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21/03/2014 | FRANCE | N°12NT03235

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 4ème chambre, 21 mars 2014, 12NT03235


Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2012, présentée pour la société Batitec, dont le siège est 5, rue des 4 Vents à Verson (14790), représenté par Me Touchard, avocat au barreau de Caen ; la société Batitec demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-2232 du 11 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 septembre 2011 par laquelle le président du conseil général du Calvados a rejeté son recours gracieux tendant à la prise en compte de travaux supplémentaires dans le cadr

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Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2012, présentée pour la société Batitec, dont le siège est 5, rue des 4 Vents à Verson (14790), représenté par Me Touchard, avocat au barreau de Caen ; la société Batitec demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 11-2232 du 11 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 6 septembre 2011 par laquelle le président du conseil général du Calvados a rejeté son recours gracieux tendant à la prise en compte de travaux supplémentaires dans le cadre du marché qu'elle a conclu avec le département du Calvados le 25 mars 2010 ainsi qu'à la condamnation du département du Calvados à lui verser la somme de 53 097,72 euros pour les travaux réalisés hors marché, avec intérêts au taux légal ;

2°) d'annuler la décision du 6 septembre 2011 et de condamner le département du Calvados à lui verser la somme de 53 097,72 euros avec intérêts au taux légal à compter du 7 novembre 2011 ;

3°) de mettre à la charge du département du Calvados la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

elle soutient que :

- le mémoire de réclamation exigé par l'article 13-44 du CCAG était constitué par le décompte général et définitif de la société Batitec transmis au conseil général et au maître d'oeuvre le 7 septembre 2011 ; dans ce courrier, la société Batitec commentait et expliquait son décompte général et définitif en précisant l'état d'avancement des travaux et les moins-values engendrées par les prestations non réalisées ; en tout état de cause la lettre du 18 novembre 2011 adressée au conseil général pour contester la notification du DGD établi par la collectivité après celui de la société exposante le 25 octobre 2011 constituait un mémoire de réclamation ; ce courrier est sans ambiguïté sur la volonté de la société Batitec de contester le décompte général qui lui était soumis dès lors que la société a fait explicitement référence à la requête soumis au tribunal administratif quelques jours auparavant ;

- les pénalités de retard qui ont été infligées à la société Batitec sont sans fondement dès lors qu'elles n'avaient pas été évoquées en cours de chantier ; aucun compte-rendu n'en a fait état ; ce n'est que dans le DGD du 25 octobre 2011 que la société Batitec a découvert l'imputation de ces pénalités ;

- les travaux supplémentaires réalisés étaient justifiés et nécessaires dès lors que la société Batitec s'est référée au CCTP qui indiquait l'existence de trois plans de structure et que ces plans se sont révélés par la suite insuffisants et ont nécessité qu'un complément de fondations soit mis en oeuvre ;

- quatre entreprises ont fait l'objet d'une résiliation de marché avant l'achèvement du chantier ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2013, présenté pour le conseil général du Calvados, représenté par Me Pintat, avocat au barreau de Paris, tendant au rejet de la requête et au paiement par la société Batitec d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il soutient que :

- la lettre de la société Batitec du 18 novembre 2011 ne peut être considérée comme un mémoire en réclamation contre le décompte général au sens de l'article 13.44 du CCAG Travaux ; si la lettre du 18 novembre 2011 était une réclamation, elle aurait dû être adressée au maître d'oeuvre ; ce courrier ne conteste pas les éléments du décompte général notifié ; il se borne à se référer aux réclamations antérieures ; la société Batitec ne conteste pas le décompte général dès lors qu'elle ne fait part d'aucune critique concernant les éléments venus modifier le projet de décompte final et notamment les pénalités mises à sa charge par le maître d'ouvrage pour un montant de 31 443,74 euros, les travaux réalisés dans le cadre du marché de substitution conclu à la suite de la résiliation, les réfactions effectués par le maître d'oeuvre sur le décompte, le taux de réalisation des travaux au jour de la résiliation retenu par le maître d'oeuvre, le rejet des demandes concernant les travaux complémentaires ; de plus, la société Batitec n'apporte dans sa lettre du 18 novembre 2011 aucun élément relatif au chiffrage des prétendus travaux complémentaires ; la requête jointe à cette lettre ne saurait pallier ces lacunes et se borne à confirmer la demande relative à l'indemnisation des prétendus travaux supplémentaires ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 76-87 du 21 janvier 1976 approuvant le cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de travaux ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 février 2014 :

