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15/05/2014 | FRANCE | N°13NT01700

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 15 mai 2014, 13NT01700


Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2013, présentée pour M. C... B..., demeurant..., par Me Pollono, avocat au barreau de Nantes ; M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1203080 et 1209689 en date du 31 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 3 mars 2012 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de l'admettre au séjour et, d'autre part, l'arrêté du 31 juillet 2012 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de s

jour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé ...

Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2013, présentée pour M. C... B..., demeurant..., par Me Pollono, avocat au barreau de Nantes ; M. B... demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1203080 et 1209689 en date du 31 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté du 3 mars 2012 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de l'admettre au séjour et, d'autre part, l'arrêté du 31 juillet 2012 par lequel le préfet de la Loire-Atlantique a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler ces arrêtés ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil, Me Pollono, qui renonce à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle, d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

il soutient que :

en ce qui concerne le refus d'admission au séjour :

- le préfet a méconnu son obligation d'information ;

- il n'y a pas eu de fraude à la demande d'asile ;

en ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- l'illégalité du refus d'admission au séjour entraîne, par voie de conséquence, celle du refus de délivrance du titre de séjour ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale dès lors qu'elle repose sur un refus de titre de séjour illégal ;

- il encourt des risques de mauvais traitements en cas de retour dans son pays d'origine ; le préfet s'est estimé lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 juin 2013, présenté par le préfet de la Loire-Atlantique, qui conclut au rejet de la requête ;

il soutient que :

- l'arrêté contesté est suffisamment motivé ;

- les dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 ne sont pas applicables ;

- le moyen tiré de l'illégalité par voie d'exception de la décision refusant d'admettre la requérante au séjour n'est pas recevable dès lors que cette décision est devenue définitive ;

- la requérante ne bénéficiait pas du droit de se maintenir sur le territoire français, malgré un recours devant la Cour nationale du droit d'asile, en application de l'article L. 742-6 ;

- il n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale ;

- elle n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour à l'appui des conclusions dirigées contre la mesure d'éloignement ;

- le requérant n'établit pas encourir de risques de persécutions en cas de retour dans son pays d'origine ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

Vu la décision de la section administrative du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Nantes en date du 27 février 2013 admettant M. B... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale au titre de cette instance et désignant Me Pollono pour la représenter ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 29 avril 2014, présentée pour M. B... ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, modifiée, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, modifiée, relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 avril 2014 :

- le rapport de M. Giraud, premier conseiller ;

- et les observations de MeA..., substituant Me Pollono, avocat de M.B... ;

1. Considérant que M. B..., ressortissant se disant de nationalité érythréenne, relève appel du jugement du 31 décembre 2012 par lequel le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande tendant à l'annulation, d'une part, de l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 3 mars 2012 portant refus d'admission au séjour et, d'autre part, l'arrêté du préfet de la Loire-Atlantique du 31 juillet 2012 portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le refus d'admission provisoire au séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 18-1 du règlement (CE) susvisé du 11 décembre 2000 concernant la création du système " Eurodac " pour la comparaison des empreintes digitales aux fins de l'application efficace de la convention de Dublin : " Toute personne visée par le présent règlement est informée par l'Etat membre d'origine : a) de l'identité du responsable du traitement et de son représentant, le cas échéant ; b) de la raison pour laquelle les données vont être traitées par Eurodac ; c) des destinataires des données ; d) dans le cas des personnes visées à l'article 4 [demandeurs d'asile] ou à l'article 8, de l'obligation d'accepter que ses empreintes digitales soient relevées ; e) de l'existence d'un droit d'accès aux données la concernant et d'un droit de rectification de ces données. / Dans le cas de personnes visées à l'article 4 ou à l'article 8, les informations visées au premier alinéa sont fournies au moment où les empreintes digitales sont relevées. " ; et qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 10 de la directive susvisée du 1er décembre 2005 relative à des normes minimales concernant la procédure d'octroi et de retrait du statut de réfugié : " En ce qui concerne les procédures prévues au chapitre III, les Etats membres veillent à ce que tous les demandeurs d'asile bénéficient des garanties suivantes : / a) ils sont informés, dans une langue dont il est raisonnable de supposer qu'ils la comprennent, de la procédure à suivre et de leurs droits et obligations au cours de la procédure ainsi que des conséquences que pourrait avoir le non-respect de leurs obligations ou le refus de coopérer avec les autorités. Ils sont informés du calendrier, ainsi que des moyens dont ils disposent pour remplir leur obligation de présenter les éléments visés à l'article 4 de la directive 2004/83/CE. Ces informations leur sont communiquées à temps pour leur permettre d'exercer les droits garantis par la présente directive et de se conformer aux obligations décrites à l'article 11 ; (...) " ; que ces dispositions ont été transposées par le décret n° 2011-1031 du 29 août 2011 relatif aux conditions d'exercice du droit d'asile qui a modifié l'article R. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... a déclaré dans sa demande d'admission provisoire au séjour au titre de l'asile comprendre la langue tigrinya et s'est alors vu remettre le 27 février 2012, lorsqu'il s'est présenté pour la première fois à la préfecture de la Loire-Atlantique, un guide du demandeur d'asile rédigé en langue tigrinya ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir qu'il n'a pas reçu les informations exigées par les textes susmentionnés dès lors que la version éditée en 2011 de ce guide comprenait bien l'ensemble des mentions prévues par les textes applicables ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 741-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés, l'admission en France d'un étranger qui demande à bénéficier de l'asile ne peut être refusée que si (...) 4° La demande d'asile repose sur une fraude délibérée ou constitue un recours abusif aux procédures d'asile ou n'est présentée qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement prononcée ou imminente. (...) Constitue une demande d'asile reposant sur une fraude délibérée la demande présentée par un étranger qui fournit de fausses indications, dissimule des informations concernant son identité, sa nationalité ou les modalités de son entrée en France afin d'induire en erreur les autorités (...) " ;

