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06/11/2014 | FRANCE | N°13NT02709

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 06 novembre 2014, 13NT02709


Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2013, présentée pour Mme A... B..., demeurant..., par Me Aibar, avocat ; Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302844 en date du 2 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2013 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet d

e la Loire-Atlantique, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivre...

Vu la requête, enregistrée le 20 septembre 2013, présentée pour Mme A... B..., demeurant..., par Me Aibar, avocat ; Mme B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302844 en date du 2 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2013 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Loire-Atlantique, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, de lui délivrer un titre de séjour ou de procéder à un nouvel examen de sa situation dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me Aibar, d'une somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de la renonciation de son avocat à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

elle soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français, qui a été prise sans que le préfet ne l'ait préalablement mise en mesure de présenter ses observations, est intervenue à l'issue d'une procédure irrégulière, en méconnaissance des stipulations de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen de sa situation personnelle ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que sa demande d'asile reposait sur une fraude délibérée ;

- l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour prive de base légale la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et commis une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 juin 2014, présenté par le préfet de la Loire-Atlantique, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- la décision portant refus de titre de séjour est suffisamment motivée ;

- la seule circonstance que Mme B... n'ait pas été expressément informée qu'elle pouvait faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire en cas de rejet de sa demande de titre, alors qu'elle ne pouvait l'ignorer, n'est pas de nature à permettre de regarder la requérante comme ayant été privée de son droit à être entendue tel qu'il est notamment exprimé au 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- c'est à bon droit qu'il a considéré que la demande d'asile présentée par l'intéressée reposait sur une fraude délibérée dès lors que ses empreintes digitales se sont révélées inexploitables à deux reprises, ce qui démontre qu'elle a cherché à se soustraire à l'identification prévue par le règlement CE n° 2725/2000 du 11 décembre 2000 ;

- il a procédé à un examen de la situation de l'intéressée ;

- la requérante n'ayant pas sollicité son admission au séjour à un autre titre que celui de demandeur d'asile, il n'était pas tenu de vérifier si elle pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur un autre fondement ;

- l'exception d'illégalité de la décision de refus de titre de séjour invoquée contre la décision portant obligation de quitter le territoire national n'est pas fondée ;

- Mme B... ne produit aucun élément permettant d'établir qu'elle encourrait des risques en cas de retour dans son pays d'origine ;

Vu le mémoire, enregistré le 10 octobre 2014, présenté pour Mme B... qui conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

elle soutient qu'en application des dispositions de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet avait obligation d'examiner d'office s'il pouvait être fait droit à sa demande de titre de séjour sur un fondement autre que le 8° de l'article L. 314-11 du même code ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 26 août 2013, rectifiée le 17 avril 2014, admettant Mme B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale et désignant Me C... pour la représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2014 le rapport de M. Jouno, rapporteur ;

1. Considérant que Mme B..., ressortissante nigériane, relève appel du jugement en date du 2 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 19 mars 2013 du préfet de la Loire-Atlantique portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si la présence de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public, la carte de résident est délivrée de plein droit, sous réserve de la régularité du séjour : (...) 8° A l'étranger qui a obtenu le statut de réfugié en application du livre VII du présent code (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que Mme B... a présenté, le 22 octobre 2012, une demande d'admission au statut de réfugié auprès de la préfecture de la Loire-Atlantique ; que cette demande a fait l'objet, selon la procédure prioritaire prévue par les dispositions de l'article L. 723-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, d'une décision de rejet du 5 janvier 2013 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ; que le préfet de la Loire-Atlantique était, dès lors, tenu de refuser à Mme B... le titre de séjour qu'elle sollicitait sur le fondement des dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que l'autorité administrative, qui n'était saisie d'aucune demande à un autre titre et n'était pas tenue, en l'absence de dispositions expresses en ce sens, d'examiner d'office si Mme B... pouvait prétendre à une autorisation de séjour sur le fondement d'une disposition autre que le 8° de l'article L. 314-11 précité, se trouvait ainsi en situation de compétence liée pour refuser le titre de séjour sollicité, de sorte que les moyens tirés de l'insuffisante motivation de cette décision de refus et de l'absence d'examen de sa situation personnelle sont inopérants ;

4. Considérant, en second lieu, que Mme B..., qui fait valoir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que sa demande d'asile reposait sur une fraude délibérée, doit être regardée comme contestant, par la voie de l'exception, la légalité de l'arrêté en date du 3 décembre 2012 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a rejeté sa demande d'admission provisoire de séjour au titre de l'asile en application du 4° de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, toutefois, la décision de refus de titre de séjour attaquée n'a pas été prise en application de cet arrêté et ne forme pas avec cette décision une opération complexe ; que, par suite, le moyen tiré, par la voie de l'exception, de l'illégalité du refus d'admission provisoire au séjour doit être écarté ;

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de destination :

5. Considérant, en premier lieu, que Mme B... invoque devant le juge d'appel le même moyen que celui soulevé en première instance, tiré de ce que l'obligation de quitter le territoire français a méconnu son droit à être entendu, lequel est consacré au 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; qu'il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus par les premiers juges ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que compte tenu de ce qui a été dit aux points 3 et 4, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait illégale en conséquence de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour sur laquelle elle se fonde doit être écarté ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires à l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ;

8. Considérant que si Mme B..., dont la demande d'asile a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 5 janvier 2013, soutient qu'un retour au Nigéria l'exposerait à des risques de traitements inhumains ou dégradants en raison de sa confession chrétienne et se prévaut des atteintes aux droits de l'homme constatées dans ce pays, elle ne produit aucun élément permettant d'établir la réalité des risques personnellement encourus en cas de retour dans son pays d'origine ; que, par suite, le préfet de la Loire-Atlantique n'a méconnu ni les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il n'a pas davantage commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressée ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de Mme B..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint, sous astreinte, au préfet de la Loire-Atlantique de lui délivrer un titre de séjour ou de procéder à un nouvel examen de sa situation doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont Mme B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Bataille, président de chambre,

- Mme Loirat, président-assesseur,

- M. Jouno, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 novembre 2014.

Le rapporteur,

T. JOUNO Le président,

F. BATAILLE

Le greffier,

C. CROIGER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT027092


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02709
Date de la décision : 06/11/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. BATAILLE
Rapporteur ?: M. Thurian JOUNO
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : SELARL CADRAJURIS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-11-06;13nt02709 ?
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