La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/03/2014 | FRANCE | N°12NT03165

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 3ème chambre, 06 mars 2014, 12NT03165


Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2012, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par Me Le Menn, avocat au barreau de Quimper ; M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°09-5546 du 17 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Finistère du 8 juin 2009 refusant de lui accorder l'autorisation d'exploiter une surface de 18 hectares 5 ares, dont il est propriétaire, située sur le territoire de la commune de Plogastel-Saint-Germain, ensemble le rejet de son recours graci

eux en date du 3 octobre 2009 ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de...

Vu la requête, enregistrée le 12 décembre 2012, présentée pour M. A...C..., demeurant..., par Me Le Menn, avocat au barreau de Quimper ; M. C...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n°09-5546 du 17 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet du Finistère du 8 juin 2009 refusant de lui accorder l'autorisation d'exploiter une surface de 18 hectares 5 ares, dont il est propriétaire, située sur le territoire de la commune de Plogastel-Saint-Germain, ensemble le rejet de son recours gracieux en date du 3 octobre 2009 ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) de rejeter les conclusions présentées par le GAEC du Hinguer, exploitant les terres en litige ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative ;

il soutient :

- que ni l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture du 14 mai 2009, ni l'arrêté contesté, ne sont suffisamment motivés ; qu'en particulier, l'arrêté du préfet du Finistère du 8 juin 2009 ne comporte pas d'indications suffisantes permettant d'apprécier en quoi la reprise des terres affecterait l'activité du GAEC du Hinguer ;

- que le préfet a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation en indiquant que la démarche de reprise était engagée par le fils du propriétaire alors qu'il est lui-même propriétaire des parcelles objet de la demande d'autorisation d'exploiter ;

- que l'ordre des priorités définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles n'a pas été respecté dès lors qu'il entrait dans le cadre de l'article 3-1-5 de ce schéma alors que le GAEC concurrent relevait des priorités de rang inférieur prévues à l'article 3-2 ; que l'installation des agriculteurs doit primer sur le maintien des surfaces ; que les dispositions de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ont ainsi été méconnues ;

- que le préfet s'est mépris sur la portée de la réduction de référence laitière du GAEC du Hinguer qui ne résulte pas de l'opération de reprise envisagée mais de la décision du GAEC de se consacrer à une activité annexe d'élevage de bovin allaitant ; qu'à ce titre, le GAEC du Hinguer a sollicité pour la campagne 2008/2009 une aide à la cessation partielle à hauteur de 110 000 litres ; que la reprise envisagée est donc sans incidence sur la production laitière du GAEC ;

- que le GAEC du Hinguer n'a en outre pas précisé qu'il avait eu la possibilité d'acquérir les terres objet de la demande d'autorisation d'exploiter ;

- que contrairement à ce qu'affirme le préfet, les terres en litiges ne sont pas enclavées dans un ilot global exploité par le GAEC du Hinguer ; que ces terres sont éloignées du siège de cette exploitation ce qui est peu compatible avec une activité d'élevage ;

- que le motif tiré de la mise en place d'un système d'irrigation n'avait pas à être pris en compte puisque le GAEC du Hinguer ne cultivait plus de légumes nécessitant une irrigation ; que ce système d'irrigation a été mis en place irrégulièrement, sans autorisation du propriétaire ; qu'en outre, cette question est sans incidence sur l'appréciation qui doit être portée par l'autorité administrative dans le cadre du contrôle des structures agricoles ;

- que la décision fondée sur la remise en cause de la viabilité économique du GAEC du Hinguer est également entachée d'une erreur manifeste d'appréciation dès lors que l'un des associés du GAEC, MmeB..., a fait valoir ses droits à la retraite le 31 décembre 2009 et que du fait de ce départ, cette société n'est plus constituée de trois mais de deux unités de travail humain (UTH) ; qu'ainsi, la reprise sollicitée ne remet pas en cause la viabilité de l'exploitation du GAEC ramené à deux associés ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2013, présenté pour le GAEC du Hinguer, dont le siège est au lieu-dit " Le Hinguer " à Plogastel-Saint-Germain, représentée par son gérant, M. D...B..., par Me Bergeron, avocat au barreau de Quimper, qui conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de M. C...au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

il fait valoir :