5. Considérant qu'il est constant que M. B... a saisi, les 10 mars et 20 juin 2011 et le 27 février 2012 les préfets d'Ille-et-Vilaine, d'Indre-et-Loire et de Loire-Atlantique, sous des identités différentes assorties de dates de naissance distinctes, aux fins de solliciter son admission au séjour au titre de l'asile ; que, dans ces conditions et à supposer même que ces demandes réitérées s'expliqueraient comme l'allègue l'intéressé, par une situation de désespoir et des difficultés de compréhension de la procédure, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de la Loire-Atlantique aurait commis une erreur de droit ou une erreur d'appréciation au regard des dispositions précitées en estimant que la demande d'asile de M. B... reposait sur une fraude délibérée ;

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre le refus de titre de séjour :

6. Considérant que les décisions par lesquelles le préfet refuse, en fin de procédure, le séjour à l'étranger dont la demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA et l'oblige à quitter le territoire français ne sont pas prises pour l'application de la décision par laquelle le préfet statue, en début de procédure, sur l'admission provisoire au séjour ; que la décision prise sur l'admission au séjour ne constitue pas davantage la base légale du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français ; que par suite, le moyen soulevé par M. B... invoquant, par voie d'exception, l'illégalité du refus d'admission provisoire au séjour qui lui a été opposé, notamment pour défaut de remise du document d'information prévu au dernier alinéa de l'article R. 742-1, ne peut être utilement invoqué à l'appui de son recours dirigé contre les décisions par lesquelles le préfet, après la notification du rejet par l'OFPRA de la demande d'asile traitée dans le cadre de la procédure prioritaire, refuse le séjour et oblige l'étranger à quitter le territoire français ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour ne peut qu'être rejeté ;

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

8. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort de la motivation de la décision attaquée que le préfet a bien procédé à un examen approfondi de la situation personnelle du requérant avant de fixer le pays vers lequel il pourra être reconduit d'office ;

9. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 " ;

10. Considérant que si il l'allègue, M. B..., dont la demande d'asile a été rejetée le 27 juin 2012 par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, n'établit pas être exposé personnellement, en cas de retour en Erythrée, à des risques de traitements inhumains ou dégradants ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir qu'en prenant la décision fixant le pays de destination, le préfet de la Loire-Atlantique, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait estimé lié par les appréciations portées par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides sur sa demande, a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens :

12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme dont M. B..., bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, demande le versement au profit de son avocat au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête susvisée de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B... et au ministre de l'intérieur. Une copie en sera transmise au préfet de la Loire-Atlantique.

Délibéré après l'audience du 24 avril 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lenoir, président de chambre,

- M. Francfort, président-assesseur,

- M. Giraud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 mai 2014.

Le rapporteur,

T. GIRAUD Le président,

H. LENOIR

Le greffier,

E. HAUBOIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 13NT01700
Date de la décision : 15/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. LENOIR
Rapporteur ?: M. Thomas GIRAUD
Rapporteur public ?: Mme WUNDERLICH
Avocat(s) : SELARL BOUILLON POLLONO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-05-15;13nt01700 ?
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