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15/12/2014 | FRANCE | N°14NT01414

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 15 décembre 2014, 14NT01414


Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2014, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) Transports Antoine Bretagne, dont le siège social est situé ZA le Val Coric à Guer (56380), par Me Saillard-Laurent, avocat ; la SAS Transports Antoine Bretagne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1102118 en date du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Rennes en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat au versement d'une indemnité de 9 952 euros en réparation du préjudice financier que lui a causé la restitution tardive de la taxe

sur la valeur ajoutée ayant grevé ses dépenses de péage pendant la péri...

Vu la requête, enregistrée le 2 juin 2014, présentée pour la société par actions simplifiée (SAS) Transports Antoine Bretagne, dont le siège social est situé ZA le Val Coric à Guer (56380), par Me Saillard-Laurent, avocat ; la SAS Transports Antoine Bretagne demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement no 1102118 en date du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Rennes en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à la condamnation de l'Etat au versement d'une indemnité de 9 952 euros en réparation du préjudice financier que lui a causé la restitution tardive de la taxe sur la valeur ajoutée ayant grevé ses dépenses de péage pendant la période allant de 1996 à 2000 ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser cette somme ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- elle a subi un préjudice financier du fait d'une faute commise par l'Etat, caractérisée par des entraves délibérées pour la délivrance de factures rectificatives par les concessionnaires d'autoroute aux usagers, ainsi qu'en attestent les courriers du gouvernement en date des 27 février 2001 et 15 janvier 2003, dont l'annulation a été prononcée par une décision du Conseil d'Etat du 29 juin 2005 ; c'est seulement au mois d'avril 2006 que l'administration fiscale a permis aux transporteurs routiers de procéder à l'imputation de la taxe sur la valeur ajoutée ou d'en demander la restitution ;

- son préjudice financier, distinct de celui qui est susceptible d'être réparé par l'octroi d'intérêts moratoires, correspond à la valeur d'utilisation du montant de la taxe sur la valeur ajoutée non restitué à temps par l'administration, qui a pour base le produit de la taxe payée, à laquelle doit être appliqué le taux Eonia, minoration faite d'un tiers pour tenir compte des conséquences sur la trésorerie liées à la comptabilisation en charges toutes taxes comprises ;

- l'administration fiscale a méconnu les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que, d'une part, elle a été privée d'une espérance légitime d'exercer son droit à déduction et, d'autre part, l'absence d'indemnisation du préjudice financier qu'elle a subi en raison du comportement fautif de l'Etat constitue une ingérence dans son droit au respect de ses biens ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 29 octobre 2014, présenté par le ministre des finances et des comptes publics qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- l'action indemnitaire de la société requérante n'est pas recevable dès lors qu'existe un recours parallèle fiscal, lui permettant d'aboutir à un résultat identique à cette action ; si la société avait choisi de récupérer la taxe sur la valeur ajoutée par voie de réclamation contentieuse et non par voie d'imputation, elle aurait pu prétendre au versement d'intérêts moratoires ;

- l'administration n'a commis aucune faute, l'Etat ne pouvant restituer la taxe sur la valeur ajoutée en l'absence de réclamation alors qu'il incombait à la société requérante soit de présenter une réclamation contentieuse soit de procéder à l'imputation de la taxe sur la valeur ajoutée avant le 31 décembre 2002 ; la société requérante ne peut prétendre avoir été empêchée par les courriers en date des 27 février 2001 et 15 janvier 2003 de présenter une demande de restitution avant cette date, ainsi que l'a jugé la cour administrative d'appel de Paris dans un arrêt en date du 22 novembre 2012 ;

- en se bornant à modifier la période de référence de l'indemnité sollicitée et la nature du taux retenu pour son calcul, la société requérante ne fait pas état d'un préjudice distinct de celui qui est susceptible d'être réparé par l'octroi d'intérêts moratoires ;

- la société requérante ne peut se prévaloir d'une atteinte à son droit au respect de ses biens protégés par l'article 1er du protocole additionnel à la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

Vu la 6ème directive 77/388/CEE du Conseil des communautés européennes du 17 mai 1977 ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 4 décembre 2014 :

- le rapport de M. Bataille, président de chambre ;

- et les conclusions de Mlle Wunderlich, rapporteur public ;