- que les dispositions de l'article R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime prévoyant que l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture devait être motivé n'étaient plus en vigueur à la date de la décision contestée ;

- que l'arrêté contesté est suffisamment motivé ;

- que la référence à une demande de reprise par le fils du propriétaire résulte d'une erreur matérielle sans incidence sur la légalité de l'arrêté ;

- que M. C...n'est pas fondé à se prévaloir de l'ordre des priorités établi par l'article 3 du schéma départemental des structures agricoles, lequel ne s'applique qu'en cas de demandes concurrentes d'autorisation d'exploiter portant sur les mêmes parcelles ;

- que M. C...ne justifie pas du sérieux, de la réalité et de la viabilité de son projet de reprise, ni d'une reprise pour exploitation d'une taille inférieure à la moitié de la surface minimum d'installation (SMI) ;

- que la reprise demandée remettrait en cause la viabilité de l'exploitation du GAEC du Hinguer portant sur 35 ha et morcellerait cette exploitation ; que l'accès à certaines parcelles totalement enclavées dans celles réclamées au titre de l'autorisation d'exploiter serait rendu impossible ; que la reprise des terres aurait pour effet de remettre en cause les investissements réalisés sur les parcelles en litige et sur d'autres parcelles louées à d'autres propriétaires pour la culture de 3 ha de cultures légumières ; qu'ainsi, la viabilité du GAEC du Hinguer est menacée par cette demande d'autorisation d'exploiter ; que l'activité annexe d'allaitement n'a aucune incidence sur l'activité laitière ; que pour règlement d'une partie de ses droits à retraite, Mme B...a récupéré 110 000 litre de quotas, ce quantum correspond au salaire qui lui était versé de telle sorte que la perte de ces quotas sera sans incidence sur l'équilibre économique du GAEC ; que selon l'expert comptable du groupement, la reprise de terre amputerait le revenu du GAEC du Hinguer de 40 % ;

Vu l'ordonnance en date du 16 janvier 2014 fixant la clôture d'instruction au 30 janvier 2014, en application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 24 janvier 2014, présenté par le ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt qui conclut au rejet de la requête ;

il fait valoir :

- qu'à la date à laquelle le préfet du Finistère s'est prononcé, M C...était le seul candidat à l'exploitation des terres ; qu'en l'absence de demandes concurrentes, le préfet n'avait pas à examiner la demande du requérant au regard de l'ordre des priorités fixé par le schéma directeur départemental des structures des exploitations agricoles ;

- que la commission départementale d'orientation de l'agriculture n'était pas tenue de motiver son avis ;

- que la décision contestée du préfet du Finistère est suffisamment motivée ; que le préfet a tenu compte de la situation de M. C...et de la situation du GAEC du Hinguer ; que le préfet n'était pas tenu de se prononcer sur chacun des critères énumérés à l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ;

- que la référence à une demande de reprise de foncier par le fils du propriétaire est une erreur matérielle sans conséquence ; que le pétitionnaire ne démontre pas l'intérêt environnemental de son projet de reprise et que la décision contestée n'est pas entachée d'erreur d'appréciation ; que la reprise des terres envisagées aurait pour effet de faire perdre 62 000 litres de références laitières au GAEC du Hinguer ; que la circonstance que le GAEC ait précédemment refusé d'acquérir les terres en litige est sans incidence sur la légalité de la décision contestée ; que c'est à juste titre que le préfet a considéré que la reprise des terres aurait pour effet de morceler les parcelles exploitées par le GAEC ; qu'à la date de la décision contestée, le GAEC avait effectivement mis en place une culture légumière que le préfet pouvait prendre en considération pour évaluer l'impact de la reprise envisagée sur la viabilité économique du preneur en place ; qu'à ce titre, le préfet pouvait tenir compte des investissements liés à la mise en place d'un système d'irrigation par les preneurs en place ; que la circonstance que l'un des associés ait fait valoir ses droits à la retraite postérieurement à la décision contestée est sans incidence sur la légalité de cette décision qui s'apprécie à la date à laquelle elle est prise ; que le GAEC démontre que la reprise des terres envisagée aurait eu pour conséquence de remettre en cause sa viabilité ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code rural et de la pêche maritime ;