- le rapport de Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Gauthier, rapporteur public ;

- et les observations de MeB..., représentant le conseil général du Calvados ;

1. Considérant que la société Batitec, titulaire du lot n° 2 " gros oeuvre " du marché conclu le 25 mars 2010 par le département du Calvados pour les travaux d'extension et de restructuration du collège Quintefeuille à Courseulles-sur-Mer, relève appel du jugement du 11 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande tendant à la condamnation du département du Calvados à lui verser la somme de 53 097,72 euros pour les travaux réalisés hors marché, augmentée des intérêts au taux légal ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 13.31 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) applicables aux marchés publics de travaux : " Après l'achèvement des travaux l'entrepreneur, concurremment avec le projet de décompte afférent au dernier mois de leur exécution ou à la place de ce projet, dresse le projet de décompte final établissant le montant total des sommes auxquelles il peut prétendre du fait de l'exécution du marché dans son ensemble, les évaluations étant faites en tenant compte des prestations réellement exécutées. Ce projet de décompte est établi à partir des prix de base comme les projets de décomptes mensuels et comporte les mêmes parties que ceux-ci à l'exception des approvisionnements et des avances` il est accompagne des éléments et pièces mentionnés au 17 du présent article s'ils n'ont pas été précédemment fournis. " ; qu'aux termes de l'article 13.32 du même cahier : " Le projet de décompte final est remis au maître d'oeuvre dans le délai de quarante cinq jours à compter de la date de notification de la décision de réception des travaux telle qu'elle est prévue au 3 l'article 41, ce délai étant réduit à quinze jours pour les marchés dont le délai d'exécution n'excède pas trois mois. " ; qu'aux termes de l'article 13.41 de ce cahier : " Le maître d'oeuvre établit le décompte général qui comprend : - le décompte final défini au 34 du présent article ; - l'état du solde établi, à partir du décompte final et du dernier décompte mensuel, dans les mêmes conditions que celles qui sont définies au 21 du présent article pour les acomptes mensuels ; - la récapitulation des acomptes mensuels et du solde. Le montant du décompte général est égal au résultat de cette dernière récapitulation. " ; qu'aux termes de l'article 13.42. du même cahier : " Le décompte général, signé par la personne responsable du marché, doit être notifié à l'entrepreneur par ordre de service avant la plus tardive des deux dates ci-après : - quarante-cinq jours après la date de remise du projet de décompte final ; - trente jours après la publication de l'index de référence permettant la révision du solde. Le délai de quarante-cinq jours est ramené à un mois pour les marchés dont le délai d'exécution n'excède pas trois mois. " ; qu'aux termes de l'article 13.44. de ce cahier : " L'entrepreneur doit, dans un délai compté à partir de la notification du décompte général, le renvoyer au maître d'oeuvre, revêtu de sa signature, sans ou avec réserves, ou faire connaître les raisons pour lesquelles il refuse de le signer. Ce délai est (...) de quarante-cinq jours, dans le cas où le délai contractuel d'exécution du marché est supérieur à six mois. Si la signature du décompte général est donnée sans réserve, cette acceptation lie définitivement les parties, sauf en ce qui concerne le montant des intérêts moratoires ; ce décompte devient ainsi le décompte général et définitif du marché. Si la signature du décompte général est refusée ou donnée sans réserves, les motifs de ce refus ou de ces réserves doivent être exposés par l'entrepreneur dans un mémoire de réclamation qui précise le montant des sommes dont il revendique le paiement et qui fournit les justifications nécessaires en reprenant sous peine de forclusion, les réclamations déjà formulées antérieurement et qui n'ont pas fait l'objet d'un règlement définitif ; ce mémoire doit être remis au maître d'oeuvre dans le délai indiqué au premier alinéa du présent article. Le règlement du différend intervient alors suivant les modalités indiquées à l'article 50. Si les réserves sont partielles l'entrepreneur est lié par son acceptation implicite des éléments du décompte sur lesquels ces réserves ne portent pas. " ; qu'enfin, aux termes de l'article 13.45. de ce cahier : " Dans le cas où l'entrepreneur n'a pas renvoyé au maître d'oeuvre le décompte général signé dans le délai de trente jours ou de quarante-cinq jours, fixé au 44 du présent article, ou encore, dans le cas où, l'ayant renvoyé dans ce délai, il n'a pas motivé son refus ou n'a pas exposé en détail les motifs de ses réserves en précisant le montant de ses réclamations, ce décompte général est réputé être accepte par lui ; il devient le décompte général et définitif du marché. " ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, en application de l'article 13.31 du CCAG - Travaux, par un courrier du 7 septembre 2011 la société Batitec a adressé au maître d'oeuvre, la société ACAU, un projet de décompte final, intitulé à tort " décompte général et définitif ", qui ne saurait constituer le mémoire de réclamation exigé par l'article 13-44 du CCAG ;

