Vu la requête, enregistrée le 22 février 2013, présentée pour M. et Mme C...A...demeurant..., par Me Trennec, avocat au barreau de Seine-et-Marne ; M. et Mme A...demandent à la cour :
1°) d'annuler le jugement no10-3639 en date du 21 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine Nantes Métropole à réparer les préjudices qu'ils estiment avoir subis en raison de l'installation de conteneurs à ordures ménagères en face de leur commerce situé 17 rue d'Angleterre à Nantes ;
2°) de condamner la communauté urbaine Nantes Métropole à leur verser la somme globale de 950 522 euros, assortie des intérêts au taux légal et de leur capitalisation ;
3°) de mettre à la charge de la communauté urbaine Nantes Métropole le versement à leur conseil, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
ils soutiennent que :
- l'installation de conteneurs à ordures ménagères à proximité de leur commerce alimentaire et de traiteur a provoqué des problèmes d'hygiène et de salubrité les contraignant à cesser leur activité et excédant les inconvénients normaux du voisinage d'un ouvrage public ; la présence de cet ouvrage public est ainsi constitutive d'un dommage anormal et spécial justifiant leur indemnisation ;
- le lien de causalité entre l'ouvrage en cause et leurs préjudices est établi, car ils ont dû cesser brutalement leur activité, dont les documents comptables qu'ils produisent et qui sont probants attestent du caractère florissant ;
- la communauté urbaine Nantes Métropole a par ailleurs commis une faute quant au choix de l'emplacement de cette installation ;
- leur préjudice est constitué par leur manque à gagner, ainsi que par la perte de chance de voir leurs résultats continuer à progresser ; qu'ils ont subi des troubles dans leurs conditions d'existence en raison des démarches qu'ils ont dû accomplir auprès de la communauté urbaine et du médiateur de la République ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu le mémoire en défense, enregistré le 6 septembre 2013, présenté pour la communauté urbaine Nantes Métropole, par Me Reveau, avocat au barreau de Nantes, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. et Mme A...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
elle soutient que :
- la requête en appel de M. et Mme A...est irrecevable pour tardiveté ;
- contrairement à ce qu'a estimé le tribunal administratif, les requérants n'établissent pas avoir subi un préjudice anormal et spécial du fait de l'installation des conteneurs enterrés ;
- il n'est pas davantage établi de lien de causalité entre le préjudice allégué et l'installation des conteneurs dont la mise en service est intervenue plus de deux mois après la fermeture du commerce concerné ;
- les conclusions des requérants ayant sollicité une augmentation de 900 522 euros de l'indemnité qu'ils avaient initialement réclamée, au titre d'un prétendu manque à gagner qu'ils subiraient jusqu'à la date d'admission à la retraite de MmeA..., sont irrecevables ;
- l'évaluation des préjudices, qui est fondée sur un bénéfice annuel purement hypothétique, n'est ni sincère ni justifiée dans son montant ;
Vu le mémoire, enregistré le 19 juin 2014, présenté pour les consortsA..., qui concluent aux mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens ;
ils soutiennent en outre que les délais de recours n'ont commencé à courir qu'à compter de la seconde notification du jugement attaqué et que, leurs préjudices ayant perduré, ils sont fondés à solliciter une somme plus élevée que celle initialement demandée ;
Vu la décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 9 janvier 2013 admettant M. et Mme A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Trennec pour les représenter ;
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 26 juin 2014 :
- le rapport de Mme Gélard, premier conseiller,
- les conclusions de M. Degommier, rapporteur public ;
- les observations de M.A... ;
- et les observations de MeB..., substituant Me Reveau, avocat de la communauté urbaine de Nantes Métropole ;
1. Considérant que M. et Mme A...relèvent appel du jugement du 21 juin 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande tendant à la condamnation de la communauté urbaine Nantes Métropole à leur verser la somme globale de 950 522 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis en raison de l'installation de conteneurs à ordures ménagères enterrés à proximité immédiate de leur commerce alimentaire situé 17 rue d'Angleterre à Nantes ;
Sur la responsabilité sans faute de la communauté urbaine Nantes Métropole :
2. Considérant qu'un point d'apport volontaire aménagé à demeure pour les besoins du service de collecte et de tri des ordures ménagères constitue un ouvrage public dont la présence est susceptible d'engager envers les tiers la responsabilité même sans faute de la collectivité publique ; que la victime doit toutefois apporter la preuve de la réalité des préjudices qu'elle allègue avoir subis et de l'existence d'un lien de causalité entre l'ouvrage public et ces préjudices, qui doivent en outre présenter un caractère anormal et spécial au regard des sujétions que les riverains d'un tel ouvrage doivent normalement supporter ;
3. Considérant que si M. et Mme A...soutiennent que les conteneurs installés à proximité immédiate de leur commerce alimentaire, spécialisé dans la fabrication de plats préparés marocains à emporter ou vendus sur les marchés, sont une source de désagréments importants en termes d'hygiène, d'odeurs et de bruits, ils n'apportent cependant aucun élément probant à l'appui de ces allégations, alors qu'il est constant que ce dispositif enterré de collecte des ordures destinées au tri sélectif a été installé en remplacement de poubelles et de conteneurs précédemment en place, pour améliorer la propreté et la tranquillité publique, et alors surtout qu'il résulte de l'instruction que les intéressés ont cessé leur activité commerciale dès le 12 novembre 2007, soit avant même la mise en service effective des conteneurs le 21 janvier 2008 ; que, dans ces conditions, les requérants n'établissent ni l'anormalité du préjudice qu'ils invoquent, ni l'existence d'un lien de causalité entre le fonctionnement de ces points d'apport volontaire de déchets et la cessation de leur activité professionnelle ; qu'ils ne sont ainsi pas fondés à rechercher la responsabilité sans faute de la communauté urbaine Nantes Métropole à raison de l'installation de ces ouvrages ;
Sur la responsabilité pour faute de la communauté urbaine Nantes Métropole :
4. Considérant que les requérants, qui ne peuvent utilement se prévaloir de la circonstance qu'un protocole transactionnel leur a été proposé préalablement à leur action contentieuse, n'établissent pas par les pièces qu'ils produisent qu'en procédant à l'installation d'un point de collecte des déchets dans les conditions rappelées au point 3 la communauté urbaine Nantes Métropole aurait commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les fins de non-recevoir opposées par la communauté urbaine Nantes Métropole, que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté leur demande ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
6. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de la communauté urbaine Nantes Métropole, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement de la somme que M. et Mme A...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la communauté urbaine Nantes Métropole sur le même fondement ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la communauté urbaine Nantes Métropole au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A...et à la communauté urbaine Nantes Métropole.
Délibéré après l'audience du 26 juin 2014, à laquelle siégeaient :
- Mme Perrot, président de chambre,
- Mme Specht, premier conseiller,
- Mme Gélard, premier conseiller,
Lu en audience publique, le 17 juillet 2014
Le rapporteur,
V. GÉLARDLe président,
I. PERROT
Le greffier,
C. GUÉZO
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 13NT007022