Vu le décret n°2007-865 du 14 mai 2007 relatif au contrôle des structures des exploitations agricoles et modifiant le code rural ;

Vu l'arrêté du préfet du Finistère du 26 décembre 2007 portant règlement d'application du schéma directeur départemental des structures agricoles ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 février 2014 :

- le rapport de M. Lemoine, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Degommier, rapporteur public,

1. Considérant que M.C..., propriétaire de parcelles de terres sises au lieudit " Briscoul " sur le territoire de la commune de Plogastel-Saint-Germain représentant une surface de 18 hectares 5 ares donnée à bail au GAEC du Hinguer, a, après avoir délivré un congé pour reprise à l'exploitant, déposé le 25 février 2009 auprès du préfet du Finistère une demande d'autorisation d'exploiter ces terres ; qu'après avis de la commission départementale d'orientation agricole du 14 mai 2009, le préfet du Finistère, par un arrêté du 8 juin 2009, a refusé à M. C...cette autorisation ; que ce dernier relève appel du jugement du 17 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

En ce qui concerne la légalité externe :

2. Considérant, en premier lieu, que si les dispositions des articles R. 331-5 et R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime dans leur rédaction issue du décret susvisé du 14 mai 2007 applicables en l'espèce, obligent le préfet à soumettre pour avis à la commission départementale d'orientation de l'agriculture les demandes d'autorisation d'exploiter, elles ne lui imposent plus de se prononcer au vu de l'avis motivé de cette commission ; que par suite, le moyen tiré par le requérant de ce que l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture du 14 mai 2009 ne serait pas motivé est inopérant ; qu'au surplus, il ressort de l'extrait du procès-verbal de la séance du 14 mai 2009, produit devant les premiers juges, que la commission départementale d'orientation de l'agriculture du Finistère a émis un avis défavorable à la demande présentée par M. C...tendant à la reprise de terres exploitées par le GAEC du Hinguer, après avoir procédé à un examen de la situation personnelle du demandeur et du cédant et à une comparaison des exploitations, l'ayant conduit à considérer que la reprise de 18 hectares 5 ares était de nature à remettre en cause la viabilité économique de l'exploitation du GAEC et que le projet d'installation à titre secondaire de M. C...ne présentait pas un potentiel économique ou environnemental durable ; que dans ces conditions, le requérant n'est pas, en tout état de cause, fondé à soutenir que l'arrêté contesté serait intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière ;

3. Considérant, en second lieu, que l'arrêté contesté refusant à M. C...l'autorisation d'exploiter une superficie de 18 hectares 5 ares de terres rappelle que le candidat est demandeur à l'installation dans le cadre d'une double activité sans que la viabilité économique ou environnementale de son projet soit démontrée, qu'en revanche, la reprise de cette surface, enclavée dans les parcelles du GAEC du Hinguer, remettrait en cause la viabilité de l'exploitation de ce groupement, le priverait de 3 hectares de cultures légumières et de 62 000 litres de références laitières, que ce refus est conforme à l'une des orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles qui est de préserver les exploitations viables à caractère familial en limitant leur démembrement ; que cette motivation, qui se réfère à la situation du cédant et du demandeur, tant au regard des critères mentionnés à l'article L. 331-3 du code rural que des dispositions du schéma directeur départemental des structures agricoles, satisfait aux exigences posées par les articles L. 331-3 et R. 331-6 du code rural et de la pêche maritime ;

