La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

26/06/2014 | FRANCE | N°13NT02278

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 26 juin 2014, 13NT02278


Vu la requête, enregistrée le 1er août 2013, présentée pour Mme C... A..., demeurant..., par Me Moutel, avocat au barreau du Mans ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302886 du 2 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2013 par lequel le préfet de la Sarthe a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé la République du Congo ou tout autre pays dans lequel

elle serait admissible comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pou...

Vu la requête, enregistrée le 1er août 2013, présentée pour Mme C... A..., demeurant..., par Me Moutel, avocat au barreau du Mans ; Mme A... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1302886 du 2 juillet 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 janvier 2013 par lequel le préfet de la Sarthe a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé la République du Congo ou tout autre pays dans lequel elle serait admissible comme pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Sarthe à titre principal de lui délivrer une carte de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai de deux mois à compter de la même date et de lui délivrer durant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son avocat de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, moyennant la renonciation de ce dernier à percevoir la contribution de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

elle soutient que :

- le refus de titre de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; elle est célibataire et sans enfant ; elle était isolée dans son pays d'origine ; son père, et sa fratrie résident régulièrement en France ; elle s'occupe de son père qui est malade ;

- compte tenu de l'illégalité du refus de titre de séjour, l'obligation de quitter le territoire français doit être annulée ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnait également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination doit être annulée par voie de conséquence de l'annulation des deux autres décisions ; elle est en outre contraire aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, dès lors que sa maison a été détruite et qu'elle ne pourrait bénéficier d'aucune aide familiale en cas de retour en République du Congo ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 7 février 2014, présenté par le préfet de la Sarthe qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- les conditions de délivrance d'un titre de séjour temporaire en application de l'article L. 313-11, 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont donc pas satisfaites ; Mme A... ne démontre pas ne plus avoir d'attaches familiales ou sociales au Congo où elle a vécu 40 ans ; elle ne justifie pas s'occuper de son père qui est malade dès lors qu'elle ne réside pas avec lui ;

- le lien de filiation entre M. B... A... et la requérante n'est pas, par ailleurs, avéré puisque les services du ministère des affaires étrangères consultés en septembre 2013 par le Préfet de la Haute-Marne indiquent que l'acte de naissance produit par Madame C... A...concernerait une autre personne ;

- les conclusions à fin d'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ne peuvent en conséquence qu'être rejetées ;

Vu le mémoire, enregistré le 27 mai 2014, présenté pour Mme A... qui conclut par les mêmes moyens aux mêmes fins que la requête ;

elle fait valoir que :

- le préfet n'établit pas que son acte de naissance est inauthentique dès lors qu'il se fonde sur une réponse du consulat de France à Brazzaville qui poursuit les mêmes objectifs migratoires que la préfecture ; elle produit une copie de son acte de naissance qui a été légalisé par le consulat de la république du Congo en France ;

- elle justifie ne plus avoir de famille dans son pays d'origine et être titulaire d'une promesse d'embauche ;

Vu le mémoire, enregistré le 4 juin 2014, présenté par le préfet de la Sarthe ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes, en date du 4 septembre 2013, admettant Mme A... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 juin 2014 :

- le rapport de Mme Allio-Rousseau, premier conseiller ;

1. Considérant que Mme C... A..., née le 30 novembre 1969 à Brazzaville, est entrée régulièrement en France sous couvert d'un visa de court séjour le 7 novembre 2009 ; qu'elle a sollicité le 25 juillet 2012 une demande de régularisation de sa situation administrative sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 18 janvier 2013, le préfet de la Sarthe a rejeté sa demande de titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé la République du Congo ou tout autre pays dans lequel elle serait admissible comme pays de destination ; que Mme A... relève appel du jugement du 26 avril 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.(...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; "

3. Considérant que si Mme A..., célibataire et sans enfant, soutient qu'elle n'a plus d'attaches familiales en République du Congo, compte tenu, d'une part, du décès de sa mère et de sa grand-mère, respectivement en 2003 et 2007, leurs certificats de décès ne suffisent pas à établir qu'elle serait dépourvue de tous liens personnels ou d'attaches familiales en cas de retour dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de 40 ans ; que Mme A... se prévaut, par ailleurs, de ses attaches familiales en France, et notamment de la présence de son père, et celle de ses 4 frères et soeurs ; qu'en se bornant, en appel, à reprendre les termes d'un courriel du 24 septembre 2013 des services compétents du ministère des affaires étrangères, qui indique que l'acte de naissance présenté en préfecture de Haute-Marne par Mme A... est inauthentique, la référence de cet acte correspondant à une autre personne, le préfet de la Sarthe ne démontre pas, compte tenu du caractère imprécis des mentions figurant dans ce courriel, que le lien de filiation de Mme A... avec M. B... A...ne peut être regardé comme établi, alors que cet acte de naissance a été légalisé depuis par les autorités consulaires de son pays ; que, toutefois, si Mme A... fait valoir que sa présence en France est indispensable compte tenu de l'état de santé de son père, qui, âgé de soixante-dix-huit ans, est atteint de leucopathie cérébrale, avec des troubles de la déglutition et de la parole et se déplace difficilement, les certificats médicaux qu'elle produit ne suffisent pas à établir que sa présence personnelle et exclusive soit nécessaire à son ascendant, en dépit de son expérience familiale récente en matière d'assistance à personnes malades ou âgées et de son projet professionnel dans le secteur de l'aide à la personne ; qu'elle ne justifie que de déplacements ponctuels entre Sablé-sur-Sarthe, sa commune de résidence, et la région parisienne ; que son père n'est pas isolé puisqu'il réside depuis plusieurs années au domicile d'une de ses filles et que deux de ses enfants vivent non loin de son lieu d'hébergement ; que les attestations de proches n'établissent pas davantage le caractère indispensable de sa présence aux côtés de son père ; que, dans ces conditions, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'en prenant la décision de refus de titre de séjour et la décision portant obligation de quitter le territoire français, le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'application des dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le moyen invoqué à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire national tiré, par voie d'exception, de l'illégalité du refus de titre de séjour opposé à la requérante, ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, enfin, qu'aux termes l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants " ; que ces stipulations font obstacle à ce que puisse être légalement désigné comme pays de destination d'un étranger faisant l'objet d'une mesure d'éloignement un État pour lequel il existe des motifs sérieux et avérés de croire que l'intéressé s'y trouverait exposé à un risque réel pour sa personne, soit du fait des autorités de cet État, soit même du fait de personnes ou de groupes de personnes ne relevant pas des autorités publiques, dès lors que, dans ce dernier cas, les autorités de l'État de destination ne sont pas en mesure de parer à un tel risque par une protection appropriée ; que Mme A..., en faisant référence à la destruction, au demeurant non établie, de son habitation en République du Congo, n'établit pas l'existence d'un risque justifiant l'application des stipulations précitées ; que, par suite, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... A...et au ministre de l'intérieur.

Une copie en sera adressée au préfet de la Sarthe.

Délibéré après l'audience du 5 juin 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- Mme Allio-Rousseau, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 juin 2014.

Le rapporteur,

M-P. ALLIO-ROUSSEAU Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 13NT02278


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02278
Date de la décision : 26/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: Mme Marie-Paule ALLIO-ROUSSEAU
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : MOUTEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-06-26;13nt02278 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award