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27/06/2014 | FRANCE | N°13NT01078

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 2ème chambre, 27 juin 2014, 13NT01078


Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2013, présentée pour M. et MmeA..., demeurant à..., par Me Montacié, avocat au barreau de Paris ;

M. et Mme A...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-1762 du 15 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande du préfet de l'Orne, l'arrêté du 22 mai 2012 du maire d'Almenêches leur délivrant un permis de construire pour la construction d'une maison individuelle regroupant deux logements ;

2°) de rejeter le déféré présenté par le préfet de l'Orne devant le tribunal

administratif de Caen ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au...

Vu la requête, enregistrée le 15 avril 2013, présentée pour M. et MmeA..., demeurant à..., par Me Montacié, avocat au barreau de Paris ;

M. et Mme A...demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 12-1762 du 15 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande du préfet de l'Orne, l'arrêté du 22 mai 2012 du maire d'Almenêches leur délivrant un permis de construire pour la construction d'une maison individuelle regroupant deux logements ;

2°) de rejeter le déféré présenté par le préfet de l'Orne devant le tribunal administratif de Caen ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

ils soutiennent que :

- le déféré préfectoral était irrecevable dans la mesure où le sous-préfet signataire du recours gracieux préalable auprès du maire d'Almenêches n'était plus en poste quand il a exercé ce recours, et, en tout état de cause, ne justifiait pas d'une délégation du préfet en matière d'urbanisme ;

- en outre, l'absence de délégation rend irréguliers l'avis défavorable émis par le sous-préfet sur la délivrance du permis par le maire et la notification prévue par l'article R .600-1 du code de l'urbanisme ;

- contrairement à ce qu'à estimé le tribunal, le terrain d'assiette de la construction projetée est environné de bâtiments et situé dans un hameau, donc dans une partie urbanisée de la commune ; la circonstance que certaines habitations proches soient rattachées à une autre commune est sans incidence sur les dispositions de l'article L.111-1-2 du code de l'urbanisme ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 12 juillet 2013, présenté par le préfet de l'Orne, qui conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. et Mme A...une somme de 50 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la requête d'appel est irrecevable en l'absence de production d'une copie du jugement attaqué et de justification du paiement de la contribution pour l'aide juridique ;

- le déféré est recevable dès lors que le sous-préfet, signataire du recours gracieux du 27 juin 2012, exerçait ses fonctions à Argentan à cette date que l'exercice du contrôle de légalité, inhérent aux fonctions de sous-préfet d'arrondissement, ne nécessite pas de délégation particulière ;

- le sous-préfet d'Argentan bénéficiait d'une délégation en vertu de son arrêté du 10novembre 2011 portant délégation de signature au secrétaire général et prévoyant qu'en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, la délégation lui était dévolue ce qui lui permettait d'émettre un avis préalable à la délivrance du permis ;

- le terrain d'assiette du projet litigieux est situé hors de tout hameau, dans un espace naturel où n'existent que deux habitations dans un rayon de cent mètres, sans raccordement au réseau d'électricité ;

- au regard de l'article R.111-14 du code de l'urbanisme, ce projet est par ailleurs de nature à favoriser une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnants ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 28 mars 2014, présenté pour M. et Mme A...qui concluent aux mêmes fins que leur requête, par les mêmes moyens ;

- ils ajoutent que leur requête d'appel est recevable et que l'avis défavorable du sous-préfet émis au nom du préfet ne comporte aucune mention quant à l'absence ou l'empêchement du secrétaire général de la préfecture ;

Vu l'ordonnance du 24 avril 2014 fixant la clôture d'instruction au 13 mai 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire, enregistré les 28 avril 2014, présenté par le préfet de l'Orne, qui persiste dans ses conclusions ;

Vu le mémoire, enregistré le 8 mai 2014, présenté pour la commune d'Almenêches, représentée par son maire, par Me Poisson, avocat au barreau d'Argentan ; la commune d'Almenêches conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- elle s'associe au moyen des requérants selon lequel le déféré préfectoral était irrecevable ;

- six habitations se trouvent à moins de 100 mètres du terrain d'assiette du permis de construire contesté qui est ainsi situé dans une partie urbanisée de la commune au sens de l'article L 111-1-2 du code de l'urbanisme et qui, en outre, est desservi par les réseaux ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code de l'urbanisme ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 juin 2014 :

- le rapport de M. François, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Pouget, rapporteur public ;

1. Considérant que M.et Mme A...relèvent appel du jugement du 15 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Caen a annulé, à la demande du préfet de l'Orne, l'arrêté du 22 mai 2012 du maire d'Almenêches leur délivrant un permis de construire pour la construction d'une maison individuelle regroupant deux logements ;