En ce qui concerne la légalité interne :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime : " L'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. Elle doit notamment : 1° Observer l'ordre des priorités établi par le schéma départemental entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations agricoles, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande ; 2° S'assurer, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, que toutes les possibilités d'installation sur une exploitation viable ont été considérées ; 3° Prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; 4° Prendre en compte la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place ; 5° Prendre en compte la participation du demandeur ou, lorsque le demandeur est une personne morale, de ses associés à l'exploitation directe des biens objets de la demande dans les conditions prévues à l'article L. 411-59 ; 6° Tenir compte du nombre d'emplois non salariés et salariés permanents ou saisonniers sur les exploitations concernées ; 7° Prendre en compte la structure parcellaire des exploitations concernées, soit par rapport au siège de l'exploitation, soit pour éviter que des mutations en jouissance ne remettent en cause des aménagements réalisés à l'aide de fonds publics ; 8° Prendre en compte la poursuite d'une activité agricole bénéficiant de la certification du mode de production biologique ; 9° Tenir compte de l'intérêt environnemental de l'opération. " ;

5. Considérant, en premier lieu, que si le préfet du Finistère a présenté, à tort, dans l'arrêté contesté la demande de reprise formée par M. C...comme étant formulée par le fils du propriétaire alors qu'il est lui-même propriétaire des terres en cause, il ressort toutefois des pièces du dossier que cette mention résulte d'une simple erreur matérielle sans incidence sur l'appréciation portée tant par la commission départementale d'orientation de l'agriculture que par le préfet qui se sont prononcés en considération du projet d'installation déposé par M. C...et de la situation des preneurs en place ; que par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation pour ce motif ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que M. C...soutient que l'arrêté contesté aurait méconnu les dispositions de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime ainsi que les priorités du schéma directeur départemental des structures agricoles dans la mesure où l'installation des agriculteurs, situation dans laquelle il se trouve, doit primer sur le maintien des surfaces du GAEC du Hinguer ; qu'il résulte toutefois des dispositions précitées du 1° de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime, que le préfet n'avait pas à se fonder sur les priorités du schéma directeur départemental en tenant compte d'une reprise d'une exploitation familiale obtenue par succession prévue en priorité 1-5 de l'article 3 du schéma directeur départemental, ces dispositions n'étant applicables que lorsque le bien, objet de la reprise, fait l'objet de plusieurs demandes concurrentes d'autorisation d'exploiter ; qu'il est constant, en l'espèce, que le préfet n'était pas saisi de demandes concurrentes d'autorisation d'exploiter portant sur les terres en litige et que seul s'imposait, dès lors, à cette autorité, le respect des orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles et des autres critères fixés par le L 331-3 du code rural et de la pêche maritime ;

7. Considérant, en troisième lieu, que M. C...soutient que la réduction de références laitières du GAEC du Hinguer prise en compte par le préfet ne serait pas la conséquence de l'opération de reprise envisagée mais celle de la décision du groupement de se consacrer à une activité annexe d'élevage de bovin allaitant ; que toutefois, s'il n'est pas contesté que le GAEC du Hinguer a sollicité une aide à la cessation laitière partielle et une diminution de 110 000 litres de quotas, cette demande résulte du départ à la retraite de MmeB..., associée du GAEC, au 31 décembre 2009 ; qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que le préfet du Finistère aurait commis une erreur d'interprétation des composantes de l'équilibre économique de ce GAEC ou une erreur de fait, en évaluant à 62 000 litres de lait la perte de quotas résultant de la reprise de terre objet de la demande d'autorisation d'exploiter en litige ;

8. Considérant, en quatrième lieu, que la circonstance que le GAEC du Hinguer aurait eu précédemment l'opportunité d'acquérir les terres qui font l'objet de la demande de reprise est sans incidence sur la légalité de la décision contestée ;

