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02/05/2014 | FRANCE | N°13NT02409

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 5ème chambre, 02 mai 2014, 13NT02409


Vu le recours, enregistré le 19 août 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105974 du 14 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 10 novembre 2010 par laquelle le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a constaté l'irrecevabilité de la demande de naturalisation présentée par M. C... et la décision implicite rejetant le recours gracieux présentée par ce dernier ;

2°) de rejeter la demande présentée

par M. C... devant le tribunal administratif de Rennes ;

il soutient que :

- le...

Vu le recours, enregistré le 19 août 2013, présenté par le ministre de l'intérieur, qui demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1105974 du 14 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 10 novembre 2010 par laquelle le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a constaté l'irrecevabilité de la demande de naturalisation présentée par M. C... et la décision implicite rejetant le recours gracieux présentée par ce dernier ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Rennes ;

il soutient que :

- les premiers juges se sont livrés à une inexacte application de l'article 21-16 du code civil ;

- les deux enfants de M. C... résident à l'étranger et la mère de l'un de ces enfants n'est autre que sa compagne en France ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 7 janvier 2014 fixant la clôture de l'instruction au 31 janvier 2014 ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2014, présenté pour M. C... par Me Giordanengo, avocat au barreau de Nice, qui conclut au rejet du recours et à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il fait valoir que :

- il satisfait à la condition de résidence énoncée par l'article 21-16 du code civil ;

- il vit en France depuis 2002 et y a constitué un foyer ;

- il y a le centre de ses intérêts matériels et de ses attaches familiales ;

- ses enfants mineurs à l'étranger sont nés de liaisons antérieures à son mariage en France et il n'a plus de liens avec eux ;

Vu l'ordonnance du 3 février 2014 décidant la réouverture de l'instruction ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 6 février 2014, présenté par le ministre de l'intérieur, qui conclut aux mêmes fins que son recours, par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire, enregistré le 14 avril 2014, présenté pour M. C..., qui conclut aux mêmes fins que ses précédentes écritures, par les mêmes moyens ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code civil ;

Vu le décret n° 93-1362 du 30 décembre 1993 relatif aux déclarations de nationalité, aux décisions de naturalisation, de réintégration, de perte, de déchéance et de retrait de la nationalité française ;

Vu le décret n° 2005-850 du 27 juillet 2005 relatif aux délégations de signature des membres du gouvernement ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 23 avril 2014 :

- le rapport de M. Durup de Baleine, premier conseiller ;

- et les conclusions de Mme Grenier, rapporteur public ;

1. Considérant que, par une décision du 10 novembre 2010, le ministre de l'immigration, de l'intégration, de l'identité nationale et du développement solidaire a déclaré irrecevable la demande de naturalisation présentée par M. C..., ressortissant de la République du Congo, décision contre laquelle l'intéressé a présenté un recours gracieux par lettre du 24 février 2011 ; que ce recours gracieux a donné lieu à l'intervention d'une décision implicite de rejet, à laquelle s'est ensuite substituée une décision expresse de rejet en date du 21 octobre 2011, notifiée à l'intéressé le 15 novembre 2011 ; que le ministre de l'intérieur relève appel du jugement du 14 juin 2013 par lequel, saisi de la demande de M. C..., le tribunal administratif de Nantes a annulé la décision du 10 novembre 2010 ainsi que la décision implicite de rejet de ce recours gracieux ;

Sur le recours du ministre de l'intérieur :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 21-16 du code civil : " Nul ne peut être naturalisé s'il n'a en France sa résidence au moment de la signature du décret de naturalisation " ; qu'il résulte de ces dispositions que la demande de naturalisation n'est pas recevable lorsque l'intéressé n'a pas fixé en France, de manière stable, le centre de ses intérêts ;

3. Considérant que, pour déclarer irrecevable la demande de naturalisation présentée par M. C..., le ministre chargé des naturalisations s'est fondé sur la circonstance que le postulant est le père de deux enfants mineurs résidant à l'étranger ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C... est, tout d'abord, le père de l'enfant Lélo C...-Mboungou, né en République du Congo en 2003 et résidant dans ce pays à la date des décisions en litige ; que M. C... ne saurait prétendre n'avoir aucune relation avec cet enfant dès lors, d'une part, qu'il en est le père, d'autre part, que la mère en est Mme D..., qui est depuis 2005 la compagne en France de M. C... et, enfin, que M. C... a présenté un certificat de scolarité de cet enfant délivré le 25 février 2010 ; que le postulant est, ensuite, le père de l'enfant mineure F...C..., née en 2002 en République du Congo et y résidant ; qu'en outre, M. C... a divorcé en 2009 de Mme B..., ressortissante ivoirienne dont, après leur mariage en France en 2003, il s'était séparé en 2005 ; qu'aucun enfant n'est issu de cette union ; que, si M. C... contribue à la charge et à l'éducation de l'enfant résidant en France que Mme D... a eu d'un autre lit en 2006, il n'en est toutefois pas le père ; qu'à la date des décisions contestées, M. C... n'est le père d'aucun enfant, notamment mineur, résidant en France ; que, dès lors, le ministre chargé des naturalisations s'est livré à une exacte application des dispositions de l'article 21-16 du code civil en estimant que le postulant ne peut être regardé comme ayant fixé en France de manière stable le centre de ses intérêts et, par suite, comme y ayant sa résidence au sens de ces dispositions ; qu'il est ainsi fondé à soutenir que c'est à tort que, pour annuler les décisions contestées, les premiers juges en ont estimé autrement ;

5. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C..., dont les conclusions doivent être regardées comme dirigées contre les décisions expresses du 10 novembre 2010 et du 21 octobre 2011 ;

6. Considérant, en premier lieu, que, par un arrêté du 21 juillet 2009, publié au Journal officiel de la République française le 25 juillet 2009, le directeur de l'accueil, de l'intégration et de la citoyenneté a donné délégation à Mme E..., adjointe au chef du premier bureau des naturalisations et signataire de la décision du 10 novembre 2010, à l'effet de signer tous actes, à l'exclusion des décrets, relevant des attributions de ce bureau ; qu'il en résulte que le moyen tiré de l'incompétence de cette signataire manque en fait ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que la décision du 10 novembre 2010 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait en constituant le fondement ; qu'elle est ainsi régulièrement motivée ;

8. Considérant, en troisième et dernier lieu, que, si M. C... est le père d'un enfant mineur né en France en 2013 et y résidant, cette circonstance, postérieure aux décisions contestées, est sans influence sur leur légalité ;

9. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que le ministre de l'intérieur est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a fait droit aux conclusions à fin d'annulation présentées par M. C... ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

10. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation, n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant à ce que, sous astreinte, il soit ordonné au ministre de l'intérieur de réexaminer la demande de naturalisation ne peuvent être accueillies ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'a pas dans la présente instance la qualité de partie perdante, le versement d'une somme à ce titre ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nantes du 14 juin 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Nantes et ses conclusions d'appel au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C...et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 23 avril 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Iselin, président de chambre,

- M. Millet, président-assesseur,

- M. Durup de Baleine, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 mai 2014.

Le rapporteur,

A. DURUP de BALEINE Le président,

B. ISELIN

Le greffier,

C. GOY

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 13NT02409 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 13NT02409
Date de la décision : 02/05/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. ISELIN
Rapporteur ?: M. Antoine DURUP de BALEINE
Rapporteur public ?: Mme GRENIER
Avocat(s) : GIORDANENGO

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-05-02;13nt02409 ?
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