Sur la recevabilité du déféré préfectoral :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales : " Les actes pris par les autorités communales sont exécutoires de plein droit dès qu'il a été procédé à leur publication ou affichage (...) ainsi qu'à leur transmission au représentant de l'Etat dans le département ou à son délégué dans l'arrondissement (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2131-6 du même code : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. (...) " et que l'article R. 421-2 du code de justice administrative dispose que : " (...) le silence gardé pendant plus de deux mois sur une réclamation par l'autorité compétente vaut décision de rejet. Les intéressés disposent, pour se pourvoir contre cette décision implicite, d'un délai de deux mois (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., signataire du recours gracieux formé le 27 juin 2012 auprès du maire d'Almenêches en vue du retrait de l'arrêté litigieux du 22 mai 2012, était, à cette date, sous-préfet de l'arrondissement d'Argentan dans lequel se trouve la commune d'Almenêches, son installation comme sous-préfet de l'arrondissement de Fougères en Ille-et-Vilaine n'étant intervenue que le 6 août 2012 ; qu'il avait dès lors compétence, conformément aux dispositions précitées de l'article L. 2131-1 du code général des collectivités territoriales, sans qu'il soit besoin qu'il dispose d'une délégation spécifique à cet effet, pour exercer ce recours qui a interrompu le délai du recours contentieux ; qu'une décision implicite de rejet étant née le 27 août suivant du silence gardé par le maire, le déféré enregistré le 17 septembre 2012 au greffe du tribunal administratif de Caen a été effectué par le préfet de l'Orne dans le délai de deux mois imparti par l'article R. 421-2 précité du code de justice administrative ; que, dans ces conditions, la fin de non-recevoir opposée par M.et Mme A...doit être écartée ;

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'arrêté du 22 mai 2012 :

4. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 422-6 du code de l'urbanisme : " En cas (...) d'abrogation (...) d'un plan local d'urbanisme ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu (...) et lorsque cette décision n'a pas pour effet de remettre en vigueur un document d'urbanisme antérieur, le maire (...) recueille l'avis conforme du préfet sur les demandes de permis (...) postérieures à cette (...) abrogation (...)" ;

5. Considérant que le plan d'occupation des sols d'Almenêches a été abrogé par délibération du conseil municipal du 13 septembre 2007 et qu'à la date de la décision contestée, cette commune n'était plus dotée d'un document d'urbanisme opposable aux tiers ; qu'en application des dispositions précitées, le maire était tenu de recueillir l'avis conforme du préfet préalablement à la délivrance du permis contesté ; que M.B..., signataire de l'avis défavorable émis le 22 février 2012 au nom du préfet, avait, par un arrêté du préfet de l'Orne en date du 10 novembre 2011, publié au recueil des actes administratifs de la préfecture, reçu délégation de signature à cet effet en cas d'absence ou d'empêchement du secrétaire général, qu'ainsi, doit être écarté le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de cet avis, lequel, contrairement à ce qui est soutenu, n'avait pas, à peine d'irrégularité, à faire mention de cette absence ou de cet empêchement ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 111-1-2 du code de l'urbanisme : " En l'absence de plan local d'urbanisme ou de carte communale opposable aux tiers, ou de tout document d'urbanisme en tenant lieu, seules sont autorisées, en dehors des parties actuellement urbanisées de la commune : 1° L'adaptation, le changement de destination, la réfection, l'extension des constructions existantes (...) " ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet litigieux, d'une superficie de 2849 m², est situé au lieudit " Marsoulette ", à trois kilomètres du bourg, au sein d'un vaste espace naturel composé de bois, de prairies et de cultures ; que si, à une centaine de mètres à l'ouest est implanté le siège d'une exploitation agricole et que deux autres constructions sont édifiées à plus de 150 m. au nord, la présence de ces seuls bâtiments, qui ressortent au demeurant de compartiments de terrains distincts de celui des requérants, n'est pas de nature à faire regarder la parcelle de ces derniers comme appartenant à une partie actuellement urbanisée de la commune d'Almenêches au sens des dispositions de l'article L.111-1-2 précité du code de l'urbanisme ; que, dans ces conditions, et alors au surplus que le projet critiqué est de nature à favoriser, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 111-14 du code de l'urbanisme, une urbanisation dispersée incompatible avec la vocation des espaces naturels environnant, M. et Mme A...ne sont pas fondés à soutenir, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le préfet de l'Orne, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a annulé l'arrêté du 22 mai 2012 par lequel le maire d'Almenêches leur a accordé un permis de construire ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement à M. et Mme A... et à la commune d'Almenêches de la somme qu'ils demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'accorder à l'Etat le bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la commune d'Almenêches et du préfet de l'Orne et tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A..., au préfet de l'Orne et à la commune d'Almenêches.

Délibéré après l'audience du 3 juin 2014, où siégeaient :

- M. Bachelier, président de la cour,

- M. Sudron, président-assesseur,

- M. François, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 juin 2014.

Le rapporteur,

E. FRANÇOISLe président,

G. BACHELIER

Le greffier,

S. BOYÈRE

La République mande et ordonne au ministre du logement et de l'égalité des territoires en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT01078


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01078
Date de la décision : 27/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BACHELIER
Rapporteur ?: M. Eric FRANCOIS
Rapporteur public ?: M. POUGET
Avocat(s) : MONTACIE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-06-27;13nt01078 ?
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