9. Considérant, en cinquième lieu, qu'il résulte du 7° de l'article L. 331-3 du code rural et de la pêche maritime précité, que lorsque l'autorité administrative se prononce sur la demande d'autorisation, elle doit notamment prendre en compte la structure parcellaire des exploitations concernées ; que si l'enclavement des parcelles en litige ne fait pas obstacle, à lui seul, à l'opération de reprise sollicitée, il ne ressort pas des termes de l'arrêté contesté que l'enclavement des parcelles en litiges aurait constitué un élément déterminant dans le refus opposé à la demande d'autorisation d'exploiter par le préfet, lequel s'est prononcé au regard des orientations du schéma directeur départemental des structures agricoles du Finistère qui vise à préserver les exploitations viables à caractère familial en limitant leur démembrement ; qu'en l'espèce, la reprise sollicitée portant sur des ilots homogènes positionnés au centre des terres exploitées par le GAEC, aurait eu pour effet de morceler un ilot d'un seul tenant de 35 ha et aurait été de nature à remettre en cause la viabilité de l'exploitation du GAEC du Hinguer ; que par suite, M. C...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en lui refusant l'autorisation d'exploiter au motif que les terres en litige seraient insérées dans un ilot homogène exploité par le GAEC du Hinguer ;

10. Considérant, en sixième lieu, que l'installation d'un nouvel exploitant, si elle peut se traduire par une réduction de superficie des terres mises en valeur par une exploitation existante, ne doit pas en compromettre l'équilibre économique ; que lorsqu'elle statue sur les demandes d'autorisation d'exploiter, l'autorité administrative doit prendre en compte les biens corporels ou incorporels attachés au fonds dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée ; qu'il ressort des pièces du dossier que sur la parcelle 665 dont la reprise est sollicitée, le GAEC du Hinguer a fait installer une réserve d'eau permettant d'irriguer des parcelles plantées de légumes louées à différents bailleurs et dont la reprise serait à l'origine, pour le GAEC, tant d'une perte des investissements correspondants à cet équipement, que des ressources tirées de ces cultures légumières sur une surface de 3 hectares ; que le préfet du Finistère pouvait, dès lors, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, tenir compte de ces éléments d'évaluation dans les critères lui permettant d'apprécier les effets de la demande d'exploiter dont il était saisi, sans que puisse être utilement invoquée la circonstance que de tels investissements relèveraient de relations de droit privé entre le preneur et le bailleur ou que cet aménagement n'aurait pas été autorisé par le propriétaire ;

11. Considérant, en dernier lieu, que M. C...conteste l'impact de la reprise des terres en litige sur la viabilité du GAEC du Hinguer au motif que cette appréciation a été portée en prenant en compte la participation de trois associés à ce groupement alors qu'après le départ en retraite de MmeB..., associée exploitant du GAEC, cette société n'est plus composée que de deux associés exploitants ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment du rapport de l'expert-comptable du GAEC, que la reprise sollicitée aurait eu pour conséquence une perte de revenus, pour le GAEC, de l'ordre de 40 %, sans préjudice de la diminution de 110 000 litres de lait liée au départ de MmeB..., que le nombre d'associés pris en considération soit de deux ou de trois ; que par ailleurs, M.C..., double actif, qui envisageait une culture végétale de 14 hectares de miscanthus, ne démontre pas davantage en appel qu'en première instance que l'installation qu'il envisage serait viable ; qu'ainsi, c'est sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation, que le préfet du Finistère a pu fonder sa décision sur l'orientation énoncée par le schéma directeur départemental des structures agricoles qui vise à préserver les exploitations viables à caractère familial en limitant leur démembrement alors que M. C...n'a pas apporté la preuve du caractère viable et pérenne de son installation, et ce, après avoir pris en compte la situation personnelle et professionnelle du demandeur et celle des preneurs en place ;

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par M.C..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il n'y a pas lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. C...la somme demandée au même titre par le GAEC du Hinguer ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du GAEC du Hinguer tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C..., au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt et au GAEC du Hinguer.

Délibéré après l'audience du 13 février 2014 à laquelle siégeaient :

- M. Coiffet, président,

- Mme Specht, premier conseiller,

- M. Lemoine, premier conseiller.

Lu en audience publique le 6 mars 2014.

Le rapporteur,

F. LEMOINELe président,

O. COIFFET

Le greffier,

A. MAUGENDRE

La République mande et ordonne au ministre de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 12NT03165


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 12NT03165
Date de la décision : 06/03/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. COIFFET
Rapporteur ?: M. François LEMOINE
Rapporteur public ?: M. DEGOMMIER
Avocat(s) : LE MENN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2014-03-06;12nt03165 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award