;

5. Considérant qu'il ressort d'une note de la direction des libertés publiques et des affaires juridiques du ministère de l'intérieur du 28 septembre 2006, établie à l'occasion d'une précédente demande de naturalisation présentée par M. C...A..., que ce dernier est connu pour être proche de la confrérie des Frères musulmans ; qu'à ce titre, le postulant est en relation avec un individu réfugié de nationalité syrienne, membre de cette confrérie et imam à la mosquée de la Croix-Rouge à Reims, connue pour sa tendance fondamentaliste ; que, lors de son audition le 12 juin 2006, le postulant a déclaré avoir récemment fait la connaissance de plusieurs hauts responsables de ce mouvement, sans pour autant adhérer à leurs idées ; que cette note, qui est suffisamment circonstanciée, présente un caractère probant et ce, alors même que les circonstances dont elles font état sont d'environ cinq années antérieures à la décision contestée ; que, si le postulant indique ne pas adhérer aux idées de la confrérie des Frères musulmans, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, qui n'est pas fondée sur une adhésion de l'intéressé à ces idées, qui ne sont pas compatibles avec les valeurs essentielles de la communauté française ; que, si le requérant souligne n'avoir jamais été membre de la confrérie des Frères musulmans, il ne conteste pas avoir, dans le passé, été proche de cette organisation et ajoute identifier l'individu réfugié de nationalité syrienne dont fait état la note du 28 septembre 2006, sans toutefois le connaître particulièrement ; qu'il ne conteste pas connaître des responsables de la confrérie des Frères musulmans mais se borne, de façon inopérante, à alléguer que cette circonstance ne signifie en aucun cas qu'il en partage les idées ; que, dès lors et compte tenu du large pouvoir dont il dispose pour apprécier l'opportunité d'accorder la nationalité française à l'étranger qui la sollicite, le ministre chargé des naturalisations, qui n'a pas commis d'erreur de fait, n'a pas non plus commis d'erreur manifeste d'appréciation ;

6. Considérant que, si le requérant se prévaut de la circonstance qu'il réside de façon habituelle en France depuis 1984, qu'il y possède de manière stable le centre de ses intérêts, y est très bien intégré socialement et professionnellement et que trois de ses enfants sont de nationalité française, de sorte que le ministre ne pouvait valablement se fonder sur la circonstance qu'il a exercé sa profession dans un pays étranger entre 1998 et 2003, il résulte toutefois de l'instruction que le ministre aurait, en tout état de cause, pris la même décision en se fondant sur le seul autre motif de la décision du 31 mai 2011 ;

7. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. C...A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

8. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution et que, dès lors, les conclusions tendant à ce qu'il soit ordonné au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de naturalisation présentée par M. C...A...ne sauraient être accueillies ;

Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par M. A...pour l'instance et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...C...A...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Francfort, président,

- Mme Piltant, premier conseiller,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 23 décembre 2014.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINELe président,

J. FRANCFORT

Le greffier,

F. PERSEHAYE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01737
Date de la décision : 23/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. FRANCFORT
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : SELARL BOEZEC CARON

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-23;14nt01737 ?
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