1. Considérant que, pour les besoins de son activité de transporteur routier, la société par actions simplifiée (SAS) Transports Antoine Bretagne a acquitté auprès de sociétés concessionnaires d'ouvrages autoroutiers sur le territoire français, au cours de la période correspondant aux années 1996 à 2000, des dépenses de péage devant être regardées comme ayant été soumises à la taxe sur la valeur ajoutée en vertu de la directive 77/388/CEE du Conseil du 17 mai 1977, conformément à l'interprétation donnée par la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt du 12 septembre 2000 rendu dans l'affaire C-276/97 Commission c/ France ; qu'elle a imputé sur sa déclaration de chiffre d'affaires du mois de mai 2006 la somme correspondant à la taxe ayant grevé ces dépenses ; qu'estimant avoir droit à être indemnisée du préjudice financier qu'elle considère avoir subi en raison d'une restitution tardive de la taxe sur la valeur ajoutée, la société demande à la cour d'annuler le jugement du 3 avril 2014 du tribunal administratif de Rennes en ce qu'il a rejeté sa demande tendant au versement d'une indemnité ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 190 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable au litige : " Les réclamations relatives aux impôts, contributions, droits, taxes, redevances, soultes et pénalités de toute nature, établis ou recouvrés par les agents de l'administration, relèvent de la juridiction contentieuse lorsqu'elles tendent à obtenir soit la réparation d'erreurs commises dans l'assiette ou le calcul des impositions, soit le bénéfice d'un droit résultant d'une disposition législative ou réglementaire. / Sont instruites et jugées selon les règles du présent chapitre toutes actions tendant à la décharge ou à la réduction d'une imposition ou à l'exercice de droits à déduction, fondées sur la non-conformité de la règle de droit dont il a été fait application à une règle de droit supérieure. / Lorsque cette non-conformité a été révélée par une décision juridictionnelle, l'action en restitution des sommes versées ou en paiement des droits à déduction non exercés ou l'action en réparation du préjudice subi ne peut porter que sur la période postérieure au 1er janvier de la quatrième année précédant celle où la décision révélant la non-conformité est intervenue " ; qu'aux termes de l'article R. 196-1 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " Pour être recevables, les réclamations relatives aux impôts autres que les impôts directs locaux et les taxes annexes à ces impôts, doivent être présentées à l'administration au plus tard le 31 décembre de la deuxième année suivant celle, selon le cas : (...) c) De la réalisation de l'événement qui motive la réclamation (...) " ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article L. 208 du même livre, dans sa rédaction applicable au litige : " Quand l'Etat est condamné à un dégrèvement d'impôt par un tribunal ou quand un dégrèvement est prononcé par l'administration à la suite d'une réclamation tendant à la réparation d'une erreur commise dans l'assiette ou le calcul des impositions, les sommes déjà perçues sont remboursées au contribuable et donnent lieu au paiement d'intérêts moratoires dont le taux est celui de l'intérêt légal. Les intérêts courent du jour du paiement. Ils ne sont pas capitalisés. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les remboursements de taxe sur la valeur ajoutée obtenus par une société après le rejet par l'administration d'une réclamation ont le caractère de dégrèvements contentieux de la même nature que celui prononcé par un tribunal au sens de l'article L. 208 de ce livre ; que ces remboursements doivent, dès lors, donner lieu au paiement d'intérêts moratoires qui courent, s'agissant de la procédure de remboursement de crédits de taxe sur la valeur ajoutée pour laquelle il n'y a pas de paiement antérieur de la part du redevable, à compter de la date de la réclamation qui fait apparaître le crédit remboursable ;

3. Considérant que la SAS SITM se prévaut d'un préjudice financier qui résulterait des obstacles mis par l'Etat au remboursement de la taxe sur la valeur ajoutée litigieuse en conformité avec la directive telle qu'interprétée par la Cour de justice des Communautés européennes dans son arrêt du 12 septembre 2000, et de l'indisponibilité de ces sommes pendant une période de cinq ans ; que, toutefois, le seul préjudice qu'elle invoque correspond aux intérêts moratoires calculés en retenant le taux de placement sur le marché monétaire, en modifiant la période de référence et en appliquant un abattement forfaitaire d'un tiers du résultat de ces calculs pour tenir compte de l'avantage obtenu en matière d'impôt sur les sociétés ; qu'ainsi elle ne fait état d'aucun préjudice distinct de celui qui était susceptible d'être réparé par le paiement des intérêts moratoires prévus par les dispositions de l'article L. 208 du livre des procédures fiscales, dans le cadre d'une réclamation fiscale qu'elle pouvait, selon les dispositions citées ci-dessus des articles L. 190 et R. 196-1 du livre des procédures fiscales, présenter jusqu'au 31 décembre 2002, et à laquelle le courrier du gouvernement du 15 janvier 2003 dont elle fait état, intervenu postérieurement à cette date, n'a, contrairement à ce qu'elle soutient, pu faire obstacle ; que le courrier du gouvernement du 27 février 2001 auquel elle se réfère également, n'a pas davantage fait obstacle à ce qu'elle présente une telle réclamation en invoquant une violation du droit de l'Union européenne ; que, par suite, ses conclusions indemnitaires sont donc irrecevables ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la SAS Transports Antoine Bretagne n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, lequel est suffisamment motivé, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Transports Antoine Bretagne est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Transports Antoine Bretagne et au ministre des finances et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Etienvre, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 15 décembre 2014.

Le président rapporteur,

F. BATAILLE L'assesseur le plus ancien,

C. LOIRAT

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre des finances et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 14NT014142

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 14NT01414
Date de la décision : 15/12/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Frédérik BATAILLE
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : CABINET SAILLARD-LAURENT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-12-15;14nt01414 ?
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