4. Considérant que le 25 octobre 2011, le décompte général signé par la personne responsable du marché, faisant apparaître un solde négatif de 76 349,23 euros TTC, a été adressé à la société Batitec, qui en a accusé réception ; que le 18 novembre 2011, le titulaire du marché a notifié au département du Calvados un courrier exprimant son désaccord sur ce décompte et précisant qu'il était créancier d'une somme de 53 097,72 euros TTC ; que toutefois, cette correspondance n'exposait pas en détail les motifs de son désaccord et se bornait à indiquer que ces motifs étaient précisés dans la requête introductive d'instance déposée au greffe du tribunal administratif du Calvados le 7 novembre 2011 ; que cette requête, si elle expose les désaccords entre l'entreprise de gros oeuvre et le département du Calvados concernant l'exécution des travaux, ne comporte aucune critique ou justification précise concernant, notamment, les pénalités de retard, le taux de réalisation du marché qui a été résilié le 28 juillet 2011 ou les travaux réalisés par une autre entreprise en substitution de ceux qui n'ont pas été réalisés par la requérante ; que la société Batitec n'a fait parvenir aucune autre réclamation à la personne responsable du marché dans le délai de quarante cinq jours applicable en l'espèce en vertu des stipulations précitées, s'agissant d'un marché dont le délai d'exécution était fixé à 18 mois par l'article 3 de l'acte d'engagement ; qu'enfin, ces stipulations ne prévoient aucune suspension ou prolongation des délais du fait de l'introduction d'une action contentieuse par une des parties au contrat ; que le décompte général qui a été notifié à la société Batitec est ainsi devenu définitif ; que, dès lors, la requérante n'est pas recevable à remettre en cause ce décompte en demandant la condamnation du maître de l'ouvrage à lui payer la somme de 53 097,72 euros au titre de l'exécution du marché litigieux ;

5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Batitec n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Caen a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande la société Batitec au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens soit mise à la charge du département du Calvados qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ; qu'en revanche, il y a lieu, en application de ces dispositions, de mettre à la charge de la société Batitec le versement au département du Calvados de la somme de 1 500 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Batitec est rejetée.

Article 2 : La société Batitec versera au département du Calvados la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Batitec et au département du Calvados.

Délibéré après l'audience du 28 février 2014, à laquelle siégeaient :

- M. Lainé, président de chambre,

- Mme Aubert, président-assesseur,

- Mme Tiger-Winterhalter, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 mars 2014.

Le rapporteur,

N. TIGER-WINTERHALTER Le président,

L. LAINÉ

Le greffier,

M. A...

La République mande et ordonne au préfet du Calvados en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 12NT03235


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT03235
Date de la décision : 21/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAINE
Rapporteur ?: Mme Nathalie TIGER-WINTERHALTER
Rapporteur public ?: M. GAUTHIER
Avocat(s) : PINTAT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-03-21;12nt03235 ?
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